• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : Quelques généralités sur le titane et ses alliages

I.3 Les modes de déformation dans les alliages de titane β-métastables

3.2. Le maclage mécanique

Deux cristaux de même structure sont dits maclés si leur réseaux sont l’image l’un de l’autre par rapport à un plan miroir. Cette opération peut être produite à l’aide d’un cisaillement pur d’une partie du cristal par rapport à l’autre et ainsi résulter de l’action d’une sollicitation mécanique extérieure : c’est le maclage mécanique, qui constitue alors un mode de déformation plastique alternatif ou en en compétition avec le glissement cristallographique. La déformation par maclage entraîne un cisaillement du réseau, parallèlement au plan de macle et suivant la direction de maclage [71], [72] (Figure 3-5). Le réseau maclé est symétrique du réseau primitif par rapport au plan de macle, les éléments K1, K2, η1, η2 sont indiqués sur la figure. Le déplacement subi par chaque atome est inférieur à une distance inter atomique. Ce

Chapitre I Quelques généralités sur le titane et ses alliages 27

cisaillement du réseau permet ainsi d’accommoder de la déformation plastique, et est communément appelé « Twinning induced plasticity » (TWIP).

Figure 3-5 : Caractéristique des maclages {332}<113> et {112}<111> observés dans les métaux de structure cubique centré [71]

Dans les alliages cubiques centrés, le mode de maclage {112}〈111〉 est le plus couramment observé. Son mécanisme de formation est le résultat d’un glissement successif dans les plans {112} de dislocations partielles ayant pour vecteur de Burgers 〈111〉 [71]. Cela autorise le transfert direct du réseau matriciel en réseau maclé (Figure 3-6(a)). Récemment, un nouveau mécanisme a été proposé par Wu et al. [73] pour des alliages cubiques centrés présentant une haute densité de phase ω métastable. Ce mécanisme s’appuie sur la force motrice de la réversion ω → β, pour expliquer la germination et la croissance d’une macle {112} depuis le cœur d’une particule ω, uniquement par réajustements atomiques. Au sein d’une particule de phase ω représentée en rose sur la figure 3-6, un simple réarrangement atomique peut conduire à un retour vers la structure cubique centré de la phase β mais qui présente maintenant une relation de macle avec la phase β mère en blanc. Les zones en bleu correspondent à un état intermédiaire entre les phases ω et β. Notons que cet état intermédiaire diffère selon qu’elle est en contact avec la phase β mère ou la macle.

Figure 3-6 : Illustration de la germination et de la croissance d’une macle depuis une particule ω selon l’axe [110]. Le rose et le vert représente la phase ω et le réseau maclé respectivement,

28 Quelques généralités sur le titane et ses alliages Chapitre I

Le maclage {332}〈113〉 quant à lui, ne présente ni plan ni direction de maclage dense. Cependant, ce système a été reporté dans de nombreux alliages de titane β-métastables [59], [60], [63], [66], [74]. Crocker [75] fut le premier en 1962 a proposer un modèle théorique cristallographique (figure 3-7) pour expliquer la formation du maclage {332}〈113〉. Il démontra qu’un cisaillement simple le long de la direction de maclage repété sur des plans successifs parallèles au plan de macle (flèches rouges sur la figure), comme pour le maclage {112}〈111〉, ne pouvait déplacer qu’une moitié des atomes depuis leur site du réseau mère jusqu’à leur site du réseau maclé. Ainsi, des réajustements (dits « shuffles ») supplémentaires (flèches vertes) sont nécessaires pour que l’autre moitié des atomes atteignent leur position dans le réseau maclé (Figure 3-6(b)). Ce mécanisme de cisaillement implique des réajustements importants (grande distance), ce qui est énergétiquement défavorable.

Depuis, plusieurs tentatives ont été menées pour résoudre ce problème, incluant la proposition d’un mécanisme par dislocations partielles [76]–[78] et une modification du mécanisme de cisaillement de Crocker [79]. Kawabata et al. [76] suggèrent que le maclage {332}〈113〉 peut être réalisé par des glissements successifs de dislocations partielles 〈113〉 sur des paires de plans {332} voisins, avec un réajustement de ces mêmes plans selon une direction ±〈332〉. Un mécanisme similaire est aussi présent dans le travail de Rusakov et al. [77], où est proposé un mécanisme additionnel caractérisé par le glissement de dislocations partielles 〈113〉 sur plusieurs plans {332} sans réajustement atomique supplémentaire. Cependant, ni le plan {332}, ni la direction 〈113〉 ne sont denses, ce qui sous-entend qu’un tel mécanisme par glissement de dislocations partielles reste énergétiquement défavorable.

Figure 3-7 : Projection d’un maclage (112)[111] (a) et (332)[113] (b) selon l’axe [110] dans une structure cubique centré. Les atomes dans le plan de projection sont en noir, et les atomes

au dessus ou en dessous du plan sont en blanc. Les fléches rouges et vertes indiquent le cisaillement et le réarrangement, respectivement [79]

Chapitre I Quelques généralités sur le titane et ses alliages 29

Récemment, Tobe et al. [79] ont modifié le mécanisme de cisaillement de Crocker en considérant l’instabilité de la maille cubique centré β (caractérisée par le réajustement des plans {011} adjacents dans la direction 〈011〉) comme une structure modulable avec une symétrie tétragonale base centrée (Figure 3-7(a)), produisant un nouveau mécanisme de cisaillement avec une amplitude de réajustement atomique plus petite que celle de Crocker. Bien que ce mécanisme puisse engendrer un parfait réseau maclé {332}〈113〉, les microstructures internes caractéristiques du maclage {332}〈113〉 ne sont pas correctement prises en compte.

Une étude plus expérimentale cette fois-ci, réalisée par Lai et al. [38] sur un alliage β- métastable Ti-36Nb-2Ta-3Zr, vient ajouter un nouveau mécanisme de germination du maclage {332}〈113〉. Ce mécanisme est assisté par de la martensite α’’, qui est présente en surface du matériau et vient initier la germination des macles (Figure 3-8(b)). L’hypothèse d’un mécanisme similaire de formation de macles assistée par martensite induite sous contrainte se retrouve également dans les travaux de Wasilewski [80]. Le mécanisme d’initiation est complexe, puisqu’il fait d’abord intervenir une réorientation de la phase α’’ (sous contrainte), de façon à n’avoir qu’une seule variante cristallographique. Cette variante possède une orientation particulière, parallèle à la macle β qui va germer. La transformation α’’ → βT permet d’expliquer les microstructures internes du maclage {332}〈113〉. En effet, cette transformation implique un cisaillement atomique, parallèle à la direction 〈0001〉ω de l’une des

quatre variantes de la phase ω, ce qui explique la croissance préférentielle d’une de ces variantes ω au sein de la macle β.

Les relations d’orientation entre la macle (βT) et α’’ sont :

Plan : (211)

T

// (110)

α’’

Direction : [011]

T

// [001]

α’’

et [111]

T

// [110]

α’’

Figure 3-8 : (a) Structure cubique centrée modulée en structure tétragonale [79] (b) Illustration schématique 3D d’une macle (233) [38]

30 Quelques généralités sur le titane et ses alliages Chapitre I

A l’heure actuelle, aucun mécanisme unique n’est admis pour la formation du maclage {332}〈113〉. Son mécanisme de formation semble dépendre de la stabilité de l’alliage β considéré ainsi que des conditions d’expérimentales mises en place (i.e, vitesse et sens de sollicitation, température etc.).