• Aucun résultat trouvé

Cette étude s’inscrit dans le cadre d’un plus gros projet qui vise à implanter le programme de pratiques parentales positives « Triple P » dans la province de Québec, sous la « Chaire de partenariat en prévention de la maltraitance ». En effet, le groupe de cette étude sera utilisé en tant que groupe contrôle et comparé avec un groupe expérimental ayant reçu des interventions du programme «Triple P». Ce faisant, les critères méthodologiques choisis ici sont en fonction de ceux du projet «Triple P».

Participants

Cette étude a recruté 117 participants. Parmi ceux-ci, 25 participants furent exclus de l’étude. Les raisons des exclusions étaient les suivantes : (a) l’âge de l’enfant ne rentre pas dans les critères d’admissibilité (entre 0 et 12 ans inclusivement) (n=2), (b) l’enfant ne vit pas avec le parent (n=1), (c) les parents vivent hors du territoire (n=2), (d) l’intervention ne fut jamais commencée (n=2), (e) deux personnes différentes ont répondu au prétest et au post-test (n=1), (f) le temps entre les deux questionnaires surpasse celui prévu dans les critères de recrutement (n=4), (g) le questionnaire post-test ne fut pas rempli (n=13).

L’échantillon se compose alors de 92 parents. L’âge des parents varie entre 17 et 60 ans (M = 36,56, ÉT = 6,73, n=89) et 22 % d’entre eux sont des hommes (n=20) et 78 % sont des femmes (n=72). L’âge des enfants s’étend de 0 à 12,67 ans (M = 7,09, ÉT = 3,12), avec 63 % de garçons (n=58) et 34 % de filles (n=31). De plus, 84 % de ces enfants vivent dans le foyer du parent à temps plein (n=77), 13 % vivent dans le foyer entre quatre et six jours par semaine (n=12), et un enfant vit dans le foyer moins d’une journée par semaine. Le nombre d’enfants de moins de 18 ans qui vivent à temps plein ou temps partiel au foyer varie de 0 à 5 enfants (M = 2,02, ÉT = 0,96). Dans ces familles, 11 % d’entre elles utilisent des services sous la Direction de la protection de la jeunesse (N=10), et 89 % d’entre eux utilisent des services en CLSC (N=82). Des données sociodémographiques supplémentaires se retrouvent dans le Tableau 1.

Mesures

Le questionnaire comprend 190 questions au prétest et 192 questions au post-test. Il provient du programme d’implantation de Triple P. Le questionnaire prétest s’amorce avec des questions sur les caractéristiques sociodémographiques des participants et de leur enfant. Les variables individuelles mesurées incluent : le sexe, l’âge, l’état civil, le niveau de scolarité́ et l’occupation du répondant. Les variables familiales mesurées incluent : la structure familiale (biparentale, monoparentale, recomposée), le nombre d’enfants de moins de 18 ans présent dans le foyer à temps plein ou à temps partiel, la langue(s) parlée(s) à la maison et le revenu familial. Les variables de l’enfant incluent : son sexe, son âge, la nature de son lien (parent naturel ou adoptif, beaux-parents, famille d’accueil) et le nombre de jours/semaine que l’enfant passe dans le foyer. Ces données sont demandées au prétest. Les questions au prétest et au post-test proviennent de plusieurs instruments standardisés traduits en français (soit déjà traduit ou traduit par l’équipe de recherche). Les variables dépendantes de l’étude sont présentées ici-bas. Le parent doit répondre aux questions en fonction de l’enfant pour lequel il consulte ou, s’il consulte pour plusieurs enfants à la fois, selon l’enfant qui vit le plus de difficultés. Le parent doit aussi répondre aux questions en fonction des deux derniers mois précédant la date où il répond au questionnaire. Pour répondre à la cinquième question de recherche, des donnés clinico- administratives sur le parent seront récoltés (voir section « Collecte de données clinico- administratives », p. 35).

Composantes comportementales

Pratiques parentales positives

Le Parent Practices Interview (Webster-Stratton, 1998), qui montre une bonne cohérence interne, et l’« Alabama Parenting Questionnaire » (Shelton, Frick et Wooton, 1996), qui lui montre une bonne cohérence interne ainsi qu’une bonne fidélité test-retest, permettent d’évaluer les pratiques parentales positives. Le parent doit répondre à l’aide d’une échelle en cinq points, allant de 1 (jamais) à 5 (toujours), et un score total est calculé. Plus le score est élevé, plus le parent utilise des pratiques parentales positives.

Styles disciplinaires dysfonctionnels

Les styles disciplinaires dysfonctionnels sont mesurés sur 30 items tirés du « Parenting Scale », qui démontre une bonne validité concordante avec d’autres outils utilisés fréquemment en clinique (Arnold et coll., 1993). Trois styles disciplinaires dysfonctionnels sont mesurés : négligence/laxisme, surréactivité et verbosité/hostilité. Le parent doit se situer sur une échelle de 1 à 7 comprenant un pôle positif et négatif. Un score est calculé pour les 3 sous-composantes du test. Un score élevé signifie qu’un parent utilise beaucoup de styles disciplinaires dysfonctionnels.

Conduites à caractère violent envers l’enfant

Treize questions tirées du « Parent-Child Conflict Tactics Scales » (Straus Hamby, Finkelhor, Moore et Runyan, 1998) évaluent les conduites à caractère violent envers l’enfant. Étant donné la nature des questions, les auteurs mentionnent une qualité psychométrique discutable, avec une faible fidélité, mais une validité de construit qui semble acceptable. L’instrument mesure trois échelles : la discipline non violente,

l’agression psychologique et la violence physique mineure (ou punition corporelle). Le

répondant indique la fréquence à laquelle l’enfant subit ce comportement de la part d’un adulte de son foyer. Les choix de réponse d’une adaptation par l’Institut statistique du Québec (Clément et coll., 2013) s’inscrivent selon la fréquence d’un comportement dans un intervalle de temps de 2 mois, allant de 1 (Ce n’est jamais arrivé) à 4 (C’est arrivé 6

fois et plus). Un score pour chaque composante est calculé, et un score élevé indique que

le comportement est utilisé à haute fréquence. Étant donné la qualité psychométrique plus discutable de cet instrument, cette composante sera exclue des compétences parentales comportementales et évaluée seule dans les analyses. Cette décision permet de réduire les risques de nuire aux analyses des autres instruments évaluant les compétences parentales comportementales.

Composantes cognitives et affectives

Autorégulation du parent

Cinq questions du Parent Self-Agency Measure (Dumka, Stoerzinger, Jackson et Roosa, 1996) permettent d’évaluer l’autorégulation du parent, avec une structure interne ainsi qu’une validité de construit adéquate. Le parent indique son degré d’accord sur une

échelle de type Likert allant de 1 (Rarement) à 7 (Toujours). Un score total est calculé, et un score élevé indique une meilleure autorégulation parentale chez le parent.

Stress parental

Le stress parental est mesuré à l’aide de la version brève du Parenting Stress Index (Abidin, 1995). Ce test a été validé et normé auprès de mères québécoises (Lacharité, Éthier et Piché, 1992). Cet instrument de 36 items fournit trois sous-échelles : la détresse

parentale, des interactions parent-enfant dysfonctionnelles, et un tempérament difficile chez l’enfant. Le parent indique son degré d’accord sur une échelle de type Likert allant de

1 (Fortement en accord) à 5 (Fortement en désaccord). Un score est calculé pour chaque type de stress. Plus le score est élevé, plus le parent vit du stress parental.

Détresse psychologique

La détresse psychologique est mesurée à l’aide du K-10 (Kessler et coll., 2002), qui démontre une bonne spécificité ainsi qu’une bonne cohérence psychométrique. Cet instrument de 10 items demande au parent d’indiquer, sur une échelle en cinq points allant de 1 (Jamais) à 5 (Tout le temps), la fréquence à laquelle il a ressenti des symptômes de détresse (par exemple : nerveux, désespéré́, triste, agité). Un score total est calculé, un score élevé indique un nombre élevé de symptômes d’anxiété et de dépression.

Comportements de l’enfant

Les comportements de l’enfant sont mesurés au moyen du Strenghts and Difficulties Questionnaire (Goodman, 1997), qui démontre une bonne validité concordante avec d’autres outils utilisés en clinique. Ce questionnaire comprend 25 items, contenant cinq sous-échelles : symptômes émotionnels, problèmes de la conduite, hyperactivité/inattention, comportements prosociaux et problèmes relationnels avec les pairs. Le parent évalue une caractéristique positive ou négative de son enfant et estime

l’énoncé selon : 1 (Pas vrai), 2 (Un peu vrai) ou 3 (Très vrai). Un score est calculé pour chaque comportement de l’enfant évalué et un score élevé signifie que l’enfant montre ce comportement.

Ressources personnelles du parent

Les ressources personnelles dont dispose le parent pour répondre à ses besoins et à ceux de sa famille sont mesurées à l’aide du Perceived Adequacy of Resources (Rowland, Dodder et Nickols, 1985), qui démontre une bonne validité interne. Cet instrument contient trois sous-échelles : les ressources temporelles, sociales et financières. Il comprend 12 énoncés pour lesquels le parent indique son degré d’accord sur une échelle de type Likert allant de 1 (Fortement en désaccord) à 4 (Fortement en accord). Un score est calculé pour les trois types de ressources, et plus le score est élevé, plus le parent a en main cette ressource.

Procédures

Dans cette étude, un parent désigne un adulte, homme ou femme, qui exerce des compétences parentales auprès de l’enfant. Ce peut être un parent naturel biologique ou adoptif, un beau parent ou un tuteur. Il doit vivre avec l’enfant à temps partiel ou à temps plein. Un parent qui n’a pas la garde de son enfant à l’heure actuelle peut seulement être admissible si un processus de réintégration de l’enfant dans le milieu familial est déjà enclenché. Les parents sont recrutés dans différents territoires de la ville de Québec et de Montréal, soit l’Est de l’Île de Montréal, le Centre-Sud de l’Île de Montréal, la Jacques- Cartier à Québec et La source à Québec. Leur sélection fut basée sur trois critères : la taille de la population d’enfants mineurs, la proportion d’enfants pour une problématique de maltraitance et le taux de signalement aux services de la protection de la jeunesse. Des informations démographiques se retrouvent au Tableau 2.

Les parents recrutés recherchent des services qui les aident à améliorer leurs compétences parentales. Les services évalués dans cette étude excluent les programmes d’interventions structurés semblables à Triple P qui visent le développement des pratiques parentales, par exemple « Équipe » et « Ces années incroyables ». Le parent doit recevoir des services de nature psychosociale ou éducative, en format individuel ou en groupe par les services généraux ou le programme famille-enfance-jeunesse du CLSC ou par le CJQ sur une base volontaire ou ordonnée. Les services usuels doivent répondre aux besoins ci- dessous ou à des besoins semblables à ceux-ci : éprouver des difficultés de communication, relationnelles, ou d’encadrement avec son ou ses enfants, se plaindre d’attitudes ou de

comportements difficiles de son enfant, admettre se sentir démuni et impuissant dans l’exercice de ses compétences parentales, sentir qu’il est en train de perdre le contrôle de lui-même avec son enfant, s’inquiéter pour son enfant ou vouloir le protéger en situation d’adversité. Par ailleurs, afin de contrôler des variables confondantes, un parent est exclu s’il a fait ou fait à l’heure actuelle une intervention afin de travailler ses compétences parentales dans le même style que le programme Triple P.

Recrutement des parents

Le recrutement s’est effectué de janvier 2016 à février 2017. La récolte des données s’est terminée en avril 2017. Les parents sont sélectionnés par l’entremise des intervenants et des chefs d’équipes. Un intervenant ou un responsable à la recherche du CIUSSS demande au parent l’autorisation à être contacté pour participer à l’étude. Si le parent accepte, il se voit remettre : le questionnaire (Annexe 1), deux exemplaires du formulaire de consentement (Annexe 2), le coupon de compensation (Annexe 3) et le formulaire d’enregistrement (Annexe 4). Par la suite, un membre de l’équipe de recherche contacte le parent et explique le consentement à la recherche. Le parent peut répondre au questionnaire seul ou avec une aide téléphonique. Une fois rempli, le questionnaire doit être scellé dans une enveloppe, puis transmis au centre de recherche en le remettant à l’intervenant ou par la poste. Le deuxième questionnaire et le coupon de compensation sont aussi transmis par l’intervenant ou par courrier. Les parents reçoivent une compensation monétaire de 30 dollars pour chaque questionnaire rempli.

Saisie de données et erreur de saisie

Les données furent saisies selon la valeur numérique correspondant à la position de la réponse sur les échelles du questionnaire. Une valeur numérique fut établie pour la réponse « autre ». Les questions non répondues sont considérées comme une donnée manquante. Les temps de mesure sont mesurés selon les dates de réponses au questionnaire, ou par la date de signature du formulaire d’information et de consentement si la date sur le questionnaire manque.

La saisie de données fut effectuée sous la gouverne de la « Chaire de partenariat en prévention de la maltraitance » grâce au projet d’implantation du programme Triple P. Deux étudiantes auxiliaires ont saisi les données, puis une statisticienne a comparé les deux

saisies afin d’éliminer les erreurs de saisie. Trois cas de réponse hors norme engendrent une procédure particulière. Dans le cas où un parent encercle deux réponses successives, la réponse saisie correspond à la réponse la plus normative (la plus modérée, là moins extrême). Dans la perspective où un parent encercle deux réponses extrêmes, la réponse était considérée comme une donnée manquante. Lorsqu’une question ou deux réponses non successives et non extrêmes sont encerclées, la valeur centre des deux réponses du parent est saisie. Les totaux et leurs moyennes ont été calculés pour chaque section du questionnaire. Ce sont ces mêmes cotes qui sont utilisées à l’intérieur des analyses de cette étude.

Collecte de données clinico-administratives

Afin de répondre à la cinquième question de recherche, une collecte de données clinico-administratives s’est effectuée du 1er mai 2017 au 1er septembre 2017. Les documents récoltés incluent : la demande de service, les notes évolutives d’intervenants, le plan d’intervention des intervenants et les ordonnances de services. Certains milieux ont offert un fichier Excel avec les informations désirées. Les documents récoltés ciblent seulement l’intervention entre le prétest et le post-test et concernent le parent recruté. Les documents récoltés peuvent tout de même provenir des dossiers du parent, du conjoint(e) et de l’enfant. Le consentement d’accès aux données fut effectué lors du recrutement des parents. Aucune compensation supplémentaire n’est fournie pour ces données.

Dans le cas des données clinico-administratives, les données saisies incluent : le nombre de rencontres d’intervention, le lieu de la rencontre, les intervenants présents dans les interventions et les membres de la famille présents dans les interventions. Les informations absentes sont considérées comme une donnée manquante.

Malheureusement, plusieurs évènements lors de la collecte ont nui à celle-ci et à la possibilité d’utiliser ces données. En effet, les informations sont hautement éparses à travers les écrits et peuvent se retrouver dans différents documents. Certains documents demandés ne contenaient pas les informations qu’il était attendu d’y retrouver. Par exemple, la demande de consultation pouvait parfois être absente d’un plan d’intervention. De plus, certaines informations pouvaient se retrouver dans le dossier des autres membres de la famille, et il n’était pas toujours possible d’y accéder. Il n’était également pas possible

de réclamer des documents supplémentaires sans enfreindre la demande éthique. Par ce fait même, le nombre élevé de données manquantes a nui à la possibilité d’y faire une analyse plus poussée.

Malgré tout, les informations récoltées sont très variables. En effet, il a été difficile de faire une catégorisation simple et concise des demandes de consultation. De plus, les lieux de rencontres varient entre les visites à domicile, les CLSC, les écoles, les téléphones et les courriels. Seules les interventions à domicile et en CLSC ont été saisies. Sept catégories ont été créées sur les membres de la famille présente en intervention. Ce faisant, il n’est pas possible de bien répondre à la cinquième question de recherche, qui vise à connaitre les caractéristiques des interventions auprès des familles qui vivent des difficultés dans les établissements publics québécois. Malgré tout, le nombre de rencontres entre le prétest et le post-test a pu être utilisé, grâce à un nombre plus faible de données manquantes et à sa variable de type ratio. Dans ce contexte, il a été jugé pertinent de formuler une question de recherche fondée sur une revue de la littérature traitant de l’effet du nombre de rencontre sur la force de l’intervention. Ces informations sont présentées ci- dessous.

Recension littéraire sur le nombre de rencontres dans une intervention

La littérature scientifique montre que le nombre d’interventions varie énormément entre les programmes d’intervention. En effet, l’étude de Pinquart et Teubert (2010) inclut des interventions qui comptent de 1 à 421 rencontres dans une période de 1 jour à 60 mois. Toutefois, la force de l’effet n’est pas nécessairement liée à un nombre plus élevé de rencontres. Thomas et Zimmer-Gembeck (2011 ; 2012) montrent que des interventions de 12 séances sont plus efficaces chez les familles présentant des comportements maltraitance ou susceptibles d’en présenter que des interventions de 17 séances. De plus, Carrasco et Fox (2012) ont comparé un groupe d’intervention standard à un groupe intensif et confirme que les deux modalités d’intervention améliorent presque toutes les composantes étudiées entre les deux temps de mesure. Ils établissent que le temps d’apprentissage varie d’un individu à l’autre, et que certains s’améliorent beaucoup plus vite, ce qui vient annuler le facteur d’intensité. Ce faisant, une amélioration significative peut survenir à l’intérieur d’une période de huit semaines. Les interventions doivent se fier au besoin des parents plus qu’au nombre de rencontres (Carrasco et Fox, 2012). Dans les services sociaux, les

interventions peuvent éventuellement se terminer lorsque le parent ou l’intervenant ne perçoivent plus l’intérêt de continuer l’intervention. Le nombre de rencontres dans un délai de huit semaines varie alors entre les familles, et ce, selon la sévérité de leur difficulté.

Question de recherche

Est-ce que le nombre de rencontres est associé à la sévérité des difficultés vécues par les parents sur ses compétences parentales et les comportements de l’enfant ? Ce nombre de rencontres influence-t-il la force de l’effet des interventions sur les compétences parentales ?

Hypothèse

Il est attendu qu’un parent ayant participé à un plus grand nombre de rencontres démontre plus de difficulté sur le plan des compétences parentales et des comportements de l’enfant avant le début de l’intervention comparativement à un parent ayant participé à un petit nombre de rencontres. Il est également attendu que les parents ayant participé à un plus grand nombre de rencontres montrent une plus grande amélioration des compétences parentales que les parents ayant participé à un nombre faible de rencontres.

Chapitre 3 ANALYSES ET RÉSULTATS

Documents relatifs