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Mécanismes post-transcritionnels régulés par les microARN

E- Régulation de l’expression de l’expression génique par les micro-ARN

3- Mécanismes post-transcritionnels régulés par les microARN

Durant ces cinq dernières années, les miARN se sont imposés comme des régulateurs majeurs de l’expression génique. Leur champ d’action étant restreint aux domaines déterminés par les études déjà réalisées à leur sujet, il est probable que celui-ci croisse avec les études futures qui seront réalisées sur les miARN.

Chez les métazoaires, les miARN contôlent l’expression génique aux stades post-transcriptionnels en régulant (1) l’initiation de la traduction, (2) l’élongation de la traduction, (3) la protéolyse du peptide naissant, et enfin (4) la stabilité du messager en guidant sa déadénylation (Figure 10).

3-1 Régulation de l’initiation de la traduction

Le mécanisme par lequel les miARN régulent la traduction de l’ARNm cible est au centre d’un débat, avec d’un côté les partisans du contrôle de l’initiation de la traduction initiée à la coiffe, et de l’autre côté, ceux qui observent plutôt que les miARN régulent la traduction indépendamment de la coiffe, ou régulent l’élongation de la traduction. Actuellement, rien n’est tranché, il n’est pas impossible que les phénomènes coexistent.

3-1-1 Régulation de l’initiation de la traduction initiée à la coiffe, par les miARN L’initiation de la traduction dépendante de la coiffe fait partie des premières étapes, découvertes comme étant régulée par les microARN. Deux études principales sont venues poser les bases de ce mécanisme, appuyées ensuite par d’autres arguments. La première étude démontrant que les miARN régulent l’initiation de la traduction initiée à la coiffe s’est basée sur l’observation que, avec des gènes rapporteurs comprenant plusieurs sites de liaison pour le microARN Let-7, la répression n’était obtenue que dans le cas où la traduction du gène rapporteur était initiée à la coiffe et non à l’IRES virale de l’EMCV (Encephalomyocarditis virus) (Pillai et al., 2005). Dans cette même étude, les auteurs observent que les ARNm dont la traduction est réprimée par Let-7 voient leur distribution dans un gradient de polysomes se décaler vers le haut du gradient, ce qui signifie que ces ARNm ne sont plus engagés dans la machinerie de traduction. Une autre étude est venue appuyer ces résultats en utilisant des ARN synthétiques avec des analogues de coiffe ApppN, non reconnus par la machinerie d’initiation de la traduction. La transfection de ces ARN synthétiques a montré qu’ils étaient insensibles à l’inhibition de la traduction due à la présence de multiples sites Let-7 dans leur région 3’UTR, ce qui a permis aux auteurs de conclure que la présence de la coiffe était indispensable au mécanisme d’inhibition de la traduction médiée par les miARN (Humphreys et al., 2005). Enfin, cette étude valide l’insensibilité de l’IRES d’EMCV à l’inhibition de la traduction médiée par les miARN, permettant aux auteurs de conclure sur la nécessité du complexe

eIF4F dans le mécanisme d’inhibition de la traduction régulée par les miARN. Une autre étude est venue appuyer ces observations et préciser le rôle déterminant du facteur eIF4E dans le mécanisme d’inhibition de la traduction régulée par les miARN. Dans cette étude, réalisée avec des systèmes de traduction in vitro dans des extraits cellulaires, les auteurs vérifient une fois de plus l’insensibilité de l’IRES d’EMCV à Let-7, et précisent l’importance du facteur eIF4E (Mathonnet et al., 2007). Il est important de noter que ces études, bien que parues dans des journaux prestigieux, et donc techniquement très bien faites, souffrent de n’être réalisées que dans des systèmes très artificiels, sans doute indispensables pour l’étude de mécanismes moléculaires, mais insuffisantes pour tirer des conclusions définitives.

Enfin, un autre type d’approche est venu renforcer la thèse de la régulation de l’initiation de la traduction dépendante de la coiffe. Dans cette étude les auteurs démontrent que les protéines AGO contiennent dans leur domaine central des similitudes significatives avec le domaine de liaison à la coiffe du facteur eIF4E. Dans le domaine central de la protéine AGO2, un motif MC contient deux résidus phénylalanines (F470 et F505), indispensables à la fois à la liaison de la coiffe et à la fonction répressive de AGO2 sur la machinerie de la traduction (Kiriakidou et al., 2007). Ainsi, les miARN inhiberaient l’initiation de la traduction en amenant AGO2 à proximité de la coiffe, qu’elle lierait en compétition avec eIF4E.

3-1-2 Régulation de la traduction indépendamment de la coiffe, par les miARN Un mécanisme d’action alternatif des miARN sur la machinerie de la traduction a été récemment proposé, impliquant le facteur eIF6, associé à la sous-unité 60S du ribosome (cette association permettant à la sous-unité 60S d’être libre et donc disponible pour un nouveau tour de traduction). Le facteur eIF6 a été retrouvé associé au complexe AGO2–Dicer–TRBP dans des cellules humaines et d’embryons de Caenorhabditis elegans (Chendrimada et al., 2007). Dans les cellules HeLa, la suppression d’eIF6 (par siARN) conduit à la perte de l’inhibition de la traduction de gènes rapporteurs médiés par les miARN. De manière similaire la suppression d’eIF6 chez le nématode entraîne une perte de l’effet inhibiteur du miARN lin-4 sur ses cibles endogènes LIN14 et LIN28, in vitro et in vivo.

Cette étude démontre que les miARN peuvent exercer leur effet inhibiteur sur la traduction des protéines au-delà du contrôle de l’étape de l’initiation à la coiffe, sans pour autant réguler l’élongation de la traduction.

Une autre étude, réalisée sur des cellules HeLa, retrouve quant à elle des miARN (miR-21, miR-16 et Let-7a) dans les polysomes en cours de traduction (Maroney et al., 2006). Les auteurs de cette étude retrouvent plus précisément Let-7a dans les polysomes associés à un de ces ARNm cibles

KRAS. Comme Let-7a inhibe l’expression de KRAS, et qu’ils se retrouvent ensembles dans les polysomes, cette inhibition ne peut venir que d’une accélération du relargage du ribosome, avant même que la synthèse de la protéine ne soit achevée. C’est ce qui est appelé le « ribosome drop- off ».

Une autre étude est venue appuyer ce modèle du « ribosome drop-off ». Cette étude confirme que les miARN associés à leur ARNm cibles sont retrouvés dans les polysomes (Petersen et al., 2006). De plus, dans cette étude les auteurs montrent que les IRES virales de HCV (hepatitis C virus) et du CrPV (cricket paralysis virus) sont sensibles à l’inhibition de la traduction induite par des petits ARN, type miARN. Ceci fait dire aux auteurs de ce travail, que l’inhibition de la traduction dépendante des miARN peut avoir lieu indépendamment de la coiffe, donc à des stades « post- initiation ». Enfin, des marquages métaboliques permettent aux auteurs d’observer l’initiation de la traduction de l’ARNm ciblé par un miARN, mais cette traduction est abortive, ce qui vient appuyer l’hypothèse du relargage du ribosome, ou « ribosome drop-off ».

Enfin, une dernière étude retrouve les ARNm avec leur miARN associés ainsi que la protéine AGO dans les polysomes. Toutefois, les auteurs de cette étude suggèrent un autre mécanisme d’inhibition de la synthèse protéique par les miARN au niveau « post-initiation » de la traduction. Comme ils observent que 30% des complexes (ARNm-RISC) ne sont pas engagés dans les polysomes, ils proposent un mécanisme d’inhibition de la traduction initiée à la coiffe (qui explique ces 30%), associé à une protéolyse des peptides naissants qui étaient alors en cours de traduction (Nottrott et al., 2006).

3-2 Régulation de la stabilité des messagers, la déadénylation

La première étude qui a démontré que des miARN pouvaient réguler la stabilité des ARNm qu’ils ciblent a été réalisée chez Caenorhabditis elegans. Les auteurs de cette étude démontraient pour la première fois, chez un métazoaire (et non chez les plantes), que la liaison, même imparfaite de Let- 7 à son ARNm cible lin-14 entraîne une diminution de la stabilité de ce dernier (Bagga et al., 2005). Cette observation a été confirmée par une autre qui démontre que miR125a et son homologue miR125b régulent négativement l’expression de l’ARNm humain lin-28, en induisant une diminution de la stabilité de ce dernier, bien que la liaison entre miARN et ARNm soit imparfaite (Wu and Belasco, 2005).

Une autre étude a permis d’avoir une vision plus globale de ce mécanisme de régulation de la stabilité des messagers par liaison imparfaite de miARN à des ARNm cibles dans des cellules humaines. Cette étude, basée sur la quantification de transcrits sur puces, montre que l’augmentation du niveau de miR-124 et de miR-1 conduit à une diminution d’une centaine de messagers respectivement dans le cerveau et dans le muscle (Lim et al., 2005). La diminution

observée serait due à la déstabilisation des messagers puisque ces derniers auraient dans leur région 3’UTR des sites de liaison pour chacun des miR-124 et miR-1. De manière similaire une autre étude a démontré que, chez le poisson zèbre, miR-430 régule la stabilité d’une centaine d’ARNm d’origine maternelle, en accélérant leur déadénylation, au cours des stades précoces du développement (Giraldez et al., 2006).

La déstabilisation des ARNm induite par la liaison d’un miARN, est initiée par la déadénylation de ce messager. Cette déstabilisation fait intervenir les protéines AGO qui colocalisent avec de nombreuses autres enzymes de dégradation dans des structures subcellulaires appelées P-bodies. La

protéine GW182 interagit avec les protéines AGO au niveau de leur domaine PIWI. À côté de la protéine GW182 les protéines CAF1 et NOT1, ainsi que le complexe de «decapping » formé par DCP1et DCP2, forment un ensemble protéique indispensable à la dégradation des ARNm dépendante des miARN (Behm-Ansmant et al., 2006).

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