• Aucun résultat trouvé

Pétain attend sous l'orme. — Franchet d'Esperey. — Les réseaux Corvignolles et les cercles bleu-blanc rouge. — Les fonds de la Cagoule. — L'assaut contre la République.

Dans les milieux qu'il est convenu d'appeler

« nationaux », la moitié du péril rouge fournit désormais la substance de tous les échanges de vues.

En présence d'un situation jugée pré-révolu- tionnaire, deux formes de mouvements clandestins se dessinent, d'abord parallèles, qui se rejoindront ensuite et qui se sépareront bientôt : d'une part, les groupes d'autodéfense constitués dans l'Armée, d'autre part, la Cagoule civile.

Considérons d'abord — puisqu'il vit le jour le premier — le mouvement militaire.

Craignant l'apparition des « soviets » de casernes, de nombreux officiers songent à s'organiser avec le concours de sous-officiers et de soldats du contin- gent triés sur le volet, en groupes d'autodéfense. Ce

dessein s'affermit à mesure que la guerre d'Espagne étend ses ravages.

Au surplus, le S. R. (Service de renseignements) de l'armée française transmet à l'état-major géné- ral de l'armée, à Paris, un document venant de Barcelone, dans lequel il est écrit « qu 'au début d'une révolution, les officiers de l 'armée active doivent être purement et simplement suppri- més » (1). Panique dans les cercles de garnisons.

Des officiers cessent de coucher à leur domicile.

A Metz, le commandant de la région, le général Giraud, diffuse par la voie réglementaire, ce texte parmi les chefs de corps, dont le colonel de Gaulle commandant le régiment de chars.

A Paris, un camarade de promotion de Charles de Gaulle à l'École supérieure de guerre, Georges Loustaunau-Lacau, officier détaché à l'état-major du maréchal Pétain, organise « les réseaux Corvi- gnolles ». Pourquoi Corvignolles ? Devenu écrivain d'état-major, successeur d'ailleurs, à ce poste, de Charles de Gaulle qu'il connaît bien (« C'est un ascenseur qui ne s'arrête pas à l 'étage », dit-il), Loustaunau-Lacau a été chargé par le maréchal Pétain d'écrire la vie de Vauban. Or, Vauban compte un Corvignolles dans sa famille. Sous l'inspiration du moment, le commandant Loustau- nau-Lacau transforme ce Corvignolles en un officier de carrière décédé, dont les membres du (1) Ce document était apocryphe. M. Daladier, ministre de la Guerre, prit des sanctions.

réseau — en particulier de très nombreux chefs de corps — reçoivent, en signe de reconnaissance, la soi-disant carte de visite : Hervé- Gratien de Corvi- gnolles (1). Les réseaux Corvignolles sont nés.

Navarre.

Loustaunau-Lacau se met au travail. Béarnais court et trapu, il représente le type « force de la nature ». Esprit brillant, teinté de mythomanie.

Soldat héroïque, comme il le prouvera en 1940 et dans les camps de la mort, il se révèle aussi comme un maniaque du renseignement, un obsédé de la clandestinité, un tourmenté de la conjuration (2).

Il choisit son premier pseudonyme : Navarre. Plein d'humour, il raconte volontiers qu'il descend d'un bâtard d'Henri IV. Il n'en revendique pas pour

(1) Suivant les cas, ces cartes de visite étaient coupées en deux, selon un pointillé varié. Pour prendre contact, les affiliés qui ne s'étaient jamais rencontrés, devaient réunir leurs demi- bristols.

Ce système de reconnaissance fut, de nouveau, utilisé en mai 1958 par le mouvement contre-révolutionnaire des généraux Chassin et Cherrière — mouvement qui, à Alger, avec l'aide des troupes de Pierre Lagaillarde et d'Ortiz s'empara du Gouver- nement général avant les gaullistes.

Officiers subalternes dans la période 1936-1940, les généraux Cherrière et Chassin avaient d'ailleurs appartenu aux réseaux Corvignolles.

(2) Après la guerre, candidat aux élections législatives de 1951 dans les Basses-Pyrénées, son premier mot, en apprenant qu'il était élu, fut : « Enfin, je pourrai comploter à l'abri de l'im- munité parlementaire. »

autant le trône de France. Patriote exacerbé, sans discernement.

A la tête des réseaux « Corvignolles » (1) Lous- taunau-Lacau « décortique » les cellules communis- tes de l'Armée : deux cents, souligne-t-il, sont

« liquidées en douceur » par ses soins. Il remet au généralissime Gamelin un exemplaire de l'édition originale du livre l'Insurrection armée, dérobée, dit-il, par ses agents au siège du P. C., livre dans lequel il est indiqué qu'au début d'une révolution sociale « il faut tuer tous les officiers d'active à considérer comme des ennemis de classe ».

Mis à la porte de l'Armée par M. Daladier, ministre de la Guerre (« C'est un officier d'aven- ture », dit-il), en 1938. Réintégré en septembre 1939 après la déclaration de guerre. Arrêté au front le 22 mars 1940, sur ordre de M. Daladier, président du Conseil. Frappé d'une lourde sanction discipli- naire au front, il fut enfermé à la forteresse de Mutzig, près d'Obernai.

A l'état-major Pétain, Loustaunau-Lacau ob- tient, d'emblée, l'adhésion à ses réseaux du capi- taine Bonhomme, officier d'ordonnance du Maré- chal. Dragon jovial, « Mameluk » fidèle, céliba- taire joyeux mais vigilant, Bonhomme raconte

(1) Appelés aussi par Loustaunau-Lacau « Cercles bleu- blanc-rouge », eux-mêmes codés : le bleu représente les mili- taires ; le blanc, les civils (les réseaux en comprenaient quelques- uns) ; le rouge, les financiers de l'organisation, dont un ban- quier.

tout au Maréchal : les potins, les « coucheries » et les histoires de l'Armée. Le Maréchal sait donc beaucoup de choses sur l'affaire Corvignolles, et, indirectement sur la Cagoule civile (1). Beau- coup de choses, mais pas tout. Loin de là : Loustau- nau-Lacau et Bonhomme redoutent sans cesse que

« le Vieux », très fatigué, par instants, du point de vue intellectuel, ne commette quelque gaffe magis- trale.

A l'insu du Maréchal, Loustaunau-Lacau dissi- mule un jour des caisses de grenades et de détona- teurs dans le garage de l'état-major du 8, boule- vard des Invalides. « Ce cochon va faire sauter le Maréchal », s'écrie le commandant V... en décou- vrant la cachette.

Pour ses documents secrets concernant les

(1) Le maréchal Pétain fut aussi renseigné, au moins en partie, par un maître des requêtes au Conseil d'État que lui avait présenté le sénateur Lémery et qui allait devenir le premier garde des Sceaux du Gouvernement de Vichy : Raphaël Alibert.

Gracié par le général de Gaulle, sous le gouvernement Michel Debré, et sur l'initiative de M. Edmond Michelet, ministre de la Justice, qui souhaitait pardonner à la fois à un vichyste, à un général allemand encore interné en France et à des militants F.L.N., M. Raphaël Alibert n'a cessé de nier son appartenance à la Cagoule. Une seule liste — chiffrée — de quelques membres de la Cagoule a été saisie par un hasard extraordinaire ; à la lettre A, on lit : Alibert, sans prénom, il est vrai, mais avec l'a- dresse personnelle de celui qui allait devenir ministre de la Justice.

Au demeurant, des témoignages qu'il n'est pas possible de mettre en doute indiquent que M. Raphaël Alibert, non seule- ment appartenait à la Cagoule, mais siégeait au Comité directeur.

réseaux d'autodéfense, Loustaunau-Lacau utilise sans manière... le propre coffre-fort du Maréchal.

On trouve là notamment la Charte des réseaux Corvignolles rédigée de façon curieuse (toujours pour des raisons de secret) (1), sous la forme désa- busée d'un testament pastiché dans le genre noble : Le testament du vieil officier de cavalerie.

« Moi, comte Hervé-Gratien de Corvi- gnolles, officier de cavalerie en retraite, j'aperçois des étoiles au ciel, mais j'en décou- vre peu sur mes manches...

« Je vois la France sur une pente dange- reuse. J'adjure ma famille et mes amis chers de s'unir pour conserverie patrimoine menacé, etc..., etc... »

Bien qu'abritant, à son corps défendant, les secrets dans le coffre-fort d'état-major, Philippe Pétain n'a jamais été le « patron » de la Cagoule.

Le Maréchal demeure beaucoup trop prudent...

Rentrant la tête dans les épaules, comme un poilu de Verdun sous la mitraille, il cite, en poli- tique, sa phrase favorite : « Il ne faut jamais sortir trop tôt la tête du trou. »

(1) Mettant la main sur le texte, les magistrats instructeurs mirent beaucoup de temps avant de comprendre de quoi il s'agissait.

Pétain écoute, observe, enregistre, attend.

Navarre (Loustaunau-Lacau) s'en plaint. Il confie à un de ses amis, officier d'un état-major de Paris :

« Lorsque je parle au Vieux de nos activités, il m'écoute et ne dit rien » (1).

Pétain paraît donc n'encourager ni décourager quiconque. Étrange attitude.

Aujourd'hui, membre de « l'Association pour le soutien de l'action du général de Gaulle », un homme qui a suivi avant la guerre, de l'intérieur et dans le détail, l'affaire de la Cagoule, nous a déclaré, après mûre réflexion :

« Pétain attendait sous l'orme... Mutatis mutandis et révérence parler, tout cela me rappelle l'attitude du général de Gaulle au moment du 13 mai 1958... »

Nous transcrivons. Pour la petite ou pour la grande Histoire ? Pour l'Histoire qui, ainsi que le

(1) Au procès Pétain, le commandant Loustaunau-Lacau a indiqué qu'en 1936, le maréchal Pétain l'avait chargé « d'aller voir un peu ce qui se passe » du côté de la Cagoule.

En rentrant de cette mission, « j'ai dit au Maréchal, déclare Loustaunau-Lacau : « Monsieur le Maréchal, il y a des armes.

Et le Maréchal a répondu : « C'est grand dommage, car lorsqu'on a des armes, on éprouve le besoin de s'en servir. » (Cf : procès Pétain. Compte rendu sténographique.)

dirait Charles de Gaulle, jugera tout et tous à son heure.

A la vérité, le « drapeau » de la Cagoule est, volens nolens, le maréchal Franchet d'Esperey, pied-noir (par hasard) de Mostaganem, alors âgé de quatre-vingts ans. Pour appeler les choses par leur nom, ce valeureux capitaine qui s'était illustré, entre autres, sur le front d'Orient, com- mence de subir les effets de l'âge. Comme quoi, pour sauver sa légende, il ne faut jamais s'occuper trop longtemps des affaires publiques., bien que Clemenceau ait encore déployé une énergie extra- ordinaire jusqu'à la victoire, à l'âge de soixante- dix-sept ans.

Franchet d'Esperey, au nom flamboyant de panache, conserva longtemps une vitalité extraor- dinaire. Sa devise s'inscrit en deux mots : « Sans frein. » C'est un homme de guerre, un Turenne. Il n'est « ni de droite, ni de gauche », ce qui veut tout dire.

Enfant, lycéen à Versailles, il suit les mouvements des troupes qui opèrent contre la Commune. Adulte, il répète en leitmotiv le commandement d'es- crime : « Toujours la pointe au corps. » Officier, il est noté « hors ligne, de valeur exceptionnelle ». Il se montre écœuré par les ordres reçus sous le ministère Combes en vue de procéder, au besoin, par la force, aux inventaires des biens reli- gieux.

En 1906, des grèves de mineurs éclatent dans le Nord et le Pas-de-Calais. « Pour assurer l'ordre (1), d'Esperey reçut le commandement d'un détache- ment assez important : trois bataillons de régiments d'infanterie différents ; trois compagnies d'autres régiments ; deux escadrons de dragons et deux esca- drons de hussards. Clemenceau avait, au début, donné aux troupes l'ordre formel de ne pas se montrer ; mais ce n'était pas la méthode du colonel d'Esperey : il prescrivit à ses chefs de détachements de ne tolérer aucun rassemblement, d'éviter de tirer pour ne pas atteindre des innocents, mais d'aller de l'avant baïonnette au canon, en sonnant la charge, de manière à refouler les mutins à coups de crosse ou de baïonnette, sans pouvoir se tromper. En quelques jours, l'ordre fut rétabli.

« Par les méthodes qu'il employait, d'Esperey se faisait considérer comme brutal, mais il était indi- férent à l'opinion qu'on se faisait de lui, et cher- chait uniquement à atteindre le but fixé.

« Il obtint un témoignage officiel de satisfac- tion du ministre de la Guerre « pour le zèle et le dévouement dont il avait fait preuve et pour que les qualités de tact, de mesure et d'à-propos qu'il avait déployées dans l'accomplissement de la mission délicate qui lui avait été confiée ».

En 1914, selon Joffre lui-même dans ses Mémoires,

« le rôle de Franchet d'Esperey mérite d'être souligné devant l'Histoire : c'est lui qui a rendu

(1) Général Paul AZAN, Franchet d'Esperey (Flammarion).

possible la bataille de la Marne ». Il restera d'une violente germanophobie, jusqu'à sa mort, et en 1942 (1), il s'opposera à la politique de Vichy.

Avant de mourir, il donnera des ordres pour que sa famille quitte le cortège au cas où des Allemands croiraient devoir assister à ses obsèques.

Le vieux sanglier.

En 1936, Franchet d'Esperey, bien que dimi- nué par un grave accident d'automobile qui l'a laissé infirme, donne encore l'impression de vouloir charger, tel un rude sanglier. Hélas ! la démarche ne laisse plus de doute sur les possi- bilités du Maréchal. Le Général Azan nous a laissé un portrait de son ancien chef :

« ... Appuyé sur deux cannes et soutenu par son porte-fanion, il se déplaçait à petits pas, le cou en avant, le dos voûté, le regard fixé à terre ou péniblement levé. Sa parole, déjà brève et saccadée avant l'accident, était devenue plus heurtée. »

Le biographe du Maréchal affirme que l'intel- ligence « était restée aussi claire et son jugement aussi sûr ».

D'autres témoins, de qualité, ont gardé un

(1) Voir dans la partie « Documents secrets et textes inédits » le document rédigé pour l'auteur par cet officier supérieur.

souvenir très différent de l'état intellectuel du Maréchal ; certains jours, à certaines heures ils l'ont trouvé défaillant dans ses raisonnements, et surtout perdant par moment le sens de la mesure.

Comme beaucoup de chefs militaires, Franchet d'Esperey se montre obsédé à la fois par le danger communiste et par le péril nazi. Il noue des liai- sons dangereuses. Il reçoit Deloncle qui porte la cagoule sur les fonts baptismaux. Abusé, il accorde au chef du C. S. A. R. sa caution et il délègue un officier à titre d' « observateur » pour assister aux délibérations du « Conseil Supérieur » de l'organisme clandestin. Il tient des propos, à l'habitude vigoureux, poussés maintes fois jusqu'à la violence, propos que nous préférons enterrer sous les cendres du passé.

Un matin, le Maréchal entre en fureur. Le Front Populaire bat son plein. Des Généraux des Régions ont transmis des rapports alarmants sur l'action du P. C. Franchet d'Esperey considère que le Gouvernement Léon Blum faillit à sa tâche. Il décide de placer Monsieur Lebrun, Président de la République, en présence de ses responsabilités, avec le franc-parler d'un vieux soldat qui ne mâche pas ses mots, fût-ce dans le bureau du chef de l'État.

Franchet d'Esperey sollicite Pétain en vue de la démarche. Et Pétain impassible sous son beau visage marmoréen, décoche une flèche : « je suis un Maréchal Républicain, moi! ».

Le nom de Franchet d'Esperey sert de caution à la Cagoule naissante. Apeurés, de grands indus- triels (fabricants d'automobiles, d'huiles comes- tibles, de pneumatiques, de parfums, de soies artificielles) accordent des fonds importants.

La manne tombe sous le patronage du Maréchal, qui croit participer à une entreprise patriotique et sert ainsi de « paravent » à un complot dirigé contre les institutions républicaines.

Aux cagoulards qui sollicitent certaines caisses du patronat, Franchet d'Esperey confie des lettres de créance, signées de sa main, ainsi rédigées :

« Vous devez accorder foi au porteur de cette lettre ».

Le Maréchal verse 1 500 000 francs à Loustau- nau Lacau, puis ce dernier s'entend, un jour, convoquer au bureau de l'ancien commandant du Corps expéditionnaire en Orient.

« Et le vieux Maréchal — raconte Loustaunau- Lacau (1) — que je revois toujours avec son regard intense de lion blessé, me dit exactement ceci :

« Loustaunau-Lacau, je reçois vos bulle- tins secrets, je sais ce que vous faites. Il y a ici un homme, M. Deloncle, qui agit dans un autre sens que vous ; il veut renverser l'État ;

(1) Déposition au procès Pétain.

c'est la seule façon qui nous reste de sauver nettoyons l'Armée de tous les miasmes qu'elle recèle et nous faisons le maximum d'efforts pour la relever moralement et matériellement.

Ce que nous pouvons savoir des préparatifs d'Hitler pour la guerre prochaine nous en- lève toute envie de participer à un mouve- ment de putsch quelconque, qu'il soit de droite ou qu'il soit de gauche ; ne comptez jamais sur nous pour cela.

« Suivit une discussion orageuse avec Deloncle, poursuit Loustaunau-Lacau. Je savais que déjà un certain nombre d'officiers, et non des moindres, étaient inscrits dans ses rangs. Je cédai sur un seul point : j'accep- tai de recevoir les renseignements de Deloncle qui concernaient strictement l'action commu- niste dans les casernes, et, en échange, je lui demandai de me remettre la liste des officiers inscrits chez lui et de les délier de leur serment. Nous nous sommes vus par la suite deux ou trois fois, toujours dans ce même cadre.

« J'ai retiré de la Cagoule les camarades

qui s'y étaient inscrits, sauf un ; mais son nom n'a pas d'importance : il n'a joué aucun rôle.

« Quant au maréchal Franchet d'Esperey, conclut Loustaunau-Lacau, je suis allé le voir le soir même chez lui. J'ai été reçu assez fraîchement. Je lui ai montré, avec le danger allemand qui ne pouvait pas le laisser insen- sible, les risques qu'il courait personnelle- ment à mélanger son nom, victorieux et res- pecté, à une aventure. Il l'a compris et je suis persuadé que ses relations avec la Cagoule en sont restées là. »

Au cours de cette entrevue mémorable avec le maréchal d'Esperey et Navarre, Deloncle avait ajouté :

« Nous voulons renverser l'État parce qu'il n'y a plus moyen de faire autrement. Nous voulons le faire par tous les moyens, y compris la force. On ne peut pas vivre avec la Répu- blique. »

Cette profession de foi nous amène au cœur du sujet...

En présence du maréchal Franchet d'Esperey, Deloncle avait encore déclaré, ce jour-là : « Il faut rétablir le Roi » (1).

(1) Le 25 novembre 1937, des perquisitions se déroulèrent au Courrier royal.

Il est bien vrai que les éléments de base de la Ca- goule sont monarchistes. Mais les desseins varient suivant les interlocuteurs : aux uns, la Cagoule parle de rétablir la royauté, aux autres d'ins- tituer un Directoire politico-militaire. « Après quoi, on verra. »

En réalité, les contre-révolutionnaires, d'abord décidés à détruire ce qui existe, peuvent — comme plus tard une partie de l'O. A. S. — se réclamer du propos :

« Vous dites : où vas-tu? Je l'ignore, mais j'y vais. »

CHAPITRE III

LE CONDOTTIERE

Le Comité secret. — Le Tribunal suprême de la Cagoule. — Le serment. — Les codes. — Le plan de mobilisation. — Le Kriegspiel. — « Nous sommes méchants! » — Les effectifs. — Corps sans tête ou tête sans corps. — L'effondrement classique des régimes.

Cagoule, cagoulards... Ces mots poursuivent une longue carrière, bien que, dans leur valeur intrinsèque, ils ne correspondent pas à la réalité.

Leur fortune vient de ce qu'ils frappent les imagi-

Documents relatifs