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DISCUSSION SCIENTIFIQUE

VIII.3. Logiciel CHEVILAB

VIII.3.1. Rappel sur les méthodes empiriques existantes [Ref. 77]

Jusqu’à une époque très récente, les assemblages étaient décrits dans les règlements relatifs à une technique de construction. Ainsi, les assemblages par boulonnage et rivetage étaient-ils décrits dans les règlements nationaux ou européens (Eurocode 3TP

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) de construction métallique, les liaisons par scellement de barres métalliques dans le béton dans les règlements nationaux (BAEL en France) ou européen (Code CEB 90TP

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, Eurocode 2TP 6

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) de béton armé. Les fixations pour le béton et la maçonnerie ne faisaient quant à elles, l’objet d’aucun code de calcul ou de guide technique compatible avec les autres grands codes structuraux et avec l’Eurocode 1TP

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. Cette situation pouvait durer tant que les fixations étaient utilisées pour des équipements secondaires et des charges légères. A partir du moment où elles ont pu être employées, dans le bâtiment et le génie civil, dans des applications pour lesquelles la rupture de l’ancrage pourrait entraîner des conséquences graves pour la stabilité de l’ouvrage ou pour la vie humaine ou encore des conséquences économiques importantes, il est apparu indispensable de disposer d’un code de calcul fiable, fondé sur les principes de sécurité décrits dans l’Eurocode 1 d’une part et sur les principes de la résistance des matériaux d’autre part.

Un premier code européen, inspiré de méthodes employées en Allemagne a vu le jour et a été présenté en annexe du guide UEAtcTP

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, publié en juin 1992. Les éléments novateurs de ce guide étaient les suivants :

1- prise en compte des principes de l’Eurocode 1 (résistance caractéristique, coefficients partiels de sécurité, etc.)

2- prise en compte de l’influence de l’état du béton sur la performance mécanique des chevilles de fixation (état tendu fissuré, état comprimé non fissuré),

3- prise en compte d’essais d’aptitude à l’emploi qui permettent de mettre en évidence le bon comportement des fixations lorsqu’elles sont soumises à des sollicitations ou lorsqu'elles sont mises en place dans des conditions qui s’écartent des conditions normales ,

4- prise en compte de l'expérience acquise dans ce domaine (« current experience ») et utilisation de modèles analytiques déduits, par régression multiple non-linéaire, d’un très grand nombre d’essais réalisés,

5- description de l’ensemble des modes de rupture observés. Les travaux de ce guide ont été repris et poursuivis par l’EOTATP

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et présentés dans le guide d’Agrément Technique Européen sur les chevilles métalliques pour bétonTP

10 PT publié en 1997. TP 4 PT

Eurocode 3, ENV 1993-1-1, Calcul des structures en acier, CEN/TC250, 24 avril 1992

Chapitre VIII : Discussion scientifique

Des travaux de recherche sont menés dans le monde (en Europe, aux USA et en Asie) afin de codifier le calcul des ancrages dans le béton utilisant des chevilles de fixation. Une norme américaine, ACI 355.2, publiée en janvier 2003, reprend une partie très importante du guide d’ATE.

Revenons en Europe : le guide d’ATE est presque achevé et couvrir fin 2003, début 2004 les types principaux de chevilles métallique pour béton : chevilles à expansion par vissage, à frappe, à verrouillage de forme et chevilles à scellement (dites chevilles chimiques) ainsi que les mortiers de scellement pour scellement d’armatures. Ce guide vise la qualification des produits. Parallèlement, un groupe du CEN est en train de rédiger une norme sur le calcul des ancrages (design of fastenings) utilisant, entre autres, les produits de fixation couverts par ATE et normes européennes.

VIII.3.2. Pourquoi utiliser le logiciel CHEVILAB ?

Les méthodes de calcul réglementaire (Annexe C du guide d’ATE [Ref. 41] 001, projet de norme CEN, design of fastenings, modèle code CEB-fib, ect) ont montré leurs limites notamment en cisaillement et plus particulièrement en présence de bords et lorsque la direction de la charge est quelconque. Un calcul aux éléments finis avec modèle d’endommagement permet de prédire l’ensemble de la réponse charge-déplacement d’un ancrage ainsi que le mode de rupture. Toutefois, un tel calcul est lourd, coûteux en temps et reste comme affaire d’ingénieur de bureau d’étude disposant de codes de calcul évolués. Or, dans la majorité des cas, on pourrait se contenter d’estimer le mode et la charge de rupture à condition que le calcul soit rapide et facile à mettre en œuvre. C’est dans cette optique qu’un logiciel simplifié pourrait être utilisé par les ingénieurs qui ont des ancrages à dimensionner et qui, pour certaines configurations particulières, ne peuvent pas utiliser les méthodes réglementaires.

VIII.3.3. De la théorie du calcul à la rupture au logiciel CHEVILAB

On a montré l’existence d’un chargement limite pour un système élastique/parfaitement plastique [Ref. 116]. Dans ce contexte, l’analyse limite postule deux théorèmes qui forment les deux approches : statique par l’intérieur et cinématique par l’extérieur et permet la détermination directe de chargement ultime résultant d’une compatibilité entre l’équilibre mécanique et l’écoulement parfait plastique. La structure est donc considérée comme idéale dans le sens où la déformation de la structure augmente sans limite alors que le chargement reste constant. Dans cette méthode, on n’adopte ni un écrouissage plastique ni un changement important géométrique de la structure. Cependant, les résultats issus de l’analyse limite montrent une bonne approximation du chargement limite de la structure réelle correspondante.

Plus généralement, l’approche calcul à la rupture a pour l’objectif (comme l’analyse limite) d’estimer de manière directe la charge ultime pour chaque système. Dans cette méthode, la condition de plasticité parfaite est remplacée de façon plus générale par le concept de condition de résistance pour chaque point matériel du système. Cette condition de résistance est définie en donnant un domaine convexe assigné au tenseur des contraintes, ou plus généralement aux efforts inférieurs. On élargit ainsi l’application du calcul à la rupture en l’adaptant aux structures non seulement constitués des matériaux élastiques plastiques mais

Chapitre VIII : Discussion scientifique

sont la géométrie de la structure, le chargement appliqué et la résistance des matériaux constitutifs. Les résultats apportés par le calcul à la rupture sont indépendants de la connaissance de la loi de comportement du matériau constitutif à l’intérieur du domaine de résistance et de l’état d’autocontrainte initial du système et l’histoire de chargement qui lui est imposée.

Dans la pratique, l’approche calcul à la rupture est applicable dans des systèmes soumis à des charges caractérisées par un nombre limité de n paramètres. Plusieurs structures : poutres,

ossatures, fondations superficielle, mur de soutènement… sont traitées dans la cadre de la théorie du calcul à la rupture et validées par l’expérience. La théorie du calcul à la rupture est le fondement du calcul aux Etats Limites Ultimes dans les euros codes.

Nous avons choisi la méthode du calcul à la rupture comme la base scientifique de l’outil de calcul de la résistance mécanique des chevilles de fixation CHEVILAB. Sachant qu’une telle structure comporte deux types de matériaux : l’acier et le béton dont les critères de résistance sont disponibles: Critère de Tresca, de Von Mises ou de Mohr-Coulomb. Le chargement qui lui est imposé est caractérisé par un effort de traction, un effort de cisaillement et éventuellement un moment. Nous avons une bonne connaissance des mécanismes de rupture à travers des essais. Ce sont des données importantes que nous avons utilisées pour l’adaptation de l’approche cinématique par l’extérieur à la tenue d’une cheville. Les premiers calculs disponibles dans CHEVILAB sont mis en œuvre en traitant le cas d’une cheville au centre ou au bord d’une dalle sous l’action simultanée d’un ’effort de traction et d’un effort de cisaillement en trouvant un majorant du chargement ultime et le mode de ruine correspondant parmi 10 modes possibles résultant de 4 mécanismes de rupture considérés. Les résultats analytiques et numériques trouvés sont cohérents entre eux.d’un point de vue de la physique. Cet outil original est actuellement une des rares applications en 3D du calcul à la rupture dans le domaine de génie civil.

Vu de la nature du calcul à la rupture, les éléments de la structure doivent manifester une ductilité suffisante. Or le béton est un matériau fragile en traction. C’est pour cette raison que nous avons choisi le critère de résistance Mohr-Coulomb tronqué en traction. En effet, lors du calcul d’une cheville au bord de dalle, la réponse est très sensible à la résistance en traction du béton. Aussi, est-il nécessaire de calibrer le système à partir des caractéristiques mécaniques du matériau si l’on veut obtenir des résultats pertinents.

Cet outil est un outil « ouvert » et l’on peut intégrer des autres mécanismes de rupture comme le glissement entre la cheville et le béton, le mode « pry out »… Des études supplémentaires seront nécessaires pour tester d’autres configurations complexes (implantation de la cheville à l’angle de dalle par exemple)

On pourra tenir en compte des effets thermique, chimique ou d’endommagement préalable du béton. Pour cela, il faut identifier l’action de ces phénomènes vis-à-vis du critère de résistance pris en compte pour le béton. Dans la même démarche, on pourrait modéliser éventuellement le béton armé en utilisant l’approche d’homogénéisation.

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