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La fabrication des nanoparticules, entre 50 et 200 nm, à partir d’une solution de copolymères bloc, est abondamment décrite dans la littérature. Les deux principales techniques sont l’émulsion/évaporation de solvant [64, 65] et la nanoprécipitation [65, 66], ainsi que ces variantes comme la « nanoprécipitation flash » [67, 68] ou les techniques de microfluidique [69] [70].

La technique d’émulsion-évaporation de solvant repose sur la formation préalable d’une émulsion stable (au moins transitoirement) d’une solution organique de polymère dans une

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phase externe aqueuse [65]. Les solvants organiques utilisés dans cette méthode sont pratiquement insolubles dans la phase aqueuse externe. Cette émulsion doit être stabilisée par des surfactants ou des stabilisants stériques. La diffusion du solvant organique dans la phase externe et puis son évaporation permet la solidification de la particule. Après lavages par dialyse ou par centrifugation de l’excès de molécules stabilisatrices, les particules peuvent être récupérées et caractérisées. Nous n’apporterons pas davantage d'informations sur l’émulsion/évaporation de solvant, car cette technique n’a pas été retenue dans notre étude pour différentes raisons, la principale étant la nécessité d’utilisation d’adjuvants tels que des surfactants. En général, ceux-ci sont difficiles à éliminer et donc compliquent les analyses chimiques de surface au cœur de cette étude.

1.3.1 Principe de la nanoprécipitation

Le procédé de nanoprécipitation consiste à injecter dans une phase externe aqueuse, d’une solution de polymère globalement hydrophobe, dispersée dans un solvant organique complètement soluble ou partiellement soluble dans l’eau, tel que l’Acétone, le DMSO ou le THF [71].

Ce procédé ne nécessite pas forcement l’utilisation de molécules stabilisatrices qui peuvent être requises cependant dans une perspective d’optimisation des tailles ou si on utilise des polymères de haut poids moléculaire (>50 000 g/mole) peu hydrophiles. Ceci est un grand avantage tel que nous le verrons par la suite dans notre projet. Globalement, c’est une méthode simple bien adaptée à l’échelle du laboratoire, mais dont la limitation provient de la difficulté à faire de la mise à l’échelle pilote ou industrielle.

Deux théories ont été proposées pour expliquer le mécanisme de formation des nanoparticules lors de la nanoprécipitation. La première, proposée par Quintana-Guerero et

coll. [72], explique la formation de NP par des turbulences à l’interface entre la phase

organique et la phase aqueuse. Ces turbulences sont provoquées par les différences de tension de surface entre les deux solvants et elles conduisent à la formation de microgouttelettes et à la

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précipitation subséquente du polymère sous forme de particule, due à la fuite du solvant organique.

La seconde théorie est basée sur l’instabilité chimique du système lors du mélange des deux phases. Le passage quasi instantané du solvant organique dans la phase externe aqueuse provoque un phénomène de « supersaturation », le polymère étant à une concentration dans la phase composée d’eau et du solvant organique beaucoup plus élevée que sa concentration de solubilité maximum. Cette solution métastable évolue spontanément. Résultant de petites fluctuations locales de concentrations, une nucléation et une croissance de la nouvelle particule en formation par l’insertion de chaînes polymériques se produisent. Le résultat en est des particules de forme globulaire de taille nanométrique qui grossissent avec le temps. L’insertion de chaines continue jusqu’à ce que l’énergie nécessaire soit trop élevée et cela même si le système n’est pas à l’équilibre [65, 66]. Le système devient alors « gelé » et la taille de la particule est fixée et il ne se produit plus d’échange de chaîne de polymère.

De façon intéressante, celle-ci permet de prédire que le rayon des particules formées dépend de la supersaturation : à faible supersaturation, peu de particules sont formées tandis qu’à haute supersaturation de nombreuses particules plus petites sont formées [66]. Autrement dit, si le mélange des phases organiques (solvant) et aqueuses (non-solvant) est lent, les particules auront tendance à être plus grosses que si le mélange est rapide et qu’alors moins de chaines ont le temps de diffuser et de s’insérer dans le noyau en formation.

L’obtention de petites tailles et de faibles polydispersités nécessite que la nucléation se produise sur temps très bref, ce qui demande des temps de mélange très courts, de l’ordre de quelques millisecondes [67]. Ceci a amené le groupe de R Prud’homme notamment à développer des dispositifs d’auto-assemblage rapide des polymères bloc appelé « flash nanoprecipitation » [67, 68]. Ces dispositifs reposent sur la rencontre de deux jets (une phase de « non-solvant », une phase contenant le polymère dissous dans un bon solvant) se rencontrant dans une chambre de géométrie particulière permettant une diffusion rapide des deux phases [73].

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Le mécanisme de nucléation et croissance n’est pas sans rappeler les étapes de formation des micelles, y compris les micelles faites à partir d’amphiphiles de haut poids moléculaires, tels que des polymères blocs. La formation des micelles, contrairement à la formation des particules, est complétée par une phase d’équilibration qui minimise l’énergie libre du système et implique un changement du nombre de micelles [74]. Cette étape ne se produit pas pour les systèmes « gelés » que sont les particules polymériques qui ne sont pas des systèmes dynamiques. Néanmoins ces systèmes ont été appelés « micelle-like » [8] ou « frozen-micelle » par plusieurs auteurs pour refléter le fait que leur structure rappelait les micelles formées par des surfactants. Le terme « crew-cut » micelle a été également introduit par le groupe d’Adi Eisenberg pour des particules formées par copolymère bloc dont le bloc hydrophile était beaucoup plus petit que le bloc hydrophobe formant le cœur de la particule « micellaire » [75].

Plus récemment des approches reposant sur la microfluidique, soit l’utilisation des principes de mécanique des fluides dans des canaux de taille micrométrique ont été mise de l’avant afin de mieux contrôler les paramètres de mélange des phases et afin de permettre une mise à l’échelle plus facile des procédés de fabrication [76, 77]. Le principe repose sur l’injection à des vitesses bien contrôlées dans des canaux distincts de quelques centaines de µm d’une phase organique et d’une phase aqueuse. Ces phases se rencontrent à des ratios prédéfinis dans une chambre de mélange qui prend différentes formes selon les systèmes pour favoriser leur mélange rapide. La rapidité de mélange de la phase organique et de la phase aqueuse est déterminante pour l’obtention de particules de petites tailles et de faible polydispersité tel que mentionné précédemment. On retrouve principalement deux types de design, soit des designs basés sur des flux coaxiaux d’une phase organique et d’une phase aqueuse [69], soit encore des designs impliquant de la tortuosité et des formes d’arrêtes de poisson perturbant l’écoulement des fluides, favorisant un mélange chaotique et rapide des deux phases [70]. Les nanoparticules liposomales, lipidiques [78, 79] ou polymériques obtenues sont par la suite collectées et purifiées [69]. Certains auteurs ont rapporté un meilleur

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contrôle sur les tailles, la morphologie et l’efficacité d’encapsulation de molécules actives par ces méthodes [80].

1.3.2 Paramètres à contrôler

De façon pratique, selon la théorie basée sur la supersaturation, la taille des particules (et la dispersité de taille) dépend de la vitesse du mélange et de la concentration de polymère dans la phase organique, qui deviennent donc les paramètres primordiaux à contrôler.

La concentration, donc la quantité de chaînes dans un volume donné de phase organique, détermine la taille des particules formées. Cet effet est indissociable de la viscosité de la solution de polymère qui en augmentant favorise la production de particules de plus grande taille [71]. Le rôle du poids moléculaire du polymère ainsi que du type de solvant ont aussi été mis en évidence en relation avec la viscosité de la phase organique [81].

La vitesse d’injection de la phase organique contenant le polymère a peu d’influence en nanoprécipitation classique, le paramètre important étant dans cette configuration la rapidité du mélange des deux phases. Par contre en nanoprécipitation « flash » et en microfluidique, ce paramètre de débit des phases devient important pour contrôler la taille des particules obtenues [67, 69].

D’autres paramètres peuvent être négligés, tels que la température ou le ratio phase organique / phase aqueuse qui n’ont qu’une influence mineure sur la taille et la dispersité de taille [65].

1.3.3 Encapsulation de molécules actives.

L’incorporation de molécules dans une NP se fait au moment de sa fabrication. Lors de l’encapsulation de molécule active hydrophobe par nanoprécipitation, la situation est complexifiée, car il faut prendre en compte le comportement de la molécule à encapsuler, parallèlement au comportement du polymère. Plusieurs paramètres reliés à la molécule active sont importants : sa solubilité dans la phase organique et la phase aqueuse, la vitesse relative de précipitation du polymère et de la vitesse de précipitation de la molécule active, sa

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concentration, son affinité pour l’un et l’autre des deux blocs du copolymère, décrit par le paramètre d’interaction de Flory-Huggins χSP [82], la vitesse de diffusion des solvants et des molécules.

Un phénomène souvent observé est une limite de solubilité de l’actif dans la matrice polymérique au-delà de laquelle, le système est déstabilisé, produisant des particules de taille micrométriques, une suspension dispersée ainsi que des particules d’actifs non encapsulées.

La co-solubilisation de la molécule active (dans le cas d’actif hydrophobe) et du polymère dans une phase organique et leur coprécipitation subséquente peut avoir plusieurs conséquences pour la molécule active, qui peut subir une séparation de phase et précipiter pour former des cristaux (ou des nanocristaux), se retrouver sous forme amorphe ou encore être dispersée en solution dans la matrice polymérique. Ces états physiques doivent être connus, car ils influencent la solubilité, la libération de l’actif, sa stabilité [83].

L’encapsulation et ces conséquences sur la structure de la particule sont à suivre pour toute nouvelle formation. En effet l’intercalation de molécules actives entre les chaines de polymères sous forme de molécules isolées, de nanocristaux ou de partie amorphe peut avoir des conséquences sur les transitions vitreuses des polymères, la possibilité de séparation de phase, la dégradation et les cinétiques de libérations des molécules actives.

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