• Aucun résultat trouvé

5.4 Résultats

5.5.2 Limites de l’approche

L’approche utilisée dans cette étude ne permet pas de quantifier des taux d’érosion, mais uni- quement de déterminer des zones où le risque d’érosion des sols des parcelles est plus ou moins fort. Afin d’aller jusqu’à une quantification de ces taux d’érosion, différents modèles pourraient être utilisés. Ainsi, des modèles empiriques permettent d’estimer des taux d’érosion, comme le modèle RUSLE par exemple (Renard et al., 1991). Ce modèle permet de prendre en compte l’ef- fet de mesure de CES mais nécessite pour cela l’estimation du facteur P, basé sur des mesures de terrain d’efficacité de ces mesures. Ce modèle ne permet pas par ailleurs de prendre en compte directement des variations de la configuration spatiale des aménagements. Une alternative est d’utiliser des modèles d’érosion à base physique et spatialement explicite, comme par exemple, les modèles EUROSEM (Morgan et al., 1998) ou Mhydas-Erosion (Gumiere et al., 2011). L’uti- lisation de ces modèles permettrait également de prendre en compte plus finement les effets de l’occupation du sol et des propriétés du sol dans la détermination du risque d’érosion. La capacité hydraulique des fossés pourrait aussi être prise en compte grâce à ces modèles, afin de considérer un débordement potentiel des fossés (Ghesquiere, 2008) et la création de ravines qui pourrait s’en suivre. Cependant, en utilisant ces modèles se posent des problèmes de paramétrisation pour prendre en compte les effets des mesures de CES (Hessel and Tenge, 2008).

Notre approche ne permet pas de prendre en compte les autres aménagements « invisibles »pour le MNT, comme de petits talus qui peuvent contraindre les chemins de l’eau également. Afin de combler ce manque, le MNT pourrait être modifié d’une façon similaire à ce qui a été fait pour les fossés, comme le proposent Aurousseau et al. (2009) pour les haies et talus et Duke et al. (2006) pour les routes. Les bandes enherbées entre parcelles ne sont également pas prises en compte dans notre estimation du risque d’érosion, alors que ces bandes enherbées peuvent diminuer l’érosion sur les versants d’une façon significative en favorisant l’infiltration et en aug- mentant la rugosité, ce qui limite le ruissellement et ses capacités de transport (Dillaha et al., 1989). Cette non prise en compte de ces bandes enherbées et des autres aménagements comme les petits talus amène peut-être à surestimer le stream power index, notamment dans le cas où on ne considère pas les fossés. Encore une fois, pour résoudre ce problème, des modèles d’érosion à base physique et spatialement explicites pourraient être utilisés pour prendre en compte ces aménagements (Gumiere et al., 2011). Cependant, les bandes enherbées sont assez peu dévelop-

5.6 Conclusion

pées dans notre zone d’étude (Gumiere et al., 2011), avec environ 20 % des parcelles aménagées sur le sous-bassin versant de Roujan par exemple.

Afin de conforter les résultats de notre approche, il serait nécessaire de disposer d’observa- tions terrain concordantes. De telles mesures de terrain sont régulièrement faites et permettent d’évaluer l’efficacité des mesures de CES (Paroissien et al., 2010), puis le facteur P du modèle RUSLE (Hessel and Tenge, 2008). Néanmoins, afin d’analyser la relation entre l’efficacité des réseaux de fossés et leur configuration spatiale, il serait nécessaire d’instrumenter des versants avec des réseaux de fossés présentant des configurations spatiales variées afin de constater s’ils permettent effectivement de limiter l’érosion parcellaire de façon homogène. L’impact d’une densification du réseau paraît plus difficile à explorer sur le terrain. À l’inverse, l’effet d’une dédensification du réseau pourrait être observé en se focalisant sur des zones où les structures de CES sont à l’abandon (figure 5.2). Ce type d’observations a par exemple été mené en Espagne et a permis de révéler l’impact de l’abandon de l’entretien des terrasses sur l’augmentation de la connectivité hydrologique du bassin et de l’érosion des sols (Bellin et al., 2009).

L’effet des réseaux de fossés dans l’interception du ruissellement avant qu’il ne rentre dans la parcelle apparaît donc clairement dans notre étude et illustre bien leur caractère anti-érosif. Cependant, en interceptant le ruissellement des versants, les réseaux de fossés concentrent le ruissellement qui augmente ainsi fortement dans le réseau lui-même (chapitre 4), ce qui tend à augmenter l’érosion dans le réseau (Roose and Sabir, 2002). L’érosion des fossés peut en effet être une source de sédiments importante (Elliot and Tysdal, 1999). De plus, la mise en place d’un réseau de drainage dense tend à accélérer le drainage du versant (Roose and Sabir, 2002) alors que la conservation des eaux sur les versants est un enjeu important pour l’agriculture méditerranéenne. La densification du réseau augmente également les crues à l’aval (Moussa et al., 2002; Roose and Sabir, 2002) (chapitre 4). La densification du réseau à outrance ne peut donc être vue comme une solution idéale, d’autant plus quand on considère les coûts de mise en place et d’entretien de ces réseaux (Martínez-Casasnovas and Ramos, 2006). La gestion des réseaux de fossés doit donc viser un compromis entre les différents services écosystémiques qu’ils procurent. Actuellement, il semblerait qu’ils soient optimisés pour la gestion de l’érosion parcellaire, ce qui renvoie à leur fonction principale mis en avant par les agriculteurs lors des enquêtes (chapitre 6).

5.6 Conclusion

Ce chapitre a mis évidence l’effet des fossés dans la diminution du risque d’érosion des sols des parcelles. Cet effet semble être distribué de manière homogène dans les paysages agricoles de l’Hérault. Le risque d’érosion estimé grâce au stream power index converge ainsi vers une valeur

Chapitre 5 : Diagnostic de l’efficacité des réseaux de fossés à limiter le risque d’érosion hydrique des sols réseaux de fossés réels apparaissent assez efficaces et efficients pour limiter le risque d’érosion des sols des parcelles en comparaison à des réseaux simulés dans le but de limiter ce risque.

Troisième partie

Variabilité de la couverture végétale

des fossés et rétention des pesticides

Dans cette partie, on commence par caractériser la diversité des pratiques d’entretien des fossés et de la végétation résultante (chapitre 6). Cette étude se base sur un dépouillement des résultats d’enquêtes d’agriculteurs et des relevés de végétation, suivi de leur analyse statistique. La variabilité de l’entretien et des couvertures végétales des fossés est mise en avant. Quelques déterminants de l’entretien des fossés ressortent à la fois des enquêtes et de l’analyse statistique, à différents niveaux (fossés, parcelles, exploitations, communes). Cependant, on observe une quasi absence d’organisation spatiale amont-aval des pratiques d’entretien. Un très fort effet de l’entretien sur les couvertures végétales des fossés est également observé.

Au vu de ces résultats une caractérisation plus fine des régimes d’entretien pour une année donnée est entreprise dans le chapitre 7 afin d’analyser l’impact des pratiques d’entretien des fossés sur le transfert de pesticides dans les bassins versants cultivés (une partie de ce chapitre fait redondance avec le chapitre 6 du fait de l’insertion d’un article). Pour ce faire, les enquêtes et les relevés de végétation servent à calibrer des simulations spatio-temporelles de la végétation des fossés. L’évaluation de l’impact est réalisé suivant des indicateurs relatifs à la rétention et au transfert de pesticides déjà proposés dans la littérature. On montre alors que la forte dynamique spatio-temporelle de la végétation des fossés suite à leur entretien implique une forte variabilité spatio-temporelle de leur capacité de rétention des pesticides. Cette capacité est d’ailleurs minimale au moment où la plupart des pesticides sont épandus dans les vignes.

Chapitre 6

Déterminants des pratiques

d’entretien et de la végétation des

fossés agricoles

6.1 Introduction

La végétation des fossés intervient dans la modulation de nombreux processus environnemen- taux. En hydrologie, la végétation influe sur la capacité hydraulique des réseaux de fossés et conditionne ainsi leur débordement et la bonne évacuation des crues (Ghesquiere, 2008). La végétation intervient en effet sur les capacités hydrauliques des fossés, en modifiant leur rugo- sité (Järvelä, 2002; O’Hare et al., 2010; Crabit et al., 2011) qui détermine en partie la vitesse des écoulements et la hauteur d’eau. La végétation des fossés joue également un rôle dans le transfert des pesticides, en modifiant les vitesses de transfert dans le fossé ainsi que ses capaci- tés de rétention des pesticides (Margoum et al., 2003; Moore et al., 2008). Les fossés sont par ailleurs entretenus par les agriculteurs (Bassa et al., 2012). Cet entretien va avoir un impact sur les couvertures végétales des fossés et donc sur les processus hydrologiques dans lesquels cette végétation intervient. L’entretien des fossés a aussi un rôle sur la biodiversité des fossés (Milsom et al., 2004; Blomqvist et al., 2006; Manhoudt et al., 2007). Finalement, au vu des impacts de l’entretien des fossés sur leur couverture végétale et les impacts qui en découlent dans des processus environnementaux variés, il paraît utile de mieux comprendre les motiva- tions des agriculteurs et les déterminants physiques de cet entretien et de la couverture végétale résultante. En effet, que ce soit dans le but de comprendre l’impact de cet entretien sur des processus environnementaux (évacuation des crues, biodiversité...), ou pour comprendre où se situent les leviers d’action pour faire évoluer les pratiques, cette compréhension des motivations des agriculteurs et des déterminants est nécessaire. De plus, la description et la spatialisation

Chapitre 6 : Déterminants des pratiques d’entretien et de la végétation des fossés agricoles

(ii) de rechercher des variables explicatives de l’entretien des fossés et du pourcentage de cou- verture végétale résultant pour une année donnée, en distinguant les effets paysagers des effets d’exploitation.