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3.1- Mécanismes cellulaires essentiels de contrôle de la réponse cellulaire

Chapitre 1 : Bibliographie

IV. 3.1- Mécanismes cellulaires essentiels de contrôle de la réponse cellulaire

La MEC a un rôle important de transmission des signaux extracellulaires à la cellule qui les intègre en induisant des voies de signalisation et des réponses cellulaires adaptées aux propriétés du microenvironnement. En fait, la cellule est capable de percevoir des signaux mécaniques exerçant sur elle et autour d‘elle (étirement, pression, rigidité du support), des signaux solubles (facteurs de croissance) et insolubles matricielles (FN, collagène…), ainsi que des modifications d‘ordre biologiques (ligands spécifiques), chimiques, et structurelles de son environnement à l‘échelle nanométrique (figure 43). La détection de ses variations repose sur des différents mécanismes faisant appel aux molécules d‘adhésion et au cytosquelette [239] et induisant des changements dans la cellule via diverses voies de signalisation : c‘est la mécanotransduction.

Par définition, la mécanotransduction étant un procédé permettant de transformer des signaux mécaniques en signaux biochimiques, elle est considérée comme l‘une des premières, si ce n‘est la première forme de perception cellulaire. A ce titre, elle a reçu une attention toute particulière et de nombreux efforts sont faits pour mieux comprendre son fonctionnement. Au niveau moléculaire, il existe de nombreuses voies de signalisation qui ont été identifiés en mécanotransduction, y compris les voies Ras/MAPK, PI3K/Akt, RhoA/ROCK, YAP/TAZ, Wnt/β-catenin, ou TGF-β pathways [249 – 251] (Figure 44).

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Figure 43: Schéma représentant les différents aspects du microenvironnement cellulaire [245].

(a) Adhésion des cellules à des ligands d‘adhésion adsorbés sur des surfaces non traités et leur interaction avec des signaux solubles. (b) Complexe de la fonctionnalisation biologique (vert) via des signaux insolubles dérivés de la MEC. (c) Matériaux chimiquement fonctionnalisés (rouge) permettent une présentation adaptée des ligands bioactifs.

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Figure 44: Les voies de signalisation induites lors de la mécanotransduction (flèches noires) interférées avec les

voies de signalisations mendiées par les facteurs solubles (flèches bleues) qui participent à la régulation du destin cellulaire [248].

Plusieurs acteurs ont déjà été identifiés, parmi lesquels les intégrines, les cadhérines, les canaux ioniques activés par l‘étirement (Stretch Activated ion Channels : SACs), le cytosquelette et le noyau.

Les intégrines sont au cœur de la transmission des signaux de l‘extérieur vers l‘intérieur de

la cellule (outside-in) mais également de l‘intérieur vers l‘extérieur (inside-out) (figure 45). Ce sont des protéines transmembranaires participant à l‘adhésion des cellules avec la MEC et servant de trait d‘union avec le cytosquelette par l‘intermédiaire de protéines de liaison de l‘actine (Actin Binding Proteins : ABPs). La liaison d‘une Ig avec son ligand est d‘abord faible puis se renforce sous l‘action des contraintes exercées sur elle. Dans un premier temps, et en présence de ces forces, l‘Ig passe à une conformation de plus haute affinité (forme active), permettant de stabiliser l‘interaction. Cette réponse de l‘Ig est plus efficace si la contrainte est appliquée rapidement ou si elle est cyclique. Des protéines des complexes d‘adhésion focale comme la vinculine, taline, kindlin sont également recrutées. Dans un second temps, d‘autres Ig de haute affinité vont être recrutées à leur tour pour interagir localement avec les protéines extracellulaires au niveau de la liaison, ce qui renforce le complexe d‘adhésion focale. Ces adhésions focales vont ainsi transmettre des signaux biochimiques par l‘intermédiaire de RhoA GTP, de c-src et de la Focal Adhesion Kinase (FAK) et entrainer une modulation de l‘organisation et de la contraction du cytosquelette [249]. L‘activation des Ig est dépendante de la présence de cations divalents (magnésiums, calcium ou manganèse), leur conformation est inactive, et leur liaison au ligand est très faible en cas d‘absence de liaisons de ces ions [56].

Les cadhérines sont également des protéines impliquées dans l‘adhésion cellulaire mais

participent aux interactions des cellules entre elles. Soumises à des contraintes, elles répondent de façon similaire aux Ig, en changeant de conformation et en recrutant d‘autres cadhérines pour former des clusters très semblables aux complexes d‘adhésion focale des intégrines. La kinase de la chaine légère de la myosine II (Myosin II Light Chain Kinase : MLCK) et ROCK (RhoAssociated Protein Kinase) joueraient un rôle essentiel dans le renforcement des liaisons des cadhérines et dans le recrutement des clusters, notamment en activant Rho et en phosphorylant la chaîne légère de la myosine II (MLC) [250].

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Figure 45: Activation des intégrines [56].

(a) Conformation inactive des intégrines en absence des cations divalents. (b) Signalisation inside-out : la conformation des intégrines est active grâce à la présence des cations. La liaison des protéines taline et kindline aux intégrines leur facilite d‘acquérir une conformation active d‘une part et leur liaison aux ligands d‘autre part. (c) Signalisation ouside-in : recrutement et regroupement des intégrines.

Les canaux activés par l‘étirement sont des canaux calciques transmembranaires répondant aux contraintes mécaniques. Ils s‘ouvrent en réponse à un étirement et permettent un influx d‘ions calciques dans le cytoplasme de la cellule. Ils seraient responsables de l‘induction d‘un certain nombre de mécanismes physiologiques ou pathologiques dépendants du calcium dans la cellule. Ils sont notamment soupçonnés de participer à la transformation cancéreuse, à l‘activité métastatique et la migration cellulaire. Vladislav et al. ont déterminé en 2014 qu‘ils pourraient entrainer une signalisation via les canaux potassiques dépendants du calcium. Il est également envisageable que cet influx de calcium soit pris en charge par la calmoduline et régule la MLCK, entrainant par une voie de signalisation la contraction de l‘actinomyosine et le remodelage cellulaire [251].

Le cytosquelette est composé de nombreuses molécules dont l‘actine ainsi que de protéines liées à l‘actine (ABP). Il donne sa morphologie à la cellule et subit les forces exercées sur elle. Il est lié indirectement à certaines molécules membranaires comme par exemple au niveau des adhésions focales et il constitue les fibres de stress [252]. Sous l‘action des contraintes mécaniques ou via les signalisations force-dépendantes déclinées plus haut, le cytosquelette va se remodeler et donc changer l‘architecture de la cellule [253]. Le noyau traite des signaux intracellulaires issus de stimuli mais peut répondre directement aux contraintes mécaniques par l‘intermédiaire de son « squelette ». Il possède un réseau de

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lamines sous sa membrane interne qui se lie à des protéines transmembranaires (comme LAP2, emerine…) et à l‘hétérochromatine. La déformation du cytosquelette va avoir un impact directement sur la structure du noyau par les contraintes mécaniques qu‘elle exerce sur les complexes LINC (Linkers of Nucleoskeleton and Cytoskeleton) comme les trimères de SUN et va entrainer des changements de conformations de protéines qui pourront engendrer des interactions altérées, ou provoquer la dépolarisation des lamines nucléaires et donc un remodelage de la chromatine. Fedorchak et al. ont remarqué que les facteurs de transcription induits par les forces (lex-1, Egr-1 ou Pai-1 par exemple) étaient moins exprimés en l‘absence de lamines A ou C [254].

Donc, la transmission des signaux de l‘environnement extracellulaire (mécaniques, topographiques, biochimiques, électriques) vers la cellule en mettant en place des voies de signalisation intracellulaire induit des différents comportements et réponses cellulaires. Les réponses cellulaires aux différents signaux extracellulaires sont variées: adhérence, étalement, différenciation, prolifération, migration et autres. L‘adhérence et l‘étalement sont des processus d‘attachement des cellules à leur support, et d‘induction à la cellule les premiers signaux de survivre [258,259]. La différenciation est un processus par lequel une cellule se spécialise en un type cellulaire spécifique [257]. La prolifération permet aux cellules adhérées et différenciées de se multiplier. Alors que la migration correspond au processus permettant le déplacement des cellules en fonction des caractéristiques du microenvironnement matriciel [258].