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Chapitre 2 : Étude bibliographique sur la photocycloaddition [2+2]

II. A. c) 1) Liaison hydrogène

Dans le but de contrôler la réactivité à l’état solide et de permettre la photocycloaddition selon le postulat topochimique de Schmidt, certains groupes,63 notamment celui de MacGillivray,8,57a),64 ont étudié les assemblages supramoléculaires entre une plateforme et deux oléfines par cocristallisation au moyen de liaisons hydrogènes. Cette organisation moléculaire aligne parallèlement les doubles liaisons C=C entre elles à une distance inférieure à 4,2 Å ce qui permet la formation d’un ou plusieurs cyclobutanes après cycloaddition [2+2]. L’utilisation de liaisons non covalentes peu énergétiques est intéressante car elles contrôlent la formation de liaisons covalentes entre deux oléfines lors de la photocycloaddition puis elles sont clivées par simple extraction en libérant le photodimère (Schéma 24).64c)

63 a) Feldman, K. S.; Campbell, R. F. J. Org. Chem. 1995, 60, 1924-1925. b) Ohba, S.; Hosomi, H.; Ito, Y. J. Am. Chem. Soc. 2001, 123, 6349–6352.

64 a) MacGillivray, L. R.; Reid, J. L.; Ripmeester, J. A. J. Am. Chem. Soc. 2000, 122, 7817–7818. b) Papaefstathiou, G. S.; Kipp, A. J.; MacGillivray, L. R. Chem. Commun. 2001, 2462–2463. c) MacGillivray, L. R. CrystEngComm 2002, 4, 37-41. d) Hamilton, T. D.; Papaefstathiou, G. S.; MacGillivray, L. R. J. Am. Chem. Soc. 2002, 124, 11606–11607. e) Papaefstathiou, G. S.; Zhong, Z.; Geng, L.; MacGillivray, L. R. J. Am. Chem. Soc. 2004, 126, 9158–9159. f) Friščić, T.; MacGillivray, L. R.

Chem. Commun. 2005, 5748-5750. g) Chu, Q.; Swenson, D. C.; MacGillivray, L. R. Angew. Chem. Int. Ed. 2005, 44, 3569–

3572. h) Friščić, T.; MacGillivray, L. R. Chem. Commun. 2003, 1306–1307. i) Papaefstathiou, G. S.; Friščić, T.; MacGillivray, L. R. J. Supramol. Chem. 2002, 2, 227–231. j) Friščić, T.; Drab, D. M.; MacGillivray, L. R. Org. Lett. 2004, 6, 4647–4650.

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Schéma 24 : Contrôle de la photocycloaddition [2+2] par assemblage moléculaire de deux oléfines avec

une plateforme linéaire liées par liaisons hydrogènes

Le succès de ce processus réside dans le choix de la plateforme permettant d’assembler et d’organiser les molécules d’intérêt à l’état solide. En 1995, Feldman63a) a montré qu’un naphtalène disubstitué en forme de « J » maintenait parallèlement deux oléfines à une distance de 3,62 Å l’une de l’autre et permettait ainsi la cycloaddition (Schéma 25).

Schéma 25 : Assemblage moléculaire orientant parallèlement deux oléfines par une plateforme

naphtalène disubstituée

MacGillivray a, quant à lui, proposé la plateforme benzène 1,3-dihydroxy, ou résorcinol, à la suite des travaux d’Ayoma montrant qu’un cocristal de bis(resorcinol)anthracène maintenait par liaisons hydrogènes deux molécules d’anthraquinone à une distance de 3,80 Å (Figure 12).57a),64i)

Figure 12 : Assemblage de deux molécules d’anthraquinone à l’état solide maintenus parallèlement à

une distance de 3,80 Å par liaisons hydrogènes avec une plateforme résorcinol

Cette plateforme donneuse de liaison hydrogène, pourrait donc aligner des groupements azotés. En 2000, MacGillivray a montré que la cocristallisation du résorcinol avec le 1,2-bis(4-pyridyl)ethylène (E) (4,4’-bpe) conduisait à l’assemblage moléculaire comportant quatre composants reliés entre eux par liaisons hydrogène.64a) Ce composé aza stilbénique a été choisi car il est photostable à l’état solide du fait de la distance entre ses doubles liaisons de 6,52 Å, et son irradiation

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en solution forme quatre isomères différents.65 Liées au résorcinol, les deux oléfines maintenues parallèlement à une distance de 3,65 Å fournissent après irradiation à l’état solide, le photodimère rctt (Schéma 26). L’assemblage supramoléculaire a donc permis d’effectuer la photocycloaddition [2+2] de manière quantitative après rapprochement des doubles liaisons, et de contrôler sa stéréosélectivité.

Schéma 26: photocycloaddition [2+2] quantitative et stéréosélective du 4,4’-bpe au sein d’un

assemblage moléculaire à quatre composants avec le résorcinol

A la suite de cette découverte, MacGillivray a établi une librairie de substrats et de plateformes pouvant contrôler la photocycloaddition [2+2] à l’état solide. Dans un premier temps, il a généralisé la cycloaddition du 4,4’-bpe avec différentes plateformes. Le 1,8-diacide carboxylique naphtalène64b) et l’imide de Rebek66 ont montré leur efficacité en maintenant les oléfines à une distance de 3,72 et 3,76 Å respectivement dans un assemblage moléculaire à quatre composants. L’irradiation de ces derniers a conduit au photodimère rctt quantitativement (Schéma 27). L’imide de Rebek,67

plateforme hétéroditipique, a été étudié du fait de la distance de 3.5 Å entre ses groupements terminaux et de sa capacité à donner des liaisons hydrogène.68

65 Vansant, J.; Toppet, S.; Smets, G.; Declercq, J.-P.; Germain, G.; Van Meerssche, M. J. Org. Chem. 1980, 45, 1565–1573.

66 Varshney, D. B.; Gao, X.; Friščić, T.; MacGillivray, L. R. Angew. Chem. Int. Ed. 2006, 45, 646–650.

67 a) Rebek Jr, J. Acc. Chem. Res. 1990, 23, 399–404. b) Rebek Jr, J. Angew. Chem. Int. Ed. 1990, 29, 245-255.

68 a) Faraoni, R.; Castellano, R. K.; Gramlich, V.; Diederich, F. Chem. Commun. 2004, 370–371. b) Castellano, R. K.; Gramlich, V.; Diederich, F. Chem. Eur. J. 2002, 8, 118-129. c) Pascal, R. A. Jr.; Ho, D. M. J. Am. Chem. Soc. 1993, 115, 8507-8508. d) Mori, K.; Murai, O.; Hashimoto, S.; Nakamura, Y. Tetrahedron Lett. 1996, 37, 8523-8526.

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Schéma 27 : photocycloaddition [2+2] du 4,4’-bpe en présence des plateformes 1,8-diacide

carboxilyque naphtalène et imide de Rebek

Après avoir défini les plateformes pouvant assembler et organiser les molécules de 4,4’-bpe dans un arrangement favorable à la photocycloaddition [2+2] à l’état solide, MacGillivray a étudié différents substrats bipyridines, dérivés du 4,4’-bpe.64i) Les substrats choisis sont non symétriques pour connaitre la régiosélectivité de cette cycloaddition. Ainsi, l’irradiation du 1-(3-pyridyl)-2-(4-pyridyl)ethylène (E) (3,4-bpe) en présence de la plateforme naphtalène a conduit au photodimère HH rctt quantitativement (Schéma 28).69 La distance maintenue entre les deux oléfines est de 3,58 Å.

Schéma 28 : photocycloaddition [2+2] régiosélective et stéréosélective du 3,4-bpe lié à la plateforme

naphtalène

MacGillivray a analysé en 2002 l’influence d’un assemblage moléculaire à trois composants et ouvert en partie terminale.70 Le 4-chlorostilbazole (4-Cl-sbz) est la molécule d’intérêt reliée par deux liaisons hydrogènes au résorcinol. La distance entre les doubles liaisons est de 3,75 Å du côté de la plateforme et 4,40 Å sur la partie ouverte, malgré une interaction chlore-chlore. De plus, les oléfines sont orientées antiparallèlement donc ne respectent pas les règles topochimiques de Schmidt. Cependant, l’irradiation de ce cocristal conduit au photodimère rctt quantitativement (Schéma 29).

69 Varshney, D. B.; Papaefstathiou, G. S.; MacGillivray, L. R. Chem. Commun. 2002, 1964–1965.

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Schéma 29 : photocycloaddition [2+2] du 4-Cl-sbz dans un assemblage moléculaire ne respectant pas

les règles topochimiques de Schmidt

MacGillivray a donc défini une librairie de plateformes et substrats pouvant être utilisés pour effectuer la photocycloaddition [2+2] régio- et stéréosélectivement. Or, toutes les oléfines sont des bipyridines acceptrices de liaisons hydrogènes, et les plateformes sont les donneuses. En 2005, MacGillivray a inversé les rôles en étudiant l’irradiation de l’acide fumarique lié à la plateforme 2,3-bis(4-méthylènethiopyridyl)naphtalène (2,3-nap).64f) L’assemblage moléculaire à quatre composants liés par liaisons hydrogènes est également possible dans ce sens-là et les deux oléfines sont séparées de 3,84 Å. La photocycloaddition [2+2] est donc permise pour former le photodimère rctt de manière stéréosélective avec un rendement de 70% (Schéma 30).

Schéma 30 : Photodimérisation [2+2] de l’acide fumarique lié à une plateforme bipyridine naphtalene

Après avoir réussi les simples et doubles cycloadditions de composés aza stilbéniques, MacGillivray a étudié en 2004 la formation de ladderanes par cette méthodologie à partir de dérivés di- et triéniques.8 Ainsi, en étendant le substrat à un bis(4-pyridyl)poly-m-ène (E) comportant deux ou trois doubles liaisons, les [3]- et [5]-ladderanes 55 et 56 ont pu être synthétisés quantitativement à l’échelle du gramme en une seule étape de photocycloaddition [2+2] stéréospécifique (Schéma 31).

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Schéma 31 : Formation de [3]- et [5]-ladderanes par photocycloaddition [2+2] de di- et triènes

bipyridines liées au 5-méthoxy-résorcinol par liaisons hydrogène

Les structures RX des cocristaux de départ montrent une distance inférieure à 4.2 Å entre les doubles liaisons d’intérêt, ce qui a permis la photocycloaddition. En fin de réaction, la plateforme est clivée par traitement au KOH et extraction au dichlorométhane. Le suivi RMN des réactions a montré que la fermeture des cyclobutanes n’était pas concertée mais se faisait par étapes de simple, double puis triple cycloaddition. Ce résultat prouve que les liaisons hydrogènes sont assez fortes pour aligner parallèlement les oléfines même après les premières cycloadditions. Ceci est rarement le cas des solides seuls dont la cycloaddition s’arrête après la formation d’un cyclobutane.58d),71 Ce résultat dépend du substrat utilisé, comme l’a rapporté le groupe de Wang recemment.53d) En effet, en utilisant des groupements imidazoles à la place des pyridines, l’irradiation s’arrête après une simple photocycloaddition, bien que l’arrangement moléculaire maintienne parallèlement deux oléfines à une distance de 3,8 Å (Schéma 32).

Schéma 32 : photocycloaddition [2+2] d’un diimidazole butadiène dans un assemblage moléculaire à

quatre composants avec le 5-méthoxy-résorcinol

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De manière intéressante, le composé 57 est obtenu quantitativement en utilisant une lampe au xénon, alors qu’il se trouve en mélange avec le macrocycle résultant d’un réarrangement de Cope par irradiation au mercure.

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