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I.3 Comportement des pieux sous chargement axial cyclique

I.3.3 Paramètres influençant le comportement des pieux sous chargement axial cyclique

I.3.3.1 Caractéristiques du chargement cyclique

Chan et Hanna (1980) ont réalisé des essais de chargement cycliques dans une cuve sur un pieu modèle dans un sable moyennement dense. Ces essais visent à étudier l’influence du nombre de cycles, de la charge moyenne Qmoy et de l’amplitude cyclique Qcyc sur la réponse du pieu. Les figures I.22 et I.23 montrent l’évolution des déplacements en tête de pieu au cours des essais en compression et en traction respectivement. Sur ces deux figures, les charges minimales et maximales appliquées sont mentionnées et il apparaît qu’il existe une valeur de charge maximale à partir de laquelle le comportement du pieu change. Pour les essais en compression, cette valeur est comprise entre 0.25 Rc

et 0,30 Rc, avec Rc la capacité portante du pieu. Pour les essais en traction, cette valeur est comprise entre 0.20 Rs et 0,30 Rs, avec Rs la résistance à la traction du pieu. En dessous de cette valeur de charge maximale, les déplacements en tête de pieu s’accumulent très faiblement. Au-delà de cette limite, les déplacements s’accumulent rapidement dès les premiers cycles, conduisant finalement à une rupture.

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Figure I.22 : Evolution des déplacements en tête de pieu au cours des essais de compression (Chan et Hanna, 1980)

Figure I.23 : Evolution des déplacements en tête de pieu au cours des essais de traction (Chan et Hanna, 1980)

Jardine et Standing (2000) présentent les résultats d’essais in-situ effectués sur des pieux battus ouverts de 457 mm de diamètre installés dans du sable moyennement dense à dense. L’ensemble de ces résultats a été présenté sous forme d’un diagramme de stabilité cyclique sur la Figure I.24 (Jardine et Standing, 2012). Ce diagramme de stabilité cyclique montre que le nombre de cycles pour atteindre la rupture du pieu est affecté par la charge moyenne Qmoy et l’amplitude cyclique Qcyc. Ce type de

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diagramme est décrit en détail dans le paragraphe I.3.5.2. Jardine et Standing (2012) montrent que ces deux paramètres conduisent à trois comportements différents : stable, métastable ou instable. Le comportement stable est défini par une faible vitesse d’accumulation des déplacements pour une centaine de cycles. Un comportement métastable est défini par une accumulation des déplacements à des vitesses modérées, et la rupture est observée pour un nombre de cycles compris entre 100 et 1000. Enfin, le comportement instable est défini par une rapide accumulation des déplacements conduisant à une rupture pour un nombre de cycles inférieur à 100. D’après la Figure I.24, l’augmentation de la charge maximale Qmax accélère la rupture et la vitesse d’accumulation des déplacements, confirmant ainsi les observations expérimentales de Chan et Hanna (1980). Jardine et Standing (2012) considèrent que des essais de chargements cycliques à de grandes amplitudes conduisent à une forte dégradation de la résistance à la traction du pieu, tandis qu’un comportement opposé est observé pour des essais non alternés à faible amplitude. En effet, un faible niveau de chargement cyclique a un effet positif sur la capacité portante du pieu. Après une légère baisse des frottements limites à l’interface, le pieu cicatrise avec le temps et la résistance à la traction peut augmenter d’environ 20% après avoir appliqué un chargement cyclique stable.

Figure I.24 : Diagramme de stabilité cyclique pour des pieux battus dans le sable (Jardine et Standing, 2012)

Silva et al. (2013) confirment les résultats des essais in-situ réalisés à Dunkerque à partir d’essais sur des pieux modèles réalisés en chambre d’étalonnage dans du sable siliceux de Fontainebleau. La densité du massif utilisé est moyennement dense à dense (ID=0.72). Silva et al. (2013) présentent les résultats relatifs à deux types d’essais réalisés : des essais non-alternés à faible amplitude, et des essais

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alternés à grande amplitude. Le massif a été instrumenté afin de mesurer les contraintes radiales et les frottements axiaux mobilisés autour du pieu au cours des sollicitations. Ces mesures locales de contraintes permettent d’expliquer les améliorations ou dégradations des frottements axiaux limites. La Figure I.25 montre l’évolution des contraintes radiales autour d’un pieu modèle à différentes distances de l’axe du pieu. Les mesures correspondent à une première séquence non-alternée de faible amplitude, à un chargement post-cyclique, et enfin à une deuxième séquence alternée de grande amplitude. Les mesures montrent que les contraintes radiales diminuent avec le nombre de cycles mais la décroissance est plus accentuée pour les cycles alternés de grande amplitude. Le chargement statique effectué après la première séquence à faible amplitude montre une forte augmentation des contraintes radiales. Cette augmentation est due à la dilatance. Les figures I.26 et I.27 illustrent les chemins de contraintes pour trois niveaux le long du pieu modèle, pour les deux séquences à faible et à grande amplitudes respectivement. Les chemins de contraintes tracés sur la Figure I.26 évoluent vers la gauche, et donc une diminution des contraintes radiales est notée, traduisant un phénomène de contractance à l’interface sol-pieu. Cette contractance conduit à une densification du sol. Silva et al. (2013) expliquent que cette densification provoque une dilatance et donc une augmentation du frottement lors de l’essai post-cyclique suivant. Pour des cycles à grande amplitude alternés, les chemins de contraintes passent par des lignes appelées « lignes de changement de phase ». Ces passages provoquent des alternances de phénomènes de contractance et dilatance. Ceci conduit à une désorganisation du sol à l’interface et donc à une chute du frottement. La Figure I.28 représente les résultats d’essais d’arrachement (traction) effectués sur un pieu modèle après les deux séquences à faible et à grande amplitude. L’amélioration de la résistance à la traction est clairement notée après les petits cycles non-alternés.

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Figure I.26 : Chemins de contraintes au cours des cycles non alternés à faible amplitude (Silva et al., 2013)

Figure I.27 : Chemins de contrainte au cours de la séquence alternée à grande amplitude (Silva et al., 2013)

Figure I.28 : Courbes d'évolution de la force d'arrachement en fonction du déplacement pour le pieu modèle avant et après les deux séquences de chargement (Silva et al., 2013)

Doherty et Gavin (2013) ont réalisé des essais de chargements cycliques non alternés sur un pieu modèle installé dans de l’argile molle issue de l’Irlande du Nord. Doherty et al. (2010) proposent une valeur de limite de liquidité égale à 65 % (±10 %), et une valeur de limite de plasticité égale à 35 % (± 5 %). Le pieu a subi quatre séquences de chargements avec des charges maximales appliquées équivalentes à 0.37, 0.48, 0.59 et 0.81Rs. La Figure I.29 présente les résultats des charges appliquées et des déplacements accumulés en tête de pieu en fonction du temps. Le pieu modèle présente un

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comportement stable au cours des trois premières séquences. Le déplacement permanent cumulé à la fin des trois séquences est très faible. Ce déplacement représente moins de 0.4 % du diamètre du pieu. La vitesse d’accumulation des déplacements permanents diminue avec le nombre de cycles. Cependant, pour la dernière séquence, le pieu présente un comportement instable car les déplacements permanents s’accumulent rapidement dès les premiers cycles. De plus, la vitesse d’accumulation des déplacements plastiques augmente avec le nombre de cycles. Doherty et Gavin (2013) mettent ainsi en relief l’influence des caractéristiques du chargement cyclique sur le comportement du pieu installé dans l’argile. Ils définissent également l’existence d’une valeur seuil de la charge appliquée en tête de pieu comprise entre 72 % et 85 % Rs. En dessous de cette valeur limite, le pieu présente un comportement stable, tandis qu’au-delà de cette valeur, le pieu présente un comportement instable. Cette valeur seuil ne peut être généralisée à tous les types d’argiles, elle dépend du type de sol et du mode d’installation du pieu.

Figure I.29 : Chargement appliqué en tête du pieu modèle et déplacement accumulés en fonction du temps pour chaque séquence de chargement (Doherty et Gavin ,2013)