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Méthode de recherche : une recherche qualitative

Les recherches réalisées dans le cadre de cette thèse s’inscrivent dans une démarche qualitative. Elle correspond à une « palette de techniques interprétatives pour décrire, décoder, traduire

ou du moins saisir la signification et non la fréquence d’un phénomène donné »

(Maanen, 1979, p. 520). Il s’agit de se concentrer sur les sujets, sur la compréhension de l’objet étudié dans son contexte. On cherche à savoir « comment » et « dans quel but ». On s’intéresse à la description de l’individualité d’un phénomène. On considère que la connaissance est un phénomène construit socialement. La recherche qualitative se distingue alors d’une méthode quantitative dans la mesure où elle vise la profondeur et non pas l’universalité et l’objectivité. Elle cherche à étudier des situations naturelles et spécifiques (Giordano, 2003 ; Hlady Rispal, 2002). Elle est ici particulièrement appropriée, car elle permet de décrire l’usage du capital humain par les cabinets de conseil, mais aussi la représentation des acteurs du capital humain, des outils utilisés afin de le développer à travers la prise en compte de la richesse des mots. Les différentes données qualitatives ont l’avantage de proposer des descriptions et des explications riches et fondées dans le contexte spécifique étudié. Elles offrent au chercheur la possibilité d’aller au-delà de ses a priori et des cadres théoriques initiaux (Huberman et Miles, 2003). Les mots ont un caractère « concret », « évocateur » qui est bien plus convaincant que des chiffres (Huberman et Miles, 2003). Cette méthode permet aussi de comprendre notre objet d’étude dans sa globalité, à l’aune des expériences, mais aussi de l’interprétation des acteurs interrogés au sein de l’organisation. En effet, Yin (2015) distingue cinq caractéristiques d’une recherche qualitative qui correspondent également à notre travail : (1) l’étude de la signification des comportements humains dans un contexte réel, (2) l’étude des perceptions des individus qui participent à une étude, (3) la description des éléments du contexte qui peuvent influencer les perceptions, (4) la mise en évidence des concepts existants ou nouveaux qui permettent de mieux comprendre et d’analyser les comportements humains en société et, enfin (5) la reconnaissance de la pertinence de l’utilisation de différentes sources de données.

Dans le cadre de notre travail doctoral, les sources de nos données sont multiples (cf. Tableau 5). Ainsi, pour étudier l’utilisation du capital humain par les consultants, les données ont été recueillies en ligne et donc directement sur les sites des cabinets de conseil. Concernant l’étude de l’université de Bordeaux, nous avons eu recours pour nos deux autres articles à l’observation non participante, à la réalisation d’entretiens semi-directifs et à des données secondaires. La singularité de la démarche repose dans la nature de notre terrain qui se

confond avec notre environnement professionnel direct pouvant conduire à un risque de dissonance cognitive (Goy, 2008). Cette posture semble se rapprocher du statut d’observateur- participant des travaux de Gioia et al. (1994). Elle est néanmoins à relativiser en raison de l’intérêt porté par notre recherche pour la dimension organisationnelle et notre rattachement administratif en tant qu’attachée temporaire d'enseignement et de recherche à une structure au sein de laquelle il n’y a pas eu d’entretien. Aussi, comme Musselin (2001) qui regrette le faible traitement des universités comme de véritables objets de recherche par les chercheurs on considère que « le risque de proximité avec l’objet observé n’est pas plus grand quand un

universitaire regarde ses collègues que lorsqu’il travaille sur les classes moyennes (auxquelles il appartient tout autant) ou que lorsqu’une femme sociologue analyse la situation des femmes actives » (p. 15). Une période d’immersion d’un peu plus d’un an au sein du pôle Ressources

Humaines et Développement Social nous a permis d’observer directement le contexte et d’avoir une meilleure compréhension du fonctionnement de l’université. Elle a aussi facilité la réalisation des entretiens avec les différents acteurs.

Nos deuxième et troisième articles, réalisés au sein de l’université de Bordeaux constituent donc une étude de cas. Cette dernière ne peut être considérée comme une technique de collecte de données en soi, mais représente une approche méthodologique constituée de multiples dispositifs de collecte de données (Barlatier, 2018). Elle étudie un phénomène contemporain dans son contexte réel quand les frontières entre phénomène et contexte ne sont pas clairement évidentes et pour laquelle différentes sources de données sont mobilisées (Yin, 2014). Elle vise ainsi à intégrer le contexte à travers les circonstances temporelles et sociales dans l’analyse du phénomène étudié (Gombault, 2005). Stake (1995) distingue trois types d’étude de cas : l’étude de cas instrumentale, intrinsèque et collective. L’étude de cas instrumentale correspond à la situation où le cas présente un intérêt secondaire, joue un rôle de soutien et facilite la compréhension d’autre chose. En revanche, selon Stake (1994), l’étude de cas instrumentale vise à voir et comprendre tout ou partie d’un problème. Cette approche tend à résoudre un problème ou à contribuer à une théorie. Le cas est donc accessoire, c’est un instrument qui va servir à un objectif supérieur. Le cas intrinsèque est étudié en profondeur car il est intéressant pour lui-même. Il vise une meilleure compréhension du phénomène incarné dans le cas pour un cas particulier ou unique pour le chercheur sans volonté d’en généraliser les résultats. Pour autant, un même cas intrinsèque peut devenir instrumental car il peut être intéressant sous l’éclairage d’une perspective théorique spécifique (Verstraete, Néraudau et Jouison- Laffitte, 2018). Une direction instrumentale peut alors être prise par un cas initialement

intrinsèque. Stake (1994) considère que ces deux types d’études de cas peuvent se combiner. Effectivement, dans le cadre de nos travaux nous nous intéressons principalement au capital humain. Néanmoins, chaque contexte présente également un intérêt au regard de l’état de l’art et d’une perspective néo-institutionnelle. En ce sens, le cas qui était dans un premier temps instrumental devient aussi intrinsèque. Le cas collectif, quant à lui, implique l’étude de plusieurs cas simultanément ou séquentiellement afin de pouvoir produire des résultats généralisables.

L’ensemble de ces données a fait l’objet d’une analyse de contenu en mobilisant des logiciels différents. Lasswell est généralement considéré comme l’initiateur de l’analyse de contenu. Cette dernière a évolué au fil du temps et reste la technique d’analyse la plus connue pour les données qualitatives. Elle correspond à « un ensemble disparate de techniques » (Henry et Moscovici, 1968, p. 36) et ne fait donc pas l’objet d’une définition précise. En effet, Berelson en 1952 (cité par Bardin, 2013, p. 14), l’un des pionniers de l’analyse de contenu, la considère comme « une technique de recherche pour une description objective, systématique et

quantitative du contenu manifeste des communications, ayant pour but de les interpréter ».

Bardin (2013, p. 58) propose une définition plus complète et plus souple « un ensemble de

techniques d’analyse des communications visant, par des procédures systématiques et objectives de descriptions du contenu des messages, à obtenir des indicateurs (quantitatifs ou non) permettant l’influence de connaissances relatives aux conditions de production, de réception (variables inférées) de ces messages ».

Notre premier article a fait l’objet d’une analyse lexicale de la présentation de l’offre de service relative au capital humain proposé par vingt-cinq cabinets de conseil sur leur site Internet. Afin de faciliter cette analyse, nous avons utilisé le logiciel Tropes. Ce logiciel permet notamment de repérer et de dénombrer les occurrences et les co-occurrences du corpus en fonction d’un lexique construit par le chercheur au regard du sujet de la recherche.

Une analyse lexicale a également été réalisée dans le cadre de notre deuxième article pour identifier la richesse et la nature du vocabulaire utilisé dans le discours. L’analyse a donc été effectuée par la statistique textuelle grâce au logiciel Alceste (Analyse des Lexèmes Co- occurrents dans un Ensemble de Segments de Texte). Cette démarche développée en 1986 par Max Reinert repose sur une méthode de classification descendante hiérarchique qui vise à fractionner le texte de façon successive en différentes unités pour en extraire des classes de mots représentatives. Il ne s’agit pas de « représenter la forme logique d’une représentation

sous-jacente à un ensemble de propositions, mais à « cartographier » les principaux […] « lieux communs » sur lesquels ce monde du discours se construit simultanément avec celui des énonciateurs » (Reinert, 1999, p. 68). Ce logiciel a pour avantage de réaliser une analyse par la

quantification qui permet alors d’en dégager les structures les plus significatives.

Enfin, notre troisième article a fait l’objet d’une analyse thématique qui consiste à « repérer

des ‘noyaux de sens’ qui composent la communication et dont la présence ou la fréquence d’apparition pourront signifier quelque chose pour l’objectif analytique choisi »

(Bardin, 2013, p. 137). Afin de réaliser cette analyse, le logiciel NVivo 11 a été utilisé. Il représente une aide à l’analyse et est conçu selon une approche manuelle de « l’analyse papier- crayon » (Deschenaux et Bourdon, 2005).

La collecte des données pour ces trois articles a été stoppée à l’atteinte de la saturation théorique (Glaser et Strauss, 1967) ; moment où les informations recueillies deviennent redondantes.

Le Tableau 5 présente une synthèse des données, des méthodes d’analyse et des logiciels utilisés dans le cadre des trois articles de recherche.

Tableau 5. Méthodes de recherche mobilisées dans les trois articles

Données utilisées Méthode d’analyse Logiciel utilisé Article 1 Données disponibles en ligne sur les

sites des cabinets de conseil à partir de la présentation de l’offre de conseil en lien avec le capital humain

Analyse lexicale Tropes

Article 2 Observation non participante Entretiens semi-directifs Données secondaires

Analyse lexicale Alceste

Article 3 Observation non participante Entretiens semi-directifs Données secondaires