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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.3 Mécanismes de livraison de gènes

Le passage des complexes ADN/polycation à travers la membrane plasmique et la diffusion de l’ADN jusqu’au noyau de la cellule ne se fait pas directement. Ils doivent surmonter plusieurs barrières extracellulaires et intracellulaires avant de rejoindre le noyau pour la transcription des gènes, telle que le montre la Figure 2.3. Cependant, les mécanismes impliqués dans la livraison de gènes par les polycations ne sont pas tous connus.

Tout d’abord, l’entrée d’un système non-viral dans la cellule peut se produire par plusieurs voies : endocytose, phagocytose ou macropinocytose (Morille et al., 2008; Mintzer et Simanek, 2009). L’endocytose par adsorption non-spécifique est le processus principalement emprunté par les complexes ADN/polycation (sans ligand), suivi par un mécanisme modulée par de la clathrine. Il a été démontré que l’adsorption non-spécifique avec la membrane plasmique des cellules est favorisée par des complexes chargés positivement. Ces derniers peuvent en effet interagir avec les protéoglycanes, les glycoprotéines et les glycérophosphates anioniques présents

sur la membrane plasmique (Mislick et Baldeschwieler, 1996). D’un autre côté, il est important que les complexes ADN/polycation soient assez stables durant ce processus pour éviter la dissociation par ces biomolécules anioniques. Des tailles de particules inférieures à 100 nm de diamètre sont suggérées pour favoriser l’internalisation (Mintzer et Simanek, 2009). Cependant, des études in vitro ont montré que des complexes ADN/chitosane avec des tailles beaucoup plus grandes peuvent également transfecter les cellules (Lavertu et al., 2006; Strand et al., 2010).

Figure 2.3. Schéma illustrant les différents barrières extracellulaires et intracellulaires que

doivent passer les systèmes non-viraux lors de la transfection (Morille et al., 2008).

Après l’internalisation par endocytose, les particules sont généralement piégées dans les endosomes et ensuite dégradées par les lysosomes (Figure 2.3). Ce deuxième obstacle de la transfection doit être surmonté par les complexes, préférablement, avant que les endosomes passent d’une forme précoce à une forme mature pour finalement devenir des lysosomes dans lesquels des enzymes hydrolytiques dégradent les composés emprisonnés (Luzio et al., 2001).

Durant la maturation des endosomes, le pH à l’intérieur des vésicules passe d’environ 7 à 4.5-5.0 (Behr, 1997). Deux hypothèses ont été suggérées pour la libération des complexes ADN/polycation dans le cytoplasme. La première hypothèse est fondée sur la capacité des polycations comme les dendrimères à interagir directement avec la membrane bicouche de l’endosome et à provoquer sa rupture (Zhang et Smith, 2000). En raison de la nature anionique de la membrane bicouche contenant des phospholipides, des interactions électrostatiques avec les polycations pourraient induire localement des courbures (bending) à cette membrane jusqu’à causer sa rupture (Figure 2.4). Bien que ce mécanisme ait été suggéré pour les dendrimères à base de polyamidoamine et de PLL, il semble ne pas s’appliquer pour des polycations linéaires car le PLL sous forme linéaire ne peut induire de tels changements à la membrane de l’endosome (Zhang et Smith, 2000).

Figure 2.4. Hypothèse de rupture de l’endosome provoquée par des courbures locales de sa

membrane phospholipidique qui seraient induites par des interactions électrostatiques avec des dendrimères (Zhang et Smith, 2000).

Une hypothèse alternative pour libérer les complexes ADN/polycation de l’endosome a été proposée par le groupe de Behr à partir de leurs études sur des complexes à base de PEI (Boussif et al., 1995; 1997). Selon cette hypothèse, connue sous le terme de « proton sponge effect », les polymères cationiques comme le PEI et les polyamidoamines, qui possèdent une

grande quantité de groupements protonables, pourraient servir de tampon lors de l’acidification du compartiment des endosomes par les enzymes ATPase qui transportent des protons du cytoplasme (Figure 2.5). Cette accumulation de protons induit en même temps un flux de contre- ions (Cl-) pour assurer l’électroneutralité et une entrée d’eau qui fait augmenter la pression osmotique dans les endosomes, conduisant à leur gonflement et leur éclatement pour ainsi libérer les complexes. Selon un modèle de prédiction dérivé d’une étude récente, les complexes seuls ne peuvent pas provoquer une telle augmentation de la pression osmotique dans les endosomes sans une quantité suffisante de polycation libre (Yang et May, 2008). Selon d’autres études sur les systèmes de livraison de gènes à base de polymères, l’hypothèse du proton sponge effect n’est pas toujours valide. Par exemple, l’acétylation du PEI pour diminuer jusqu’à 57% des groupements protonables a en effet donné de meilleures efficacités de transfection par rapport au PEI non modifié (Gabrielson et Pack, 2006). Dans le cas des complexes ADN/chitosane, ce ne sont pas les chitosanes avec des valeurs de DDA les plus élevées qui sont nécessairement plus efficaces pour la transfection (Lavertu et al., 2006), tel que montre également une étude récente dans laquelle les groupements amine protonables du chitosane ont été substitués par des oligosaccharides neutres (Strand et al., 2008; Strand et al., 2010).

Les complexes libérés des endosomes doivent ensuite rejoindre le noyau des cellules par diffusion dans le cytoplasme (Figure 2.3). L’état de l’ADN dans le cytoplasme est peu connu, il peut être associé ou dissocié du polycation. Il est suggéré que le polycation doit maintenir ses fonctions assurant la protection de l’ADN contre la dégradation des nucléases du cytoplasme et la condensation de l’ADN pour faciliter la diffusion vers le noyau (Lukacs et al., 2000). Le mécanisme de pénétration dans le noyau est également peu connu et ne sera pas abordé dans le cadre de ce travail. Cependant, plusieurs études suggèrent l’importance d’avoir des complexes ADN/polycation facilement dissociables au niveau du noyau pour permettre la transcription des

gènes mais également suffisamment stables pour éviter une décomplexation prématurée (Gabrielson et Pack, 2006; Lavertu et al., 2006; Strand et al., 2010).

Figure 2.5. Shéma illustrant l’hypothèse du « proton sponge effect » (Behr, 1997).

2.4 Propriétés physico-chimiques des complexes ADN/chitosane

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