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Article 2 – Répertoire des Tfr

A. Les Tfr contrôlent la production d’anticorps

Se poser la question du contrôle de l’action des Tfh revient à se demander de quoi l’organisme a « peur » dans leur mode de fonctionnement. Plusieurs modèles murins ont été élaborés ces dernières années pour observer au mieux l’effet de l’absence de Tfr (1). Du fait des observations combinées du phénotype de ces souris et de celles faites en pathologie humaine, on peut supputer que les contrôles peuvent intervenir dans trois axes (2)

1. Modèles murins

Plusieurs solutions ont été produites afin d’évaluer l’effet de la perte de Tfr sur un organisme murin.

126 a. La déplétion liée à l’expression de Foxp3

La déplétion de l’ensemble des cellules régulatrices de l’organisme grâce à des souris Foxp3DTR ou DEREG (souris exprimant le récepteur à la toxine diphtérique DTR sous promoteur de Foxp3 dans lesquelles une injection de toxine diphtérique conduit à la déplétion de l’ensemble des cellules de l’organisme) est l’une d’entre elles. Cette technique cependant n’est que peu spécifique puisque déplète tous les lymphocytes T régulateurs de la souris et amène à un phénotype très altéré mélangeant les problèmes liés à l’absence de Treg à ceux liés à l’absence de Tfr (Linterman et al., 2011).

Des modèles de recomposition de système immunitaire de souris avec des moelles osseuses de souris Sh2d1a-/- :Foxp3DTR ou Sh2d1a-/-:Foxp3-/- (Sh2d1a codant pour SAP, molécule importante dans les Tfol impliquée dans la stabilité des liaisons B-T) (Linterman et al., 2011) ont pu apporter quelques réponses et une déplétion spécifique des Tfr mais on s’éloigne encore plus de l’homéostasie de l’organisme avec ces expériences de transfert et ces techniques sont complexes à mettre en place.

b. La déplétion liée aux gènes folliculaires

Une autre solution trouvée fût de reconstituer un système immunitaire en injectant des cellules T à une souris déficiente, dont des Treg de souris Bcl6-/- ou Cxcr5-/- (Chung et al., 2011). Mais à nouveau l’homéostasie de l’organisme est brisée et les souris transférées présentent de nombreuses anomalies – notamment du contexte cytokinique et de l’organisation structurelle des organes lymphoïdes – empêchant des conclusions claires.

c. Le modèle « idéal »

Le modèle le plus conforme à une étude précise du rôle des Tfr a été créé par une équipe américaine et utilise le fameux modèle cre/lox. Les cellules expriment sous le promoteur de Foxp3 une recombinase (Cre) qui coupera dans les cellules dans lesquelles elle est exprimée le gène situé entre les séquences « lox », en l’occurrence le Bcl6. Les souris Bcl6fl/fl.Foxp3Cre permettent de façon simple de supprimer chez les souris l’expression des Tfr spécifiquement sans créer de troubles disproportionnés. Une critique néanmoins réside en le fait que cette suppression n’est pas inductible. Les souris se sont donc développées avec cette déficience en Tfr et on ne connaît pas l’impact sur la maturation du système immunitaire.

d. La pathologie, meilleur modèle ?

Malgré les avancées apportées par les nombreux modèles de souris KO ou transgéniques - je ne peux m’empêcher de penser au concept d’auto-immunité catastrophique provoquée par

127 l’absence de Foxp3 dans des souris tel que montré en 2007 par l’équipe d’A. Rudensky (Kim et al., 2007) – je reste toujours circonspect face à l’utilisation de ces outils pour rendre des conclusions scientifiques. D’autant plus qu’avec les Tfr nous ne sommes pas en présence – pour poursuivre avec mon exemple de souris Foxp3 KO – d’une population « majoritaire » dont l’absence est difficilement polluée par d’autres mécanismes, mais d’une minuscule population pour laquelle le moindre changement autre que celui que nous observons peut briser les conclusions apportées. Un des remèdes à cette réticence qui m’est propre sera sûrement l’étude de la pathologie qui – et c’est paradoxal – est bien plus physiologique. Là aussi le phénotype observé pourra dépendre de la concordance de plusieurs mécanismes, défaillances ou autres mutations mais correspondront toujours à une réalité non pas créée mais existante en soi. Ce point de vue est néanmoins personnel et ne repose que sur de minces expériences en la matière. Dans tous les cas, l’étude de l’implication des Tfr dans la pathologie humaine devrait se développer dans les années futures et il y a fort à parier qu’elle aidera en beaucoup à la compréhension de la physiologie de ces cellules.

Malgré les critiques que l’on a pu en faire, l’étude des modèles murins mais aussi de la physiologie des Tfh a pu faire émerger trois potentiels débordements de la fonction des Tfh qui pourraient être canalisés par la grâce des Tfr.

2. Les trois grâces

Trois effets de contrôles pourraient concerner les Tfr : le contrôle de la quantité d’anticorps (1), de leur cible (2) et de leur qualité (3).

a. Trop d’anticorps

Un excès de production d’anticorps peut être néfaste. Si ce dernier intervient contre un pathogène il semblerait qu’il soit facilement circonscrit et pas forcément dangereux. Mais les réactions d’hypersensibilité de type 3, causées par des dépôts de complexes immuns (complexes antigènes-anticorps) dans certains tissus, provoquant inflammations et lésions, pourraient être en cause. Il semble cependant qu’il s’agisse plus d’un problème d’élimination que de production de ces anticorps qui soit ici en cause (Charles A Janeway et al., 2001).

b. De dangereux anticorps

Une production d’anticorps contre le soi a été relevée dans de nombreuses maladies auto-immunes (introduction section III). Ces phénomènes nécessitent une double rupture de tolérance, de la part des lymphocytes B ET des lymphocytes T mais ces processus sont fréquents. Si les Tfr agissent de façon analogue aux Treg, ils sont des patrouilleurs du soi capables d’intervenir en cas d’agression auto-immune. Néanmoins la caractérisation du

128 défaut qualitatif ou quantitatif quasi-systématique des Treg dans la plupart des maladies auto-immunes humaines et murines n’a pas encore son pendant du côté des Tfr.

c. De mauvais anticorps

Un mauvais fonctionnement de la maturation d’affinité. Il a été décrit dans un modèle de souris KO pour les cellules Tfr spécifiquement que les souris en questions produisaient des quantités élevées d’anticorps mais avec une classe différente (plutôt des IgA que des IgG) et d’une affinité moindre pour la cible. Les Tfr joueraient donc un rôle important dans la commutation de classe et dans la maturation d’affinité des anticorps, toutes étapes ayant lieu dans le centre germinatifs dans lequel elles se localisent. Chez ces souris néanmoins la quantité de Tfh et de B du CG ont été relevées comme normales semblant indiquer que les Tfr n’ont pas d’effet direct sur la taille des populations (Wu et al., 2016b).

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