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Bien que l’importance de la participation des parents dans les programmes de prévention soit étudiée, peu de modèles sont présentement disponibles pour expliquer plus finement les facteurs qui l’influencent (Dumas et al., 2007 ; Halgunseth et al., 2009). En analysant les quatre modèles recensés, il est possible d’observer différentes limites et d’établir les constats suivants :

1. Les modèles traitent tous de la « participation parentale » mais aucun n’est spécifique au « recrutement des parents » dans la littérature actuelle.

Le recrutement étant la première étape qui vient influencer par la suite l’ensemble du processus de participation, plusieurs chercheurs s’entendent sur le fait que le recrutement mérite une attention particulière (Gross et al., 2001; Snell-Johns et

al., 2004). Elle est peu abordée dans les écrits scientifiques, en plus d’être souvent

omise dans les études traitant de la participation parentale (Dumas et al., 2007). Il semble donc tout à fait justifié et pertinent de s’intéresser spécifiquement à cette sphère de la participation, le recrutement étant la porte d’entrée pour les familles dans les services et le premier pas qui permettra à ces dernières d’aller vers les services.

2. Dans les modèles de la participation parentale, la sphère du recrutement est la moins détaillée et donc la moins bien comprise.

Lorsqu’on considère que la participation se décortique en trois sphères, il est possible de constater que la compréhension de chacune d’entre elles varie d’un modèle à l’autre. En fait, la théorie d’Ajzen (1991), le modèle de Spoth et Redmond (1995) ainsi que celui de McCurdy et Daro (2001) accordent une grande place à l’intention de participer du parent. Or, aucun ne permet d’expliquer clairement et de comprendre comment cette intention pourra être dépassée afin de mener au recrutement du parent. Pour sa part, le modèle de Kazdin (1996), tout comme la grande majorité des explications mises de l’avant par celui de McCurdy et Daro (2001), permet uniquement de comprendre certains éléments qui influencent les sphères de la présence et de l’engagement des parents dans les activités. Il est donc possible de constater que la sphère du recrutement est donc la moins détaillée et par le fait même, la moins bien comprise sur le plan empirique.

3. Aucun des modèles ne permet un portrait complet des facilitateurs et des barrières à la participation des parents ni du recrutement dans des programmes.

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Il est possible de constater qu’aucun des modèles ne permet un portrait complet des facilitateurs et des barrières à la participation des parents dans des programmes en adoptant une vision et une compréhension écologique, et ce, malgré le fait que cette approche soit prônée dans les écrits scientifiques traitant de la participation parentale (Dumas et al., 2007; Durlak et DuPre, 2008; Halgunseth et al., 2009; Snell-Johns et al., 2004). Bien que McCurdy et Daro (2001) offrent le modèle le plus complet, l’ensemble des modèles et des théories recensées limitent leur compréhension à des facteurs majoritairement propres aux familles et même le plus souvent, spécifiques au parent lui-même. Différents facteurs identifiables dans la littérature relatifs aux autres niveaux de l’écologie tels des facteurs contextuels, relatifs à la communauté ou aux caractéristiques des intervenants, de l’intervention et des organisations se retrouvent donc peu abordés, et même dans certains cas complètement écartés des modèles théoriques disponibles à ce jour. Pourtant, selon d’autres auteurs, la participation des parents serait possible en raison de l’interaction entre la famille, l’organisation qui donne des services et des facteurs de la communauté et non pas la responsabilité seule du parent (Waanders et al., 2007). Il appert donc qu’une lecture bioécologique de la participation parentale, qui prend en considération le point de vue de l’ensemble des acteurs impliqués, soit plus pertinente pour développer une compréhension fine et complète des facteurs qui amène les parents à participer à des services.

4. Aucun modèle théorique de la participation parentale, ni du recrutement, n’est spécifique aux programmes préventifs et n’a été étudié précisément dans un contexte de services offerts lors de la petite enfance.

Lorsque les milieux de la pratique tentent de rejoindre des parents pour prendre part à des programmes de prévention, les enjeux et les difficultés ne sont pas les mêmes que lorsqu’il s’agit de programmes d’intervention. Les embuches au recrutement varient en raison de la nature même du service offert. De fait, ces programmes de prévention tentent de rejoindre des familles pour qui les difficultés de

l’enfant ne sont pas encore identifiées ou jugées importantes (Southam-Gerow, 2003; Vitaro et Gagnon, 2000). Les parents n’identifiant pas nécessairement de sentiment d’urgence d’intervenir auprès de leur enfant, il est donc possible de croire qu’ils se sentent peut-être moins interpellés par le service qui leur est offert.

De plus, chaque période développementale présentant son lot de défis distincts, la décision de s’inscrire ou non à un programme de prévention peut donc être spécifique à la période développementale de l’enfant (Gross et al., 2001). Cela implique d’avoir un regard différent sur le recrutement selon le stade de développement de l’enfant. Il semble donc justifié de porter un regard spécifique sur le recrutement des parents dans des programmes offerts lors de la petite enfance, de par les répercussions possibles que peuvent avoir ces services sur la trajectoire de vie de l’enfant.

4.1 Recensions systématiques sur le thème de la participation parentale

Bien qu’aucun des modèles théoriques ne porte sur le recrutement des parents de familles à défis multiples dans des programmes de prévention lors de la petite enfance, à notre connaissance, aucune recension ne permet actuellement de dresser un portrait de l’état de la situation quant à l’ensemble des facteurs d’influence du recrutement des parents. En fait, il est vrai que certaines recensions qui traitent de la participation des parents dans les services sont disponibles. Certaines se sont intéressées aux barrières à la participation (Axford et al., 2012; Snell-Johns, et al., 2014) ou à l’implication et à la rétention dans les programmes une fois débutés (Axford et al., 2012; Ingoldsby 2010; Morawska et Sanders, 2006; Randolph, Fincham et Radey, 2009). D’autres se sont intéressées aux programmes de prévention et d’intervention en santé mentale chez les enfants (Ingoldsby, 2010) ou à l’implication familiale dans les programmes de transition en milieu scolaire (Pang, 2010). Finalement, d’autres se sont intéressées spécifiquement aux familles difficiles à rejoindre pour des difficultés d’enfants de tous âges (Aubin-Horth, 2014; Boag-

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Munroe et Evangelou, 2012; Watson, 2005). Si ce grand nombre de recensions permet de confirmer l’intérêt porté au défi que représente la participation des parents à défis multiples dans des programmes, elles ne sont pas spécifiques ni au recrutement, ni aux programmes de prévention des difficultés de comportement lors de la petite enfance.

5. RECRUTER LES PARENTS, UNE PROBLÉMATIQUE EMPIRIQUE … ET