D. MACROH2A, UN VARIANT D’HISTONE SINGULIER
4) MacroH2A et ADP-ribosylation
Le domaine macro est retrouvé dans de nombreuses protéines et existe chez tous les
organismes. Il est constitué de 135 résidus principaux et peut être répété jusqu’à trois fois
dans une même protéine (Ladurner 2003). En 2003, des études structurales montrent une forte
similarité entre le domaine macro de la famille AF1521 et la superfamille des hydrolases
triphosphate. De plus, un membre de cette famille AF1521 est une ADP-ribose
phosphoestérase (Allen, Buckle et al. 2003). Ceci suggère un lien entre le domaine macro et la
régulation du métabolisme de l’ADP-ribose.
En 2005, les recherches se poursuivent et permettent de démontrer que le domaine macro de
AF1521 se lie avec une forte affinité à des ADP-riboses. Des mutagenèses dirigées révèlent
l’existence d’une « poche » dans le domaine macro. Cette cavité permettrait de lier un ligand
et de réaliser des contacts avec l’ADP-ribose (Karras, Kustatscher et al. 2005).
C’est au niveau de cette poche que réside des différences spécifiques entre les deux isoformes
de macroH2A1. Dans la forme 1.1, une phénylalanine induit une courbure, et deux glycines
(223 et 224) sont remplacées par des résidus plus volumineux dans la forme 1.2 (Lys226 and
Asp227). De plus, macroH2A1.2 présente une insertion de trois résidus (E-I-S). Ces faibles
divergences induisent une perte de reconnaissance du monomère d’ADP-ribose par le
domaine macro de macroH2A1.2 (Figure 22) (Kustatscher, Hothorn et al. 2005).
Un petit nombre de virus à ARN animaux codent pour des domaines macro. Leur analyse
structurale révèle que ces domaines lient efficacement l’ADP-ribose libre, ou lié à PARP-1
(Egloff, Malet et al. 2006).
Les protéines de la famille BAL (B-aggressive lymphoma) portent une combinaison inédite,
avec en N-terminal un domaine macro capable de réprimer la transcription, et en C-terminal
un domaine PARP actif (Aguiar, Takeyama et al. 2005).
b
Figure 22 : L’épissage alternatif du variant d’histone macroH2A1 régule
la fixation des métabolites NAD
a) Schéma représentant l’épissage alternatif de l’histone humaine macroH2A1 : en gris
sont indiqués les résidus inchangés, et en bleu les insertions présentes dans la forme
macroH2A1.2
b) Structure du domaine macro de macroH2A1.1, représenté en brun. En jaune est indiqué
l’exon épissé alternativement dans la forme macroH2A1.2. Les résidus critiques pour la
fixation de l’ADP-ribose sont mentionnés (d’après Kustatscher G, 2005).
Quelle est la signification fonctionnelle de cette interaction entre le domaine macro et
l’ADP-ribose ? Le variant d’histone macroH2A a-t-il un lien avec les protéines responsables de la
synthèse du poly(ADP-ribose), les PARPs ?
En utilisant une lignée stable de HeLa exprimant une macroH2A1.1 étiquetée (e-mH2A1),
nous avons montré récemment que les nucléosomes contenant e-mH2A1 sont spécifiquement
associés avec PARP-1, via la région non histone. Cette association conduit à l’immobilisation
de PARP-1, et à une inhibition de son activité enzymatique. Plusieurs promoteurs enrichis en
macroH2A1 ont été identifiés, notamment celui du gène de HSP70.1. Une élimination de
PARP-1 ou de macroH2A par siRNA ralentit la transcription du gène Hsp70.1.
L’interaction macroH2A-PARP serait cruciale pour maintenir l’inactivation de ce gène : en
s’associant avec le variant, PARP-1 prendrait place dans un complexe de répression
transcriptionnelle. Suite au choc thermique, un changement conformationnel de macroH2A
libérerait l’enzyme, ce qui la rendrait active (Ouararhni, Hadj-Slimane et al. 2006)/annexe 4.
Ces résultats ont été étoffés par une autre étude, montrant que macroH2A1.2 et PARP-1
peuvent également interagir. La région non histone de chacune des isoformes de macroH2A
est capable d’inhiber l’activité enzymatique de PARP-1 in vitro (Nusinow, Hernandez-Munoz
Les variants d’histone sont une nouvelle voie de modification épigénétique que la cellule
utilise pour moduler la structure chromatinienne et l’expression des gènes. MacroH2A est l'un
de ces variants et se singularise par sa grande taille. Contrairement à H2A.X et H2AZ, il
n’existe que peu de données génétiques ou biochimiques concernant macroH2A. Mon travail
de thèse s’est axé sur l’étude de ce variant.
Par immunofluorescence, macroH2A est retrouvé accumulé sur le territoire du chromosome X
inactif chez les mammifères femelles. Il pourrait jouer un rôle dans le maintien de son état
répressif. Néanmoins, cette hypothèse reste encore aujourd’hui controversée. La spécificité
même de l’association entre macroH2A et le Xi est remise en cause, étant donné la forte
concentration en nucléosomes de cette région.
Certaines expériences biochimiques ont permis cependant d’identifier quelques gènes du Xi
où macroH2A se localiserait de façon préférentielle. Cet enrichissement étant de faible
importance, la question de l’implication réelle de cette protéine dans le mécanisme
d’inactivation du chromosome X reste ouverte.
Existe t-il vraiment une surexpression de macroH2A au niveau du chromosome X inactif ? Ce
variant d’histone est-il impliqué fonctionnellement dans le maintien de la répression
transcriptionnelle du Xi ?
Pour répondre à ces questions, nous avons réalisé des immunoprécipitations de chromatine
combinées avec diverses hybridations sur puces à ADN («ChIP-on-CHIP»). Par cette
approche, l’enrichissement en macroH2A ne dépend pas du degré de condensation de la
chromatine. Nous avons également développé une approche d’ARN interférence, permettant
une élimination conséquente de macroH2A, qui nous a permis d’étudier l’impact du variant
sur la maintenance de l’état inactif du Xi.
La description de ces travaux constituera la première partie du chapitre « Résultats ».
De nombreuses données suggèrent que macroH2A pourrait participer à l’inactivation de la
transcription. Au cours de ma thèse, j’ai participé à plusieurs études qui ont permis de préciser
cet effet de répresseur transcriptionnel, in vitro, mais également in vivo. Cette partie de mon
travail a été présentée dans la section « Introduction » de ce manuscrit, et les trois
publications correspondantes figurent en annexe 1, 2 et 3.
Nous avons souhaité nous intéresser plus particulièrement au rôle potentiel de macroH2A
dans le mécanisme de réparation de l’ADN. En effet, il a été montré que le domaine macro
est capable de lier l’ADP-ribose, un nucléotide déterminant dans de nombreux processus
biologiques tels que la transcription ou la réparation de l’ADN. De plus, nous avons démontré
récemment une association entre macroH2A et PARP-1 in vitro, conduisant à une inhibition
de son activité enzymatique. Ces données ont été publiées dans Genes and Development et
sont présentées en annexe 4.
Plusieurs types d’expériences ont donc été conduites pour évaluer l’impact de macroH2A sur
la réparation des cassures simple brin de l’ADN assurée par PARP-1. L’ensemble des
résultats obtenus seront détaillés dans la seconde partie du chapitre « Résultats ».
MATERIEL ET METHODES
A. Biologie cellulaire
B. Techniques d’analyses in situ
C. Approches de « ChIP-on-CHIP »
D. Techniques d’analyses des protéines
E. Clonage
A. BIOLOGIE CELLULAIRE
Dans le document
Localisation et fonction du variant d'histone macroH2A
(Page 78-88)