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Mécanismes moléculaires des voies de recombinaison homologue

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Les voies de recombinaison homologue

I. Mécanismes moléculaires des voies de recombinaison homologue

Double Strand Break Repair (DSBR) I.1.

Le modèle DSBR a été proposé par Jack Szostak et al. (1983). Celui-ci est basé sur des études de transformation et de ciblage de gènes chez la levure (Orr-Weaver & Szostak, 1983) et fournit des explications à de nouvelles observations non prises en compte par le modèle de Holliday (Haber et al., 2004).

Les principales étapes de ce modèle sont présentées figure 8. Suite à une CDB de l'ADN, les deux extrémités subissent une résection 5'-3' générant des extrémités d'ADN

Formation d’une cassure double brin

5’

3’ 5’

3’

Invasion d’une séquence homologue Formation de la boucle D

Capture de la seconde extrémité

Formation de la double jonction de Holliday

Figure 8 : Voie DSBR (Double Strand Break Repair) (d’après Symington, 2002)

Résection 5’- 3’ des extrémités d’ADN

Synthèse d’ADN

Déplacement de la boucle D

Migration puis résolution des jonctions

1

1

2 2

Résolution selon (1) génère un échange des régions d’ADN flanquantes (crossing-over)

ou

Résolution selon (2) génère un produit de conversion génique (non crossing-over)

5’

3’ 5’

3’ 3’

3’

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simple brin (ADNsb) 3' sortantes. Ces extrémités recherchent une région homologue dans une double hélice d'ADN, généralement la chromatide sœur ou le chromosome homologue.

Quand une région homologue est identifiée, l'extrémité d'ADNsb l'envahit par appariement avec le brin complémentaire, formant ainsi une structure appelée boucle de déplacement, ou boucle D. La région d'ADN hétérologue est étendue par une synthèse d'ADN utilisant comme amorce, l'extrémité 3' du brin envahisseur et comme matrice, la copie homologue non endommagée. La poursuite de la polymérisation d'ADN conduit au déplacement de la boucle D qui pourra s'apparier avec la seconde extrémité de la cassure et servir de matrice à son extension. L'intermédiaire ainsi formé est nommé double jonction de Holliday. Les deux simples jonctions peuvent migrer, généralement en sens opposé, conduisant à l'extension du duplexe d'ADN hétérologue (étape de migration des branches). La résolution de cet intermédiaire de recombinaison peut aboutir à différents types de produits selon la localisation des clivages au niveau des deux jonctions (triangles gris, Figure 8). Les crossing-over (CO) génèrent un échange réciproque de matériel génétique entre les deux molécules d'ADN homologues. En revanche, les produits de non crossing-over (NCO) résultent d'un transfert non réciproque d'information génétique entre les deux molécules, c'est la conversion génique.

Selon ce modèle, la résolution aléatoire des deux jonctions de Holliday devrait produire un nombre équivalent de produits de CO et de produits de NCO. Or, des études portant sur la commutation de type sexuel chez S. cerevisiae (Nasmyth, 1982 ; McGill et al., 1989) ou la recombinaison des éléments transposables chez la drosophile (Gloor et al., 1991) ont révélé que les évènements de conversion génique sont plus nombreux que les CO. Ces travaux ont mené à la proposition d'un nouveau modèle dans lequel la réparation des CDB par recombinaison homologue ne génère que des évènements de conversion génique : il s'agit de la voie SDSA (Synthesis-Dependent Strand-Annealing).

Formation d’une cassure double brin

5’

3’ 5’

3’

Invasion d’une séquence homologue Formation de la boucle D

Appariement du brin néosynthétisé avec l’autre extrémité 3’ simple brin

Figure 9 : Voie SDSA (Synthesis-Dependent Strand-Annealing) (d’après Symington, 2002)

Résection 5’- 3’ des extrémités d’ADN

Synthèse d’ADN

Déplacement de la boucle D

Synthèse d’ADN et ligature des brins menant à un produit de conversion génique (non crossing-over)

5’

3’ 5’

3’ 3’

3’

! "!('!"!

Synthesis-Dependent Strand-Annealing (SDSA) I.2.

Le modèle SDSA, proposé dans les années 90 (Nassif et al., 1994 ; Ferguson &

Holloman, 1996), est présenté figure 9. Les premières étapes de la voie SDSA sont communes à celles de la voie DSBR : résection 5'-3' des extrémités de la CDB, recherche d'homologie et invasion d'une séquence homologue non endommagée par l'une des extrémités d'ADNsb 3' sortantes. Ceci aboutit à la formation de la boucle D. La synthèse d'ADN initiée à partir de l'extrémité 3' du brin envahisseur provoque le déplacement de la boucle D le long de la matrice d'ADN. Le brin nouvellement synthétisé est ensuite déplacé et peut s'hybrider par complémentarité de bases avec l'autre extrémité d'ADNsb 3' sortante de la chromatide endommagée. La synthèse d'ADN est alors amorcée à partir de l'extrémité 3' du brin non envahisseur et permet de combler les lacunes. La ligature des brins restaure la continuité de la molécule d'ADN.

Une différence essentielle entre ce mécanisme et le modèle de Szostak est qu'il génère exclusivement des produits de NCO (conversion génique), puisqu'il n'implique ni la formation ni la résolution d'une double jonction de Holliday. De plus, l'ensemble de l'ADN nouvellement synthétisé se retrouve finalement dans la molécule "destinataire", c'est-à-dire dans la chromatide initialement endommagée (lignes pointillées, Figure 9). En accord avec ces prédictions, les séquences "donneuses" sont généralement non modifiées au cours d'évènements de conversion génique induits par une CDB (Pâques et al., 1998).

Dans les cellules somatiques, la réparation des CDB est assurée principalement par la voie SDSA, prévenant ainsi les potentiels effets négatifs des CO tels que les réarrangements chromosomiques issus d'évènements de recombinaison entre séquences homologues non-alléliques. Les travaux de Allers et Lichten (2001) ont montré que les produits de NCO méiotiques sont principalement générés par SDSA, révélant le rôle clé de cette voie (pour revue, voir Andersen & Sekelsky, 2010).

5’

3’ 5’

3’

Figure 10 : Voie BIR (Break-Induced Replication) (d’après Malkova & Ira, 2013)

5’

3’ 5’

3’ 3’

3’

Formation d’une cassure double brin

Résection 5’- 3’ des extrémités d’ADN

Synthèse d’ADN

Migration de la boucle D

Invasion d’une séquence homologue Formation de la boucle D

Formation d’une molécule d’ADN dont les deux brins sont néosynthétisés

! "!#$!"!

Alors que les évènements de conversion génique générés par les voies SDSA et DSBR ne concernent que des régions de quelques kilobases, des évènements de plus grande échelle (d'une centaine de kilobases à un bras de chromosome entier) ont été décrits (Esposito, 1978 ; Voelkel-Meiman & Roeder, 1990 ; Malkova et al., 1996). Ces observations ont servi de base à l'élaboration de nouveaux modèles nommés BIR (Break-Induced Replication).

Break-Induced Replication (BIR) I.3.

Inspirés des mécanismes de réplication dépendante de la recombinaison d'E.coli et du phage T4, plusieurs modèles de réplication d'ADN induite par une CDB ont été envisagés (Malkova et al., 1996 ; Morrow et al., 1997). Des travaux récents menés chez la levure ont démontré que la voie BIR aboutit à l'héritage conservatif du matériel génétique néosynthétisé, en accord avec le modèle de synthèse d'ADN conservative (Donnianni & Symington, 2013 ; Saini et al., 2013). Comme dans les voies DSBR et SDSA, la voie BIR implique la résection 5'-3' des extrémités de la cassure suivie de la recherche puis de l'invasion d'une séquence homologue (Figure 10). La synthèse d'ADN initiée à partir de l'extrémité 3' du brin envahisseur induit la migration de la boucle D. Le mouvement de la jonction non résolue provoque le déplacement du brin nouvellement synthétisé. Ce processus aboutit à la formation d'une molécule d'ADN dont les deux brins sont néosynthétisés, tandis que l'ADN matrice conserve ses deux brins d'origine (Smith et al., 2007). Le BIR peut ainsi être à l'origine de la réplication de grandes régions chromosomiques. La recombinaison de type BIR prendrait en charge les CDB dont une seule extrémité est disponible et serait notamment impliqué dans la réparation des fourches de réplication bloquées et l'allongement des télomères en absence de télomérase (pour revue, voir Malkova & Ira, 2013).

Formation d’une cassure double brin entre deux séquences homologues

5’

3’ 5’

3’

Appariement des séquences homologues simple brin issues de la résection

Synthèse d’ADN et ligature des brins

Figure 11 : Voie SSA (Single Strand Annealing) (d’après Symington, 2002)

Résection 5’- 3’ des extrémités d’ADN

Coupure et élimination des extrémités 3’ simple brin non complémentaires

5’

3’

5’

3’

5’

3’

3’

3’

5’

3’

5’

3’

5’

3’

5’

3’

5’

3’

3’

3’

! "!(&!"!

Single-Strand Annealing (SSA) I.4.

Une autre voie impliquant une homologie de séquence pour la réparation d'une CDB est la voie d'hybridation simple brin (SSA). Le modèle SSA, proposé initialement par Lin et al. (1984), décrit la recombinaison entre deux séquences répétées dans la même orientation situées sur la même molécule d'ADN (SSA intramoléculaire) ou sur deux molécules différentes (SSA intermoléculaire) (Lin et al., 1984). Les principales étapes de la voie SSA intramoléculaire sont présentées dans la figure 11. Le processus est initié par la résection 5'-3' des extrémités d'ADN générant des queues simple brin 3' sortantes. Quand la résection est suffisante, les séquences complémentaires situées de part et d'autre de la cassure s'apparient.

Les extrémités d'ADNsb non complémentaires sont ensuite clivées et éliminées. La synthèse d'ADN permet de combler les lacunes potentielles avant la ligature des brins. Ce processus aboutit à la délétion du matériel génétique situé entre les séquences répétées ainsi que d'une des répétitions. Contrairement aux voies conservatives précédemment décrites, le SSA est donc un système de réparation mutagène. Il peut également être à l'origine d'importants réarrangements chromosomiques dans le cas où les séquences répétées se situent sur deux chromosomes différents (Richardson & Jasin, 2000).

Des évènements de SSA ont été détectés chez les levures, les animaux et les plantes ; ce mode de réparation des CDB serait particulièrement important dans les génomes présentant de nombreuses séquences répétées (Lin et al., 1984 ; Maryon & Carroll, 1991 ; Fishman-Lobell et al., 1992). L'efficacité du SSA est largement influencée par la longueur des régions répétées, leur degrés d'identité de séquence (Sugawara & Haber, 1992 ; Sugawara et al., 1997) et par la distance séparant les deux répétitions (Fishman-Lobell et al., 1992). A titre d'exemple, il a été montré chez la levure que l'efficacité du SSA est de 100% quand les régions homologues ont une taille supérieure à 400 paires de bases mais seulement de 5%

quand celle-ci est de 60 pb (Sugawara & Haber, 1992).

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