• Aucun résultat trouvé

Au tout début du développement de l’embryon, l’oxygène et les nutriments nécessaires à sa croissance diffusent librement. Puis, au fur et à mesure que les besoins augmentent, la diffusion n’est plus suffisante et un réseau vasculaire primitif se met en place par un processus appelé vasculogenèse.

I.1. La vasculogenèse :

Lors de ce processus, les cellules mésenchymateuses précurseurs ou hémangioblastes prolifèrent et migrent pour former des amas cellulaires appelés îlots sanguins. Les cellules situées en périphérie de ces îlots sanguins se différencient en cellules endothéliales primitives alors que les cellules situées à l’intérieur de ces îlots forment les premiers globules rouges ou érythrocytes primitifs. Ainsi, après différenciation, un labyrinthe vasculaire appelé plexus vasculaire initial ou primitif est formé (Cf. figure 16).

Figure 16 : Formation des vaisseaux par vasculogenèse et tubulogenèse. (Extrait Xu, Tubulogenesis during blood

vessel formation. Semin Cell Dev Biol, 2011)(38).

Ce réseau primitif est ensuite complété par le mécanisme de tubulogenèse.

I.2. La tubulogenèse :

La tubulogenèse est un processus au cours duquel les précurseurs des cellules endothéliales organisés en cordon passent de la forme cuboïde à une forme aplatie. Ils réorganisent leurs points de jonction à la périphérie du cordon et permettent ainsi l’ouverture d’un espace entre ces cellules, espace à l’origine de la formation de la lumière du vaisseau ou lumen (Cf. figure 16).

Plusieurs mécanismes de formation du lumen ont été proposés :

- l’accumulation de sialomucine négativement chargée le long des membranes luminales opposées permet l’ouverture initiale d’un espace ressemblant à une fente entre les CE.

- des vacuoles formées à l’intérieur des cellules s’alignent au centre de la cellule et fusionnent avec celles de la cellule voisine pour créer un espace (39). Ce mécanisme est appelé « Cell hollowing » (Cf. figure 17).

- des vésicules d’exocytose libérées dans l’espace extracellulaire fusionnent et élargissent la lumière au centre du cordon (40). Ce mécanisme est appelé « Cord hollowing » (Cf. figure 17).

Figure 17 : Les différents mécanismes de tubulogenèse (formation de la lumière des vaisseaux). (Extrait de Xu,

Semin Cell Dev Biol, 2011)(38).

Puis, l’expansion du réseau vasculaire s’effectue par le mécanisme d’angiogenèse.

I.3. L’angiogenèse :

Plusieurs mécanismes permettent la formation de nouveaux vaisseaux à partir d’un vaisseau pré-existant :

- l’angiogenèse par bourgeonnement : sous l’effet de différents facteurs de croissance, les cellules endothéliales d’un capillaire sortent de leur état de quiescence, se divisent et se mobilisent pour créer un bourgeonnement endothélial qui donnera lieu à un nouveau vaisseau. (Cf. figure 18 A). Ce processus est le plus connu et le plus fréquemment retrouvé en situation

Figure 18 : Représentation des différents processus de formation des vaisseaux sanguins. (Adapté de Leite de

Oliveira, Molecular Aspects of Medicine, 2011) (41).

- l’angiogenèse par intussuception, c’est-à-dire par division (Cf. figure 18 B). Le tissu de soutien exerce une pression localisée sur la paroi du vaisseau, l’allonge et divise le vaisseau en deux vaisseaux filles. C’est un mécanisme de formation rapide de nouveaux vaisseaux : les CE n’ont pas besoin de proliférer ni de migrer, elles ont juste besoin de se réorganiser. Le vaisseau reste fonctionnel tout le long du processus. L’intussusception angiogénique a lieu pendant le remodelage vasculaire, la vascularisation tumorale et le cycle menstruel (42).

- l’angiogenèse en boucle : ce mécanisme d’expansion vasculaire a été décrit pendant la réparation tissulaire et est également un processus rapide de formation de nouveaux vaisseaux fonctionnels (43) (Cf. figure 18 C). Ce mécanisme est basé sur le concept des forces mécaniques qui régulent la croissance des vaisseaux comme le débit sanguin, la tension exercée par les tissus et les organes à l’extérieur du vaisseau et sur l’augmentation de la pression à l’intérieur des capillaires (44). Les myofibroblastes impliqués dans la reconstruction de la zone de contact lésée tirent les vaisseaux sanguins à proximité et entrent dans l’aire de remodelage comme un réseau de boucles.

Enfin, les vaisseaux se développent ensuite en diamètre et en épaisseur pariétale selon le processus appelé artériogenèse.

I.4. L’artériogenèse :

Cette étape supplémentaire de différenciation a lieu afin d’élargir le diamètre et la paroi des vaisseaux pour former les artères et les veines. La maturation de la paroi permet également l’ajout des différents composants du vaisseau comme les péricytes, la MB, les différentes lames élastiques, les spécialisations des CE en fonction du tissu ou de l’organe (comme par exemple les jonctions cellule-cellule et cellule-matrice, les fenestrations, les récepteurs, la différentiation artério-veineuse…) (Cf. figure 18 D).

Tous ces différents mécanismes permettent d’aboutir à un réseau vasculaire pleinement fonctionnel.

Seul le mécanisme d’angiogenèse par bourgeonnement sera détaillé dans la suite de ce document.

L’angiogenèse est nécessaire pendant tout le processus de reproduction (développement embryonnaire, implantation placenta, cycle menstruel) mais également lors de la réparation tissulaire et de la cicatrisation. Il est très ponctuel et ne dure pas longtemps (quelques mois lors de la reproduction, quelques jours lors de la cicatrisation). Les cellules entrent ensuite dans une phase dite de dormance encore appelée quiescence, à l’exception des organes reproducteurs. En dehors de ces cas, l’angiogenèse n’a plus lieu dans les tissus adultes sains mais peut apparaitre lors de maladies inflammatoires (comme la polyarthrite rhumatoïde, les rétinopathies diabétiques), des désordres de la peau (psoriasis, sarcome de Karposi, l’hémangiome) ou au cours du développement des cancers.

II. Le switch angiogénique :

La maintenance du système vasculaire est finement régulée par un ensemble de facteurs favorisant la formation de nouveaux vaisseaux appelés facteurs pro-angiogéniques et des facteurs empêchant cette formation appelés facteurs anti-angiogéniques. C’est la proportion

Lorsque les vaisseaux sont au repos, il y a un équilibre qui est établi entre ces facteurs pro- et anti-angiogéniques : on parle de balance angiogénique. Mais, lorsqu’il y a une nécessité de former de nouveaux vaisseaux, les proportions entre ces différents facteurs sont modifiées et contribuent à faire pencher cette balance en faveur d’une activité pro-angiogénique ; on parle de switch angiogénique (Cf. figure 19). De la même manière, la déstructuration des vaisseaux peut être obtenue après diminution des molécules pro-angiogéniques ou augmentation des molécules anti-angiogéniques.

Figure 19 : La balance angiogénique (Extrait de Sudhakar, JBB, 2009)(45).

II.1. Les facteurs pro-angiogéniques :

De nombreuses molécules sont dites pro-angiogéniques car elles induisent différents processus impliqués dans l’angiogenèse. Leurs mécanismes d’actions sont résumés dans le tableau 1.

II.2. Les facteurs anti-angiogéniques :

Les principales molécules endogènes à activité anti-angiogénique proviennent de la dégradation de la membrane basale par différentes protéases ; d’autres sont sécrétées par les cellules endothéliales ou par le microenvironnement et agissent sur la prolifération et la migration des cellules endothéliales (Cf. tableau 2).

Facteurs angiogéniques Mécanismes d’action Facteurs de croissance :

Famille du VEGF ↑ la perméabilité vasculaire, ↑ la prolifération et la migration des CE ↑ l’activateur du plasminigène, ↓ l’apoptose des CE

PlGF ↑ l’angiogenèse pathologique

Famille du FGF ↑ la prolifération et la migration des CE, ↑ l’activateur du plasminogène, ↑ les intégrines αvβ3 et autres molécules d’adhésion

Pléiotrophine ↑ la prolifération et la différenciation des CE

PDGF ↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE, stabilisation des vaisseaux

HGF/SF ↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE EGF / TGF-α ↑ la synthèse de facteurs pro-angiogéniques, prolifération des CE TGF-β Stabilisation des vaisseaux

EPO Prolifération des CE

Système des angiopoïétines :

Ang-1 et Tie-2 ↑ la stabilisation des néovaisseaux, ↓ la perméabilité vasculaire

Ang-2 en présence de VEGF Déstabilise les vaisseaux pour permettre la modification du réseau vasculaire

Médiateurs de l’inflammation et cytokines :

TNF-α ↑ la différentiation des CE IL-8 ↑ la prolifération des CE

IL-3 ↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE Prostaglandines E1, E2 ↑ la différenciation des CE

IL-4 ↑ la migration et la différenciation des CE

TGF-α ↑ la production de molécules de la MEC, du VEGF, de l’IL-8 et du PDGF IGF-1 ↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE, induction du VEGF,

↑ l’activateur du plasminogène, ↓ l’apoptose des CE

Molécules de la MEC, molécules d’adhérence cellulaire, protéases matricielles et inhibiteurs :

Gangliosides, acide hyaluronique, laminine, tenascine, collagène IV

↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE

uPA et tPA / MMP ↑ le remodelage de la MEC, libère et active de nombreux facteurs de croissance PAI

TIMP

↑ la stabilisation des néovaisseaux en empêchant la dissolution de la MEC PECAM Molécule d’adhésion nécessaire à la survie des CE, migration des CE,

stabilisation des vaisseaux

E-sélectine / ICAM-3 Molécules exprimées dans les néovaisseaux associés aux tumeurs, mécanismes inconnus

VE-Cadhérine Stabilisation des vaisseaux, ↓ l’apoptose des CE

Intégrines Interaction avec la MEC et les protéases, importante pour la migration des CE, liaison avec le VEGF, ↓ l’apoptose des CE

Oncogènes tumoraux :

Ras ↑ la synthèse du VEGF et des TGF-α et Ŕβ, ↓ la synthèse de la TSP-1 P53 ↑ la synthèse du VEGF, ↓ la synthèse de la TSP-1

Von Hippel Lindau ↑ la synthèse du VEGF

Autres :

COX-2 ↑ la vasodilatation

Angiogénine ↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE Adrénomédulline ↑ la vasodilatation, la prolifération et la migration des CE Œstrogènes ↑ la prolifération, la migration et la différenciation des CE Proliférine ↑ la migration des CE

Facteurs angiostatique Mécanismes d’action Fragments protéiques :

Angiostatine (fragment du plasminogène ↓ la prolifération et la migration, ↑ l’apoptose des CE ↑ l’activateur du plasminigène, ↓ l’apoptose des CE Endostatine (fragment du collagène XVIII) ↓ la prolifération, ↑ l’apoptose des CE

Fragment de l’anti-thombine III ↓ la prolifération, ↑ l’apoptose des CE

plasminigène, ↑ les intégrines αvβ3 et autres molécules d’adhésion

Prolactine 16 kDa ↓ la prolifération, ↓ angiogenèse induite par le FGF-2

Médiateurs solubles :

Thrombospondine-1 ↓ la prolifération, ↑ l’apoptose des CE Troponine ↓ la prolifération des CE

réseau vasculaire

Interféron-α ↓ la prolifération, ↑ l’apoptose des CE, ↓ angiogenèse induite par le bFGF

Interféron-γ ↓ la prolifération des CE

TGF-β ↓ la prolifération et la migration des CE, ↓ les activateurs du plasminogène, ↑ TIMP, ↑ l’apoptose des CE

TNF-α ↓ la prolifération induit par FGF, ↑ l’apoptose des CE

Facteur Plaquettaire-4 ↓ la prolifération, ↓ angiogenèse induite par le FGF-2 et l’IL-8 CXC chimiokines sans motifs ERL ↓ liaison FGF et VEGF sur leur récepteur

IL-12 ↑ l’interféron-γ IL-4 ↓ la migration des CE Inhibiteur du VEGF (VEGFl) ↓ la prolifération des CE TIMP ↓ l’activité des MMP PAI ↓ l’activité de l’uPA

MMP Génère les fragments protéiques Acide rétinoïque ↓ la migration des CE

Angiopoïétine-2 ↓ la maturation des vaisseaux, antagoniste de l’ang-1, déstabilisation des vaisseaux

PEDF ↓ la prolifération et la migration des CE

Tableau 2 : Liste des principaux facteurs anti-angiogéniques et leurs mécanismes d’action. (Adapté de Distler Q

III. Les différentes étapes de l’angiogenèse par