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Chapitre 2 – Caractérisations instrumentale et sensorielle de surface

II. Méthodes d’analyse complémentaires

Pour compléter les mesures de l’angle de contact plusieurs autres méthodes d’analyse ont été utilisées, notamment la spectroscopie infrarouge permettant d’étudier la composition chimique de surface, la mesure de perte insensible en eau et de pH surfacique permettant d’évaluer des paramètres physiologiques de la peau mais aussi la microscopie optique et numérique permettant d’étudier la surface des modèles non-biologiques.

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II.1. Spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier

La mesure de spectroscopie infrarouge est basée sur la capacité des molécules à absorber certaines longueurs d’onde du rayonnement infrarouge, grâce à l’interaction entre le rayonnement et la matière. L’énergie du rayonnement absorbée par une molécule dans l’infrarouge moyen correspond à la fréquence de vibration de certaines liaisons chimiques de cette molécule (Stuart 2005). Il existe différents modes de vibrations des liaisons chimiques : les modes d’élongation et de déformation (Figure 18), dont les énergies sont caractéristiques du type de liaison.

Figure 18. Différents modes de vibrations : exemple des vibrations des groupements CH2 d’une

molécule (extrait de (Dalibart and Servant 2000))

Ainsi, on obtient le spectre infrarouge d’un échantillon (liquide, solide, gazeux, sous forme de poudre …) traversé par un rayonnement infrarouge polychromatique en déterminant les longueurs d’onde absorbées, spécifiques des fonctions chimiques présentes dans l’échantillon en question.

Dans le cas de notre étude de surface, un spectromètre infrarouge à transformée de Fourier en réflexion totale atténuée a été utilisé (appareil Frontier (Perkin-Elmer, Waltham, Etats-Unis), piloté par le logiciel Spectrum (version 10.03.08.0135)). Quel que soit l’échantillon à analyser, celui-ci était placé directement au contact d’un cristal de sélénium de zinc de fort indice de réfraction (n = 2,43) (Figure 19), et maintenu avec une force de 20 UA pour assurer un bon contact entre la surface à analyser et le cristal.

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Figure 19. Principe de la mesure en réflexion totale atténuée (adapté de (Dalibart and Servant 2000)) L’analyse est réalisée sur la gamme de longueurs d’ondes allant de 650 cm-1 à 4000 cm-1. 4 spectres sont enregistrés et moyennés lors de chaque acquisition. L’analyse des spectres obtenus est également réalisée sur le logiciel Spectrum.

Cette technique non invasive a permis de caractériser la composition chimique de surface des modèles biologiques et non-biologiques, et de la peau in vivo. Elle a été utilisée sur peau nue mais aussi après application de produits cosmétiques, permettant d’étudier la composition chimique du film résiduel. Les produits présentés dans le Tableau 7 ont été utilisés afin de comparer les modèles non-biologiques et la peau in vivo et les produits présentés dans le Tableau 9 ont été caractérisés sur modèles non-biologiques.

Utilisée sur peau nue, cette technique a également permis de caractériser l’organisation des bicouches lipidiques du SC. En effet, les longueurs d’onde de vibration des groupements CH2 des chaines lipidiques sont très sensibles à leur organisation latérale, notamment le mode de vibration d’élongation symétrique νsymCH2 (Figure 18, (Mendelsohn, Flach, and Moore 2006)), dont la gamme de fréquences associées est comprise entre 2847 cm-1 et 2855 cm-1. Plus la longueur d’onde associée est élevée, plus les bicouches sont désorganisées. Ceci a notamment été démontré par Mendelsohn, Flach et Moore, à travers l’étude de l’organisation des bicouches lipidiques du SC en fonction de la température (Figure 20, (Mendelsohn, Flach, and Moore 2006)). Deux transitions sont observées : une première transition correspond au passage de l’organisation orthorhombique à hexagonale pour des longueurs d’onde autour de 2849.5 cm-1, puis la deuxième transition vers l’état le plus désordonné a lieu vers 2852 cm-1. Le suivi de cette longueur d’onde donne donc des indications quant à l’organisation des bicouches lipidiques.

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Figure 20. Evolution de la longueur d’onde νsymCH2 en fonction de la température et de l’organisation

latérale des bicouches lipidiques (adapté de (Mendelsohn, Flach, and Moore 2006)). II.2. Perte insensible en eau et pH surfacique

Les mesures de PIE et de pH surfacique ont permis de déterminer des caractéristiques physiologiques de la peau et de caractériser sa fonction barrière (Elkeeb et al. 2010). Ces techniques ont essentiellement été utilisées ex vivo, avant et après exposition aux polluants atmosphériques.

La mesure de PIE est basée sur la mesure de l’évaporation de l’eau à sa surface, en utilisant la loi de Fick :

Où m : eau transportée en g ; A : surface en m², t : temps en h, D : constante de diffusion D = 0.0877 g/m.h.mmHg ; p : pression de vapeur de l’atmosphère en mmHg ; x : distance de la surface de la peau au point de mesure en m.

L’appareil utilisé, le Tewamètre® TM 300 (Monaderm, Monaco, France), contrôlé par le logiciel CK_Multi Probe (Courage & Khazaka Electronic GmbH, Cologne, Allemagne), est en géométrie ouverte et possède deux capteurs permettant de mesurer la PIE, un capteur de température et un capteur d’humidité (Elkeeb et al. 2010), placés dans un cylindre creux (Figure 21). Ce type de tewamètre en géométrie ouverte nécessite des conditions ambiantes standardisées.

129 Figure 21. Représentation du principe de la mesure de PIE à l’aide d’un Tewamètre® (issue de

(“Tewameter® TM 300 - Courage - Khazaka Electronic, Köln” 2018)

Pour réaliser la mesure de PIE, le Tewamètre® a été utilisé en mode continu : une fois la sonde correctement positionnée sur la surface à analyser, la mesure est déclenchée et une valeur de PIE est mesurée toutes les secondes, durant 60 secondes. La valeur de PIE reportée correspond à la moyenne des mesures réalisées entre 15 et 30 secondes.

La sonde Skin-pH-mètre® PH905 (Monaderm, Monaco, France) pilotée par le même logiciel CK_Multi Probe a été utilisée pour les mesures de pH surfacique. Il s’agit d’une sonde de pH ayant la particularité d’être plane, pour assurer un bon contact avec la surface de la peau. Toutes les mesures de pH ont été réalisées au minimum trois fois par surface analysée, et la sonde a été rincée à l’eau distillée et essuyée avec du papier doux entre chaque utilisation.

L’ensemble des mesures biométrologiques ont été réalisées à température ambiante (entre 18°C et 22°C) et à un taux d’humidité contrôlé (50%). Lors des mesures sur explants de peau, le Tewamètre®, préalablement nettoyé avec un chiffon doux, était toujours utilisé avant le Skin-pH-mètre® afin d’éviter de mouiller la peau par la sonde pH.

II.3. Caractérisation du microrelief des modèles non-biologiques

Les microscopies optique et numérique ont permis d’étudier la surface et le microrelief des modèles non-biologiques.

Le microscope optique Leica (DMLP/DC 300, Leica Microsystems, Heerbrugg, Suisse) a été utilisé en mode transmission, au grossissement x50, en lumière non-polarisée et polarisée. Les images microscopiques sont enregistrées par le logiciel IM 1000. Cette technique a notamment été utilisée pour évaluer l’homogénéité du dépôt de lipides sur la SFS (en lumière non-polarisée LNP et polarisée LP) (Figure 22), et leur possible cristallisation (en LP).

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Figure 22. Exemple d’images microscopiques obtenues (transmission, Gx50) (a) support Dragonskin20® moulé sans lipides, (b) SFS avec un dépôt de lipides homogène (c) SFS avec un

excès de lipides dans les sillons du microrelief

Le microscope numérique utilisé est un VHX-1000 (Keyence Corporation, TSE, Osaka, Japon), équipé d’une lentille VH-Z100R au grossissement x300. Les images en trois dimensions ont été enregistrées en transmission et assemblées pour obtenir des images de 1600 x 1600 pixels (Figure 23). Ces analyses numériques ont permis de caractériser plus finement la rugosité des modèles non-biologiques. Les profils de rugosité et les paramètres associés ont été calculés à partir des images 3D, selon la norme ISO 25178, grâce au logiciel Mountains Map® (Digital Surf SARL, Besançon, France) (Tableau 8).

Figure 23. Exemple d’images obtenues en microscopie numérique (a) SFS (b) VS Tableau 8. Paramètres de rugosité de surface (ISO 25178)

Paramètres de rugosité Unité Définition

Sq µm Hauteur moyenne quadratique

Ssk / Facteur d’asymétrie

Sp µm Hauteur maximale des pics

Sv µm Profondeur maximale des vallées

Sz µm Hauteur maximale

Sa µm Hauteur moyenne arithmétique

(a) (b) (c)

LNP

LP

131 Ainsi, à partir des méthodes instrumentales décrites précédemment, les modèles biologiques et non-biologiques ont pu être caractérisés de façon complète d’un point de vue chimique, physico-chimique et topographique. Pour compléter cette caractérisation instrumentale, des méthodes de caractérisation sensorielle ont également été utilisées, notamment pour l’évaluation du film résiduel de produits cosmétiques. Ces méthodes sont présentées dans le paragraphe suivant.