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- l’acide acétique est la deuxième espèce condensable majoritaire. Sa teneur est d’environ 10-15 % m/m, et varie suivant les conditions opératoires ;

- en dehors de ces deux composés, les condensables sont composés de dizaines voire d’une centaine d’espèces. Une identification la plus exhaustive possible paraît nécessaire ;

- Hormis l’eau et l’acide acétique, les espèces condensables quantifiées sont nombreuses et présentes en faible proportion. Cette complexité, comparable à celle des huiles de pyrolyse, rend la quantification des condensables d’autant plus délicate. Par conséquent, une fraction importante des condensables reste non quantifiée voire inconnue.

2.3.

Mécanismes et cinétiques de formation des espèces

condensables et incondensables

Les mécanismes de dégradation du solide et de formation des espèces condensables et incondensables font l’objet des travaux de thèse d’Elvira RODRIGUEZ au CEA Grenoble, dans le cadre du projet INVERTO. Ces mécanismes ne seront donc pas étudiés en détail ici. Seront brièvement présentés :

- la formation de certaines espèces condensables et incondensables et les mécanismes de conversion des constituants majoritaires associés ;

- l’influence des minéraux sur la formation des condensables.

2.3.1. Espèces formées par dégradation de la cellulose

Chen, Kuo (2011) et Nocquet (2012) ont montré expérimentalement que la cellulose est très faiblement dégradée à 250-260 °C (environ 5 % de perte de masse), tandis qu’elle est dégradée beaucoup plus fortement à 280-290 °C (environ 70 % de perte de masse). Il est donc possible que la formation des condensables essentiellement issus de la cellulose, tels que les anhydrosaccharides, furanes, glycolaldéhyde, soit faible en dessous de 250-260 °C, et plus forte à partir de 280-290 °C.

D’autre part, des interactions entre la cellulose et le xylane, et entre la cellulose et la lignine, ont également été mises en évidence. Ces interactions entraînent un ralentissement de la

dégradation du solide et des rendements en condensables plus faibles que lorsque les constituants sont torréfiés séparément (Nocquet, 2012).

La dépolymérisation de la cellulose, par rupture des liaisons "-1,4, conduit à la formation d’espèces condensables et incondensables, notamment de levoglucosan, furfural, formaldéhyde, CO2 et CO (Browne, 1958 ; Nocquet, 2012 ; Collard, 2012). Il est probable

que d’autres anhydrosaccharides et d’autres furanes soient également produits par dépolymérisation de la cellulose. Nocquet (2012) a notamment identifié DGP, levoglucosenone, 1,6-anhydro-!-D-galactofuranose, 2-furanméthanol, 5-méthyl-2- furancarboxaldehyde dans les espèces condensables issues de torréfaction de cellulose.

Enfin, la pyrolyse de la cellulose entraîne la formation de glycolaldéhyde et 1-hydroxy-2-propanone par fragmentation de la cellulose amorphe (Collard, 2012). Cette réaction pourrait également se produire en torréfaction. Richards (1987) observe la formation de glycolaldéhyde par pyrolyse de cellulose à 350 °C. Le mécanisme proposé est une rupture du cycle du glucose.

2.3.2. Espèces formées par dégradation des hémicelluloses

La dégradation des hémicelluloses est décrite suivant plusieurs mécanismes complexes. Les hémicelluloses conduisent notamment à la formation (Repellin, 2006 ; Nocquet, 2012 ; Collard, 2012) :

- d’acide acétique par fragmentation des groupements acétyles (-COCH3) ;

- de méthanol par fragmentation des groupements méthoxy (-O-CH3) ;

- d’acide formique par fragmentation ; - de furfural par dépolymérisation.

La pyrolyse rapide d’hémicelluloses à 400 °C entraîne également la formation d’anhydrosaccharides, tels que levoglucosan et levoglucosenone (Alén et al., 1996). Lors d’essais de torréfaction de xylane en lit fixe, Nocquet (2012) a montré la présence de levoglucosan et de 1,6-anhydro-!-D-galactofuranose dans les condensables. La formation d’anhydrosaccharides par dépolymérisation des hémicelluloses aurait donc aussi lieu en torréfaction.

2.3.3. Espèces formées par dégradation de la lignine

La dégradation de la lignine peut se produire par fragmentation de la chaîne alkyle et par dépolymérisation. Ces réactions conduisent à la formation (Voinot, 2007 ; Collard, 2012) :

- de méthanol, de formaldéhyde, d’acide formique par fragmentation ;

- de composés aromatiques, tels que 2-méthoxyphénol, vanilline, eugénol, 2,6-diméthoxyphénol, syringaldéhyde par dépolymérisation.

Nocquet (2012) a montré la présence de nombreux composés phénoliques dans les condensables de torréfaction de lignine, tels que 2-méthoxy-4-vinylphénol, 4-méthylphénol, 4-éthyl-2-méthoxyphénol.

Les composés aromatiques formés ont une structure très proche de la lignine initiale. L’eugénol, le 2-méthoxyphénol, la vanilline sont très proches des unités de lignine de type G. Le syringaldéhyde et le 2,6-diméthoxyphénol sont, eux, très proches des unités de lignine de type S.

Ainsi, il est probable que la composition H/G/S de la lignine influence les rendements de ces composés aromatiques.

Par ailleurs, la dégradation de la lignine par pyrolyse entraîne la formation d’une fraction de haute masse molaire et insoluble dans l’eau, appelée lignine pyrolytique. D’après Scholze, Meier (2001), cette fraction représente entre 14 et 28 % des huiles de pyrolyse en base anhydre, et a une masse molaire moyenne de 650-1300 g.mol-1(Mohan et al., 2006).

Si la lignine est nettement moins dégradée en torréfaction qu’en pyrolyse, il ne peut néanmoins pas être exclu que les espèces condensables de torréfaction contiennent également de la lignine pyrolytique. Cette dernière n’a, à notre connaissance, jamais été étudiée en torréfaction.

2.3.4. Espèces formées par dégradation de tous les constituants

Tous les constituants du bois se décomposent en formant de l’eau, du CO2 et du CO.

Le CO2 est formé :

- par fragmentation de la cellulose activée ;

- par fragmentation des groupements carboxyles (-COOH) présents sur les acides hexuroniques des hémicelluloses et par fragmentation des groupements acétyles ; - par rupture de la liaison entre C" et C$ de la lignine.

Quant au CO, il est formé :

- par fragmentation de la cellulose activée ;

- par fragmentation des groupements acétyles et méthoxy des hémicelluloses ; - par rupture de la liaison entre C" et C$ de la lignine.

D’après Heidari et al. (2014), la proportion en CO dans les gaz incondensables augmente encore jusqu’à 600 °C, représentant à cette température 44 % m/m des gaz incondensables. Ceci serait causé par des réactions secondaires de craquage des espèces condensables en phase vapeur. Ce phénomène est rencontré aux températures de pyrolyse (Boroson et al., 1989). Il est possible qu’il ait également lieu en torréfaction.

2.3.5. Influence des minéraux

L’influence des cendres sur les mécanismes de torréfaction et le rendement en solide a été étudiée par quelques auteurs. L’imprégnation de minéraux, en particulier KCl et K2CO3

jusqu’à 1,2 K+ % m/m, sur différentes biomasses entraîne une baisse du rendement en solide torréfié (Saleh et al., 2013 ; Khazraie Shoulaifar et al., sous presse). A contrario, le lavage de biomasse présentant naturellement une forte teneur en minéraux, telle que la paille de blé, entraîne une hausse du rendement en solide par rapport à la biomasse non lavée (Saleh et al., 2013). De plus, les essais réalisés en ATG montrent une baisse de la température de conversion maximale du solide pour les biomasses imprégnées en KCl et K2CO3 par rapport

aux biomasses lavées et non lavées. Les rendements en solide des essais de torréfaction sur biomasses lavées, non lavées et imprégnées en fonction de la teneur en K sont représentés sur la Figure 2.1(Saleh et al., 2013).

Figure 2.1. Rendements en solide (% m/m sec) d’essais de torréfaction à 270 et 300 °C de biomasses lavées, non lavées et imprégnées en KCl et K2CO3(Saleh et al., 2013).

Aux températures de pyrolyse, l’imprégnation de biomasses avec K+ et Na+ entraîne une baisse des rendements en huiles et une hausse des rendements en char, en eau et en gaz. La présence de minéraux inhibe la dépolymérisation de la cellulose, ce qui explique la baisse de rendements en huiles. En parallèle, la présence de minéraux favorise les réactions de réarrangement, entraînant la hausse du rendement en char, et de fragmentation, entraînant la hausse des rendements en eau et en gaz (Jensen et al., 1998 ; Collard, 2012).

On constate donc une différence d’influence des minéraux sur le rendement en solide, suivant que la température de réaction correspond à la pyrolyse ou à la torréfaction.

Aux températures de torréfaction, l’influence des minéraux sur les rendements en espèces condensables et incondensables n’a, à notre connaissance, pas été étudiée. Si les mécanismes observés aux températures de pyrolyse ont également lieu aux températures de torréfaction, il est possible que les rendements en gaz incondensables augmentent avec la teneur en minéraux. De même, si les minéraux inhibent la dépolymérisation de la cellulose, il est possible que les rendements en anhydrosaccharides et furanes diminuent. Cette hypothèse reste à étudier. L’influence des minéraux sur les produits de la torréfaction et sur les espèces condensables en particulier est un sujet vaste, qui nécessite une étude expérimentale dédiée. C’est pourquoi elle ne sera pas étudiée en détails ici.

2.3.6. Cinétique de formation des espèces condensables et

incondensables

La cinétique de formation des espèces condensables et incondensables n’a été étudiée que par quelques auteurs (Bridgeman et al., 2008 ; Nocquet, 2012 ; Bates, 2012).

Bridgeman et al. (2008) ont décrit expérimentalement les cinétiques de formation de quelques espèces condensables et incondensables, à savoir CO2, CO, acide acétique, acide formique,

formaldéhyde, acétaldéhyde, méthanol et méthane. Les expériences consistent en la torréfaction de baldingère faux-roseau à 248 °C en ATG couplé à un FTIR (en anglais

Fourier transform infrared spectroscopy ; spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier).

Ce couplage permet de suivre simultanément la perte de masse du solide et la formation des espèces condensables.

L’évolution de l’absorbance des espèces condensables et incondensables est représentée sur la

Figure 2.2.

Figure 2.2. Cinétique de formation d’espèces condensables et incondensables lors de la torréfaction de baldingère faux-roseau à 248 °C en ATG-FTIR (Bridgeman et al., 2008).

On constate que les courbes d’absorbance des espèces étudiées ont des allures similaires. En particulier, les pics de formation de ces espèces sont simultanés, à environ 30 min de temps de séjour. Ces pics correspondent au début du palier à la température d’étude.

Bates (2012) et Nocquet (2012) décrivent la formation des produits de la torréfaction par un modèle à deux réactions successives. Ce modèle permet de rendre compte d’une première étape de réaction rapide et d’une seconde étape plus lente. Il a initialement été développé pour représenter la dégradation thermique du xylane en condition de pyrolyse (Di Blasi, Lanzetta, 1997). La première réaction produit un intermédiaire réactionnel solide et une partie des espèces volatiles. La seconde réaction produit le solide torréfié ou char et les espèces volatiles restantes.

Le modèle de Bates décrit la production d’eau, acide acétique, acide formique, acide lactique, méthanol, furfural et 1-hydroxy-2-propanone issus de la torréfaction de saule. Ce modèle s’appuie sur la composition des condensables de saule décrite par Prins (2005).

Quant au modèle de Nocquet, il décrit la formation d’eau, acide acétique, formaldéhyde, méthanol, furfural, CO2 et CO à partir de la torréfaction de xylane, cellulose, lignine et des

mélanges des constituants deux à deux. Les rendements modélisés sont comparés aux rendements mesurés expérimentalement. Ces derniers sont obtenus à partir de la torréfaction des constituants pris séparément dans un réacteur à lit fixe couplé à un FTIR préalablement étalonné. Le modèle permet finalement de prévoir les rendements des espèces avec une précision satisfaisante, mis à part furfural et acide formique.

2.4.

Méthodes de récupération et d’analyse des