Partie 1 : Télédétection 21
1.2 Méthodes non linéaires
utilisées pour du démélange, comme par exemple [103], basée sur la projection sur des
sous-espaces.
Il est possible de se référer à [73, 88, 89, 90] pour plus de références et de détails sur les
méthodes linéaires, ainsi qu’aux références dans les exemples cités.
1.2 Méthodes non linéaires
Dans certains cas, le modèle linéaire ne suffit pas à rendre compte de tous les phénomènes
radiatifs qui induisent le contenu de chaque pixel. Cela est le cas quand la lumière se réfléchit
sur au moins deux matériaux différents avant de remonter vers le capteur, c’est à dire quand il
y a plusieurs réflexions. Ce phénomène se produit lorsque l’on a des structures 3D sur la scène
(végétation, scènes urbaines...) [104] ou en présence de mélanges complexes ou fins ("intimate
mixtures", en anglais), c-à-d au niveau particulaire (cas par exemple des grains de sable...) [105].
Dans certaines conditions d’observation et pour certaines scènes, ce phénomène ne peut plus
être négligeable [73][104]. Ces réflexions multiples jouent notamment un rôle important dans
les scènes très rugueuses (non planes), ce qui est le cas pour les milieux qui nous intéressent,
c-à-d les milieux urbains.
Pour tenir compte de cette non-linéarité dépendant des données traitées il faut donc des
méthodes de traitement non linéaires. Il existe néanmoins moins de méthodes non linéaires que
linéaires dans la littérature et cela est essentiellement dû à la complexité des méthodes non
linéaires, mais aussi à la difficulté d’appréhender le modèle de mélange auquel on est confronté,
suivant l’application.
1.2.1 Sans modèle de mélange défini
La plupart des méthodes non linéaires existantes ne partent pas d’un modèle de mélange
défini, et encore moins d’équations physiques. Plusieurs de ces méthodes sont d’ailleurs basées
sur l’utilisation de réseaux de neurones, qui sont des méthodes ne nécessitant pas la connaissance
du modèle. Nous citons ici quelques exemples de travaux qui traitent de ce type de méthodes
non linéaires.
Dans [106] et [107] une méthode hybride (combinant une méthode linéaire, pour
l’initiali-sation, et une non linéaire) de démélange non linéaire est proposée pour mieux tenir compte des
non linéarités qui peuvent exister dans les mélanges à cause des réflexions multiples, et donc
dans le but d’avoir de meilleurs résultats qu’avec une méthode linéaire. Le démélange se fait en
deux étapes :
– La première étape est une méthode linéaire qui sert à trouver des valeurs
d’initialisa-tions, représentatives, pour l’étape suivante. Pour [106] les endmembers sont estimés par
l’algorithme AMEE (Automated Morphological Endmember Extraction) proposé par les
mêmes auteurs [108]. Finalement, les abondances sont trouvées avec la méthode FCLSU
(Fully Constrained Linear Spectral Unmixing) [74]. [107] utilise plutôt N-FINDR pour
l’extraction des endmembers puis l’algorithme OSP (Orthogonal Subspace Projection)
[109].
– La 2ème étape est une méthode non linéaire pour déterminer les abondances, elle utilise
un Perceptron Multi-Couche (MLP : Multi-Layer Perceptron).
Dans [106], la méthode est testée sur une image de scène avec végétation (présence de sol,
végétation au sol et arbres) tandis que [107] s’intéresse à des mélanges de minéraux. Dans les
deux cas la méthode non linéaire semble donner de meilleures performances qu’une méthode
linéaire.
On retrouve encore une utilisation des réseaux de neurones dans [110] pour cette
fois-ci des scènes urbaines multispectrales (9 bandes). Les endmembers sont extraits à partir de
pixels purs d’images à forte résolution. Ensuite deux méthodes sont proposées pour estimer les
abondances, une linéaire, des moindres carrés sans contrainte, et une non linéaire, basée sur
des réseaux de neurones. Des tests sont faits sur des images réelles dans le but de séparer 3
endmembers : vegetation, sol et surfaces imperméables. Les réseaux de neurones s’avèrent plus
efficaces d’après ce papier, car ils permettent de tenir compte de la non linéarité éventuelle des
mélanges.
Dans [111] on trouve une comparaison des performances de différentes méthodes non
li-néaires de démélange spectral (ou classification sub-pixellaire) : arbres de régression, modèles
adaptatifs ART (Adaptive Resonance Theory), Perceptron Multi-Couche (MLP). Les tests sont
faits sur des données synthétiques et montrent que le MLP, qui est d’ailleurs le plus utilisé (voir
[111] pour plus de détails sur les méthodes et pour les références), donne les meilleures
perfor-mances. Par contre il est plus difficile et plus long à implémenter (plus de paramètres à fixer,
apprentissage long...).
Un autre type de méthode est présenté dans [112], qui diffère complètement des réseaux
de neurones : Simplex Volume Maximization. C’est une extension de la méthode N-FINDR au
cas non linéaire, en considérant que ce n’est plus un simplexe mais une variété
2("manifold" en
anglais), un calcul de distances géodésiques adapté est donc utilisé, pour tenir compte de la non
linéarité des données. Le type de non-linéarité n’est pas précisé, l’article ne se base donc pas sur
un modèle bien défini mais considère juste que les pixels s’écrivent : x
i= F P
Mm=1
a
imρ
m,
où F est une fonction non linéaire continue bijective. C’est donc un mélange post-nonlinéaire
au sens de la SAS (voir chapitre "Etat de l’art en SAS"). L’algorithme, qui est testé sur des
données simulées et des données réelles avec des minéraux, semble donner de meilleurs résultats
qu’une méthode linéaire (N-FINDR suivi de FCLS).
2. En géométrie, une variété est un espace topologique abstrait, qui peut être "localement" vu comme (approximativement) euclidien de dimension n, n étant la dimension de la variété. Parmi les variétés les plus simples figurent les courbes et surfaces du plan et de l’espace euclidien.
31 1.2. MÉTHODES NON LINÉAIRES
Dans [105] on trouve encore un autre type de méthode : une approche basée sur un noyau
adaptatif. La méthode est une généralisation de l’algorithme FCLS [74] cité plus haut et est
appelée KFCLS (Kernel fully Constrained Least Squares). Un noyau est introduit dans le critère
à minimiser, avec un paramètre réglable qui dépend de la linéarité du mélange, le but étant
de tenir compte de la non linéarité des mélanges. La méthode est supervisée (elle nécessite
l’extraction préalable des endmembers) et permet donc d’estimer les abondances pour des
mélanges linéaires ou non linéaires à la fois. Elle permet notamment de détecter les pixels où
il y a non linéarité du mélange. L’image utilisée représente une scène côtière avec du sable,
de l’eau et de la végétation et, d’après les résultats de l’article, la non linéarité se situe au
niveau de la plage, et est donc introduite par le sable. Il est à noter que l’article ici s’intéresse
essentiellement à des mélange fins ("intimate") (voir aussi [113] des mêmes auteurs pour plus
de détails).
Toutes ces méthodes (voir aussi références citées dans les exemples de travaux cités), même
si elles ne sont pas basées sur un modèle de mélange précis, montrent néanmoins l’intérêt de
tenir compte de la non linéarité lors du démélange spectral. Dans des cas d’application où le
modèle est complexe et la non linéarité non définie clairement, ces méthodes peuvent avoir leur
intérêt. Dans certains cas on peut néanmoins modéliser le mélange, comme on va le voir dans
la suite.
1.2.2 Avec modèle spécifique : linéaire-quadratique ou bilinéaire
Certaines méthodes récentes proposent un modèle bilinéaire ou linéaire quadratique par
rapport aux spectres. Le modèle bilinéaire est un cas particulier du modèle linéaire quadratique,
lorsqu’il n’y a pas de termes au carré. Les méthodes basées sur ces modèles ont pour but de tenir
compte des possibles interactions entre les différents matériaux en présence de relief. Le cas le
plus traité dans la littérature est celui de scènes avec végétation [114][115]. On s’intéressera ici,
en plus des méthodes, aux modèles de mélange proposés, afin de voir par la suite l’intérêt de
notre approche basée sur des équations physiques ainsi que la différence avec le modèle physique
que nous proposerons. Cette différence réside surtout dans la manière de définir les coefficients
de mélange et les hypothèses les concernant.
Dans [116], par exemple, un modèle bilinéaire est proposé. Le cas étudié concerne un
mélange d’uniquement 2 endmembers et tient compte des réflexions de premier ordre entre
deux matériaux (avec les mêmes notations que précédemment) :
x=a
1ρ
1+a
2ρ
2+a
3ρ
1⊙ρ
2, avecX
m
a
m= 1, a
m≥0 (1.3)
où⊙ correspond à la multiplication terme à terme entre les 2 vecteurs.
a de l’ombre, et est donc supposé nul ailleurs, ce qui peut être faux
3. Une classe ombre est donc
détectée, représentée par le produit des spectres des deux matériaux.
La méthode de démélange utilisée est supervisée et se déroule en deux étapes :
– Déterminer les pixels purs de chaque classe de matériaux d’une manière supervisée
(ma-nuelle).
– Estimation des abondances par une méthode de moindres carrés avec contraintes.
L’article montre que le fait de tenir compte de l’existence de zones d’ombre dans lesquelles on a
des termes quadratiques, semble améliorer les résultats pour les zones sans ombre par rapport
aux méthodes linéaires. L’utilité des termes quadratiques est donc prouvée mais le choix du
modèle, notamment l’hypothèse de somme à 1 des abondances, n’est pas vraiment validée car
les données utilisées pour les tests sont générées suivant le modèle proposé.
On retrouve aussi la proposition d’un mélange bilinéaire dans [115]. Dans cet article le
cas particulier traité est celui des vergers. Contrairement au cas précédent, ici les abondances
(appelées aussi dans l’article fractions) des termes quadratiques sont considérées ’virtuelles’,
c.à.d. n’ayant pas d’existence physique dans la surface représentée par le pixel. Les auteurs
partent d’un modèle déjà proposé pour des scènes avec végétation [117][118], pour l’étendre en
se basant sur des simulations. Le premier modèle est donc le suivant :
x=c
1ρ
1+c
2ρ
2+c
3ρ
1⊙ρ
2, avecX
j
c
j=K, c
j≥0 eta
j= c
jK (1.4)
Les abondances sont ensuite définies par les a
j, ce qui donne la somme à 1. Dans ce
mo-dèle, l’abondance a
3est considérée virtuelle. D’après [115] cette considération induit une
sous-estimation des valeurs de a
1eta
2. Une autre définition des abondances (ou fractions) est alors
proposée dans l’article :
f
j=a
j+τ
jX
k