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Chapitre 1 : Stratégies d’écriture d’Otsiémi

1.3 Libertés de l’écrivain

L’écrivain bénéficie de libertés en tant que créateur et maître de son œuvre. Ces libertés qui, concentrées ici spécialement sur la question du style ou de l’expression littéraire, reflètent « la langue de l’écrit, parfaitement maîtrisée et pensée », selon Elizabeth Naudou190. L’écrivain

use de cette liberté pour exprimer l’inexprimable à travers la langue commune, pour ne pas taire des idées difficiles à exprimer à travers la langue française.

Le processus utilisé ici par Otsiémi est d’une part la recréation linguistique et d’autre part sa licence poétique.

1.3.1 Recréation linguistique

La recréation linguistique est un concept plus souvent utilisé dans l’exercice de la traduction. Lorsqu’il y a impossibilité de traduire dans une langue donnée un ou des mots d’une autre langue, dû à l’absence d’un équivalent juste dans cette langue, le traducteur se retrouve face à des difficultés. Afin de les surmonter, il fait appel à l’une des trois options suivantes : la première étant de trouver un autre équivalent au mot, pas souvent très fidèle à la traduction ; la deuxième, de ne pas traduire le mot et de le retranscrire fidèlement tel quel ; et la troisième, de faire preuve de créativité en en créant un nouveau tout en tentant de rester fidèle au sens qui lui est propre.

Martha J. Cutter, professeur d’anglais et d’études africaines, montrant dans un article les difficultés que traversent les traducteurs dans l’exercice de la traduction de l’anglais vers le chinois, se rend bien compte de l’« impossible nécessité » de faire une traduction fidèle et juste. Elle prend pour exemple David Wong Louie et Fae Myenne Ng, auteurs de nouvelles, qui font face aux mêmes difficultés :

190 Elizabeth Naudou, « La Liberté de l’écrivain de Nirmal Verma », Impressions d’Extrême-Orient [En ligne],

I know what i want to say in English. My mind’s stuffed full with the words. I pull one sentence at a time from the elegant little speech… and try to piece together a word-for- word translation into Chinese. Yielding nonsense.191

David Wong Louie, Pangs of Love.

I have a whole different vocabulary of feeling in English than in Chinese, and not everything can be translated.192

Fae Myenne Ng, Bone 193

Janis Otsiémi va, pour ne pas être confronté à ce problème dans son œuvre, tenter les deuxième et troisième options : soit retranscrire le mot dans sa langue d’origine, soit créer un mot nouveau en essayant de rester fidèle au sens du mot à traduire. Toutefois, dans le cadre de notre étude, la recréation linguistique dépasse la difficulté de la sphère traductive pour faire valoir le pouvoir créatif et ludique de l’écrivain. Ici, contrairement à un traducteur dans l’exercice de ses fonctions, l’écrivain n’éprouve aucune difficulté à transcrire le ressenti, l’émotion de ses mots, il joue de son pouvoir créatif. C’est dire que l’écrivain traduit mieux que le traducteur pourrait, lui, faire face aux limites de la traduction. Otsiémi opte pour la recréation linguistique non pas pour traduire la difficulté de traduction, mais pour exprimer ce qu’il veut dire avec ses propres mots. On songe en l’espèce à Gilles Deleuze reprenant à son compte Marcel Proust :

Les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère. Sous chaque mot chacun de nous met son sens ou du moins son image qui est souvent un contresens. Mais dans les beaux livres, tous les contresens qu’on fait sont beaux.194

Pour tenter de définir le style littéraire, Deleuze octroie à l’écrivain la possibilité ou le pouvoir d’établir « dans sa langue une langue étrangère qui ne préexiste pas195 ». Proust rajoutait en

outre que « [c]haque écrivain est obligé de se faire sa langue, comme chaque violoniste est obligé de se faire son « son »196 ». C’est dire que l’écrivain manipule à sa guise sa langue

d’écriture, il est cet « Auteur-Dieu » qui recréé la langue à sa convenance.

Recréer la langue revient, pour l’auteur, à créer une langue à partir d’une langue préexistante. C’est en d’autres termes s’inspirer de mots réels pour en créer d’autres. Janis

191 « Je sais ce que je veux dire en anglais. Mon esprit est empli de mots. Je tire une phrase à la fois de l’élégant

petit discours… et essaie de faire une traduction mot-à-mot en chinois. Un non-sens. » [Traduction faite par nous].

192 « J’ai tout un lexique différent sur le sentiment aussi bien en anglais qu’en chinois, et tout ne peut être traduit. »

[Traduction faite par nous].

193 Martha J. Cutter, « An impossible necessity: translation and the recreation of linguistic and cultural identities

in contemporary chinese american literature », Criticism, vol 39, n° 4, 1997, pp. 581-612 : https://www.jstor.org/stable/23118175?seq=1#page_scan_tab_contents

194 Marcel Proust, Contre Sainte-Beuve, Paris, Gallimard, 1954 (titre posthume), pp. 297-298. 195 Gilles Deleuze, « Bégaya-t-il », in Critique et Clinique, Paris, Minuit, 1993, p. 138. 196 Marcel Proust, Correspondance, Kolb Philip Ed., vol 8, Paris, Plon, 1981, p. 276.

Otsiémi en fait la preuve dans ses romans en usant de sa capacité à créer de nouveaux mots, et à jouer avec ces derniers.

Le mot « mectard(s) » est le mot apparaissant le plus dans la quasi-totalité de l’ensemble de ses romans. Peau de balle, Le chasseur de lucioles, African tabloïd l’attestent.

L’écrivain le traduit par « mecs ». Toutefois, dans le premier roman cité, il marque une légère différence entre « mec » et « mectard » :

On boit dans un bar, et voilà qu’il déclenche un baroud parce qu’un mec aurait posé ses prunelles sur elle. Trop susceptible comme une gonzesse, le mectard. (PB 166 – Nous soulignons)197

Par cette distinction, on en déduit que « mectard » renvoie bien plus qu’à « mec », il désigne un homme représentant quelque peu l’inimitié, l’agressivité, la méchanceté. En utilisant le suffixe -ard, l’écrivain en fait un nom pour désigner la personne et un adjectif, à la fois, pour la qualifier. Ainsi, « mectard » désigne non seulement un homme, mais encore plus un homme malveillant. Les exemples suivants le démontrent. D’une part, les « mectards » sont associés aux hommes balafrés, tatoués, à des braqueurs, dealers et toutes personnes négativement influentes :

Dans le fond, il était déçu. Il s’était attendu à voir un de ces mectards aux visages taillés au silex, aux bras tatoués de perroquets ou d’aigles. (PB 19 – Nous soulignons) Owoula baladait ses yeux sur des mecs qu’il ne trouvait pas nets. Dans une foule de mectards […], il repéra une tête bien connue de ses papelards au bureau. (PB 148 – Nous soulignons)

Depuis plus d’une heure, les deux mectards palabraient à bâtons rompus au petit coin… (CL 40 – Nous soulignons)

Papy secoua la tête pour signifier au policier qu’il ne connaissait pas le mectard [un faussaire] en question. (AT 149 – Nous soulignons)

D’autre part, les « mectards » représentent un danger pour les malfrats. L’extrait suivant rapporte la parole d’un kidnappeur qui voit en l’image des représentants du milieu sécuritaire

197 Nous opterons tout au long de cette étude pour l’adoption des sigles propres à chacun des romans de Janis

Otsiémi, suivi du numéro de(s) page(s) correspondante(s). PB : Peau de balle

VSB : La Vie est un sale boulot CL : Le Chasseur de lucioles

BMPP : La Bouche qui mange ne parle pas AT : African tabloïd

(gendarmerie, police) un danger pour lui et ses complices. La définition du mot « mectard » variera donc en fonction de celui qui l’emploie :

Vous aurez plusieurs mectards sur le dos : les flics, les pandores, les codos, les services spéciaux… » (PB 32 – Nous soulignons)

Par ailleurs, le mot « bouchard » est également un mot qu’emploie assez souvent Otsiémi, pour désigner des « grandes gueules198 » :

C’était un bouchard qui n’avait rien dans les tripes. (VS B101 – Nous soulignons) Bouchard comme une gonzesse, Mohamed l’était. (BMPP 132 – Nous soulignons) Les nervis de la ville étaient de grands bouchards. (CL 68 – Nous soulignons)

Et les bouchards racontaient que même à la retraite le colonel Tchicot continuait à tirer les ficelles auprès de ses deux protégés. (AT 18 – Nous soulignons)

En effet, les personnes qui parlent haut et fort, en plus d’être des mouchards, sont désignées, selon l’expression locale, comme des individus qui « ont ou font la bouche », en d’autres termes, des « gueulards ». L’écrivain, en recréant ce mot, fait la contraction de « bouche » et « gueulard » tout en s’inspirant de « mouchard ». Ce mot désignant ainsi le tout, c’est-à-dire un gueulard et un mouchard. Ce phénomène linguistique, appelé amalgame lexical ou encore mot- valise, consiste à faire la fusion de deux ou plusieurs mots. Le premier extrait désigne Lebègue, un braqueur qui, malgré l’impression qu’il dégageait, serait prêt à dénoncer ses complices. Le second identifie Mohamed, un trafiquant de drogue, comme étant un bouchard, car il est un informateur prêt à « vendre sa mère pour son bizness de shit199 ». Le troisième associe les

bouchards aux nervis, aux tueurs de la ville. Et le dernier, aussi étonnant soit-il, à des membres de la police judiciaire.

Par ailleurs, on peut se reporter à quelques autres exemples :

Tchicot était souvent le « pain béni » des journaux satiriques qui le surnommaient « le bouledogue », un sobriquet qu’il ne fallait jamais prononcer en sa présence. « Les ambitions fratricides d’un colonaillon », article diffamatoire sur Tchicot […], avait valu à son auteur une cure de torture dans les geôles de la Police judiciaire. (PB 180 – Nous soulignons).

« Colonaillon » dériverait de « colon » (colonisateur) et « haillon » (vêtement déchiré, autrement dit un chiffon). Ce qui donnerait à ce mot le sens de personne qui s’installe dans un milieu et

198 Note de bas de page, Le Chasseur de lucioles, p. 68. 199 La Bouche qui mange ne parle pas, p. 132.

veut ériger ses règles, mais qui au fond n’est qu’une personne piteuse, et lui confèrerait son caractère diffamatoire et insultant :

À vingt ans, Gabi avait tiré la chasse sur ses études et appartenait à un gang de motaristes. (VSB 78-79 – Nous soulignons)

L’auteur le définit par motard à la page 79 de son roman. Mais l’on remarque qu’il procède surtout par suffixation du mot « motard ». L’on y voit la fusion de motard et du suffixe -iste. L’auteur, bien qu’inconsciemment, souligne la différence entre motard et « motariste ». Un motard est un motocycliste passionné de moto ; un « motariste » est également un motocycliste passionné de moto mais s’adonnant parallèlement à des activités de délinquants. Gabi appartenait effectivement à une coterie dont certains membres « avaient trouvé la mort [et dont d’autres] purgeaient la perpète dans les geôles du pays » (VSB 79). Lui et quelques-uns de ses complices avaient écopé de plusieurs années de prison pour un braquage. Le « motariste » est par conséquent, suivant le contexte mis en avant par Otsiémi, un motard délinquant :

La ville de Libreville n’était plus ce qu’elle était autrefois. Bon nombre de ses quartiers étaient devenus de véritables banditoustans où aucun policier ne s’aventurait à la nuit tombée. (AT 14 – Nous soulignons)

L’écrivain donne à ces quartiers, à travers le suffixe -stan qu’il leur octroie – sans vouloir rentrer dans les clichés – un caractère dangereux et instable digne conféré à certains pays de l’Asie centrale dont l’Ouzbékistan, le Pakistan, le Kazakhstan, l’Afghanistan. Mais c’est aussi et surtout une allusion au « bantoustan », nom attribué à un territoire réservé aux populations noires du temps de l’apartheid en Afrique du Sud par les populations racistes en 1954 pour délimiter les territoires. Bantoustan, qui est également un amalgame lexical, est le résultat de la jonction de bantou (peuple ayant en partage les langues bantoues) et stan (suffixe signifiant « terre de » en langue persane). L’auteur s’en inspire pour créer le mot « banditoustan » qui est la jonction de bandit, tous, et stan. Il aurait pu parler de « bandistan », mais décide de prolonger le suffixe –stan en rajoutant l’adjectif « tous ». On pourrait croire à un jeu de mots « tous bandits », pour désigner un quartier dans lequel résident en majorité des individus considérés comme des bandits. À ce sujet, en effet, au Gabon, le nom « bandit » est adjectivé et s’accorde même au féminin. On parle de « bandite » :

C’était un subterfuge qu’il utilisait comme la plupart de ses collègues pour couvrir ses découcheries extraconjugales. (AT 174-175 – Nous soulignons)

« Découcher » c’est dormir hors de chez soi. L’action de « découcher » est le « découchage ». Cependant, l’écrivain substantive le verbe à son gré et en fait sa création tout en conservant le sens originel du mot.

En somme, l’une des libertés de l’écrivain est la recréation linguistique. Otsiémi s’y adonne en se servant de mots déjà présents dans le dictionnaire de l’Académie française tout en apportant sa touche originale. Il crée des mots à partir de mots déjà créés, il les recrée. Le travail de la recréation linguistique s’apparente quelque peu à l’exercice de la traduction. Elle intervient lorsque la traduction se retrouve face à des limites, lorsque la traduction trahit la langue. La recréation linguistique s’apparente par conséquent à la retranscription de mots dans une langue nouvelle tout en respectant l’émotion qu’ils transmettent, le contexte dans lequel ils sont utilisés. C’est l’une des libertés que peut s’offrir un écrivain dans son acte d’écriture. Otsiémi s’en sert comme d’un jeu linguistique en faisant intervenir dans la majorité des cas des amalgames lexicaux (fusions de mots).

1.3.2 Licence poétique

Toute langue possède des limites au niveau de la retransmission d’idées. Des limites ne lui permettant pas d’exprimer ou de traduire toute chose. C’est généralement dû au contexte social et/ou historique d’appartenance du sujet interprète et de l’objet interprété. Toutefois, lorsque ces difficultés ne sont pas perçues, il est possible que d’autres caractéristiques propres aux normes de la langue apparaissent. L’écrivain/poète a toutefois le pouvoir de s’exprimer en ayant quelquefois recours volontairement à des « fautes ». Une liberté prise contre les règles de grammaire et autres dans un but purement subversif et surtout esthétique. C’est ce que l’on appelle la licence poétique.

En poésie, le mot licence désigne la permission. À l’origine, très souvent utilisée en poésie, la licence poétique est utilisée pour la beauté des rimes pour l’œil, de la sonorité pour l’ouïe, contre les règles ordinaires de la langue. Nous le percevons chez Pierre Corneille qui veillait au respect de la métrique du vers :

Elvire, où sommes-nous, et qu’est-ce que je voi ? Rodrigue en ma maison ! Rodrigue devant moi !

(Pierre Corneille, Le Cid, acte 3, scène 4 – Nous soulignons)

Toutefois, au-delà de la poésie, la licence poétique peut être percevable dans le roman. Le roman de Janis Otsiémi en est une preuve. La liberté qu’il s’octroie dépasse les enjeux lyriques pour davantage toucher au message de son texte et de sa phrase.

L’exemple le plus palpant est celui de « chicard ». Initialement, ce terme désigne une personne qui a du chic. À la différence de « chiquard » qui désigne une personne dont les pieds

sont attaqués par des chiques200, on le reconnaît à sa démarche chancelante. Otsiémi a

volontairement transposé le sens du mot « chiquard » à celui de « chicard ». À la fois paronyme (ressemblance entraînant quelques confusions) et antithèse (sens contraire du mot désigné), pour lui, le « chicard » n’est pas celui qui a du chic, mais celui qui a des chiques. L’extrait suivant présente des personnes dont les pas s’avéreront être oscillants après avoir consommé une forte quantité d’alcool :

Papy alla chercher une bouteille de Pastis, une liqueur embouteillée avec une teneur de 45° d’alcool. Avec ça, il savait que les flics repartiraient clopin-clopant comme des chicards. (PB 143 – Nous soulignons)

Sans doute a-t-il aussi voulu donner une touche chic, élégante au porteur de chiques afin que celui-ci ne soit pas directement assimilé à une personne infestée. L’auteur parle de démarche de « chicard ». Donc, d’une personne qui marche en titubant tout en essayant de conserver une démarche maîtrisée et soignée. Un individu marchant comme un « chicard » est alors un individu marchant en clopinant, en boitant tout en faisant de cette démarche une démarche ayant du style. Cette démarche est caractéristique au Gabon de nombreux hommes qui pensent avoir, grâce à elle, une allure séduisante, rassurante et/ou confiante :

Sanglé dans un vieil uniforme kaki chamarré de médailles et de galons bidon qui devaient peser un sacré poids, il trainait ses gambettes clopin-clopant comme un chicard. (PB 70 – Nous soulignons)

Joe plissa le front quand il vit Fred débouler dans le café de sa démarche de chicard. (BMPP 34 – Nous soulignons)

Otsiémi ne s’arrête pas là : il omet une lettre pour ôter un trait de la caractéristique du sens d’un mot. Le mot définit ce qu’il n’est pas. Aux mots « tubes201 » et « héros », il soustrait

respectivement le « e » de l’un et le « s » de l’autre pour signifier que c’étaient des tubes qui n’en étaient pas réellement (et potentielle volonté d’angliciser le mot), et que c’était un héros qui n’en était pas réellement et qui éventuellement avait agi comme sous l’effet de l’héroïne :

Mais tous les tubs, les chanteurs de techno avaient disparu des bacs. (PB 50-51 – Nous soulignons)

Ça aurait été une balade de santé si le vigile du complexe Michel Dirat n’avait pas joué au héro.202 (PB 164 – Nous soulignons)

De là, l’écrivain donne un sens à chacun de ses mots, à chacune de ses « fautes » volontaires.

200 Puces pénétrantes.

201 Chansons phares.

Par ailleurs, Otsiémi mobilise aussi des expressions inspirées de la société locale. Expressions qui évoquent, de la part de certains locuteurs, le mauvais usage des prépositions et le mauvais usage des mots, la société gabonaise confondant les prépositions « à » et « en ». Or, l’on « fait confiance à quelqu’un » et l’on « a confiance en quelqu’un » ; l’on sort à vélo, à moto ; l’on mène quelqu’un en bateau ; l’on a la quarantaine, et l’on est dans la quarantaine. C’est de ce type de formulation, fortement présente dans le langage social du Gabon, que l’auteur nourrit son inspiration. Il en est conscient et joue avec les mots :

- Écoute, Yan. Si t’as pas confiance à ce mec-là, il vaut mieux qu’on lâche tout. Personne n’est encore mouillé jusqu’à présent. (PB 40 – Nous soulignons)

- Avis à toutes les voitures, expectora Moussounda. […] Suivez tout individu qui sortira de là à pied, en vélo, en moto ou en voiture. (PB 19 – Nous soulignons)

- Ces enquêteurs veulent causer un bout avec toi. Arrange-toi pour ne pas les emmener en bateau sinon on te ramène au « Purgatoire », dit-il sur un ton dur. (BMPP 121 – Nous soulignons)

Elle portait un ensemble pagne fleuri et des babouches ? Un foulard noir retenait ses cheveux. Elle devait avoir dans la quarantaine. (VS 169 – Nous soulignons)

Cependant, nous ne percevons pas dans les romans d’Otsiémi que des fautes volontaires inspirées de sa société d’appartenance, on y voit également la présence de coquilles. Sont-ce des erreurs voulues par le romancier ou des coquilles commises par l’éditeur ? D’une part, l’on voit un changement dans l’usage d’un mot, voire une évolution morphologique. Nous remarquons d’un côté, « on ne se cadotait pas des bises dans le milieu. » (PB 39 – Nous soulignons) et dans le reste de l’ensemble de ses romans, une autre forme du même verbe, cadeauter203 : « Koumba cadeauta la porte d’un léger kokoko pour attirer l’attention

d’Essono. » (VS 61 – Nous soulignons), par exemple. C’est le même cas pour « Il les jeta aux pieds des deux opéjistes204 » (– Nous soulignons)et opjiste (forme ancienne du mot). En effet,

dans le premier cas, l’auteur souhaite rester le plus fidèle possible au mot d’origine « cadeau ». « Cadoter » répondant davantage au modèle d’écriture SMS dont l’approche est de reproduire phonétiquement le mot. Dans le deuxième exemple, « opjiste » reste fidèle à l’acronyme OPJ205.

Toutefois, afin de jouer davantage au jeu créatif, l’auteur en fait un mot respectant la

203 Africanisme désignant le fait de donner en cadeau, d’offrir. 204 Officiers de la Police Judiciaire.