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Partie 1 : Synthèse des travaux de recherche

6. Modélisation de nuages de points

6.2 Méthodologie de reconstruction 3D d’arbres

La reconstruction 3D d'arbres trouve un intérêt dans divers domaines : les jeux vidéo pour un rendu réaliste des scènes, dans le domaine forestier pour l’étude de la croissance des plantes et de la biomasse forestière (quantification du volume de bois et de feuilles), dans le domaine urbain, pour la gestion, par les services des espaces verts et de l’urbanisme, de la végétation parsemant la ville, mais aussi dans les études climatologiques étant donné l’effet positif que nul ne conteste aujourd’hui, des arbres sur le climat urbain.

6.2.1 La 3D pour les modèles climatiques

L’un des enjeux de l’étude du climat urbain est la mise au point de modèles numériques permettant de simuler le climat spatialement. En général, trois types de données sont nécessaires en entrée aux modèles de simulations :

 une représentation de la géométrie de la zone d’étude,

 la connaissance de la nature des matériaux composant cette zone et

 des données de forçage météorologique (forçage radiatif (solaire et infrarouge), température de l’air, humidité, vitesse du vent, concentration en CO2 dans l’air, quantité de précipitation, pression atmosphérique).

A partir de ces informations, le modèle estime les échanges de flux entre chaque objet de l’environnement urbain et ses alentours et simule, suivant un pas de temps défini, une dynamique journalière, hebdomadaire ou mensuelle du climat.

Il existe des modèles de simulation à deux échelles principales :

 les modèles de microclimat : à l’échelle de l’objet, de la rue voire du quartier  les modèles à méso-échelle : à l’échelle de la ville voire de la région.

Si l’on souhaite se concentrer sur un élément spécifique, comme un bâtiment ou un arbre par exemple, on choisira un modèle de microclimat à l’échelle d’un objet. Par exemple, le modèle écophysiologique

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RATP (Radiation Absorption, Transpiration and Photosynthesis) de l’INRA, avec qui nous avons collaboré, fonctionne à l’échelle de l’arbre et simule son fonctionnement (Sinoquet et al., 2001). Si l’on souhaite simuler les interactions entre cet objet et tout son environnement, il faudra utiliser un modèle de microclimat capable de simuler une rue ou un quartier. Par exemple, le modèle LASER/F (LAtent, SEnsible and Radiation Fluxes) développé par des membres de notre équipe considère l’échelle du quartier (Kastendeuch & Najjar, 2009). Ce type de modèle permet une simulation sur des zones d’étude plus grandes que ne le permet RATP, mais en réalisant davantage d’approximations. Pour produire des simulations sur toute une ville ou une région, il faudra utiliser de préférence un modèle à méso-échelle, ce qui engendre une perte de précision supplémentaire dans les simulations (exemple : Méso-NH de Météo-France). Ce genre de modèle ne s’appuie pas sur une reconstruction fine en 3D de l’environnement urbain, mais est tributaire d’une carte qui schématise l’occupation des sols de la ville sous forme de pourcentages.

La qualité des simulations dépend de plusieurs facteurs et en particulier de la qualité du modèle géométrique décrivant l’objet ou la zone d’étude. Quelle que soit l’échelle de simulation choisie, un compromis devra être trouvé entre le niveau de détail (voir paragraphe 7.3.4) de la géométrie des modèles d’arbres et l’exactitude des simulations climatiques. Des comparaisons inter-modèles ainsi que des validations ont été réalisées sur la zone du jardin du Palais Universitaire ainsi que sur d’autres quartiers instrumentés. Le lecteur pourra se référer à la thèse d’E. Bournez (2018).

6.2.2 Reconstruction 3D d’arbres en ville

Nous nous sommes penchés sur cette thématique à partir de 2014, en lançant plusieurs projets de recherche technologique et de fin d’études sur la problématique de la reconstruction 3D d’arbres à partir de données lasergrammétriques. Nous avons constaté que la littérature ne proposait alors que peu de pistes de reconstruction 3D d’un objet complexe tel qu’un arbre en tant qu’individu isolé. Davantage de travaux traitent de l’extraction de zones végétalisées, voire d’arbres individuels au sein d’un couvert forestier par classification de données de télédétection (images satellites à très haute résolution spatiale ou données LiDAR aéroportées ou photographies aériennes). Les procédés s’attachant à reproduire la géométrie d’arbres individuels depuis le sol comprenaient alors des approches manuelles (souvent descriptives) donc chronophages, des approches basées sur l’exploitation de photographies (souvent limitées à la 2D) et quelques-unes mettant en œuvre des procédés lasergrammétriques. C’est dans ce contexte qu’est né le sujet de thèse d’Elena Bournez. Pour reconstruire la géométrie 3D des arbres tels qu’attendus dans RATP et LASER/F à partir de nuages de points obtenus par balayage laser terrestre, deux algorithmes de reconstruction ont été développés :

 Le premier algorithme, « TreeArchitecture », vise à reconstruire l'architecture 3D des arbres par squelettisation des branches et des pousses (Figure 24). Il se décline en une étape de squelettisation, une étape de génération d’un modèle volumique avec l’utilisation de cylindres et enfin une étape de recueil d’autres caractéristiques utiles pour la suite (hiérarchisation des branches, longueur des branches, diamètre du tronc, surface projetée au sol). Le lecteur pourra se référer aux travaux de PFE de Hayot (2014), Bournez (2015), Lempereur (2016) et (Landes et al., 2014b et Landes et al., 2015a). Il s’agit d’une modélisation basée sur des primitives géométriques. Avec cette maquette, grâce à des relations allométriques (statistiques relatives aux feuilles, leur position, distribution, inclinaison, orientation, etc.) issues de mesures effectuées sur un échantillon de plusieurs pousses feuillées, l’INRA de Clermont-Ferrand est capable de produire un modèle feuillé détaillé (annexeA.7, p. 126).

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 Le second algorithme, intitulé « TreeCrown » représente l’arbre de façon simplifiée, au travers d’une enveloppe convexe englobant le feuillage. Cette représentation permet d’estimer le volume du houppier à partir du calcul d'une coque convexe (Figure 25). Les expérimentations ont principalement porté sur des tilleuls argentés taillés. Il s’agit ici d’une modélisation par maillage.

Figure 24 : Algorithme de reconstruction 3D détaillée, baptisé « TreeArchitecture » (Bournez et al., 2016b)

Figure 25 : Algorithme de reconstruction 3D globale, avec enveloppe du houppier, baptisé « TreeCrown » (Bournez, 2018)

L’étape de segmentation que nous tenions à scinder de la modélisation dans l’approche de reconstruction 3D de bâtiments à partir de nuages de points ne sera pas abordée dans cette partie consacrée aux arbres, pour deux raisons principales :

 L’arbre que nous allions étudier disposait d’une géométrie très spécifique, du fait de sa taille en « têtes de chats ». Il aurait ainsi exigé une segmentation non transposable à d’autres arbres.  Développer un algorithme de segmentation retardait l’étape de modélisation géométrique. Or

nous souhaitions réaliser une étude de faisabilité avant tout, permettant d’estimer la pertinence de données acquises au scanner laser statique pour la reconstruction d’arbres.

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Les seules segmentations mises en œuvre ont consisté à procéder manuellement au découpage de la scène pour isoler le nuage de points couvrant l’arbre étudié et ensuite à décomposer l’arbre en segments de têtes de chats.

Ce choix stratégique s’est révélé judicieux puisque dans l’année qui a suivi nos développements, sont apparus des outils gratuits de reconstruction 3D d’arbres à partir de nuages de points n’exigeant pas de segmentation préalable. Une étude comparative a été menée pour confronter nos modélisations à des modélisations produites via ces outils gratuits, comme nous le verrons dans le paragraphe 7.3.2.4 (p. 58). Malgré les résultats prometteurs fournis par nos algorithmes, l’outil « PlantScan3D » a supplanté « TreeArchitecture » et a été adopté par la suite (Bournez et al., 2017).

Nous retiendrons que deux niveaux de reconstructions ont ainsi découlé de ces travaux :

 une « reconstruction 3D détaillée », qui préserve la structuration spatiale du feuillage, comme attendu par l’outil RATP. Le modèle 3D correspondant est généré de façon semi-automatique avec utilisation de l’outil « PlantScan3D » et la création du feuillage de l’arbre grâce à la connaissance des relations allométriques (annexeA.7, p. 126).

 une « reconstruction 3D globale » faisant intervenir « TreeCrown », pour laquelle le houppier est approximé par une enveloppe dans laquelle le feuillage est uniformément réparti, comme attendu dans LASER/F (Figure 25).

Contrairement aux arbres, étant donné la simplicité géométrique des bâtiments étudiés dans nos projets, leur reconstruction 3D fera davantage intervenir des techniques basées sur l’ajustement de primitives géométriques, comme nous allons le présenter ci-après.