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CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE

1.4 Matériaux d’électrodes employés dans les piles microbiennes

1.4.1 Matériaux d’anodes

Les matériaux utilisés à l’anode sont importants pour maximiser différentes caractéristiques telles l’adhésion cellulaire et le transfert d’électrons. Ainsi, ces matériaux se doivent d’être conducteurs, biocompatibles et chimiquement stables dans la solution anodique. Lorsque les anodes consistent en matériaux métalliques, ces métaux doivent être résistants à la corrosion et surtout non toxiques.

Le tableau 1.1 présente les différents matériaux testés par diverses études effectuées sur les piles à combustible microbiennes. Néanmoins, les propriétés générales et les performances de ces

matériaux étant dépendantes entre autres de la composition de l’électrolyte, du design du réacteur, de son mode opératoire ainsi que des matériaux eux-mêmes et des micro-organismes électricigènes, seules les références y sont citées car les comparaisons ne sont possibles, ceci étant causé par une trop grande disparité des conditions expérimentales entre chaque étude. Le matériau le plus employé est le carbone, que ce soit sous forme de plaque compacte, de tige, de granules, de matériel fibreux (feutre, tissu, papier, etc.) ou le carbone vitreux (réticulé ou non). Les matériaux fibreux sont plus adoptés car ceux-ci offrent une plus grande surface d’attachement pour les micro-organismes, augmentant substantiellement la puissance générée par la pile microbienne (Chaudhuri & Lovley, 2003; Logan et al., 2006). La figure 1-6 montre deux exemples de fibres de carbone sous des formes couramment utilisées dans les piles microbiennes. L’utilisation de nanotubes et de nanofils de carbone, tout en augmentant considérablement la surface de l’anode, permet aussi l’accroissement de la puissance générée par la pile microbienne (Sun, Zhao, Yang, Song & Xue, 2010; Tsai, Wu, Lee & Shih, 2009; Zhao et al., 2010), quoique leur coût limite leur application dans des systèmes de traitement d’eaux usées.

Figure 1-6 : Anodes formées de fibres de carbone sous forme de brosse (A) (Logan, Cheng, Watson & Estadt, 2007) et de feutre (B) (SGL Group, 2010) (C : grossissement de 150X) Différents matériaux ou dépôts ont été évalués comme anode, et ce, dans le but d’augmenter le transfert d’électrons entre les micro-organismes et l’électrode. Or, malgré la quête au remplacement du platine comme catalyseur dans toutes piles à combustible, une équipe a testé ce matériau comme catalyseur anodique pour augmenter le taux de transfert d’électrons entre les bactéries et le papier de carbone formant l’anode (Park, Sanchez, Cho & Yun, 2008). Ce dépôt a

A B

augmenté significativement le courant produit. Toutefois, le choix du platine comme catalyseur demeure questionnable de même que la réaction électrochimique générant la majeure partie des électrons, ceux-ci pouvant provenir en partie de l’oxydation de l’eau plutôt que de la dégradation microbienne du substrat. Si les électrons ne sont plus générés par les micro-organismes, on ne peut plus considérer être en présence d’une pile à combustible microbienne.

De la même façon, le titane a aussi été testé sous forme de plaque, avec et sans dépôt de platine (ter Heijne, Hamelers, Saakes & Buisman, 2008). Le titane a démontré son inaptitude à être utilisé comme anode dans une pile microbienne. De plus, le choix des matériaux est encore une fois problématique puisque le titane est aussi dispendieux pour de telles applications, tout comme le platine, et la présence de ce dernier met en doute la réaction d’oxydation siégeant à l’anode tel que mentionné précédemment.

Un dépôt de Fe2O3 a été effectué afin de favoriser la croissance des micro-organismes électricigènes par rapport aux micro-organismes méthanogènes, augmentant ainsi la puissance générée par la pile microbienne. Ce dépôt a effectivement conduit à une production supérieure d’électricité (de 22 à 30 W m-3

), mais cette alternative n’a pas accru la puissance autant que l’enrichissement de la flore microbienne électricigène (Kim et al., 2005).

Du rouge neutre a été immobilisé sur du graphite, augmentant ainsi la production d’énergie par la pile microbienne tout en diminuant les coûts en évitant d’ajouter régulièrement ce médiateur dans l’anolyte (Park & Zeikus, 2003). Par contre, il n’est pas révélé si, avec une longue période d’opération, le médiateur se retrouve en solution et est évacué, tel qu’on peut le présager.

Le même groupe a procédé à la fabrication d’électrodes de graphite contenant du Mn4+

, Mn2+ et Ni2+, Fe3O4, Fe3O4 et Ni2+, de même qu’en immobilisant sur la surface des médiateurs tels le naphtoquinone (NQ) et l’AQDS (Lowy et al., 2006; Park & Zeikus, 2003). Chacun de ces traitements a montré avoir une plus grande activité anodique pour le transfert des électrons, principalement pour l’électrode de Mn2+

et Ni2+. Les électrodes modifiées possédaient un potentiel différent du carbone non modifié, suggérant des réactions électrochimiques différentes siégeant à l’anode.

Tableau 1.1 : Matériaux testés à l’anode dans les piles à combustible microbiennes

Anode État/Composition Référence

Carbone ou graphite

Brosse formée de fibres (Logan et al., 2007)

Brosse traitée à l’acide (Feng, Yang, Wang & Logan, 2010b)

Feuille mince (Liu et al., 2010)

Feutre (Aelterman, Versichele, Marzorati, Boon & Verstraete, 2008b)

Feutre traité à l’acide (Zhu et al., 2010)

Granules (Aelterman et al., 2008b)

Laine (Aelterman et al., 2008b)

Nanotubes/Nanofils (Sun et al., 2010; Tsai et al., 2009; Zhao et al., 2010)

Papier (Liu et al., 2005b; Liu et al., 2010)

Plaque (ter Heijne et al., 2008)

Tige (Liu et al., 2010)

Tissu (Morris, Jin, Wang, Zhu & Urynowicz, 2007) Tissu traité au NH3 (Cheng & Logan, 2007b)

Vitrifié (Aldrovandi et al., 2009; He, Minteer & Angenent, 2005)

Voile (Liu et al., 2010)

Électrodes ou dépôts métalliques

Fe2O3 (Kim et al., 2005)

Fe3O4 (Lowy et al., 2006)

Fe3O4 + Ni2+ (Lowy et al., 2006)

Mn4+ (Park & Zeikus, 2003)

Ni2+ + Mn2+ (Lowy et al., 2006)

Pt (Park et al., 2008; ter Heijne et al., 2008)

Ti (ter Heijne et al., 2008)

Médiateurs

AQDS (Lowy et al., 2006)

NQ (Lowy et al., 2006)

Différents traitements de surface peuvent aussi être appliqués pour augmenter les performances des matériaux d’anode. Un simple traitement de la surface d’électrodes avec du NH3 gazeux a montré une amélioration du temps d’acclimatation nécessaire à la production d’électricité par une pile microbienne due à l’augmentation de la charge de la surface, de même qu’un accroissement de la puissance générée causé par la présence de groupes fonctionnels à la surface de l’électrode traitée (Cheng & Logan, 2007b). Quant à eux, les traitements à l’acide sulfurique, à l’acide nitrique et à l’acide nitrique suivie d’éthylènediamine permettent aussi d’accroître la puissance générée en modifiant les groupes fonctionnels de surface, soit respectivement par l’enlèvement de groupements C-O tout en laissant place à un ratio azote/carbone plus élevé, par l’augmentation du ratio N/C, et finalement par l’accroissement du ratio oxygène/carbone et l’adhésion de groupes azotés (Feng et al., 2010b; Zhu et al., 2010).

Ainsi, la meilleure option pour l’anode est d’utiliser un matériau tel le carbone sous une forme possédant une très grande surface (feutre, brosse) tout en limitant le traitement de surface effectué pour minimiser leurs coûts de fabrication. Les traitements à l’acide ou au NH3 gazeux semblent réalisables puisqu’ils sont abordables et modifient positivement les groupements fonctionnels à la surface. L’ajout de médiateurs ou autres dépôts métalliques peuvent conduire à un ratio puissance/coût trop bas par rapport aux simples traitements de surface.