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Chapitre 1: Rappels et généralités

I.1. a. Avantages et inconvénients

1.5 Méthode de cristallogenèse en flux

La méthode de croissance en flux est utilisée pour l’élaboration des monocristaux présentant au moins une des caractéristiques suivantes :

 fusion non congruente,  température de fusion élevée,

 tension de vapeur importante à la fusion,  transformation allotropique.

L’utilisation d’un flux comme solvant permet d’obtenir des cristaux d’un composé en dessous de son point de fusion. Le rôle principal du flux est d’abaisser la température de cristallisation du composé à élaborer et de former un diagramme de phase de type eutectique avec le cristal désiré (Figure 1.17). La détermination du diagramme d’équilibre entre le soluté A et le solvant B se fait par la technique d’analyse thermique différentielle :

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Figure 1.17 : Diagramme de phase d’un binaire. A soluté (composé à cristalliser) ; B = solvant (flux). La flèche correspond au chemin de la concentration du liquide lors de la cristallogenèse.

La difficulté principale de cette méthode est le choix du flux. Celui-ci doit dissoudre une quantité importante de soluté sans réagir avec lui et de plus il ne doit pas réagir avec le creuset dans lequel a lieu la cristallisation. Les critères guidant le choix d'un flux sont :

 un pouvoir dissolvant assez grand,

 une inertie chimique vis à vis du composé à cristalliser,  une faible volatilité,

 une faible viscosité pour limiter les problèmes de diffusion,

 une température de fusion basse, très éloignée de sa température d’ébullition,

 une grande solubilité dans l’eau ou dans un solvant courant dans le cas où il serait nécessaire d’éliminer le flux pour récupérer le cristal désiré.

Les flux les plus couramment utilisés sont : l’oxyde de plomb, de baryum, de molybdène, de bore, de bismuth ou les fluorures de plomb, d’alcalino-terreux et d’alcalins [17].

1.5.2 Dispositif

Avant de se lancer dans une croissance en flux, il est nécessaire d’effectuer au préalable des tests de nucléation spontanée afin d’évaluer la faisabilité de la cristallogenèse. Le mélange du soluté et du flux est placé dans un creuset (Figure 1.18) puis fondu en le portant à une température supérieure à la température de fusion (d’environ 50 °C). La cristallisation du composé est obtenue par refroidissement lent. Le flux est dissous pour récupérer les cristaux.

liquide A+liq B+liq A+B (solides) A T B

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Figure 1.18 : Schéma du montage utilisé pour la synthèse des cristaux par nucléation

spontanée.

Ensuite, la croissance en flux sera réalisée en cherchant à contrôler la nucléation par l’utilisation d’un germe. Il existe plusieurs dispositifs de croissance en flux, tous utilisant en général le même type de four (Figure I-27). Leurs différences sont les suivantes :

 Top-Seeded-Solution Growth (TSSG) (Figure 1.19 et Figure 1.20) : le germe est seulement en contact avec la surface du bain.

 Middle-Seeded-Solution Growth (MSSG): le germe est immergé dans le bain (et souvent excentré).

 Le tirage à partir du flux : le germe est mis en contact avec la surface du bain. Une translation très lente du germe vers le haut est ensuite appliquée (de l’ordre du millimètre par jour) quand la cristallisation démarre.

bain = matériau + flux

poudre

d’alumine

creuset

en platine

feuille de platine

creuset

en alumine

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Figure 1.19 : photos de deux fours résistifs (2 zones et 3 zones) utilisés au laboratoire.

Figure 1.20 : montage du four TSSG trois zones.

Par comparaison, la grande différence entre le four de flux et le four Czochralski est en général le système de chauffage. Dans le four Czochralski, le creuset est chauffé par induction moyenne fréquence (15 kHz dans notre cas). La température du bain croît du centre vers les bords du creuset, en passant de la température de solidification à celle de fusion de la phase souhaitée. Par conséquent, il y a beaucoup de gradient thermique radial dans le bain. Ce gradient est difficile à mesurer à cause de couplage entre le thermocouple et la spire inductrice. Dans le four Czochralski, le gradient thermique axial (plus facile à estimer) au-dessus du creuset Pt est le plus élevé, il est de l’ordre de la dizaine de degrès par centimètre. Des mesures du gradient axial seront présentées dans la partie 2.2.2 dans le cadre de la croissance de cristaux de CBF Etant

46 donné que le facteur entre le gradient axial et le gradient radial est d’environ un ordre de grandeur, le gradient thermique radial du four de Czochralski est probablement pour

notre dispositif de quelques degrés par cm. Par comparaison avec le four Czochraski, il y a très peu de gradient thermique horizontal, environ 0,4 °C/cm, dans le four du flux que nous avons développé au laboratoire en raison du chauffage résistif. La température varie

donc très peu du centre vers le bord de creuset.

Deux fours pour la technique du flux ont été développés au laboratoire et sont constitués pour l’un de deux zones de chauffage et pour l’autre trois zones. Tout comme pour le four Czochralski, des mesures du gradient axial seront présentées dans la partie 3.2.3 dans le cadre de la croissance de cristaux de YAB. Le creuset est souvent mis dans la zone centrale dont la température est la plus homogène pour éviter d’être perturbé par la température extérieure. Les températures des zones sont mesurées par des thermocouples, et un système de régulation est assuré par pilotage informatique pour respecter le profil de température voulu par l’utilisateur. Ce système de régulation est complété d’un suivi de la croissance du cristal par un système de pesée. Si la vitesse de cristallisation est très élevée, la pente de refroidissement sera diminuée par l’opérateur; dans le cas contraire, la pente sera augmentée. Notre montage offre la possibilité d’une translation très lente du germe de l’ordre du dixième de millimètre par jour et un contrôle très précis du refroidissement de 0,1 °C/jour.

1.5.3 Croissance à partir du flux

Indépendamment des dispositifs, il y a plusieurs méthodes possibles pour synthétiser les cristaux par croissance en flux.

 L’évaporation du flux

C’est une méthode utilisée pour des flux volatils (par exemple, PbO – PbF2). La croissance des cristaux est contrôlée par une limitation de la vitesse d’évaporation du flux entretenant la sursaturation du bain. Le palier d’évaporation peut être de trois à dix jours, suivi d’un refroidissement lent (5 à 10 °C/h).

 Le refroidissement lent

Cette méthode consiste en un refroidissement lent à partir d’une solution non saturée pour l’amener à saturation. La cristallisation débute quelques degrés en dessous de la température de saturation. La vitesse de refroidissement varie entre quelques degrés par jour et 0,1 °C/j. Le cristal, développé à partir d’un germe monté sur une canne de tirage, est désolidarisé du bain avant la cristallisation du flux.

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 Le tirage à partir d’un flux

Après mise en solution (Figure 1.17) le bain est refroidi lentement pour atteindre la courbe du liquidus. Quand la température de saturation du soluté dans le solvant est atteinte, on place un germe en contact avec le bain pour permettre la cristallisation du composé. Un refroidissement lent d’environ 0,1 °C par jour est ensuite imposé pour suivre l’évolution de la courbe du liquidus causée par la variation de la composition du bain (diminution de la concentration en soluté suite à la cristallisation de celui-ci). Une translation lente (quelques millimètres par jour) est lancée en même temps avec le refroidissement lent.

1.5.4 Avantages et inconvénients

Comme les autres méthodes de cristallogenèse, la croissance en flux possède aussi des avantages et des inconvénients.

 Avantages :

 La température de fusion du mélange soluté-solvant est inférieure à celle du soluté.  Des cristaux à fusion non congruente peuvent être élaborés.

 Inconvénients :

 Contamination éventuelle par le flux.  Choix du flux difficile.

 Vitesse de refroidissement très lente (0,1 °C par jour), la durée de tirage est très longue (au moins 1 mois).

 La taille du cristal dépend de la taille du creuset.