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Les interactions entre les plantes et les microorganismes phytopathogènes sont dépendantes

de la disponibilité en azote dans l’environnement. En effet, celle-ci influe à la fois sur les défenses de

la plante, sur la virulence des pathogènes et sur la sévérité de la maladie. Cependant, les mécanismes

moléculaires qui sous-tendent les différents effets observés (qui peuvent être contradictoires suivant

le pathosystème considéré) restent, pour la plupart, à étudier en détail. Il est probable que

l’ensemble du métabolisme de l’azote et des acteurs moléculaires impliqués, joue un rôle dans ces

interactions entre les plantes et leurs pathogènes. Ainsi, le système d’acquisition du nitrate, le

métabolisme des acides aminés ou les systèmes de transport de l’azote semblent jouer un rôle dans

les interactions plantes/pathogènes. L’ensemble de ces aspects est présenté dans la revue publiée

récemment par Fagard et al (2014).

Concernant le métabolisme des acides aminés, une revue récente a pointé le rôle central du

métabolisme du glutamate dans le développement de la maladie et la mise en place des réactions de

Figure III-10. Stratégie de virulence du pathogène versus métabolisme du glutamate de l’hôte.

Modèle hypothétique montrant comment le métabolisme du glutamate de la plante peut moduler

les réactions de défense en fonction de la stratégie de virulence du pathogène. AS : Asn synthetase ;

AST : Asp transaminase ; GDH (AM/DAM) : Glu dehydrogenase (aminating/deaminating) ; GOGAT :

Gln-oxoglutarate aminotransferase ; GOX : glycolate oxidase ; GS : Gln synthetase ; GSH : glutathione

; PAO : polyamine oxidation (PA-oxidase) ; P5C : pyrroline-5-carboxylate. (d’après la Figure 3 de Seifi

et al, 2013).

Introduction

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défense par la plante (Seifi et al., 2013a). Le métabolisme du glutamate comprend trois grandes

fonctions : le recyclage et la remobilisation de l’azote, la régulation de la balance redox et le

métabolisme énergétique par la fourniture de composés du cycle de Krebs (Figure III-9). Les

modulations complexes des différentes parties du métabolisme du glutamate en réponse à un agent

pathogène permettent d’adapter la réponse de la plante à l’agent pathogène en fonction du cycle de

vie de celui-ci. En effet, une stratégie dite « d’endurance » peut être mise en place par la plante afin

de maintenir la viabilité des cellules et ainsi limiter la progression d’un pathogène nécrotrophe

(augmentant par la même occasion la susceptibilité à un agent biotrophe). A l’inverse, la mise en

place d’une stratégie « d’évasion » provoque la mort des cellules et permet de résister à un

agresseur biotrophe. Ces deux stratégies et les acteurs moléculaires impliqués sont résumés dans la

Figure III-10.

Les membres des familles GLN1 et ASN sont impliqués dans les réponses des plantes aux

agents pathogènes. En effet, il a été montré chez le tabac qu’un gène GS1 est induit lors de l’infection

par des pathogènes (Pageau et al., 2006) ; que l’expression des gènes GLN1 d’Arabidopsis est

modulée en réponse à différents pathogènes (AtGLN1;1 est, par exemple, induit lors de l’infection

par Erwinia amylovora ; Fagard et al., 2014) ; que l’infection du haricot commun par Colletotrichum

lindemuthianum induit l’expression de la GS1 (Tavernier et al., 2007). De plus, des publications

récentes de l’équipe de M. Höfte ont montré que l’extinction de l’expression de la GS1 dans le

pathosystème mutant sitiens de la tomate/Botrytis cinerea provoque l’augmentation des symptômes

de maladie (Seifi et al., 2013b). Dans ce pathosystème, l’induction de l’activité GS1 permettrait le

maintien de la viabilité cellulaire autour du site d’infection afin de limiter la progression du

nécrotrophe. En effet, la GS1 remplacerait alors la GS2 pour faire tourner le cycle GS/GOGAT et

permettre la fourniture de substrats du cycle de Krebs via le shunt du GABA. Récemment, Seifi et al

(2014) ont montré une induction d’un gène AS chez la tomate en réponse à l’infection par B. cinerea,

ainsi qu’une déplétion en asparagine des plantes infectées provoquée par une consommation par le

champignon. L’induction de l’AS chez la tomate au niveau du phloème était déjà connue en réponse

à Pseudomonas syringae (Olea et al., 2004) et chez le poivron en réponse à des pathogènes

microbiens (Hwang et al., 2011). Il est montré dans cette étude que l’extinction du gène AS1

provoque une augmentation de la susceptibilité des plantes aux agents pathogènes.

En plus de leur rôle dans la gestion des stress biotiques, les GS1 et AS peuvent également

jouer un rôle dans la gestion des stress abiotiques. Chez le tabac, l’activité GS1 au niveau du phloème

permet de réguler la synthèse de proline et la résistance au stress hydrique (Brugiere et al., 1999).

Les stress salins et osmotiques provoquent une augmentation de l’expression de la GS1 et de

l’activité GS correspondante chez le tournesol (Santos et al., 2004) et l’expression de la GS1

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augmente chez le tabac en réponse au stress oxydant (Pageau et al., 2006). L’exposition des plantes

au cadmium provoque une augmentation du contenu en transcrits et protéines GS1 chez la tomate

ainsi qu’une augmentation des transcrits de l’asparagine synthétase (Chaffei et al., 2004).

Une étude préliminaire de l’implication des gènes GLN1 d’Arabidopsis dans la réponse à un

stress biotique (infection par l’agent nécrotrophe B. cinerea) et abiotique (stress salin) a été réalisée

par Camille Soulard, stagiaire de Master 2 en 2014. J’ai participé à l’élaboration de son sujet de stage,

encadré son stage au quotidien d’un point de vue technique et participé à la correction de son

rapport. Ce rapport figure en annexe.

Introduction

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IV Objectifs de recherche

Le colza est une espèce d’intérêt agronomique dont la culture nécessite l’apport d’intrants

azotés en grande quantité. L’azote apporté n’est toutefois pas utilisé par cette plante de façon

optimale en dépit d’une bonne capacité d’absorption à partir du sol. La mauvaise efficacité de

remobilisation de l’azote de feuille à feuille (Malagoli et al., 2005a) conduit à une perte importante

d’azote dans l’environnement par la chute de ces feuilles au stade végétatif. Dans le contexte actuel

associant l’augmentation de la population mondiale ainsi que le coût économique et

environnemental des intrants, il est nécessaire de diminuer la quantité d’engrais azotés apportée aux

cultures tout en essayant de conservant des rendements et une qualité de la graine aux plus hauts

niveaux. Chez le colza, cet objectif pourra être rempli à la condition de posséder une meilleure

connaissance des mécanismes impliqués dans les flux d’azote au sein de la plante, et notamment,

une meilleure connaissance des acteurs moléculaires de la remobilisation de l’azote aux stades

végétatif et reproducteur.

La remobilisation des composés azotés au cours de la sénescence se traduit par une

augmentation de la concentration en acides aminés dans la sève phloémienne et notamment des

concentrations en glutamine et asparagine. Ces deux acides aminés sont des formes privilégiées de

transport de l’azote au sein de la plante car ils possèdent un ratio azote / carbone élevé. La

glutamine et l’asparagine, servant à la remobilisation de l’azote, sont synthétisées par l’action des

glutamine synthétases cytosoliques et des asparagine synthétases, respectivement. Ces deux

enzymes sont codées par des familles multigéniques (la famille des gènes GLN1 et celle des gènes

ASN) et certains des gènes de ces familles sont induits au cours de la sénescence. Ainsi, le but de ce

travail de thèse a été (i) de caractériser l’expression des gènes GLN1 et ASN chez Arabidopsis et le

colza afin de comparer ces deux modèles et mettre en évidence des ressemblances de profils

d’expression en fonction de l’âge foliaire et en réponse à l’azote ; et (ii) d’étudier la contribution des

gènes GLN1 et ASN dans le processus de remobilisation de l’azote des feuilles vers les graines en

formation en utilisant des mutants d’Arabidopsis.

La partie Résultats sera organisée en quatre parties distinctes :

- Le chapitre I porte sur l’identification des membres de la famille GLN1 chez le colza et l’étude

de leur profil d’expression en fonction des tissus, de l’âge des feuilles et de la disponibilité en

azote. Les résultats ont été valorisés par une publication, pour laquelle je suis co-premier

auteur, dans la revue Journal of Experimental Botany (Orsel et al., 2014).

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- Les résultats obtenus lors de l’étude de l’expression des cinq gènes GLN1 d’Arabidopsis au

niveau de la plante entière, au niveau tissulaire et au niveau cellulaire ont permis la

rédaction d’une publication constituant le chapitre II des Résultats.

- Le chapitre III porte sur le phénotypage des mutants gln1 dans le but d’identifier le rôle des

GS1 dans le développement de la biomasse, l’établissement du rendement ou dans

l’allocation des ressources azotées. Ce chapitre a également été rédigé sous forme de

publication.

- Enfin, le chapitre IV expose les résultats obtenus lors de l’étude de l’expression des gènes

ASN chez Arabidopsis en fonction des organes, de l’âge et de la disponibilité en azote ainsi

que ceux obtenus lors de l’étude des mutants asn d’Arabidopsis, dans un but identique que

l’étude décrite au chapitre III.

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I La famille GLN1 chez Brassica napus : identification et analyse de

l’expression en fonction de la sénescence et de la disponibilité en

azote

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