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Méthodes numériques de calcul du déplacement d’un pieu sous charge axiale monotone

I.2 Comportement des pieux sous chargement axial monotone

I.2.4 Méthodes numériques de calcul du déplacement d’un pieu sous charge axiale monotone

I.2.4.1 Méthode des courbes de transfert (méthode t-z)

I.2.4.1.1 Principes

La méthode t-z, appelée aussi méthode des courbes de transfert, a été proposée d’abord par Coyle et Reese (1966). Elle vise à calculer le déplacement vertical d’un pieu soumis à une sollicitation axiale. La méthode se base sur la définition de courbes reliant la contrainte de cisaillement sur la surface latérale du pieu τ, au déplacement vertical du tronçon de pieu wz, et ce à différentes profondeurs. Ces courbes sont appelées également courbes z ou courbes de transfert. La construction de ces courbes t-z se base sur des données récoltées au cours d’essais de chargement de pieux instrumentés in-situ ou d’essais en laboratoire sur des pieux modèles, ou encore à partir d’essais in-situ (CPT, PMT, etc). Les premières courbes t-z ont été développées par Coyle et Reese (1966). Une courbe t-z typique est présentée sur la Figure I.14.

La méthode t-z peut-être mise en œuvre de différentes manières. Par exemple, elle peut se baser sur la discrétisation du pieu en une série de segments. La Figure I.15 montre que le pieu a été discrétisé en 3 segments pour des raisons de simplicité. La méthode se base sur la résolution de l’équation d’équilibre (I.30) d’un tronçon de pieu en compression.

0 ) ( ² zD wzdz w d A Ep   (I.30) Les principales étapes d’une méthode de résolution numérique de la méthode t-z utilisée par Poulos et Davis, 1980 peuvent être résumées de la manière suivante :

1. Le raisonnement commence par imposer un petit déplacement en pointe wb du segment 3 sur la Figure I.15. La résistance en pointe est alors calculée approximativement en utilisant par exemple la théorie de Boussinesq et en considérant la base du pieu comme étant une section rigide et circulaire.

2. A mi-hauteur du segment 3, un déplacement wz3 est considéré arbitrairement (par exemple wz3 est pris égal à wb). A partir de la courbe t-z correspondant à la profondeur du segment 3, la valeur de la contrainte de cisaillement autour du tronçon de pieu τ3 est récupérée. L’équilibre des forces appliquées sur l’élément 3 permet ensuite de calculer l’effort en tête du tronçon Q3.

3. En supposant que la charge au sein du petit segment 3 varie linéairement et en considérant que le pieu a un module d’Young Ep, la déformation élastique Δw’z3 à mi-hauteur du segment est ainsi calculée. La somme de Δw’z3 et de wb donne la nouvelle valeur de déplacement w’z3 à mi-hauteur du segment 3.

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4. Les deux valeurs w’z3 et wz3 sont comparées. Si la valeur calculée w’z3 ne coïncide pas avec wz3 à une tolérance près, une nouvelle valeur de wb est imposée et le calcul est repris. Si la tolérance est respectée, le calcul passe au deuxième segment de pieu jusqu’à l’obtention de la charge en tête Q0 et du déplacement en tête wz0. Le processus de calcul est repris pour différentes valeurs de déplacements en pointe jusqu’à obtenir une série de valeurs de Q0 et de wz0. Ces valeurs sont ensuite utilisées pour tracer la courbe de charge/enfoncement.

Figure I.15 : Principe de la méthode des courbes de transfert (Coyle & Reese, 1966)

La méthode t-z a été largement utilisée pour l’estimation du déplacement d’un pieu sous chargement axial et ses résultats sont considérés comme satisfaisants (Frank et Zhao, 1982 ; Maleki, 1995).

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Cependant, Poulos et Davis (1980) soulignent que cette méthode a plusieurs limitations théoriques et pratiques. Par exemple, l’utilisation des courbes de transfert suppose que le mouvement d’un point du pieu est relié uniquement à la contrainte de cisaillement en ce point. Aucun effet des autres contraintes n’est pris en compte lors du calcul. De plus, la méthode des courbes de transfert ne prend pas correctement en compte la continuité du sol, ce qui la rend inconvenable pour l’analyse des problématiques de tassement de groupe de pieux. Un inconvénient pratique s’ajoute aux inconvénients théoriques précédents. Il concerne l’importante instrumentation des pieux qui est nécessaire pour la récupération des données permettant de construire les courbes t-z. Cette instrumentation est plus importante que celle utilisée lors d’un essai normal de chargement de pieu.

Dans le paragraphe suivant, plusieurs exemples de courbes t-z sont donnés.

I.2.4.1.2 Exemples de courbes t-z monotones

Il existe plusieurs courbes t-z monotones qui ont été développées depuis 1960. La première courbe t-z est celle qui a été proposée par Coyle et Reese (1966). Une étude comparative de huit courbes t-z monotones a été réalisée par Bohn (2015). Cette étude compare les rigidités initiales, le type de sol et le type de pieu des courbes proposées. Les résultats de cette analyse sont récapitulés dans les tableaux I.9 et I.10. De plus, l’annexe A.I propose une description de certaines courbes t-z du tableau I.9, et une description d’autres courbes t-z non-présentées sur ce tableau.

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I.2.4.2 Méthode du continuum élastique

L’analyse basée sur la théorie d’élasticité a été utilisée par plusieurs chercheurs (Randolph et Wroth, 1978 ; Poulos et Davis, 1980). Dans cette approche, l’interaction sol-pieu est modélisée en divisant le pieu en une série de tronçons chargés uniformément. La solution du problème est obtenue en imposant une compatibilité entre les déplacements du pieu et les déplacements du sol à proximité. Les déplacements du pieu sont obtenus en utilisant la compressibilité d’un pieu soumis à une sollicitation axiale. Les déplacements du sol sont obtenus en utilisant les équations de Mindlin.

Poulos et Davis (1980) détaillent les principes de cette méthode. Le sol est considéré comme un massif semi-infini homogène isotrope et élastique, ayant un module d’Young Es et un coefficient de poisson νs constants dans tout le massif. Afin de calculer les déplacements du pieu et du sol, la méthode considère que tant que le comportement à l’interface reste élastique, les deux déplacements sont égaux.

Poulos et Davis (1980) résument les étapes principales de la méthode d’élasticité.

1. La première étape est de calculer le déplacement du sol au point i résultant de la contrainte pj

appliquée sur un élément j du pieu (voir Figure I.16). Ce déplacement sρij est donné par l’expression (I.30) où Iij est un facteur d’influence au point i causé par la contrainte de cisaillement appliquée à l’élément j.

j ij s ij I p E d s  (I.30)

2. La deuxième étape est de calculer le déplacement du sol au point i noté sρi résultant de la contrainte de cisaillement appliquée sur l’ensemble des éléments du pieu et sur la base.

) ( ) ( 1 b ib s b n j j ij s i I p E d p I E d s

(I.31)

3. La troisième étape est d’écrire une relation similaire à l’ensemble des points situés à proximités du pieu (n points), et aussi pour la base. Une relation matricielle (I.32) est obtenue. Dans cette relation, {sρ} est un vecteur déplacement du sol, {p} est un vecteur de contraintes de cisaillement appliqués au pieu, et [Is] est une matrice carrée de dimensions n+1 contenant les différents facteurs d’influence.

   

I

 

p E d s s s (I.32)

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Figure I.16 : Méthode d'analyse de l'interaction sol-pieu basée sur la théorie d'élasticité (Poulos et Davis, 1980)

4. La quatrième étape est d’exprimer le déplacement d’un élément de pieu j à partir de l’équation d’équilibre des forces qui lui sont appliquées. Une seconde relation matricielle relie le vecteur déplacement des éléments de pieu {sp} et le vecteur des contraintes {p}.

5. La cinquième étape est d’appliquer la condition de non-glissement qui impose l’égalité des vecteurs déplacements du sol et déplacements du pieu. Cette égalité permet de résoudre le problème.

Poulos et Davis (1980) ont introduit quelques modifications à la méthode afin de pendre en compte la non-homogénéité du sol, et introduire le glissement entre le pieu et le sol.

I.2.4.3 Méthode des éléments finis

La méthode des éléments finis a été largement utilisée dans la modélisation en géotechnique. Elle se base sur une discrétisation spatiale du milieu pour déterminer une solution au problème d’équilibre d’un solide soumis à des conditions limites exprimées en termes de force ou de déplacement. Cette méthode a été appliquée pour modéliser le comportement d’un pieu soumis à une sollicitation statique axiale. Dans ce type de modélisation, le problème d’interaction sol-pieu impose l’utilisation d’éléments spécifiques pour reproduire le comportement à l’interface. En effet, dans une interaction sol-pieu, des déplacements relatifs entre le sol et la fondation peuvent apparaître. Cependant, les

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éléments continus imposent le même déplacement à la structure et au sol donc ils ne peuvent pas être utilisés de manière simple dans ce type de modélisation. Par conséquent, des éléments spéciaux sont appliqués afin de modéliser le déplacement relatif sol-pieu. Ces éléments d’interfaces sont classés en deux catégories: des éléments sans épaisseur, et des éléments de type couche mince.

Les premiers éléments sans épaisseur ou éléments joints à 4 nœuds ont été proposés par Goodman et al (1968) (Figure I.17). Chaque nœud est dédoublé et un élément à épaisseur nulle est ainsi modélisé. Dans ce modèle, les déplacements relatifs sont reliés aux déplacements des nœuds à l’aide d’une fonction d’interpolation. Une matrice de rigidité est donc établie. Hermann (1978) puis Frank et al. (1982) ont également modélisé les interfaces sol-structure avec des éléments joints mais ils ont utilisé des ressorts fictifs pour relier les nœuds opposés. Chaque nœud est ainsi dédoublé et relié à l’autre grâce à un ressort tangentiel et un ressort normal (Figure I.18).

Figure I.17 : Elément joint à 4 nœuds (Goodman et al, 1968)

Figure I.18 : Elément joint de type ressorts (Herrmann, 1978)

Les éléments d’interface de type couche mince ont été utilisés dans plusieurs travaux (Desai et al. (1984), Zaman et al. (1984), Wang et al (2003)). Elle consiste à introduire une zone de faible épaisseur par rapport aux dimensions du problème pour simuler la zone de contact entre le sol et la structure. Une loi de comportement, différente des lois de comportement appliquées à la structure et au reste du massif, est imposée dans cette zone.

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