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4.5. Conception et assemblage du système de récupération des espèces condensables

4.5.2. Conception du système de récupération des espèces condensables

La conception de ce système s’appuie sur l’utilisation du logiciel ProSimPlus. ProSimPlus est un simulateur de procédés industriels en régime permanent, permettant de résoudre des équations de bilans matière et énergie pour les opérations unitaires du procédé, de calculer les caractéristiques des courants, de dimensionner les équipements du procédé.

4.5.1. Objectifs

Les objectifs du système de récupération des condensables sont les suivants :

- Dans un premier étage, récupérer par condensation les espèces condensant à haute température ;

- Dans un deuxième étage, récupérer par condensation le maximum d’espèces condensables ;

- Dans un troisième étage, piéger le formaldéhyde résiduel resté en phase gazeuse par barbotage dans l’eau, c’est-à-dire par absorption réactive gaz-liquide.

En effet, un modèle thermodynamique a été développé dans le cadre de la thèse de Mylène DETCHEBERRY au LGC, et représente l’équilibre thermodynamique des gaz de torréfaction (Detcheberry et al., sous presse). Ce modèle montre que certaines espèces, telles que le levoglucosan et l’eugénol, peuvent être condensées à haute température, sans condensation des espèces majoritaires plus légères, telles que l’eau et l’acide acétique. L’objectif en aval étant de séparer et purifier les espèces condensables, l’approche de condensation étagée en température paraît pertinente car elle facilite l’opération de séparation ultérieure.

Quant à l’étage 3, une étude des équilibres de phases du système formaldéhyde-méthanol-eau montre que le formaldéhyde resté en phase gazeuse en sortie de deuxième étage pourra être piégé par absorption réactive dans l’eau (Detcheberry et al., 2015).

Des systèmes de récupération fractionnée ont également été développés pour les huiles de pyrolyse. En général, les anhydrosaccharides et composés phénoliques sont récupérés, ensemble ou séparément suivant la complexité du système. Ensuite, l’eau et les autres espèces légères sont récupérées par condensation (Pollard, 2009 ; Westerhof et al., 2011 ; Tumbalam Gooty, 2012). Ces systèmes appliqués à la pyrolyse confirment donc la pertinence d’une approche de récupération fractionnée des espèces condensables de torréfaction.

4.5.2. Conception du système de récupération des espèces

condensables

Les objectifs du procédé simulé sont de déterminer les températures de refroidissement de chacun des étages de condensation et de déterminer leurs surfaces d’échange.

La conception du système de récupération des espèces condensables peut se décomposer en plusieurs étapes :

i. Le choix des constituants et de ses caractéristiques (débits, températures des courants) ;

ii. Le choix du modèle thermodynamique ; iii. L’élaboration du schéma de procédé ;

iv. Le calcul des conditions opératoires et le dimensionnement.

On étudiera le cas où les débits de gaz condensables et incondensables sont majorants. On choisit ici le cas de la torréfaction de miscanthus à 300 °C pendant 45 min, avec un débit de biomasse de 6 kg.h-1, un débit de gaz vecteur N2 de 3 NL.min-1. Il s’agit d’un cas où le débit

d’espèces condensables est important, d’environ 2 kg.h-1.

4.5.2.1. Constituants et caractéristiques

Les constituants retenus formant le mélange gazeux en entrée du système de condensation et leurs caractéristiques sont rassemblés dans le Tableau 4.13. Le choix des constituants du modèle et sa représentativité du mélange réel sont détaillés dans la section 4.5.2.5.

Le mélange gazeux est à une température initiale de 300 °C. Le débit de chaque espèce est calculé à partir de son rendement obtenu sur les essais menés sur Aligator (chapitre 3). Ensuite, les débits des gaz condensables sont corrigés, à la hausse, pour tenir compte des débits des espèces non quantifiées et des espèces non prises en compte dans le modèle. Cette hypothèse est discutée dans la section 4.5.2.5.

Tableau 4.13. Constituants formant le mélange gazeux et débits d’entrée. Type de constituant Constituant Rendement (mg.g-1 biomasse) * Débit d’entrée (g.h-1) Débit d’entrée normalisé (g.h-1) ** Gaz vecteur N2 - 225 225 Gaz incondensables de torréfaction CO2 106,1 637 637 CO 50,5 303 303 Espèces condensables Eau 160,49 963 1396 Acide acétique 40,01 240 348 1-hydroxy-2- propanone 15,17 91 132 Méthanol 8,90 53 77 Acide formique 5,53 33 48 Furfural 2,66 16 23 Acide propanoïque 2,11 13 19 Dextrose 1,02 6 9 Hydroquinone 0,48 3 4 Phénol 0,56 3 4 Total condensables 236,93 1421 2059

* Les rendements sont ceux mesurés lors des essais sur Aligator (cf. section 3.3.4.3).

** Le débit d’entrée normalisé est obtenu en multipliant le débit d’entrée par un facteur 1,45 (cf. section 4.5.2.5).

Les constituants retenus dans le modèle sont ceux ayant leurs coefficients d’interaction de groupes disponibles dans le modèle thermodynamique choisi. Le dextrose a été choisi pour représenter le comportement en condensation du levoglucosan. Cette hypothèse est discutée dans la section 4.5.2.5.

Le fluide réfrigérant est du même type pour les deux étages de condensation, à savoir un mélange monoéthylène glycol-eau à 50 % m/m, et à un débit de 10 kg.min-1. Pour les deux étages, l’écart de température entre les fluides chaud et froid est fixé à 5 °C.

4.5.2.2. Modèle thermodynamique

Le modèle thermodynamique retenu est le modèle UNIFAC modifié Dortmund. UNIFAC (en anglais universal functional activity coefficient, coefficient d’activité fonctionnel universel) est un modèle thermodynamique prédictif des équilibres liquide-vapeur des constituants du mélange modélisé. Les constituants sont décomposés en groupes fonctionnels, et le modèle s’appuie sur les interactions des groupes fonctionnels présents sur les constituants du mélange

pour déterminer leur activité27. Il permet notamment de prévoir l’équilibre liquide-vapeur d’un mélange. Le calcul des coefficients d’activité par cette méthode se décompose en deux termes, l’un appelé « combinatoire », résultant essentiellement des différences de formes et de tailles des groupements, l’autre appelé « résiduel » prenant en compte les interactions entre groupements. Le modèle UNIFAC modifié Dortmund rend les coefficients d’interaction de groupes dépendants de la température. D’autre part, l’évaluation du terme combinatoire est différente (Lohmann et al., 2001).

4.5.2.3. Schéma du procédé

Le schéma du procédé est représenté sur la Figure 4.15.

Figure 4.15. Schéma du procédé de condensation étagée des gaz de torréfaction développé sous ProSimPlus.

Chaque échangeur de chaleur, symbolisé est connecté à deux courants entrants et deux courants sortants : un mélange gazeux entrant et un mélange liquide/gazeux sortant, et un fluide réfrigérant entrant et sortant. La température de sortie du mélange liquide/gazeux de

27

Pour un mélange de gaz parfaits, l’activité chimique d’un corps est égale à la pression partielle de ce corps dans le mélange. Pour un mélange liquide idéal, l’activité est égale à la concentration du corps dans le mélange. Les coefficients d’activité prennent en compte la non-idéalité du mélange liquide.

chaque échangeur est imposée, et le modèle thermodynamique détermine les équilibres liquide-vapeur correspondants en sortie de chaque échangeur.

4.5.2.4. Températures de refroidissement et surfaces d’échange

Les taux de condensation de chacune des espèces condensables présentes dans le mélange modélisé sont représentés sur la Figure 4.16, en fonction de la température de sortie de l’étage 1.

Figure 4.16. Taux de condensation du mélange gazeux en fonction de la température de sortie de l’étage 1.

Le modèle thermodynamique prévoit que le refroidissement entre 90 et 100 °C des gaz en sortie d’étage 1 entraîne la condensation du dextrose et de l’hydroquinone, sans condensation des autres espèces. On peut supposer que des molécules similaires en terme de structure chimique et ayant une température de condensation voisine auront le même comportement, telles que l’eugénol, le 2,6-dimethoxyphénol, le LAC. Cette gamme de température sera donc visée sur le premier étage de condensation de Vibrato, et la température en sortie de l’étage 1 sera fixée à 100 °C dans la suite de la conception du système.

Concernant l’étage 2, si la température de sortie de cet étage atteint 0 °C, les taux de condensation de toutes les espèces condensables du mélange modélisé sont supérieurs à 97 %.

0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100% 0 50 100 150 T aux de con den satio n (% )

Température des gaz en sortie d'étage 1 (°C)

Dextrose (levoglucosan) Hydroquinone Phénol 1-hydroxy-2-propanone Acide formique Acide propanoïque Eau Acide acétique Furfural Méthanol

Les surfaces d’échange, la puissance échangée entre les fluides chaud et froid sont rassemblées dans le Tableau 4.14.

Tableau 4.14. Surfaces d’échange et puissances échangées des étages de condensation 1 et 2.

Paramètre Unité Étage 1 Étage 2

Température de sortie des gaz °C 100 0

Température d’entrée du fluide réfrigérant

°C 95 -5

Coefficient d’échange global W.m-2.K-1 170 170

Type d’échangeur - Monopasse à contre-

courant

Monopasse à contre- courant

Surface d’échange m2 0,030 0,219

Puissance échangée W 279 1206

La valeur du coefficient d’échange global, de 170 W.m-2.K-1, est obtenue à partir de données de la littérature, dans l’hypothèse d’hydrocarbures en traces dans un courant de gaz inerte, où le fluide froid est de l’eau (Ludwig, 2001, p. 94).

La puissance échangée dans l’étage 2 est supérieure à celle dans l’étage 1. En effet, la majorité des constituants du mélange, notamment l’eau et l’acide acétique condense dans l’étage 2.

4.5.2.5. Hypothèses et limites du système modélisé

4.5.2.5.1. Hypothèse de représentativité du modèle

Hormis N2, CO2 et CO, dix constituants sont retenus dans le modèle. Les constituants pouvant

être retenus sont ceux ayant leurs coefficients d’interaction de groupes disponibles. Les espèces majeures, telles que l’eau, trois acides, une cétone, un furane, un anhydrosaccharide et deux phénols, sont prises en compte dans le modèle.

Cependant, certaines espèces quantifiées ne sont pas prises en compte, telles que le formaldéhyde, le glycolaldéhyde ou le 2-furanméthanol. En effet, les décompositions UNIFAC de ces espèces ne sont pas disponibles, les groupes disponibles dans UNIFAC ne peuvent pas représenter certaines fonctions chimiques de ces espèces. D’autre part, les espèces non quantifiées et inconnues ne sont bien entendu pas incluses dans le modèle.

Le débit des constituants condensables du modèle est de 1421 g.h-1, soit 69 % du débit total de condensables28. On a choisi ici de corriger à la hausse les débits des constituants du modèle pour atteindre le débit total de condensables. Le facteur de correction est donc égal à

28

Ce débit total de condensables est estimé par calcul à partir du rendement en condensables mesuré sur Aligator (345 mg.g-1) et du débit de biomasse (6 kg.h-1).

1/0,69 = 1,45. On fait donc l’hypothèse que la fraction manquante a le même comportement thermodynamique que la fraction modélisée. En effet, le modèle a pour but de représenter les équilibres liquide-vapeur de l’ensemble des espèces condensables. Il n’a donc pas paru pertinent de ne tenir compte directement que des débits des espèces quantifiées.

4.5.2.5.2. Hypothèse de substitution du levoglucosan par le dextrose Le dextrose a été choisi dans ce modèle, bien que cette espèce n’ait jamais été identifiée en torréfaction. Le but est de représenter l’équilibre liquide-vapeur du levoglucosan, qui ne peut pas être pris en compte dans le modèle. Quelques propriétés de ces deux molécules sont rassemblées dans le Tableau 4.15.

Tableau 4.15. Propriétés du levoglucosan et du dextrose.

Molécule Levoglucosan Dextrose

Numéro CAS 498-07-7 50-99-7

Formule brute C6H10O5 C6H12O6

Formule topologique

Température de condensation 384 °C 344 °C

Ces deux molécules ont en commun un cycle carboné portant un atome d’oxygène et trois groupements hydroxyle (cinq pour le dextrose). D’autre part, leurs températures de condensation de corps pur sont très élevées. Ceci amène à utiliser le dextrose pour représenter le comportement thermodynamique du levoglucosan.

4.5.2.5.3. Non-prise en compte de l’étage 3

Enfin, la conception de l’étage 3 ne peut pas s’appuyer sur ce modèle. En effet, ce dernier ne représente pas les équilibres chimiques du système formaldéhyde-méthanol-eau.

4.5.3. Assemblage du système de récupération des espèces