2.3 Objectifs de la thèse
3.1.2 Les techniques iso-indice et uorescence induite par laser
Nous allons expliquer les techniques couplées iso-indice et uorescence induite par laser
utili-sées pour visualiser les changements de structure à l'intérieur de l'échantillon granulaire. Pour de
plus amples détails sur la mise en oeuvre de ces techniques, on pourra consulter les deux reviews
proposées par Dijksman et al. [56] et Wiederseiner et al. [55].
La technique iso-indice consiste à utiliser des billes transparentes immergées dans un liquide
de même indice de réfraction, ce qui rend alors le milieu translucide. Les indices optiques de
réfraction ont été vériés à l'aide d'un réfractomètre manuel (Mettler Toledo, type RE30GS).
Nous avons choisi deux types de suspensions granulaires.
La première, que nous avons étudiée en détail, est une suspension gravitaire à haute viscosité.
Elle est composée de billes monodisperses en verre borosilicate (Sigmund Lindner), parfaitement
sphériques, de diamètre moyen d = 1 mm, d'indice optique n
D= 1,473 et de densité ρ
p=
2230kg.m
−3, immergées dans du glycerol bidistillé (BDH Chemicals) de viscositéη = 1,49Pa.s,
de même indice optique n
Det de densité ρ
f= 1260 kg.m
−3. La diérence entre un milieu xe
de billes de verre dans l'air et immergées dans un liquide de même indice de réfraction est très
bien illustrée sur la Fig. 3.9.
La seconde suspension que nous avons choisi d'étudier est celle proposée dans le cadre de la
review de Wiederseiner et al. [55], qui est un mélange quasi-isodense à faible viscosité. Elle est
composée de billes monodisperses en PMMA, polymethylmetacrylate (GoodFellow), parfaitement
sphériques, de diamètre moyen d = 600 µm, d'indice optique nD = 1,49 et de densité ρp =
1180 kg.m
−3, immergées dans du Triton X100 (Fisher Scientic) de viscositéη = 0,27 Pa.s, de
même indice optique nD et de densité ρf = 1070 kg.m
−3.
Nous avions également testé une suspension proposée dans la thèse de Ngoma [66], composée
de billes de borosilicate et d'un mélange de deux huiles minérales (viscosité ηm = 18,3 mPa.s,
densité ρ
m= 850 kg.m
−3) dans les proportions respectives de 90% de Mineral Oil
(Sigma-Aldrich) et de 10% d'Immersion Oil - Type A (Cargille). Les premiers tests au rhéomètre de
cette suspension ont révélé des plateaux de viscosité de l'ordre de 10
7Pa.s très bruités. En
eet, dans notre cadre d'étude, les forces inertielles doivent être négligeables et la viscosité de
la suspension contrôlée par la compétition entre forces de lubrication et forces frictionnelles,
i.e. le nombre de Reynolds particulaire doit être inférieur à 1. Or, pour cette suspension on
Tableau 3.1 Présentation des propriétés des suspensions granulaires étudiées : type de billes,
uide interstitiel et colorant uorescent.
Système 1 Système 2
Borosilicate Glycerol Colorant Fluorescent PMMA Triton X100 Colorant Fluorescent
n
D= 1,473 n
D= 1,473 n
D= 1,49 n
D= 1,49 Nile Blue
ρ= 2,23g/cm
3ρ= 1,26g/cm
3Rhodamine 6G ρ= 1,18g/cm
3ρ= 1,07g/cm
3690 perchlorate
a Rep = (∆ρA(2πf)d)/ηf ∼ 1,5 > 1, avec de faibles vibrations telles que A = 100 µm et
f = 30Hz. Nous étudierons donc les deux suspensions présentées dans le Tab. 3.1.
An de visualiser le mouvement des particules à l'intérieur de la structure granulaire, nous
avons utilisé la technique optique de uorescence induite par laser (PLIF, Planar Laser
Indu-ced Fluorescence). Cette méthode consiste en la ré-émission de la lumière grâce à un colorant
uorescent uniquement dans le plan d'émission du rayonnement de la nappe laser. Le colorant
uorescent doit avoir un pic d'absorption du même ordre que la longueur d'onde du laser utilisé,
et ré-émettre à une longueur d'onde supérieure. Les ré-émissions sont conservées en ajoutant un
ltre optique.
Nous avons donc ajouté un colorant uorescent dans la phase liquide de la suspension
granu-laire, en nous basant sur des études précédentes [55, 56, 66]. Pour le système 1, nous avons
choisi la Rhodamine 6G (BDH Chemicals), qui a un pic d'absorption à λ= 530nm et ré-émet à
555< λ <585 nm. Pour le système 2, nous avons utilisé du Nile Blue 690 Perchlorate
(Sigma-Aldrich), qui a un pic d'absorption à λ= 530 nm et ré-émet à 600 < λ < 630 nm. Cela nous
permet de n'utiliser qu'un seul laser et passe-haut, susant pour obtenir des images propres pour
les deux systèmes. Nous illuminons donc le milieu avec une nappe laser verte (Coherent Inc.),
de longueur d'ondeλ= 518nm et d'une puissance maximale de P = 36mW (Fig. 3.1, -5-). Un
miroir incliné à 45° de l'échantillon -6- permet à une caméra CCD haute fréquence (1280×1024
pixels, MotionBLITZ "EoSens mini") -7-, placée derrière un ltre optique passe-haut à 550nm
-8- et perpendiculaire à l'échantillon, de ne récupérer que la lumière ré-émise par uorescence,
provenant donc uniquement de la phase liquide. Des photographies des deux systèmes issues de
la caméra sont présentées en exemple sur les Figs. 3.3(a) et (b).
(𝑎) (𝑏)
Figure 3.3 Exemples d'images brutes récupérées par la caméra pour (a) le système 1 et (b)
le système 2 présentés dans le Tab. 3.1.
Une expérience typique se déroule suivant le même protocole. La phase liquide de la
sus-50
pension est chauée an de diminuer sa viscosité et le colorant uorescent qui est sous forme
poudreuse est dissout dedans. La solution est alors ltrée pour enlever les restes de poudre.
Les billes sont ensuite saupoudrées sur le liquide, an de les laisser sédimenter. Après quelques
heures, l'échantillon est placé dans une cloche à vide an d'enlever les éventuelles bulles d'air.
L'échantillon est au nal composé de 6 cm de hauteur de grains et de 0,2 mm de uide
surna-geant, nécessaire pour que les billes soient toujours immergées, même si de la dilatance apparait.
Il est ensuite placé sur la cellule de mesure, puis le vane est plongé à l'intérieur. Des vibrations à
σv = 21,03 Pa sont imposées durant5 min an d'être dans la partie logarithmique de la phase
de compaction, ce qui assure un instant initial reproductible (cf Ref. [67]). Des expériences de
rampes continues de contrainte ont été eectuées an d'obtenir les mesures de rhéologie globale,
soitγ˙ = 10
−3−10
2s
−1soitσ= 1−10
3Pa, en prenant 10 points par décade. Les mesures locales
sont obtenues à contrainte σ ou taux de cisaillement γ˙ imposé, appelé "peakhold". Un tour de
vane est imposé après la phase de compaction an de débloquer le système pour des expériences
même à très faible cisaillement. An de s'assurer de la stationnarité de nos mesures, nous avons
eectué des peakhold à très faible contrainte ou cisaillement, puisque c'est dans cette gamme que
les systèmes sont les plus longs à atteindre un état stationnaire, et suivi l'évolution de la
visco-sité de la suspension dans le temps (Fig. 3.4). Nous pouvons remarquer les fortes variations de
viscosité dans l'état stationnaire pour le système 1 comparé au système 2, provenant de la forte
viscosité du uide interstitiel. De ces résultats, nous avons décidé de faire durer chaque rampe en
moyenne5min, et chaque point est une moyenne eectuée sur les trois dernières minutes, ce qui
nous assure des mesures dans l'état stationnaire. Les images récupérées par la caméra lors des
peakhold dans l'état stationnaire nous permettent de faire du suivi de particules an d'obtenir
la rhéologie à l'échelle locale, après traitement PIV ou PTV.
t (s)
100 101 102 103η
(P
a.
s)
100 102 104 106 108 σv= 0,γ˙= 0,08 s−1 σv= 9,36 Pa,σ= 5 Pa σv= 1,32 Pa,σ= 8 Pa(a)
t (s)
100 101 102η
(P
a.
s)
101 102 103 σv= 0,05 Pa σv= 0,36 Pa σv= 0,81 Pa σv= 2,24 Pa σv= 8,98 Pa(b)
Figure 3.4 Exemples de la variation de la viscosité de la suspension au cours du temps
pour quelques peakhold (contrainte ou cisaillement imposé) et diérentes valeurs d'intensité de
vibrations σ
vdans le cas du (a) système 1 et (b) système 2, peakholdσ= 1 Pa.
Dans le document
Rhéologie et contrôle des écoulements de dispersions granulaires par l'application de vibrations
(Page 59-63)