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Mario et sa vocation sacerdotale

Comme Mario n’avait pas eu le goût d’aller au cinéma, il avait de-mandé à Joseph la compilation des notes sur le partage évangélique fait avec le Père Foisy, et il partit pour les étudier tout en savourant ce mystère de l’Eucharistie, Corps et Sang du Christ.

Il essayait de trouver une réponse meilleure que celle qu’avait donnée le Père Foisy; combien de fois n’a-t-on pas vu un jeune vouloir surpasser un aîné?

Mario, peut-être dû à ses études en sciences pures, avait un goût très affiné pour chercher des réponses dans un texte d’Évangile ; ce passe-temps lui rappelait des moments agréables de recherches dans un texte de français à l’école primaire. Le professeur donnait aux élèves un texte en français et on devait répondre à des questions qu’il posait sur ce texte, c’était une acti-vité très prisée par lui à mi-chemin de l’école primaire, soit en 4e année. De plus, il excellait dans ces recherches à trouver les réponses les plus rapides pour une compréhension optimale du texte. Mario revint au texte de la Pa-role d’Évangile à comprendre et à expliquer.

Peut-être que cette Parole (Jn 6, 22-71) n’a-t-elle jamais été autant méditée que par Mario ? Après des réflexions profondes, il n’y arriva pas et dut s’avouer vaincu, le Père Foisy avait les meilleures réponses.

Mario prit une autre question et essaya de répondre par lui-même. Il s’apercevait bien que les textes étaient beaucoup plus difficiles qu’à la petite école et leurs difficultés, ô merveille, étaient données par des mots d’une simplicité désarmante, déconcertante et élégante. Non, seul un homme versé dans l’enseignement de l’Église pourrait répondre à ces questions, sinon un prêtre.

Les questions qu’ils avaient ramassées tous les trois, Joseph, Ernest et lui-même, étaient de nature plutôt estudiantine, avec beaucoup de pourquoi et comment. De plus, les questions ne décollaient pas du texte, elles lui étaient liées comme les doigts sont liés à la main.

Il s’apercevait qu’il ne connaissait pas beaucoup l’Eucharistie pour ne pas être capable de répondre à des questions de nature estudiantine. Souvent, pour poser une question qui semblait intéressante, ils n’eurent qu’à ajouter au verbe le pronom « il » ou le précéder d’un « t » quelques fois, pour obtenir une question de paresseux, se disaient-ils, mais combien embêtante. Parfois, leurs questions de paresseux se précédaient de l’expression « qu’est-ce que ».

Les trois étudiants avaient quand même ramassé quelque vingt ques-tions assez disparates bien que quelques-unes étaient parentes dans leur for-mulation.

Mario avait des moments où il préférait être seul avec lui-même, com-plètement isolé du monde extérieur pour ne sentir que son « monde » inté-rieur. Ce qu’il aimait de son monde intérieur était le silence tout alentour de lui. Alors, il méditait et parfois il pensait à de belles Paroles de Dieu — comme elles peuvent être belles — qui provenaient d’où, il ne savait pas ; il arriva même que certaines fussent trop belles pour être nées de lui-même, alors… il croyait que Dieu lui jouait-il de beaux tours avec ses belles Paroles qui portaient la vie. Mais il ne parlait à personne de ces cadeaux reçus de Dieu de peur de les perdre.

Il se rappelait qu’il avait rédigé sa lettre de demande d’admission au Grand Séminaire de Montréal et qu’il l’avait remise au Père Foisy en main

propre lors d’un partage sur l’Évangile. Il avait attendu la réponse du Père Foisy par la poste.

Mario se rappelait le premier petit pain que Joseph lui avait donné : « Tout est possible à celui qui croit » et il avait désiré fortement une bous-sole… Boussole que son père, en faisant le ménage de l’une de ses vieilles malles, avait trouvée dans le fond de cette malle.

Cette boussole devinée lui avait causé du souci, car son père lui avait dit que c’était un hasard ; sa mère cependant avait été moins penchée sur le hasard et plus sur la façon dont Dieu exauce une prière et sur le moment où Dieu l’exauçait? Il était beaucoup moins sûr aujourd’hui que la boussole était le fruit du hasard ; il croyait que Dieu avait bel et bien exaucé sa prière en ce temps-là, et il croyait qu’il exauçait ses prières encore aujourd’hui. Aussi, il lui demandait la grâce pour maintenir le désir de sa vocation de prêtre.

Tout à coup, il saisit son portefeuille et regarda à l’intérieur pour voir s’il ne s’y trouvait pas un petit pain de la Parole de Dieu. Il en vit un sous la liasse de cartes professionnelles. Il le prit dans ses mains et le lut :

« Vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui des-cendra sur vous. » Ac 1,8.

Plus il méditait sur la Parole de Dieu, plus l’Esprit Saint le prenait sous sa gouverne. Mario en était ravi.

Il essaya de faire le moins de bruit possible dans sa position assise. Il ne bougeait pas. Il respirait si lentement qu’on aurait dit qu’il était mort. Ses yeux étaient fermés, le silence régnait autour de lui et en lui. Il se laissa aller dans la grâce de Dieu. Après quelques minutes de grand silence, et quelques secondes dans la grâce, tout s’avérait en effet que grâce et bienfait. Dans ces rares moments de ravissements, il rejoignait Dieu de très près, de si près qu’il pouvait même presque lui toucher. Mario était très heureux dans ces moments dont il se souvenait après être revenu à la « normale ».

Non, Dieu se tenait très près de ses fidèles. Si près en fait, qu’il créait un lien avec le fidèle ainsi ravi, un lien surnaturel, mais efficace dans sa réa-lisation. Il n’aimait pas en parler, aussi se faisait-il silencieux sur ses ravis-sements.

Il était encore temps pour lui de frapper à la porte des Cisterciens, une communauté contemplative d’hommes, où il serait réuni avec Dieu par son lien surnaturel. Quelle magnifique conclusion pour un contemplatif! La con-templation, oui, mais dans la vie active comme prêtre diocésain. Il y a bien la spiritualité franciscaine qui vit la contemplation quelques heures par jour et le reste de la journée est composé de la vie active dans le domaine reli-gieux. Ou encore les Dominicains, les Jésuites, les Carmes et toutes les autres familles religieuses que l’Esprit Saint suscite dans l’Église Catho-lique.

« Montrez-vous compatissants comme votre Père est compatissant. » Lc 6, 36.