• Aucun résultat trouvé

1. PARTIE 1 : Etude rétrospective des échouages et des causes de mortalité des

1.1. Matériel et Méthodes

1.1.1. Collecte des échantillons

Les populations de mammifères marins des côtes françaises sont suivies, en termes d’abondance relative, de paramètres démographiques et écologiques et de causes de mortalité au moyen du Réseau National d’Echouage (RNE). Ce réseau couvre toutes les côtes de France Métropolitaine dont les différentes façades maritimes avoisinent les 5000 kilomètres. Il est composé de plus de 200 bénévoles intervenants sur seulement 300 à 1000 échouages par an (Van Canneyt et al., 2015). Ce rassemblement de personnes et d’organismes compétents a pour objectif principal de collecter les informations relatives aux échouages de cétacés et de pinnipèdes. Le RNE est aujourd’hui coordonné par le Centre de Recherche sur les Mammifères Marins (CRMM) à La Rochelle. Depuis 2004, le CRMM est intégré à l’Université de La Rochelle (observatoire-pelagis.cnrs.fr). L’Observatoire Pelagis assure alors la coordination scientifique du RNE. Le CRMM a pour objet de constituer un observatoire à long terme des populations de mammifères marins, d’évaluer les menaces qui pèsent sur ces espèces et d’apporter des propositions de gestion aux administrations concernées. Le CRMM coordonne cet ensemble au compte de l’Etat (pelagis.com).

90 En Belgique, la gestion des mammifères marins échoués sur les côtes dépend de l’Unité de Gestion de Modèle Mathématique de la Mer du Nord (UGMM). Depuis 1990, une collaboration existe entre l’UGMM et le Service de Pathologie de l’Université de Liège afin que tous les animaux échoués soient analysés. Il s’agit du projet MARIN (Marine Animals Research and Intervention Network) dont le but est une approche multidisciplinaire (vétérinaires, biologistes, toxicologistes) des causes de mortalité des mammifères marins échoués. Ce projet est subventionné au travers de plusieurs autres programmes de recherche scientifiques qui émanent de la Politique Scientifique Fédérale Belge. Plus particulièrement, dans la cadre du projet MARIN, les tâches suivantes sont réalisées :

- Collecte des animaux échoués sur le littoral ; - Détermination de l’espèce et du sexe ;

- Autopsie suivant un protocole agréé et examen pathologique et histologique ; - Evaluation des lésions ;

- Examen, et si possible identification des parasites infestant les animaux ; - Échantillonnage des organes, tissus, parasites et expédition des échantillons

pour des recherches complémentaires telle que microbiologie, bactériologie, virologie, toxicologie, parasitologie ;

- Prélèvement du contenu stomacal ;

- Prélèvement des dents chez les odontocètes afin de déterminer leur âge.

En 1995, un accord a été établi entre les représentants du Réseau National d’Echouage de France et le service de pathologie de la Faculté Vétérinaire de Liège afin de réaliser les autopsies de mammifères marins échoués de la frontière belgo-française à la baie de Somme, représentant à peu prés 180 km de plage, à l’ULg (Université de Liège). La collecte et le transport des animaux vers Liège ont pu être réalisés grâce à des intervenants du RNE, plus particulièrement la Coordination Mammalogique du Nord de la France Groupe Mammifères Marins (Graveline), la Ligue Protectrice des Animaux du Nord (Calais), l’Office National de la chasse et de la faune sauvage, Picardie Nature (Amiens) et la Société Protectrice des Animaux de Dunkerque. C’est pour cette raison que notre étude commence à partir de 1995.

1.1.2. Protocole d’autopsie des mammifères marins

Pour chaque mammifère marin échoué, réceptionné en salle d’autopsie de la Faculté Vétérinaire de Liège, un rapport d'autopsie compilant toutes les données connues sur

91 l'individu est rédigé. Un numéro d’autopsie est attribué à chaque animal. Toutes les autopsies ont été réalisées selon un protocole standard d’investigation post-mortem des cétacés et des pinnipèdes (Jauniaux et al., 2002). Dans chaque rapport est notifié : la date et le lieu d’échouage s’ils sont connus ainsi que des donnés individuelles déterminées lors de l’examen post-mortem. Nous pouvons ainsi connaître: l’espèce, le sexe de l’animal, la longueur totale du corps, le poids ainsi que la cause probable de la mort déterminée à partir du tableau lésionnel (tableau 8). Toutes les lésions décrites dans le tableau ne sont pas forcément présentes. Il convient aussi de déterminer le code de conservation de l’animal (tableau 9) qui décrit l’état de fraîcheur de l’individu et conditionne la collecte des échantillons et l’interprétation des lésions. Le tableau 10 rapporte les codes de décomposition requis pour que l’échantillon soit utilisable. Un intérêt particulier est par ailleurs donné quand à l’identification des différents échantillons.

Plus en détails, lors de l’examen externe, on prêtera particulièrement attention à l’état d’embonpoint estimé selon l’épaisseur de graisse sous-cutanée et l’aspect des muscles. En bon état d’embonpoint, l’épaisseur de lard est importante et les muscles sont plutôt rebondis. En cas d’émaciation, le lard sous-cutané est présent en faible quantité, les muscles sont creusés et on peut voir une dépression derrière la tête et sur la colonne vertébrale qui devient facilement palpable. La peau est examinée avec précaution pour relever les lésions et les parasites éventuels. Les orifices corporels sont soigneusement inspectés pour la présence d’écoulement, de lésions et de parasites. Une attention particulière est portée à l’examen de l’oreille interne et des sinus péri-tympaniques, les parasites éventuels étant collectés. Chez les femelles, la glande mammaire est observée et prélevée ainsi que le lait éventuellement présent. Lors de l’examen interne, l’animal est placé en décubitus latéral droit s’il s’agit d’un petit cétacé et en décubitus dorsal s’il s’agit d’un pinnipède. Chez les cétacés, l’ouverture est réalisée longitudinalement depuis le cou jusqu’à l’anus d’une part et, dans la partie supérieure du flanc, au niveau des apophyses transverses. Chez les pinnipèdes, l’incision est réalisée sur la ligne médiane de l’espace inter-mandibulaire à la symphyse pubienne. Le péritoine est observé afin de détecter d’éventuels kystes de parasites. De manière générale, pour les cavités abdominale et thoracique, tout liquide doit être décrit et prélevé, tous les organes doivent être examinés in situ et après extraction, avant et après incision. Une attention particulière est prêtée aux parasites dans les organes et les vaisseaux sanguins. Si des parasites sont présents, ils doivent être prélevés (Jauniaux et al., 2002).

92

Tableau 8: Cause de mortalité probable en fonction des lésions macroscopiques observées lors de l’autopsie d’un mammifère marin.

Cause probable de la mort Tableau lésionnel à l’autopsie

Capture accidentelle par les filets de pêche

Lacérations cutanées, traces de filets ou amputations

Bon état d’embonpoint Hématomes sous-cutanés Contenu stomacal

Œdème et congestion pulmonaire

Infection Evidence de lésions inflammatoires aiguës et/ou chroniques

Emaciation

Epaisseur de lard faible ou nulle Fonte musculaire

Tube digestif vide Œdème pulmonaire

Par élimination des autres causes de mortalité

Autres

Tumeur Trauma Prédation Etc

93

Tableau 9: Code de conservation en fonction des observations post-mortem.

Code de conservation

Observations d’autopsie

CC1

Extrêmement frais (échoués vivants) : Carcasse non gonflée

Rigidité cadavérique possible Séparation du sérum

Membranes cutanéo-muqueuses intègres Œil non vitreux

CC2

Frais :

Œil vitreux

Pas de séparation du sérum

Viscères intacts, non distendus par les gaz de putréfaction Absence de protusion de la langue et du pénis

CC3

Décomposition légère : Carcasse gonflée

Détachement de la partie supérieure de la peau Altérations légères d’organes

Protrusion de la langue et du pénis

Viscères distendus par les gaz de putréfaction

CC4

Décomposition avancée :

Ecoulement de liquide par les orifices corporels

Détachement de lambeaux cutanés sur de grandes surfaces corporelles

Altérations sévères des organes (modification de la couleur, de consistance, etc)

Certains viscères sont non identifiables

CC5

Carcasse non identifiée ou fragmentaire : Disparition des organes

94

Tableau 10: Pertinence des échantillons en fonction du code de conservation de la carcasse.

ANALYSE CODE DE CONSERVATION

Histopathologie et immunohistopathologie 1-2 Virologie 1-2 Bactériologie 1-2 Parasitologie 1-3 Toxicologie 1-2 Microscopie électronique 1 Biochimie 1-2 Biologie moléculaire 1-5

Analyse biologique (âge, proies, etc) 1-5

(d’après Jauniaux et al., 2002)

Pour la présente étude, nous nous sommes intéressés à différentes données morphologiques sur les mammifères marins autopsiés depuis 1995, extraites directement des rapports d’autopsie archivés. Ici, nous nous sommes particulièrement intéressés à:

- La date et le lieu d’échouage puisque nous nous concentrons sur les animaux échoués en France ;

- Le sexe de l’individu ; - L’âge de l’animal ;

- La longueur totale de l'individu a été obtenue en mesurant la distance, en cm, allant du rostre à l'encoche de la nageoire caudale pour les cétacés (fig.18) et du museau au bout des nageoires caudales pour les pinnipèdes (fig.19) ;

- Le poids corporel, en kg, mesuré grâce à une balance ;

- L’épaisseur de lard dorsal sous-cutané, en mm, mesuré grâce à une règle ; - Les lésions macroscopiques, décrites par un vétérinaire pathologiste lors de

l'autopsie ;

95

Figure 18: Mesure de la longueur totale d’un marsouin commun.

Figure 19: Mesure de la longueur totale d’un pinnipède.