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5. Dissémination du VIH-1 dans le tractus génital féminin

5.4. Les cibles du VIH-1 dans les muqueuses : infection par du virus libre 32

5.4.2. Les macrophages

Les macrophages sont des cellules phagocytaires résidentes des tissus, principalement issues de la différenciation des monocytes circulants. Une fois

activées, ces cellules participent à la réponse immunitaire innée, par élimination de débris cellulaires et pathogènes, mais également à l’homéostasie tissulaire. Ce sont aussi des cellules présentatrices d’antigène (CPA) capable d’apprêter et de présenter les peptides antigéniques aux LT (Haldar and Murphy, 2014).

Les différentes sous-populations de macrophages

Dans le tractus, les macrophages sont principalement localisés dans la couche sous-muqueuse proche de la lame basale et représentent 10 à 20% de la population leucocytaire (Givan et al., 1997; Pudney, Quayle, and Anderson, 2005; Rodriguez-Garcia, Patel, and Wira, 2013; Wira et al., 2005).

Ces cellules phagocytaires possèdent des caractéristiques phénotypiques et des fonctions définies en fonction de leur environnement. De plus, en réponse aux différentes cytokines sécrétées dans l’environnement, la différenciation des monocytes induit deux types de macrophages bien distincts : les macrophages M1 désignés comme « classiques » et les macrophages M2 dits « alternatifs ». La polarisation en macrophages M1 est dépendante de la sécrétion d’interféron- (IFN-) et de facteur de nécrose tumorale (TNF-). La production de cytokines pro-inflammatoires IL-12 et TNF- sécrétée par les macrophages M1 induit une résistance aux pathogènes. Les macrophages M1 expriment à leur surface des récepteurs fixant la partie Fc des immunoglobulines de type 1 (RFcI ou CD64) ainsi que les marqueurs d’activation CD80 et CD86. Au contraire, la polarisation des macrophages en sous-type M2 est induite par la sécrétion d’IL-10 et d’IL-4. Ce profil anti-inflammatoire participe au remodelage tissulaire. Les M2 sont caractérisés par l’expression du récepteur au mannose (MR ou CD206) et du CD163 (hemoglobin

scavenger molecule), ainsi que l’expression de la glycoprotéine

transmembranaire CD68 (Biswas and Mantovani, 2010; Herbein and Varin, 2010; Martinez and Gordon, 2014). Dans l’endomètre non gestant comme la décidua (Quillay et al., 2015 ; El Costa et al., 2016), le phénotype des macrophages est majoritairement M2-like, c’est-à-dire qu’ils expriment des marqueurs de M2 (CD163 et CD206) mais également certains marqueurs de M1 (CD64, CD80, CD86). La distinction entre ces deux sous-types de macrophages est parfois difficile car in vivo, des profils intermédiaires M1/M2 sont souvent détectés (Cassetta, Cassol, and Poli, 2011).

L’ensemble de ces macrophages expriment à leur surface les récepteurs CD4 et les corécepteurs CCR5 et CXCR4.

Cette variabilité phénotypique dans les tissus démontre une grande diversité de la population macrophagique et définit également la sensibilité et le rôle des macrophages dans l’infection par le VIH-1. La caractérisation des différents sous-types de macrophages dans les tissus reste à déterminer.

Infection des macrophages

Des études ont montré que les macrophages dans les intestins étaient réfractaires au VIH-1, tandis que les macrophages vaginaux et utérins étaient permissifs (Shattock and Griffin, 1994; Shen et al., 2011; Shen et al., 2009). Cette différence de sensibilité à l’infection par le VIH-1 pourrait être due à une différence de production de cytokines dans l’environnement tissulaire. Par exemple, la sécrétion de TGF- dans les intestins diminue l’expression du CD4 et du CCR5, ce qui limiterait l’infection des macrophages dans ces tissus (Shen et al., 2011). De plus, le rôle des macrophages dans l’infection précoce au VIH-1 reste sujet à débat. Si certaines études montrent une rapide capture du VIH-1 ou des cellules infectées par les macrophages dans les tissus vaginaux-utérins (Miller and Shattock, 2003; Sattentau and Stevenson, 2016; Shen et al., 2009), d’autres, au contraire, proposent la restriction des macrophages à l’infection par le VIH-1 (El Costa et al., 2016; Ochsenbauer et al., 2012; Peters et al., 2015). Cette restriction des macrophages peut dépendre de leur phénotype. Les M1 ne sont pas (ou peu) permissifs à l’infection alors que les M2 le sont.

Suite à l’entrée du VIH-1 dans les macrophages, les particules virales peuvent s’accumuler au sein des macrophages. Ces cellules sont beaucoup plus résistantes aux effets cytopathogènes du VIH-1 et possèdent un temps de demi-vie beaucoup plus long comparé à celui de LT CD4 naïfs (Chun et al., 1997; Embretson et al., 1993; Igarashi et al., 2001; Reynoso et al., 2012). De ce fait, ces cellules sont souvent décrites comme étant des cellules réservoirs responsables de la persistance du VIH-1 et de la progression de la maladie. L’accumulation des particules virales peut se faire dans des corps multi-vésiculaires endosomaux (MCV) enrichit en CD81, CD9, CMH-II, et CD63



(Nydegger et al., 2003 ; Raposo et al., 2002 ; Sherer et al., 2003). La formation de ces compartiments est liée à la voie d’endocytose. Par

ailleurs, les particules virales peuvent s’accumuler dans des compartiments dénommés VCC ou « Virus-Containing Compartments » (Welsch et al., 2007 ; Gaudin et al., 2013). L’origine de ces compartiments reste sujet à débat. Les VCC contiennent de nombreux marqueurs présents dans l’endosome mais également dans le trafic vers la membrane plasmique (CD9, CD81, CD44 and CD18) (Pelchen-Matthews et al., 2011 ; 2003). La formation de ces VCC dans les macrophages est induite par l’accumulation de la polyprotéine de p55 Gag nouvellement synthétisée dans des compartiments intracellulaires préexistants exprimant le CD36 (récepteur responsable dans l’internalisation des lipoprotéines oxydées). Dans l’attente d’une transmission du virus des macrophages aux cellules avoisinantes (décrit au paragraphe 6.2), l’accumulation des particules virales au sein de ses différents compartiments suggère un échappement du VIH-1 à la réponse immunitaire et aux molécules antirétrovirales.

Alors que la fonction des macrophages lors de la phase tardive de l’infection par le VIH-1 a clairement été établie, le rôle des macrophages lors des premiers évènements d’infection reste à définir.