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Méthodes d’étude du transport du glucose

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I. Introduction bibliographique

5) Méthodes d’étude du transport du glucose

De nombreuses pathologies sont associées à des anomalies du métabolisme du glucose ou à des perturbations de son transport, comme par exemple le diabète de type 2 ou encore les ischémies myocardique ou cérébrale (Cefalu, 2008). La prévalence du diabète est en nette augmentation dans les pays industrialisés et les nombreuses complications qui lui sont associées en font un véritable problème de santé publique (Radziuk, 2000). Le stade qui précède l'apparition des signes cliniques du diabète de type 2 est appelé stade pré-diabétique. Il est caractérisé par un état d’insulinorésistance, dont le signe majeur est un défaut de transport

du glucose en réponse à l'insuline, dans les organes insulinosensibles, tels que le cœur, les muscles squelettiques et le tissu adipeux. La détection précoce de cet état, via l’étude du transport du glucose, permettrait une meilleure prise en charge des patients mais aussi un meilleur suivi de leur état métabolique. Plusieurs techniques ont alors été proposées pour cette mesure.

1. Spectroscopie à résonance magnétique

La spectroscopie à résonance magnétique ou MRS (Magnetic Resonance Spectroscopy) est une technique analytique se basant sur les mêmes principes que l’imagerie par résonance magnétique : l’analyse des signaux électromagnétique provenant de certains noyaux atomiques dont le spin nucléaire a été placé dans un champ magnétique. Quand l’imagerie par résonance magnétique utilise ces informations afin de reconstruire des images en deux ou trois dimensions, la spectroscopie par résonance magnétique s’en sert pour identifier et de quantifier la formation et la dégradation de molécules d’intérêt au sein du volume étudié. La MRS a permis d’explorer les mécanismes de la résistance à l’insuline et de l’altération du transport du glucose. Cette technique a par exemple permis de mettre en évidence, dans le muscle squelettique humain, un défaut de synthèse du glycogène chez des individus résistants à l’insuline, suggérant ainsi un défaut de transport du glucose et/ou de la phosphorylation (Roden and Shulman, 1999). Par la suite cette technique a permis de confirmer le défaut de transport du glucose stimulé par l’insuline dans le muscle squelettique mais aussi les mécanismes cellulaires conduisant à ce défaut de transport (pour revue (Petersen and Shulman, 2006; Shulman, 2004)). Si la MRS permet des études poussées sur les flux de métabolites et a permis de grandes avancées dans la compréhension de la pathogenèse de la résistance à l’insuline, elle est toutefois inapplicable à plus grande échelle de par sa complexité.

2. Imagerie PET

L'utilisation de radiotraceurs permet l'étude in vivo de l'utilisation du glucose dans différents tissus. Le plus connu de ces traceurs est sans doute le FDG marqué au fluor 18 ([18F]-2-fluoro-2-deoxy-D-glucose). Comme le glucose, il entre dans la cellule via les GLUT, puis il est phosphorylé par l'hexokinase. Toutefois, contrairement à ce dernier il n'est pas pris en charge par la glucose-6-phosphatase et va donc rester piégé dans la cellule sous sa forme phosphorylée (Gallagher et al., 1978). Le FDG est utilisé couramment en cardiologie, en neurologie et surtout oncologie où sa capacité à s'accumuler permet de refléter la consommation de glucose des cellules d'intérêt. Cependant la captation de FDG représente à la fois le transport du glucose et sa phosphorylation et ne permet pas en l'état de s'intéresser à la seule étape du transport du glucose.

Le 3OMG (3-O-methyl-D-glucose) est un traceur pur du transport du glucose. Il rentre dans les cellules par les GLUT mais n'est pas ensuite phosphorylé, ainsi il en ressort rapidement par les mêmes transporteurs (Csaky and Wilson, 1956). L'étude de la captation du 3OMG permet de s'intéresser uniquement au transport du glucose. Marqué au carbone 11, le 3OMG a permis d'étudier in vivo le transport du glucose dans le cerveau par exemple (Feinendegen et al., 1986). Cependant le carbone 11 a une période très courte de 20 minutes, limitant son utilisation à proximité d’un cyclotron médical, son lieu de production. Le 3OMG a par la suite été marqué au carbone 14. Malgré sa demi-vie particulièrement longue de 5000 ans, des études réalisées chez l'homme ont permis de mettre en évidence une anomalie du transport du glucose en réponse à l'insuline dans le muscle squelettique de patients diabétiques (Bonadonna et al., 1996, 1993). Grâce à un modèle mathématique il est possible de modéliser les échanges du traceur entre différents compartiments biologiques (plasma et tissus) et ainsi d'évaluer le transport du glucose et sa modulation par l'insuline (Bertoldo et al., 2005).

Par la suite une méthode "triple-traceur" a été mise au point. Grâce à l'utilisation conjointe de [15O]H2O, [11C]3OMG et 18FDG en imagerie PET il est possible de mesurer à la fois le débit sanguin, le transport du glucose et à sa

phosphorylation respectivement (Bertoldo et al., 2006). Cette technique permet d'identifier les différentes cinétiques mises en jeu dans le métabolisme du glucose et leur modulation par l'insuline. L'application de cette technique triple-traceur a permis de montrer que la phosphorylation, mais surtout le transport du glucose en réponse à l'insuline était sévèrement altéré chez les patients diabétiques de type 2 (Goodpaster et al., 2014).

Compte tenu de leurs périodes respectives, ni le [11C]3OMG, ni le [14C]3OMG ne sont utilisables en clinique. De plus les études en imagerie PET utilisées dans ces protocoles nécessitent toutes le maintien du patient sous clamp euglycémique.

3. Le 6DIG

Le 6-déoxy-6-iodo-D-glucose ou 6DIG est un analogue du glucose, radiomarqué à l’iode 123 (R: 159 keV, T1/2 : 13,2h) ou 125 (R: 27 keV, T1/2 : 59,9j). Il a été développé au sein du laboratoire "Radiopharmaceutiques Biocliniques" dans l'optique de développer une méthode permettant l'évaluation du transport du glucose in vivo. Le radiomarquage à l'iode 123 ou 125 permet la détection du traceur en imagerie SPECT (Single Photon Emission Computed Tomography). L'iode 125 avec sa longue demi-vie présente un avantage pratique en recherche, évitant ainsi Des marquages répétés de la molécule. L'iode 123, avec une demi-vie de 13,2 heures est lui facilement utilisable en routine clinique.

Le 6-DIG a été sélectionné à partir de différents analogues de la molécule de glucose, marqués à l’iode 123 sur différentes positions (Koumanov et al., 1996; Perret et al., 2004). Ils ont été étudiés dans différents modèles in vitro et in vivo : cardiomyocytes de rats, érythrocytes humains en suspension, cœur de rat isolé et biodistribution chez la souris (Henry et al., 1995). Les analogues iodés en position 1, 2, 3, 4 et 5 de la molécule de glucose n'ont pas présenté d'interactions avec le transporteur du glucose, mais le 6-deoxy-6-iodo-D-glucose ou 6DIG, a montré un comportement similaire à celui du 3OMG, le traceur du transport du glucose de référence. Le 6DIG entre dans les cellules via les transporteurs du glucose mais n'est pas substrat de l'hexokinase. Non métabolisé à l'intérieur de la cellule, il ressort alors par le même transporteur. (Henry, Koumanov, et al., 1997). De plus,

il a été montré que le transport du 6DIG est augmenté par l'insuline (Henry, Tanti, et al., 1997). Étudié sur de nombreux modèles biologiques, le 6-DIG a été validé comme traceur pur du transport du glucose.

La 6DIG a ensuite été évaluée dans une étude de biodistribution, sur des souris saines et diabétiques, avec ou sans stimulation à l'insuline (Perret et al., 2003). Il a alors été montré que le transport du 6DIG était significativement augmenté dans les tissus sensibles à l'insuline, après stimulation par cette dernière, chez les souris saines, mais pas chez les souris diabétiques. Ces résultats se retrouvent dans une autre étude mettant en œuvre des rats rendus insulinorésistants par un excès de fructose dans l'alimentation, sous clamp euglycémique hyperinsulinémique (Perret et al., 2007). Grâce à un modèle mathématique multi-compartimental il a été possible de calculer les coefficients de transport du 6DIG, du sang vers différents organes, sensibles ou non au glucose. L'étude de ces coefficients de transfert permet de s'intéresser à la dynamique du transport du traceur. Cette modélisation a permis de montrer que le cœur et le diaphragme étaient les organes où l'insuline induisait les plus fortes variations sur les paramètres du modèle. Ces résultats font ainsi du cœur l'organe le plus intéressant pour l'étude des variations de transport du glucose, dans l'insulinorésistance notamment, in vivo et en imagerie SPECT, grâce au 6DIG.

Grâce à la modélisation mathématique il est possible d'utiliser les données biologiques obtenues de manière expérimentale afin de quantifier l'IR. Un modèle mathématique plus simple, ainsi qu'une méthode de détection externe de la radioactivité ont alors été développés afin de pouvoir envisager l'utilisation de ce traceur en pratique clinique (Briat et al., 2007; Slimani et al., 2002). Dans cette publication se retrouve pour la première fois la méthodologie utilisée dans ce travail de thèse. Il s'agit d'un protocole en deux phases d'acquisition de la radioactivité après injection du 6-DIG, une en condition basale, et une après stimulation par l’insuline. La radioactivité est détectée de manière externe grâce à une gamma caméra et permet d'obtenir une cinétique cardiaque et une cinétique sanguine. L'analyse des données dans un modèle mathématique à 3 compartiments permet de calculer les coefficients de transfert du traceur dans le

cœur dans les deux conditions. L'insuline augmentant le coefficient de transfert du traceur dans un cœur sain, la comparaison des coefficients de transfert avec ou sans insuline chez un même individu permet le calcul d'un ratio représentatif de l'effet de cette dernière (Briat et al., 2007). Cette étude a montré pour la première fois la faisabilité de la mesure de l'IR cardiaque in vivo.

Ces points de méthodologie ont par la suite été adaptés à l'imagerie du 6DIG à l'aide d'une gamma-caméra dédiée au petit animal. Ce dispositif permet de suivre la radioactivité dans le cœur alors que l'activité sanguine est obtenue grâce à des prélèvements sanguins, le tout en condition basale et en présence d'insuline. Cette étude a montré la capacité de ce protocole à calculer un index d'insulinorésistance cardiaque appelé index R. Ce dernier permet de discriminer un groupe de rats sains d'un groupe de rats insulinorésistants (Vollaire, 2010). Un index d'IR a également été obtenu pour le muscle squelettique mais la modélisation de ce dernier nécessite cependant un temps d'acquisition plus important. Les index d'IR pour le muscle squelettique et le cœur obtenus au cours de cette étude corrèlent significativement avec le GIR (Glucose Infusion Rate). Parallèlement à ces travaux, le 6DIG a été transféré en clinique dans le cadre d'une phase I-IIa suite à une optimisation du protocole et de la modélisation mathématique. La principale optimisation repose sur l'obtention de cinétiques sanguines sans avoir recours aux prélèvements. Ceci est permis grâce au traitement des séquences d'image par une méthode d'analyse factorielle permettant d'isoler la cinétique sanguine directement sur ces dernières. La transposition de la méthodologie d'analyse factorielle des séquences d'image aux études précliniques a été évaluée (Henri, 2011).

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