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II. 1.1.2.3 Les microleviers

II.3 D EVELOPPEMENT DE NANOTRANSISTORS A EFFET DE CHAMP

II.3.2 Méthodes de fabrication des nanofils

La réalisation des nanofils peut se diviser en deux méthodes [19]. La première consiste à réaliser les nanofils avec une approche dite montante (bottom-up) en utilisant la technique VLS (Vapor Liquid Solid) pour faire croître des nanofils cristallins [45]. C’est cette approche qui a été utilisée en premier pour la réalisation de nanofils pour la détection en phase liquide [40]. Très brièvement, une particule métallique est déposée sur un substrat, et lorsque les conditions de température et de pression sont atteintes, la particule catalyse la croissance d’un fil en absorbant les espèces dissociées des molécules incidentes de la phase vapeur, qui diffusent dans le métal vers l’interface inférieure de la goutte en contact initial avec le substrat, puis avec le fil où elles se condensent (figure 12 [45]). Cette technique permet de réaliser des nanofils monocristallins extrêmement fins, avec des flancs très peu rugueux. Leur diamètre dépend de la dimension de la particule métallique qui a servi à catalyser la croissance du nanofil, il est donc variable, ce qui induit des variations au niveau des caractéristiques électriques [46]. Ces nanofils sont ensuite détachés de leur substrat d’origine, récupérés puis déposés sur le substrat où seront réalisés les composants. Ils sont finalement alignés par différentes méthodes à l’aide de techniques de microfluidique et de champs électriques [47]–[51], puis connectés en leurs extrémités. En résumé, c’est une méthode lourde et difficilement compatible avec une fabrication reproductible à grande échelle.

Les transistors à base de nanofils de silicium sensibles aux ions (Si-nw-ISFET) sont des capteurs potentiométriques polyvalents. Ils ont été introduits par Cui et al en 2001 (équipe de Charles

Figure 12 : vue au MEB de nanofils de silicium obtenus par VLS à gauche, et schéma du principe de la technique VLS à droite.

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LIEBER à Harvard) [40], avec l’utilisation de nanofils obtenus par VLS déposés et alignés sur des substrats de silicium oxydés, et avec comme applications la mesure de pH, de streptavidine et d'ions calcium Ca2+. Pour la mesure du pH, la surface oxydée des nanofils de silicium est fonctionnalisée avec des molécules APTES ((3-Aminopropyl)triethoxysilane) qui ont la capacité de se protoner et de se déprotoner. Ce capteur a montré une réponse linéaire de 100 nS/pH (figure 13 [40]). Notons quand même, que pour les nanofils non fonctionnalisés, la réponse au pH n’est plus linéaire. Pour la seconde étude, les nanofils ont été fonctionnalisés avec de la biotine afin de caractériser l’accroche ligand-récepteur entre les molécules de biotine et de streptavidine. Des concentrations de 10 picomolaires de streptavidine ont ainsi été détectées. Pour finir, après avoir modifié la surface des nanofils en y immobilisant de la calmoduline, la possibilité de détecter la présence d’ions Ca2+ a été démontrée. Cet ion est important pour la contraction musculaire, la sécrétion de protéines et le développement cellulaire. Toutes ces caractérisations ont démontré d’emblée le potentiel de ses capteurs à base de nanofils. Ce principe de transistor à base de nanofils pour la détection en phase liquide a ensuite été repris par un nombre important d’équipes à travers le monde, et continue d’être développé aujourd’hui.

Cette même équipe a aussi démontré par la suite, qu’il est possible d’implanter des transistors à base de nanofils directement et indirectement dans des cellules vivantes, pour en mesurer l’activité électrique [52], [53]. Pour cela, des nanofils coudés, obtenus par croissance VLS ont été utilisés. L’angle formé par le nanofil a pu ainsi être inséré dans une cellule vivante (figure 14 [53]). Par la suite, lors d’un autre projet, un tube de SiO2 directement réalisé sur un nanofil posé à l’horizontale,

Figure 13 : a) schéma représentant un transistor à base de nanofil fonctionnalisé avec des APTES pour la mesure du pH ; b) mesure de conductance en fonction du pH, et en

insert vue au MEB du dispositif réalisé par Cui et al, cette image représente le dispositif, avec le nanofil contacté en ces deux extrémités.

a permis de sonder des cellules vivantes de façon un peu moins invasive que les nanofils coudés (figure 15 [52]). Ces quelques exemples de l’équipe pionnière dans le domaine des transistors à base de nanofils pour la détection en phase liquide sont très impressionnants, mais ont le désavantage d’être non reproductibles et incompatibles avec la fabrication de masse. L’utilisation de très fines pellicules d’oxyde de silicium comme couche de passivation pousse à s’interroger sur les courants de fuite et la durée de vie de tels capteurs.

Toujours dans le cadre de la réalisation de transistors à base de nanofils par approche montante, des équipes se sont orientées vers la fabrication de nanofils en matériaux polymères (figure 16 [54]).

Figure 14 : vue au MEB et schéma de la sonde réalisée par Tian et al, pour l’étude de cellules vivantes. Cellule

5 µm

a) b)

c)

Figure 15 : a) schéma et b) vue au MEB d’un transistor à base de nanofil de silicium doté d’un tube d’oxyde de silicium permettant de sonder des cellules vivantes, c) Variation de

conductivité du nanofil en fonction du temps après insertion dans un cardiomyocyte.

Tube en SiO2

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L’avantage est une baisse du coût de production, avec en contrepartie de moins bonnes caractéristiques électriques. Le silicium reste aujourd’hui le matériau privilégié car c’est le mieux maîtrisé du fait de l’expérience acquise avec l’essor de la microélectronique.

II.3.2.2 Approche descendante

La seconde méthode consiste à réaliser les nanofils avec une approche dite descendante (top-down) [19]. En 2003, quelques années après l’introduction des nanofils obtenus par croissance, des publications ont montré la possibilité de réaliser des nanofils avec une approche descendante (top- down), qui donne la possibilité de réaliser des capteurs de manière collective et bien plus reproductible [55]–[57]. Le grand désavantage de cette méthode, réside dans le fait qu’il est souvent nécessaire d’utiliser des plaquettes « silicium sur isolant » (SOI) très coûteuses. Ces plaquettes sont constituées de trois couches superposées : une couche en silicium en face arrière, épaisse et servant de support, une fine couche de silicium dans laquelle les composants seront réalisés, et entre les deux, une couche « enterrée » d’oxyde de silicium qui isole les composants du reste de la plaquette (figure 17).

Pour la méthode descendante, les techniques courantes de la microélectronique sont utilisées. L’emplacement des nanofils est défini par photolithographie ou lithographie électronique, engendrant ainsi une excellente reproductibilité des dimensions, et un positionnement très précis.

Figure 16 : vue au MEB d’un transistor à base de nanofil en polymère conducteur.

Figure 17 : schémas représentant une plaquette SOI. (à gauche : www.soitec.com, à droite : www.51touch.com)

La lithographie électronique atteint des résolutions extrêmement fines (quelques dizaines de nanomètres) mais les temps d’écriture sont extrêmement longs, ce qui rend son utilisation chère et incompatible avec la production de masse. La photolithographie par projection, utilisée dans l’industrie, permet des résolutions de quelques dizaines de nanomètres également, mais a l’avantage d’être rapide et compatible avec la production de masse. Après l’étape de lithographie, des gravures humides ou sèches réalisées jusqu’à l’oxyde enterré, transfèrent les motifs dans le silicium de la face avant. Les nanofils ont finalement l’orientation cristalline du substrat dans lequel ils sont réalisés. La manière la plus simple d’obtenir des nanofils par la méthode descendante, en utilisant un substrat SOI, est de réaliser un ruban de résine par lithographie, puis de le transférer dans le silicium par gravure ionique réactive, méthode utilisée par Gao et al par exemple (figure 18 [57]).

L’utilisation de substrats SOI a permis à des équipes de recherche d’utiliser la face arrière comme seconde grille. Ce fonctionnement à double grille engendre des sensibilités au-delà de la limite de Nernst [58]. Cependant, ces résultats apparemment supra-nernstien sont dus à une amplification de tension par couplage capacitif, la sensibilité intrinsèque du capteur restant toujours en dessous de la limite de Nernst [58]. Le tableau 1 recense les principaux avantages et inconvé-nients des approches montantes et descendantes, dans le cadre de la réalisation de transistors à base de nanofils.

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Tableau 1 : résumé des avantages et inconvénients des approches montantes et descendantes pour la fabrication de nanofils.

Approche montante Approche descendante

Réalisation

- Croissance des nanofils, récolte, dépôt, alignement et métallisations.

- Gravure directe du substrat

- Techniques de la technologie CMOS (lithographie, oxydation, gravures…)

Avantages

- Flexibilité pour le choix des matériaux. - Possibilité de doper le nanofil lors de la fabrication, et ainsi de faire varier le dopage dans le nanofil ou créer des jonctions.

- Possibilité de réaliser des nanofils de moins de 10 nm de diamètre si besoin. - Peut être utilisé sur substrats souples.

- Compatible avec la fabrication de masse. - Fiabilité et reproductibilité de la

fabrication.

- Précision de l’alignement et du nombre de nanofils entre les zones source et drain. - Différentes formes de section possibles (triangle, rectangle, trapèze…).

Inconvénients

- Variations du diamètre et de la longueur difficiles à contrôler.

- Demande des méthodes de positionnement et d’alignement très précises.

- Difficulté de contrôler précisément le nombre de nanofils entre source et drain. - Production de masse difficile.

- Cher (substrat SOI).

- Peu de choix pour les matériaux.

- Dimensions limitées par l’appareillage de lithographie.

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