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La manufacture des volumes des planches

nous avons encore obtenu un mémoire de M. Perronet. Le reste est de moi ; et j’ai mis en ordre et revu le tout. (Vol. VI des Planches, p. 6)

On l’aura mesuré, l’organisation éditoriale des volumes de planches et leur articulation avec les volumes de texte posent des problèmes fort complexes. L’ENCCRE s’efforce d’y apporter des solutions qui permettent aux lecteurs de découvrir aisément le contenu du Recueil de planches et de suivre, s’ils le souhaitent, les liens tissés au cas par cas entre les articles, les illustrations et les explications de l’Encyclopédie.

II.  La manufacture des volumes

des planches

C

omme les articles, les planches et leurs explications sont le fruit d’un processus de fabrique qui a impliqué le recours à une multi- tude de sources, des plus récentes jusqu’à des travaux remontant au xviie siècle, voire plus anciens encore. L’Encyclopédie constitue, de ce point

de vue, une vraie synthèse des œuvres iconographiques élaborées depuis la Renaissance jusqu’au milieu du xviiie siècle, dans laquelle on trouvera tout

aussi bien les connaissances les plus en pointe sur un sujet, que l’exposé de traditions techniques parfois périmées pour un autre domaine.

Les sources utilisées pour les planches sont de diverses natures : dessins originaux d’artiste, albums, dessins techniques, gravures isolées, ouvrages imprimés illustrés, etc. Les procédés d’emprunt sont particu- lièrement complexes et souvent difficiles à reconstituer avec certitude — d’autant que, à de rares exceptions près, tous les dessins et manuscrits préparatoires ont disparu. Il n’est pas rare, par exemple, que Diderot et ses collaborateurs aient utilisé plusieurs sources pour une même planche.

Si nous ne pouvons donner ici un aperçu de la variété des sources sollicitées, il convient de préciser que la Cyclopædia de Chambers a égale- ment été utilisée pour cette partie de l’Encyclopédie : les planches de la section « Sciences mathématiques », publiée dans le volume VI du

Recueil, lui empruntent par exemple une très grande partie de ses maté-

riaux. Parmi les sources les plus utilisées figurent aussi les matériaux du À droite, la première des deux planches d’hydraulique représentant la machine de Nymphembourg, publiée dans le Ve tome de planches (1767) ; à gauche,

projet de Description des arts et des métiers de l’Académie des sciences, projet qui a eu une influence importante sur le Recueil des planches de l’Encyclopédie, notamment par le biais de l’affaire « des plagiats », dont il nous faut dire un mot.

Chargé de diriger la gravure des planches de l’Encyclopédie entre 1757 et 1759, l’architecte Pierre Patte publie, le 23 novembre 1759, une lettre accusant Diderot et les libraires d’avoir mis la main, avec l’objectif de les utiliser dans l’ouvrage, sur une grande partie des matériaux réunis (mais non encore publiés) par Réaumur jusqu’à sa mort, survenue le 17 octobre 1757, pour la Description des arts et métiers de l’Académie. La dénonciation de « plagiat » est explicite et suffisamment grave pour que l’Académie ordonne deux inspections chez les libraires aux mois de décembre 1759 et janvier 1760, afin d’en vérifier le bien-fondé. Si l’Académie n’a finalement pas retenu l’accusation, notamment grâce à l’engagement des libraires à lui soumettre l’ensemble des volumes avant publication, la stratégie initiale d’emprunt à la Description des arts et

métiers ne fait cependant pas de doute. L’accusation de Patte a contraint

Diderot et les libraires à faire réaliser de nouveaux dessins afin de prendre le maximum de distance avec les travaux de leur prédécesseur, mais aussi d’être en mesure de concurrencer et de surpasser la Description

des arts et métiers dont la publication finit par se concrétiser dès la fin

des années 1760.

Finalement, aucune planche de l’Encyclopédie ne plagie le travail préparatoire de Réaumur. Néanmoins, les descriptions déjà publiées dans les articles des sept premiers volumes de discours ne correspondent plus aux planches refaites : pour certaines séries, comme celles des « Ancres »,

Le certificat de l’Académie du volume I (1762) fait mention d’un total de 600 planches déjà réalisées pour l’ensemble du Recueil et l’approbation précise que toutes les planches de ce premier volume ont été gravées à partir de dessins originaux.

des « Ardoises », du « Charbon de bois », des « Forges » ou encore du « Tisserand », l’affaire des plagiats se traduit éditorialement par un manque constant de cohérence entre planches et articles, parfois corrigé dans les explications du Recueil. Ce contexte de concurrence avec la Description

des arts et métiers explique aussi, en partie, l’accroissement important

du contenu du Recueil par rapport au projet initial, qui ne prévoyait que deux volumes et un total de 600 dessins et gravures (d’après le certificat daté du 10 juin 1760, et signé par les académiciens, De Parcieux, Nollet, Morand et Lalande).

L’influence du projet de Description des arts et métiers se repère égale- ment dans la présentation même des planches, dont la structure dans l’Encyclopédie fait directement écho aux idées de Félibien et du père Dubreuil (fin xviie), déjà reprises et mises en œuvre par l’Académie royale

des sciences dès le début du xviiie siècle afin de concevoir des planches

claires et pédagogiques.

Sur cette planche double d’histoire naturelle, parue dans le volume VI (1768), le sujet traité, le volcan du Vésuve, occupe toute la page.

On trouve de fait trois principaux types de planches dans l’Encyclopédie :

les planches dans lesquelles le sujet occupe toute la page ; plusieurs exemples figurent dans les sections dédiées à l’anatomie, la chimie, la chirurgie, l’histoire naturelle, la minéralogie, les manèges, etc. ;

les planches bipartites, comprenant en haut une scène de métier (vie de l’atelier, ouvriers à l’ouvrage, etc.), suivie, sur le restant de la page, d’une reproduction analytique des outils utilisés ;

les planches uniquement formées de figures ou de représentations d’outils.

La plupart des planches sont entourées d’un trait d’encadrement. On y trouve généralement, en haut à droite, l’abréviation en italique Pl. suivie du numéro de la planche. Le titre, qui rappelle systématiquement le domaine correspondant, est centré en bas dans la plupart des cas. On trouve enfin en bas à gauche le nom du dessinateur, précédé de l’indication del. (pour delineavit : a dessiné) et, en bas à droite, celui du graveur suivi de fecit ou de direx. (a fait ou a dirigé).

III.  Les contributeurs des volumes