• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1. Introduction

1.2. Le sang, la moelle osseuse et les leucémies

1.2.2. Leucémie myéloblastique aiguë

La LMA est le sous-type de leucémie le plus commun, environ 13 000 nouveaux cas sont diagnostiqués par année aux Etats-Unis. L’incidence annuelle est de l’ordre de 2,5/100 000 et augmente en fonction de l’âge jusqu’à 12-13/100 000 chez les personnes âgées de plus de 65 ans. L’âge moyen au moment du diagnostique de la LMA est de 62 ans (Zenhausern et al. 2003). À travers le monde, l’incidence de la LMA est en croissance chez les personnes âgées. Elle est principalement due aux conséquences d’un traitement antérieur envers les tumeurs solides par chimiothérapie et/ou radiothérapie ou fait suite à l’exposition néfaste et chronique de certains facteurs environnementaux.

Contrairement aux leucémies lymphoïdes qui se caractérisent à la fois par un taux élevé de globules blancs et l’absence de cellules immatures dans le sang, la LMA implique une série de changements génétiques chez les cellules hématopoïétiques précurseurs. Il y a alors modification de la croissance et de la différenciation des cellules normales hématopoïétiques, suivie d’une expansion du clone malin dans la moelle osseuse et dans le

sang. Ces cellules précurseurs hématopoïétiques malignes peu différenciées, appelées blastes, peuvent proliférer de façon illimitée, mais ne sont pas capables de devenir des cellules sanguines normales. Comme les autres types de cancers, les altérations génétiques rencontrées dans la LMA résultent à la fois d’une activation des oncogènes et du dysfonctionnement des gènes suppresseurs de tumeur (Gilliland et al. 2004). Quel que soit le tissu d’origine (i.e. moelle osseuse ou ganglion lymphatique), presque toutes les leucémies s’étendent aux organes fortement vascularisés, tels que la rate, les ganglions lymphatiques ou le foie. On retrouve fréquemment une destruction de ces tissus au fil du temps, puisqu’en envahissant ces organes, les cellules cancéreuses se reproduisent en utilisant les éléments du métabolisme tissulaire normal. Plusieurs manifestations cliniques sont alors observées, comme par exemple des manifestations neurologiques, des lésions cutanées ainsi qu’une hépato-spléno-adénomégalie (Ball et al. 1991, Zenhausern et al. 2003). Dès le début de la maladie, des anomalies quantitatives et qualitatives du sang périphérique sont constatées dû à l’occupation de la moelle osseuse par les cellules leucémiques non fonctionnelles (Zenhausern et al. 2003). L’anémie est constante, souvent sévère, le taux de plaquettes est inférieur à 50 x 103 /µL, le nombre de leucocytes est le plus souvent élevé (entre 10 x 103 et 100 x 103 /µL) mais peut être diminué (< 5 x 103 /µL) (Ball

et al. 1991).

Le processus cancéreux conduit parfois à la production de cellules partiellement différenciées, provoquant ainsi des leucémies spécifiques à la lignée des neutrophiles, des éosinophiles, des basophiles ou les monocytes. Il existe également différentes sous-classes de la LMA, allant de M0 à M7, tel que proposé par le Groupe Coopératif Franco- Américano-Britannique (FAB) (Bennett et al. 1976) (Tableau 1.1). Ces sous-classes sont déterminées par la morphologie cellulaire observée au microscope et par le degré de maturation des cellules leucémiques. En classifiant les différents types de la LMA de cette façon, les traitements développés sont devenus plus ciblés et plus efficaces afin d’éradiquer les cellules anormales.

Tableau 1.1. Classification des différentes sous-classes de la LMA par le Groupe coopératif franco-américano-britannique (FAB) (Andoljsek et al. 2002, Bennett et al. 1976, Zenhausern et al. 2003).

Sous-Classe

FAB Nom

Marqueurs cellulaires exprimés (+) ou absents (-) Fréquence relative des différentes formes de la LMA M0 Leucémie myéloblastique aiguë indifférenciée CD13+, CD33+, CD34+ CD14-, MPO-, HLA-DR+ 2-5 % M1 Leucémie myéloblastique aiguë sans différenciation CD13+, CD33+, CD34+, CD14-,

MPO+, HLA-DR-, CD11a +/- 15-20%

M2 Leucémie myéloblastique aiguë avec différenciation (CD11a), CD13+, CD33+, CD34+/-, CD14-, MPO+, HLA-DR+, CD15+/-, CD11a +/- 10-30% M3 Leucémie promyélocytaire aiguë CD13+, CD33+, CD34-, CD14-,

CD15+/-, MPO+, HLA-DR-, CD11a +/- 10-11%

M4 Leucémie myélomonocytaire aiguë CD11a+, CD13+, CD33+, MPO+, CD14+, HLA-DR+ 25-37% M5 Leucémie monocytaire aiguë CD11a+, CD13+, CD33+, MPO-, CD14+, HLA-DR+ 9-10%

M6 Érythroleucémie aiguë CD13+, CD33+, MPO+, glikoforine A+ 3-5%

M7

Leucémie mégacaryoblastique

aiguë

Les critères diagnostiques reposent sur la morphologie des cellules observées au microscope, la cytochimie par coloration d’enzymes spécifiques présentes dans le cytoplasme des cellules leucémiques, la cytogénétique, l’étude du phénotype des blastes à l’aide de marqueurs cellulaires spécifiques analysés par cytométrie en flux et la recherche de certains marqueurs moléculaires intracellulaires (Griffin et al. 1981, Zenhausern et al. 2003). Le diagnostic d’une LMA est alors posé si l’on trouve plus de 20-30% de blastes myéloïdes dans la moelle ou le sang périphérique ou si une tumeur extramédullaire se compose de blastes myéloïdes (Zenhausern et al. 2003).

Afin de définir et confirmer le phénotype particulier des blastes leucémiques, plusieurs études immunologiques des antigènes de surface ont été menées ces dernières années. Elles ont consisté à produire un grand nombre d’anticorps monoclonaux contre des structures antigéniques de surface des cellules myéloïdes normales et leucémiques. Puisqu’ils sont hautement spécifiques, ces anticorps monoclonaux s’avèrent maintenant essentiels dans le diagnostique des différents sous-types de leucémie et sont utilisés seuls ou en association avec d’autres marqueurs cellulaires afin de corroborer la nature de la pathologie (Tableau 1.1). Par exemple, 80% des leucémies monoblastiques aiguës et myélomonocytaires (M4 et M5 de la classification FAB) et 40% des leucémies myéloblastiques et promyélocytaires (M1, M2, M3) peuvent être identifiées par l’anticorps monoclonal Mo1 (CD11a). Ce dernier reconnait une glycoprotéine de surface composée de 2 sous-unités de 94 et 144 kDa et est associé au récepteur C3bi sur les monocytes et les granulocytes (Arnaout et al. 1983). L’anticorps monoclonal Mo2 (CD14) présente un fort intérêt diagnostique en reconnaissant une glycoprotéine de 55 kDa. Il sert à identifier les cellules de la lignée monocytaire et est positif dans 50% des cas de leucémie aiguë monoblastique et myélomonocytaire (M4 et M5). Les anticorps monoclonaux de la série My1-My9 sont également importants. Par exemple, My7 (CD13) et My9 (CD33) reconnaissent 80% des leucémies myéloblastiques (M1 et M2), 100% des leucémies aiguës promyélocytaires (M3) et plus de 80% des leucémies monoblastiques et myélomonocytaires (M4 et M5) (Griffin et al. 1984, Griffin et

al. 1981). Certains anticorps peuvent infirmer certaines classes de leucémies, comme c’est le cas pour le My9 qui est toujours négatif dans les leucémies lymphoïdes (Griffin et al. 1984). Quant à l’anti-My-10 (CD34) produit par Civin et al. (Civin et al. 1984), il se lie à un antigène qui s’exprime uniquement aux premiers stades de la différenciation hématopoïétique. Le CD34 est utile dans l’identification de blastes médullaires chez les patients en rémission complète, puisqu’il n’est pas spécifique pour la lignée myéloïde. Il réagit avec 32% de leucémies aiguës lymphoblastiques et 28% des leucémies myéloïdes.

Documents relatifs