• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE I : Etude bibliographique

5. Méthodes de prédiction de la durée de vie

Les industriels portent un intérêt majeur à la durée de vie des matrices polymères. Différentes approches de prédiction de la durée de vie ont été mises en place.

5.1. Modèles empiriques

5.1.1. Méthode Arrhénienne

Cette méthode a longuement été utilisée pour des polymères soumis à la thermo-oxydation. Cependant cette approche n’a pu être appliquée à toutes les conditions. En effet, lorsque le mécanisme de dégradation présente plusieurs processus avec des énergies d’activation différentes, cette loi n’est plus valable. Elle devient optimale pour des temps de vieillissement très longs afin d’écourter les durées des essais de vieillissement. De plus, la gamme de températures doit être assez large pour y déceler des effets non Arrhénien.

Cette méthode est basée sur l’hypothèse qu’il existe un principe d’équivalence temps- température exprimé par la relation :

𝒕𝑭(𝑻) = 𝒕𝑭𝟎. 𝒆𝒙𝒑

𝑬

𝑹𝑻 Eq. I - 14

L’utilisation de cette méthode implique la réalisation d’essais de vieillissement thermique accéléré. Les données ainsi obtenues permettent d’extrapoler les performances des matériaux à des températures plus basses.

Cette méthode suppose donc que l’on ne modifie pas les mécanismes de dégradation susceptibles de se produire lors de l’utilisation à long terme du matériau, dans le domaine de températures exploré.

La durée de vie tF correspond au temps au bout duquel une propriété d’usage P atteint une

valeur critique P1, appelée critère de fin de vie ou critère de déchéance (Figure 62).

tF0 est le coefficient pré-exponentiel (de même unité que tF).

E est l'énergie d'activation (en J.mol-1).

R est la constante des gaz parfaits (J.mol-1.K-1). T est la température absolue (en K).

65

Figure 62 : Evolution d’une propriété P en fonction du temps : t2= temps d’induction et t1=

durée de vie (t1 > t2).

Une fois le critère choisi et les essais de vieillissement accéléré effectués, la relation entre durée de vie et température d’exposition est portée sur un diagramme d’Arrhénius communément appelé profil d’endurance thermique (Figure 63).

Figure 63 : Principe de l'extrapolation Arrhenienne.

Cependant ce modèle ne permet pas de prédire de manière rigoureuse la durée de vie des matériaux [124, 125]. En effet,

 Il ne permet pas d’expliquer les phénomènes intrinsèques du matériau au cours de la fragilisation,

 Les paramètres tF0 et E de la loi d'Arrhenius n'ont pas de "sens physique" et sont liés

au couple matériau-environnement étudié,

 Il existe souvent des discontinuités dans le graphe d’Arrhénius notamment dans l’intervalle de températures exploré, c’est-à-dire dans l’intervalle d’extrapolation.

ln t1 ln t2 ln t3 ln t 1 𝑇1 1 𝑇2 1 𝑇3 1 𝑇

66 5.1.2. Méthode à facteur d’accélération

E. Richaud [59] a résumé cette méthode de la manière suivante : (x) heures de vieillissement accéléré correspondent à (FA.x) heures d’exposition naturelle, avec (FA) le facteur d’accélération.

Figure 64 : Principe de prédiction de la durée de vie par une méthode à facteur d’accélération [59].

Cette approche suppose que si les conditions de vieillissement accéléré sont convenablement choisies (température, pression partielle d’oxygène, etc.), c'est-à-dire si le vieillissement accéléré "simule bien" le vieillissement naturel, alors les courbes cinétiques de vieillissement accéléré et naturel sont homothétiques, et l'on peut définir un facteur d'accélération (FA) caractéristique des conditions de vieillissement accéléré choisies, tel que les durées de vie en vieillissement naturel (tN) et accéléré (tA) sont liées par une relation de proportionnalité [59] :

𝑭𝑨 = 𝒕𝑵

𝒕𝑨 Eq. I - 15

Cependant, cette méthode requiert que :

- Les données expérimentales coïncident avec les données simulées,

- On dispose d’une multitude de données expérimentales pour vérifier la représentativité des essais de vieillissement accéléré.

67 5.2. Méthode optimale de prédiction de la durée de vie : Modèle cinétique

Cette méthode a pour objectif de modéliser l’état du matériau aux échelles moléculaire, macromoléculaire et morphologique, puis d’utiliser des relations structure-propriétés pour en déduire les propriétés à l’échelle macroscopique.

Le modèle cinétique permet donc de simuler les effets de l’oxydation au cours du temps. Celui-ci est dérivé du schéma mécanistique le plus réaliste possible [126]. Depuis sa création, ce dernier est en constante évolution afin de décrire de la manière la plus précise possible les phénomènes mis en jeu pendant l’oxydation des matrices polymère [127-129]. Ce schéma, validé dans différentes conditions de températures et pressions partielles d’oxygène, est présenté ci-dessous :

PH+hν→P° + 1/2H2

POOH →2P° + γ2PC=O + γ1S

2POOH→P°+ POO° + γ2PC=O + γ1S

P°+O2→POO°

POO°+PH→POOH + P°

P°+P° → γ4P-P+ produits inactifs

P°+POO° →γ5POOP+ (1-γ5)POOH + prod in

POO°+POO° →[PO° °OP]cage+ O2

[PO° °OP]cage →POOP

[PO° °OP]cage →POH + PC=O

[PO° °OP]cage →2P° + 2γ2PC=O + 2γ1S

où, ri : est la vitesse d’amorçage radiolytique (mol.l-1.s-1),

ri = ɸ I où I est l’intensité de l’irradiation,

k1u, k61, k62, k63 : sont les constantes de vitesses des réactions unimoléculaires (s-1),

k1b…k60 : sont les constantes de vitesse des réactions bimoléculaires (l.mol-1.s-1),

Échelle macromoléculaire (Coupures, réticulations) Échelle moléculaire (Mécanismes de vieillissement) Échelle macroscopique (Propriétés mécaniques …) Échelle morphologique (Chimicristallisation, recuit) Amorçage Propagation Terminaison ri k1u k1b k2 k3 k4 k5 k60 k61 k62 k63

68 γ2, γ1, γ4 et γ5 : sont les rendements respectifs en carbonyles, coupures de chaînes, ponts

alkyle-alkyle et en ponts dialkylperoxydes dans les réactions considérées.

En absence d’irradiation, il s’agit d’un processus en «boucle fermée», amorcé par la décomposition des hydroperoxydes POOH en radicaux alkyles P°, transformés en radicaux

peroxy PO2° en présence d’oxygène, qui arrachent des atomes d’hydrogène du substrat

polymère PH pour reformer des hydroperoxydes POOH. Les constantes de vitesse de ces réactions ont été déterminées à partir des courbes de consommation d’oxygène à différentes températures et pressions partielles d’oxygène ou compilées de la littérature.

A partir du schéma précédent et en appliquant le formalisme classique de la cinétique chimique, on peut écrire le système d’équations différentielles suivant :

𝒅[𝑷°] 𝒅𝒕 = 𝒓𝒊+ 𝟐𝒌𝟏𝒖[𝑷𝑶𝑶𝑯] + 𝒌𝟏𝒃[𝑷𝑶𝑶𝑯] 𝟐− 𝒌 𝟐[𝑷°][𝑶𝟐] + 𝒌𝟑[𝑷𝑶𝑶°][𝑷𝑯] − 𝟐𝒌𝟒[𝑷°]𝟐− 𝒌 𝟓[𝑷°][𝑷𝑶𝑶°] + 𝟐𝒌𝟔𝟑[𝑷𝑶°°𝑶𝑷]𝒄𝒂𝒈𝒆 Eq. I - 16 𝒅[𝑷𝑶𝑶°] 𝒅𝒕 = 𝒌𝟏𝒃[𝑷𝑶𝑶𝑯]𝟐+ 𝒌𝟐[𝑷°][𝑶𝟐] − 𝒌𝟑[𝑷𝑶𝑶°][𝑷𝑯] − 𝒌𝟓[𝑷°][𝑷𝑶𝑶°] − 𝟐𝒌𝟔𝟎[𝑷𝑶𝑶°]² Eq. I - 17 𝒅[𝑷𝑶𝑶𝑯] 𝒅𝒕 = −𝒌𝟏𝒖[𝑷𝑶𝑶𝑯] − 𝟐𝒌𝟏𝒃[𝑷𝑶𝑶𝑯] 𝟐+ 𝒌 𝟑[𝑷𝑶𝑶°][𝑷𝑯] + (𝟏 − 𝜸𝟓)[𝑷°][𝑷𝑶𝑶°] Eq. I - 18 𝒅[𝑷𝑶°°𝑶𝑷]𝒄𝒂𝒈𝒆 𝒅𝒕 = 𝒌𝟔𝟎[𝑷𝑶𝑶°]² − (𝒌𝟔𝟏+ 𝒌𝟔𝟐+ 𝒌𝟔𝟑)[𝑷𝑶°°𝑶𝑷]𝒄𝒂𝒈𝒆 Eq. I - 19 𝝏𝑶𝟐 𝝏𝒕 = 𝑫 𝝏²[𝑶𝟐] 𝝏𝒙² − 𝒌𝟐[𝑶𝟐][𝑷°] + 𝒌𝟔𝟎[𝑷𝑶𝑶°]² Eq. I - 20

D étant le coefficient de diffusion d’oxygène dans la phase amorphe (en m2.s-1), et [O2] étant

la concentration d’oxygène.

En surface du matériau (x = ±L, 2L étant l’épaisseur de la plaque), [O2] obéit à la loi d’Henri,

c’est-à-dire qu’à tout instant on considère que la dissolution de O2 en surface du matériau est

69 [O2] = [O2]S = SO2 . PO2

SO2 est le coefficient de solubilité de l'oxygène dans la phase amorphe (mol.l-1.Pa-1),

PO2 est la pression partielle d'oxygène dans l’environnement extérieur (Pa).

Les conditions initiales du système précédent sont :

A t = 0∀x, [P°] = [POO°] = 0; [POOH] = [POOH]0 ; [PH] = [PH]0et [O2] = [O2]0 = SO2 . PO2

Ce schéma permet ainsi, selon le choix des conditions de vieillissement (T, PO2, etc.), de

générer toutes les formes de courbes cinétiques observées expérimentalement, y compris celles qui, classiquement, étaient considérées comme les plus difficiles, voire impossibles, à simuler jusqu’alors.

Le but est de simuler le comportement à long terme du matériau pour prédire sa durée de vie dans les conditions d’usage.

Documents relatifs