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Après la démonstration du phénomène d’hémolyse à médiation immunitaire en 1898 par Jules Bordet, Paul Ehrlich mena en 1901 une série d’expériences d’immunisation d’animaux de plusieurs espèces. Il remarqua que l’obtention d’anticorps contre le sang injecté était possible mais jamais lorsque l’animal était injecté avec son propre sang. Le postulat de « l’horror autotoxicus » était né et symbolisait la réticence (mais pas l’impossibilité) pour l’organisme d’engendrer des anticorps toxiques et capables de se retourner contre lui-même.

Burnet apporta beaucoup à la matière et ce sur des décennies. De 1941 avec sa théorie de formation des anticorps à 1957 avec « The clonal selection theory of acquired immunity », il aura été le premier à tenter d’expliquer la tolérance centrale et l’absence théorique d’auto-anticorps. Les travaux de 1957 ont été inspirés de ceux d’un autre immunologiste (Jerne, 1955), conscient qu’il existait un mécanisme particulier de génération des anticorps pour arriver à un nombre de spécificités incomparable au nombre de gènes servant à les générer.

Le postulat de Witbsky émis par un immunologiste Germano-Américain en 1957 et revisité en 1993 décrit les preuves expérimentales permettant d’affirmer le caractère auto-immun d’une maladie (Rose and Bona, 1993). Elle doit

- être causée par des auto-anticorps ou des lymphocytes T auto-réactifs ;

- dans le cas d’auto-anticorps, la preuve directe de pathogénicité peut être obtenue dans des transferts passifs ;

49 - l’auto-anticorps est considéré comme pathogénique si les receveurs

développent des symptômes mimes de ceux des donneurs.

En 2007, McGonagle et McDermott (McGonagle et al., 2007) classent ces inflammations non infectieuses contre le soi en trois catégories formant plus précisément un continuum :

- les maladies avec une implication principale du système immunitaire inné ; - les maladies avec une implication combinée des deux systèmes immunitaires, le

plus souvent l’inflammation était associée au CMH de classe I ;

- les maladies principalement médiées par le système immunitaire adaptatif le plus souvent liées au CMH de classe II. On comprend rapidement le lien avec les lymphocytes B et la production d’anticorps.

2. Mécanismes et exemples

Depuis, de nombreux mécanismes ont été impliqués dans la formation de ces auto-anticorps et dans leur rôle pathologique. Ces derniers peuvent parfois être directement pathogéniques, causant la maladie en réduisant l’expression ou la fonction d’un antigène ou bien en recrutant d’autres éléments du système immunitaire. Ils peuvent également être des indicateurs de l’inflammation sans que l’on identifie de rôle pathogène particulier.

On trouvera dans le Tableau 1 ci-joint un exemple non exhaustif des anticorps mis en cause dans un type particulier de maladie, les synaptopathies, impliquées dans la signalisation du message nerveux. Un document extrêmement complet composé de près de 500 références fait également état des connaissances actuelles relatives aux auto-anticorps et à leur implication dans la pathologie (Ludwig et al., 2017).

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Tableau 1 : Liste non exhaustive des cibles d'autoanticorps dans les synaptopathies, Crisp SJ., Nat Rev Neuroscience, 2016

Plus récemment, l’implication directe des lymphocytes Tfh a logiquement été faite puisque si des anticorps sont produits il y a fort à parier que la population Tfh a contribué à cette production. Ainsi, nous citerons sans prétendre à l’exhaustivité un ensemble de maladies auto-immunes au sens des définitions précédemment indiquées, associées ou corrélées à un désordre dans la population des Tfh chez l’homme. Le plus souvent, la fréquence de ces cellules a été trouvée comme augmentée (malgré les divergences de définition phénotypique de la population) et parfois associée à une élévation des niveaux sériques d’IL-21 ou de CXCL13.

- dans la polyarthrite rhumatoïde, l’avancée de la maladie est associée à des quantités élevées d’auto-anticorps anti-CCP (Cyclic Citrullinated Peptide) (Ma et al., 2012). Il s’agit d’auto-anticorps présents chez certains patients et très spécifiques de cette maladie dans laquelle les auto-anticorps sont dirigés contre les articulations et notamment leur membrane synoviale ;

51 - le lupus ou Systemic Lupus Erythematosus (SLE) est également très étudié sous cet aspect avec une corrélation des altérations Tfh et de l’augmentation de la sévérité de la maladie, les anticorps étant directement pathogéniques dans cette affection (Simpson et al., 2010; Wong et al., 2010) ;

- la myasthénie enfin peut être prise comme exemple, les auto-anticorps se fixant à un neurorécepteur (le récepteur à l’acétylcholine) et empêchant la fixation du ligand, ralentissant par là même le message nerveux. Des fréquences de Tfh augmentées sont également retrouvées chez les patients et corrélées avec la gravité de la maladie (Saito et al., 2005; Tackenberg et al., 2007).

Parfois enfin, des Tfh sont détectés dans les organes affectés par les maladies auto-immunes. Nous donnerons le seul exemple des glandes salivaires pour le syndrome de Sjögren dans lequel certaines glandes sont cibles du système immunitaire (Salomonsson et al., 2002).

L’étude des Tfr dans ces maladies est quant à elle très restreinte et concerne une caractérisation hétérogène de la population. Ont ainsi pu être relevées une diminution de la fréquence des Tfr chez des patients atteints de sclérose en plaques (Dhaeze et al., 2015) ou de myasthénie (Wen et al., 2016), mais des résultats contradictoires apparaissent par exemple avec une augmentation des taux de Tfr chez des patients atteints de spondylarthrite ankylosante (Shan et al., 2015). Ces études se basent sur des proportions de Tfr circulantes, concept que nous aborderons dans notre discussion. Très récemment enfin, l’équipe de L. Graca a observé des quantités élevées de Tfr circulants chez des malades atteints du syndrome de Sjögren et font l’hypothèse que cette élévation des Tfr serait plutôt un indicateur d’une réponse humorale plutôt que d’une augmentation de l’activité régulatrice (Fonseca et al., 2017).

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