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3. P ROBLÈME DE RECHERCHE

3.1. Manifestations du problème

3.1.5. Méthodologie du développement des compétences

Il existe au moins deux consensus chez les pédagogues contemporains : (1) le maître joue un rôle de médiateur entre les savoirs et l’apprenant : l’apprentissage est une construction mentale réalisée par les élèves (Piaget, 1967, 1973; Vygotsky, 1978;

Anderson et coll., 1998; Gauthier et coll., 2013 ); et (2) il ne suffit pas d’être savant pour être compétent : les compétences se développent « dans et par l’action » (Pastré, 2001, p. 9), complètent les savoirs (Anderson et coll., 1998), dépassent la connais- sance de faits (Jackson, 2010) et se distinguent de la capacité de savoir refaire ce qui a longuement été exercé (Perrenoud, 1995). Selon nous, en lien avec les orientations du MEESR, ces postulats plaident pour un enseignement méthodique ayant pour ob- jectif l’expression de savoirs en action.

Au secteur des adultes, les leçons sont individualisées et au service d’individus procédant à des apprentissages en fonction de leur classement scolaire. Or, selon nos observations, le rôle de facilitateur41 attribué aux enseignants dans une situation d’apprentissage du RP est difficile à concilier avec cette réalité des CEA. Ceci est principalement dû au fait qu’un accompagnement pédagogique se limitant à

40 Selon M. Paul Inchauspé, l’enseignant est un passeur culturel, et non pas un simple exécutant

« soumis aux normes du ministère » (cité par Grégoire, 2007).

41 Selon Boutin (2004), l’expression facilitateur est empruntée à la psychologie humaniste centrée sur

des échanges sous la forme d’une dialectique question-réponse est, en général, insuf- fisant pour assurer le développement optimal d’un élève-adulte. Ainsi, selon nous, dans le contexte de l’éducation des adultes, la pédagogie inductive proposée par le RP confie à la clientèle des CEA une partie des responsabilités de l’enseignant. En effet, l’enseignement-apprentissage à des adultes progressant dans un parcours scolaire individualisé commande des explications fréquentes, concises et bien formulées. Plu- tôt qu’un facilitateur, l’enseignant devient alors un agent de changement42 : il active les apprentissages. C’est pourquoi, afin de favoriser l’appropriation des savoirs pres- crits et le développement de compétences dans un contexte andragogique, on peut difficilement faire l’économie d’enseigner explicitement les mathématiques : on di- rige intentionnellement le travail des apprenants.

L’andragogie est […] une démarche d’enseignement qui tient compte des caractéristiques propres de l’adulte apprenant. Par opposition, la pédagogie peut être définie comme l’ensemble des principes et mé- thodes ayant pour visée de faire apprendre, et qui renvoie à une ré- flexion sur l’action éducative comportant des variables intervenant dans le processus enseignement-apprentissage. (Québec, 2009b, p. 20).

Une approche personnalisée et centrée sur l’aide à la personne découle naturellement des caractéristiques de l’adulte apprenant. Bien entendu, parmi ces caractéristiques, on retrouve encore un besoin d’encadrement efficient, menant à la reconnaissance d’acquis de formation dans un délai reflétant les efforts qu’il a investi.

L’approche par compétence du RP propose une pédagogie des situations

complexes et authentiques qui modifie la dynamique en salle classe et la manière de

sanctionner les cours à la FGA43. Ci-dessous, nous abordons plus en détail la pondé- ration des évaluations certificatives au premier cycle. Dans la définition du domaine

42 Hattie, J.A. (2012). Explicit instruction. Leaders in educational thought, 1(2). [Vidéo en ligne].

Repéré à l’adresse <http://www.curriculum.org/secretariat/leaders/john.html>.

43 Selon la Fédération des syndicats de l’enseignement, plusieurs résultats de recherches portant sur le

jugement du personnel enseignant suggèrent que l’approche par compétence compromet le principe de l’égalité des chances, car elle s’avère pénalisante pour les élèves les plus faibles (FSE, 2013a).

Premier chapitre – Problématique 47

d’examen44 du régime antérieur au RP (Québec, 1992a, 1992b, 1992c, 1992d, 1992e,

1992f) la dimension des comportements observables traitant l’habileté mathématique « analyser ou synthétiser », dans laquelle on retrouve les notions « résolution de pro- blèmes » et « situations de la vie courante », représente respectivement 29 %, 30 %, 45 %, 30 %, 10 % et 30 % des six premiers cours de mathématiques (cf. tableau 1). À titre de comparaison, pour chaque cours de mathématique du premier cycle du RP, la définition du domaine d’évaluation (DDÉ) accorde 80 % des points à l’évaluation de savoirs mobilisés, c’est-à-dire des problèmes à résoudre présentés par des situa- tions de vie; 20 % sont réservés à l’évaluation explicite des connaissances, c’est-à- dire des questions menant à des réponses courtes ou plus élaborées45. Ainsi, dans le cadre du RP, le succès aux évaluations du premier cycle en mathématique dépend principalement d’aptitudes en résolution de problèmes et, corollairement, en lecture46. On peut concevoir le développement de ces aptitudes en classe à l’aide d’un ensei- gnement à la fois par et pour la résolution de problèmes (Ontario, 2006) et selon cinq composantes participant à la stabilité, la cohérence et la complexité de la pratique des enseignants : (1) cognitive; (2) médiative; (3) personnelle; (4) sociale; et (5) institu- tionnelle (Oval-Soto, 2013).

Il n’est pas exagéré d’affirmer que, depuis la création de cette offre de ser- vices, l’enseignement-apprentissage de la mathématique aux adultes à l’aide des pro-

44 L’expression « examen » est aujourd’hui remplacée par « évaluation ».

45 Le site internet de la Société de gestion du réseau informatique des commissions scolaires (GRICS)

héberge la banque d’instruments de mesure : http://bimenligne.qc.ca/fr/fga/Pages/mathematiques.aspx. La DDÉ détermine la pondération des outils de jugement. Une seule évaluation sommative (évaluation certificative), conçue selon les modalités de la DDÉ, détermine le succès ou l’échec du cours et établit la reconnaissance uniforme des acquis. Les évaluations « sont élaborées en tenant compte des défini- tions du domaine d’examen, ce qui assure leur validité sur le plan provincial. » (Québec, 2003d, p. 55).

46 La consultation des DDÉ provisoire des cours de troisième secondaire en mathématique du RP (dis-

ponibles sur le site internet sécurisé du MEESR : http://www1.mels.gouv.qc.ca/formationdiversifiee/ index.asp) suggère que la pondération des cours en FBD s’arrimera plutôt au secteur des jeunes, c’est- à-dire en accordant 30 % des points à la compétence 1 « utiliser des stratégies de résolution en situa- tion-problème » et 70 % des points à la compétence 2 « Déployer un raisonnement mathématique » (Québec, 2011a). Les programmes d’études en mathématique à la FBD sont « une adaptation du pro- gramme d’études Mathématique du Programme de formation de l’école québécoise, enseignement secondaire, deuxième cycle » (Québec, 2015e, p. iv).

grammes de la FGA consiste à observer parallèlement : (1) l’entendement des savoirs prescrits; et (2) la capacité à réinvestir ces savoirs dans un contexte de situation- problème. Sachant que les observations en classe sont au service des apprentissages47, les enseignants : (1) vérifient fréquemment la compréhension et la maîtrise d’un en- semble de notions préalables; et (2) guident les élèves vers l’application de savoirs en action et liés à des situations de vie à résoudre. Dans le cadre du RP, cette démarche d’enseignement-apprentissage et ses visées sont donc préservées et n’ajoutent pas une finalité fondamentalement nouvelle relativement à la pédagogie par objectifs du ré- gime antérieur au RP. Toutefois, l’approche par compétence du RP conçoit que – puisque l’objectif de formation poursuivi est l’intégration de savoirs mathématiques – les apprentissages s’effectuent préférablement à partir de mises en situations com- plexes. Le rôle de l’enseignant est alors d’accompagner un apprenant construisant des compétences en surmontant lui-même les limites de sa cognition. Ce modèle pédago- gique, qu’on peut qualifier « d’apprentissage par problèmes » (problem-based lear-

ning) et « d’apprentissage situé » (situated learning), s’allie à une méthodologie du

développement des compétences qui se distingue d’une approche directe et dirigée, séquencée du simple au complexe, et qui, à la suite de la communication de concepts, enseigne la résolution de problèmes typiques ou reliés à des situations de vie, p. ex. à l’aide d’exemples et de contre-exemples dont les démarches sont explicitées en détail et progressivement étayées.

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