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2. INTRODUCTION

2.5 La mélanine chez les champignons

Les mélanines sont des pigments de couleurs variées amplement distribués chez les animaux, les plantes et les microorganismes. Ces macromolécules chargées négativement, hydrophobes et de haut poids moléculaire sont formées par la polymérisation oxydative de composés phénoliques ou indoliques. Les trois types de mélanines sont : 1) Les eumélanines de couleur noir ou marron produites de l’oxydation de la tyrosine (et/ou phénylalanine) en o-dihydroxyphénylalanine (DOPA) ; 2) les phéomélanines de couleur jaune à rouge produits de la cystéinylation du DOPA ; et 3) les allomélanines, synthétisées via la voie des pentacétides par l’oxydation et la polymérisation de dihydroxynaphtalène (DHN) ou

tétrahydroxynaphtalène (DHN-mélanines), d’acide homogentisique (pyomélanines), de γ

-glutaminyl-4-hydroxybenzène, de cathécoles, ou d’acide 4-hydrophénylacétique (Langfelder

et al 2003 ; Jacobson 2000 ; Plonka et Grabacka, 2006).

Les deux types de mélanines les plus connus chez les champignons sont la DHN-mélanine et la DOPA-mélanine dont la fonction a été plutôt liée à la protection des cellules contre les facteurs externes comme par exemple, les radiations UV, l’oxydation, les températures extrêmes, la toxicité par des métaux lourds, etc. Mais chez les champignons pathogènes la mélanine est aussi un facteur de virulence et de pathogénie qui leur procure de la turgescence pour assurer l’invasion des tissus végétaux et les protège de l’action des enzymes chez des plantes affectées, ou de la réponse immunitaire chez l’être humain. D’autres fonctions ont aussi été attribuées à la mélanine comme donner de la rigidité à la paroi cellulaire et stocker

de l’eau et des ions pour éviter la dessiccation (Jacobson, 2000 ; Casadevall et al., 2000 ;

Nosanchuk et Casadevall, 2003).

La localisation de la mélanine chez les champignons est variée, on peut la trouver entre la membrane et la paroi cellulaire, intercalée dans la paroi cellulaire, ou externe à la paroi cellulaire. La mélanine externe peut être produite dans la cellule et externalisée, ou produite à l’extérieur de la cellule à partir soit de l’oxydation de certains composants du milieu de culture par des phénoloxydases extracellulaires, soit de l’autoxydation des composés phénoliques libérés dans le milieu tels que le L-DOPA ou le catéchol en forme de mélanine. Quelquefois cette mélanine externe s’associe à la surface cellulaire mais elle n’est pas

fortement liée à la paroi (Langfelder et al., 2003).

 

INTRODUCTION 2.5.1 Voies de synthèse de la mélanine chez les champignons

Trois voies de synthèse de mélanine ont été décrites chez les champignons, la voie DHN-mélanine, synthétisée par la majorité des ascomycètes ; la voie pyoDHN-mélanine, détectée jusqu'à

présent chez Y. lipolytica (Carreira et al., 2001b), Aspergillus nidulans et Aspergillus

fumigatus ; et la voie DOPA-mélanine synthétisée par des espèces d’ascomycètes et quelques

basidiomycètes (Langfelder et al., 2003). Les modèles généraux de la biosynthèse de

DHN-mélanine et pyoDHN-mélanine que nous décrivons ici sont ceux déduits d’A. fumigatus dont les

gènes participants et les produits intermédiaires ont été identifiés (Pihet et al., 2009), mais on

peut s’attendre à des modifications spécifiques en fonction de l’espèce.

2.5.1.1 La voie DHN-mélanine

Les précurseurs initiaux pour la biosynthèse de DHN-mélanine sont une molécule d’acétyl-CoA et quatre molécules de malonyl-d’acétyl-CoA, ou uniquement des molécules de malonyl-d’acétyl-CoA

(Figure 10). Certains champignons comme Colleotrichum lagenarium transforment le

malonyl-CoA en 1,3,6,8-tetrahydroxynaphtalène (1,3,6,8-THN) par une polycétide synthase

(Pks) en une seule étape (Fujii et al., 2000). Par contre chez Aspergillus fumigatus, à partir

d’acétyl-CoA et/ou de malonyl-CoA l’enzyme Alb1p/Pks (ACJ13039) forme l’heptacétide naphtopyrone qui est donc transformée en 1,3,6,8-THN par l’hydrolase polyketide Ayg1

(ACJ13045) (Fujii et al., 2004). Ensuite le 1,3,6,8-THN est réduit par la 1,3,6,8-THN

réductase Arp2p (ACJ13050) en scytalone qui est déshydratée en 1,3,8-trihydroxynaphtalène (1,3,8-THN) par la sytalone déshydratase Arp1p (ACJ13057). Une deuxième étape de réduction est faite par Arp2p (ACJ13050) pour transformer le 1,3,8-THN en vermelone, la déshydratation de cette dernière forme le 1,8-déshydroxynaphtalène (1,8-DHN) par l’action de la vermelone déshydratase Abr1p (ACJ13063). Finalement la laccase (ACJ13069 ; EC

1.10.3.2) Abr2p polymérise le 1,8-DHN en DHN-mélanine (Pihet et al., 2009).

 

 

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Figure 10. Voie de biosynthèse de DHN-mélanine chez Aspergillus fumigatus.

Alb1P/PKS) Polycétide synthase ; Arp2p) 1,3,6,8-THN réductase ; Arp1p) Sytalone

déshydratase ; Abr1p) Vermelone déshydratase ; Abr2p) Laccase. L’action de le

1,3,6,8-THN réductase peut être inhibée par le pyroquilon (Pq) (Adapté de Pihet et al., 2009).

2.5.1.2 La voie pyomélanine

La pyomélanine est un produit du catabolisme de L-tyrosine (Figure 11). La biosynthèse de

pyomélanine a été récemment découverte chez A. fumigatus. Ce deuxième type de mélanine

n’est pas indispensable pour la pathogenicité d’A. fumigatus. Dans cette voie la tyrosine

aminotransferase Tat transforme le L-tyrosine en 4-hydroxyphénylpyruvate qui est ensuite transformé en homogentisate par la 4-hydroxyphénylpyruvate dioxygénase HppD. L’homogentisate peut suivre deux chemins, soit il est dégradé par l’enzyme homogentisate dioxygénase HmgA pour former le 4-maleylacetoacétate, soit il est polymérisé en

pyomélanine (Schmaler-Ripke et al., 2009).

Figure 11. Voie de biosynthèse de pyomélanine chez les champignons. Tat) Tyrosine

aminotransferase ; HppD) 4-hydroxyphénylpyruvate dioxygénase ; HmgA) Homogentisate

INTRODUCTION

 

2.5.1.3 La voie DOPA-mélanine

La biosynthèse de DOPA-mélanine est réalisée à partir de deux précurseurs initiaux : la L-tyrosine, un précurseur intracellulaire qui est hydroxylé en L-DOPA et ensuite en dopaquinone par l’action d’une tyrosinase ; ou bien la L-DOPA, un précurseur exogène qui est oxydé en dopaquinone par l’action d’une phénol oxydase (laccase). L’oxydation et la polymérisation simultanées de la dopaquinone forment la DOPA-mélanine (Figure 12)

(Langfelder et al., 2003).

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Figure 12. Voie de biosynthèse de DOPA-mélanine chez les champignons. Tyr)

Tyrosinase ; Lac) Laccase. L’action de la tyrosinase peut être inhibée par l’acide Kojic (Ak).

PROBLÉMATIQUE

ET OBJECTIF

PROBLÉMATIQUE ET OBJECTIF  

3. PROBLÉMATIQUE

La capacité de Y. lipolytica à métaboliser une grande variété de substrats hydrophobes a fait

de cette levure l’objet de différents procédés biotechnologiques tels que la biodégradation de

composés polluants (n-alcanes, pétrole), la biosynthèse de produits d’intérêt industriel comme

par exemple les acides organiques à partir de glycérol ou même de pétrole, et la bioconversion d’acides gras en lactones. Dans ces trois cas on part de substrats hydrophobes. Sachant que la paroi cellulaire est une structure dynamique capable de s’adapter aux conditions de croissance, il est probable qu’en présence de substrats hydrophobes comme seule source de carbone, la paroi cellulaire modifie sa structure et ses propriétés physicochimiques, biochimiques et moléculaires afin d’améliorer l’adhésion et le transport de tels substrats dans la cellule. De plus, il est possible que pendant l'entrée à travers la surface cellulaire, une partie des substrats hydrophobes restent intercalés dans la membrane plasmique causant ainsi une fluidification membranaire qui pourrait induire un stress (Figure 13).

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