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Partie 1 : Synthèse des travaux de recherche

7. Evaluation de la qualité des résultats

7.1 Erreurs liées à l’acquisition des données

Ces erreurs sont liées aux instruments employés, leur couplage, ainsi qu’aux modes opératoires mis en œuvre pour numériser le site ou l’objet d’intérêt. Le choix de l’instrument et des paramètres de balayage dépendra du cahier des charges. Bien entendu, les constructeurs annoncent des critères de qualité relatifs aux capacités de l’instrument. Ces documentations techniques restent quelquefois sommaires, sinon à prendre avec précaution, car les chiffres annoncés demandent généralement à être validés ou revus en fonction des conditions d’acquisition et du mode opératoire.

7.1.1 Erreurs liées à l’instrument de mesure

Alors que le réglage des instruments topographiques par l’opérateur était encore envisageable il y a une quinzaine d’années, il devient impensable aujourd’hui, principalement en raison de la complexité des systèmes électroniques venus remplacer ou compléter les composantes mécaniques. Les instruments s’apparentent de plus en plus souvent à des « boites noires », dont le seul point d’entrée est l’interface utilisateur. Les travaux traitant du sujet dans la littérature ont montré que les modèles d’erreurs associés à des mesures effectuées à l’aide d’une station totale peuvent être transposés aux scanners laser terrestres. Malgré un contrat de maintenance avec le constructeur incluant un contrôle de calibration de l’instrument, il convient suivant les cas, d’effectuer soi-même une calibration de l’appareil afin de modéliser le phénomène perturbateur et de réduire son effet sur les mesures (Lichti, 2017 ; Lichti, 2019). Plusieurs expériences mettant en œuvre différentes configurations de cibles ont été expérimentées dans Abbas et al. (2014) et peuvent servir de point de départ pour procéder à des auto-calibrations. Le dernier scanner commercialisé par Trimble (Trimble_X7@2020) opère une calibration automatique avant balayage, prouvant ainsi que la question est au centre des préoccupations chez certains constructeurs (paragraphe 2.2.2., p. 112).

Sans entrer dans le détail des erreurs liées à toutes les technologies de mesures 3D mentionnées dans ce mémoire, nous nous contenterons de mentionner des travaux liés à un système d’acquisition non dédié initialement à la production de nuages de points 3D : une caméra RGB-D. Au cours de la dernière décennie, les caméras RGB-D ont connu un succès certain en raison de leur capacité à fournir simultanément une image en couleurs et une carte de profondeur, moyennant un faible investissement financier. De tels capteurs sont particulièrement appréciés pour des applications en robotique ou en vision par ordinateur (exemple des caméras Kinect développées par Microsoft). Il nous a semblé intéressant d’étudier la pertinence et la précision des caméras RGB-D pour la modélisation 3D de petits objets, à courte portée. Pour atteindre cet objectif, nous avons mis en place une approche de calibration de l’appareil afin d’analyser d’éventuels phénomènes perturbateurs (Lachat et al., 2015c ; Lachat et al., 2015b). Si la précision de mesure a été estimée satisfaisante pour un système développé à des fins de jeux vidéo (à 1 cm pour des portées de 2 m), le protocole d’acquisition et de traitement à mettre en œuvre pour l’atteindre est gourmand en temps. Ainsi, à des fins de modélisation 3D, cette technologie ne supplantera pas les techniques photogrammétriques conventionnelles applicables avec des caméras à bas coût, en particulier depuis l’accès à une large gamme de logiciels robustes et disponibles sur le marché pour générer du nuage de points à partir de photographies.

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La caméra 3D Kinect a également été testée du point de vue de sa pertinence pour localiser un système mobile en milieu urbain, sans GNSS (Mittet et al., 2013).Les erreurs liées aux acquisitions dynamiques (positionnement du mobile, calibration, bruit de mesure) ont été détaillées dans la thèse de Mittet (2015), à laquelle nous renverrons le lecteur. Après calibration de la caméra RGB-D, la précision de positionnement fournie par l’algorithme développé sur un ensemble de données simulées atteignait 3.4 cm pour un déplacement d'environ 5 mètres. Appliquée à des données réelles, l'évaluation quantitative a été réalisée en comparant notre résultat à la position réelle de la plate-forme obtenue par mesures tachéométriques (Mittet et al., 2014). La dérive totale à l'extrémité est d'environ 1,3 m après 20 mètres de déplacement. Ce résultat est relativement correct si l'on considère que l'approche proposée est incrémentale et non itérative.

7.1.2 Erreurs liées au mode opératoire

Un mode opératoire adapté permet de réduire les sources d’erreurs provenant soit de l’environnement (courbure de la terre, réfraction atmosphérique, taille ou étendue du chantier) soit de l’instrument (erreurs de collimation). Du fait de son utilisation aisée sans connaissance en mesures topographiques, les scanners laser étaient accueillis par les utilisateurs comme l’instrument idéal qui allait leur permettre de s’affranchir des services d’un géomètre. Toutefois, progressivement, l’importance de choisir convenablement les stations, de prévoir des points de calage, de procéder par boucles, d’effectuer des contrôles, de géoréférencer les nuages, ont permis de recadrer les opérations de numérisations et de rappeler les principes de base à respecter dans des opérations topographiques.

7.1.2.1 Evaluation de la configuration du réseau

Il est de plus en plus courant que seul le nuage de points soit l’élément de jonction entre deux stations successives. La qualité de la consolidation qui en découlera sera dépendante non seulement de la qualité des données acquises par le scanner, mais aussi des paramètres de numérisation (densité de points) et de la configuration du levé. Ainsi, un choix de stations respectant des zones de recouvrement suffisant entre deux stations successives améliorera la qualité du recalage. Un cheminement fermé sur lui-même (en boucle) sera à privilégier à un cheminement en antenne (Figure 32), comme évoqué dans le processus de consolidation (p. 17). Si le cheminement en antenne est sujet à une transmission d’erreurs causée par un cumul d’erreurs de consolidations successives, dans des cheminements en boucle, la première et dernière station partagent une zone de numérisation commune permettant de mettre en évidence la propagation des erreurs successives de recalage et ainsi de compenser les écarts adéquatement.

Figure 32 : Configuration d’un réseau de stations : a) en antenne et b) en boucle. En rouge, les côtés du cheminement, en gris, les zones balayées, en bleu, les numéros de nuages (Lachat, 2019)

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Ce mode opératoire est préconisé avec l’utilisation d’instruments basés sur les algorithmes de SLAM, en raison de la dérive qui les caractérise. Si la disposition des stations est laissée à l’appréciation de l’opérateur, le processus de consolidation reste toutefois une boite noire dans la majorité des logiciels associés au scanner. Les travaux menés en ce sens (Salgues et al., 2020)nous ont permis de conclure, en comparant les nuages de points acquis en temps réel avec des nuages de points acquis au scanner statique, que le mode opératoire jouait évidemment un rôle crucial dans la mise en œuvre des systèmes basés sur le principe du SLAM et que ces systèmes ne pouvaient pas garantir la précision acquise avec un système statique.

A l’avenir, nous tenterons de coupler les deux, c’est-à-dire compenser des portions de nuages de points acquis par des systèmes d’acquisition temps réel sur la base de « nuages d’appui » acquis au scanner statique à des endroits stratégiques, au même titre que l’on compenserait des observations tachéométriques au sein d’un réseau d’insertions, sur la base d’un réseau de points de canevas.

7.1.2.2 Evaluation de la consolidation

L’algorithme open source MORPHεD dédié à la consolidation de plusieurs nuages de points (voir paragraphe 3.2, p. 17) permet de produire un rapport d'évaluation de la qualité de la consolidation opérée. Il a été testé sur plusieurs jeux de données, avec différentes caractéristiques (volume de données, inter-visibilité des stations, recouvrements, encombrement).

Figure 33 : Recalage global de 52 stations de numérisation (acquises dans les locaux de l’INSA Strasbourg) reliées entre elles par environ 70 cibles de différentes natures (Lachat et al., 2018)

En dehors de l’évaluation qualitative du résultat, qui permet de valider visuellement sa cohérence, (illustrée dans la Figure 33), une évaluation quantitative a été entreprise en suivant deux pistes (Lachat, 2019) :

a) constater la convergence du calcul de compensation

b) comparer les résultats du recalage à des résultats pris comme références

La convergence du calcul de compensation a été analysée selon le critère des moindres carrés, qui dépend des résidus et doit donc tendre vers un minimum afin d’aboutir à des résidus minimums au niveau des points communs ; à ce stade, les paramètres compensés n’évoluent plus et ont donc atteint leur valeur la plus probable.

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Dans un second temps, les résultats obtenus à l’issue du recalage avec la méthode développée ont être comparés à des consolidations « de référence ». Cela implique d’une part de choisir un ou des logiciel(s) courants, dont les performances sont éprouvées et d’autre part de définir ou un plusieurs critères pour la comparaison : les résidus calculés au niveau des points communs. Chacun des logiciels choisis comme « référence », Faro Scene (logiciel constructeur) et 3DVEM (logiciel universitaire), fournissent des critères d’évaluations à l’issue du recalage, mais malheureusement difficilement comparables. C’est pourquoi, en partant des mêmes jeux de données, les résidus et écarts-types ont été recalculés en suivant une approche unique.

Il ressort de cette étude que quel que soit le jeu de données considéré, la solution MORPHεD fournit les mêmes valeurs moyennes écarts-types des résidus que les logiciels cités. Ainsi, le recalage en bloc mis en place dans ces travaux a pu être validé. L’approche de consolidation développée de même que le processus d’évaluation ont été publiés dans (Lachat et al., 2018).