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LES SOLVANTS

Dans le document APPROCHE PAR PRODUIT (Page 143-148)

Lorsqu’on les interroge les adolescents scolarisés de 16 ans sont 11 % à déclarer une expérimentation des « produits à inhaler », expérimentation dont on ne contrôle pas l’intensité [101]. L’usage à long terme et répété des solvants qui ont cours parmi des populations marginalisées (enfants des rues par exemple) ne semble pas exister en France.

Parmi les populations d’usagers problématiques de drogues en France, les usa-ges de solvants/poppers sont très marginaux. Des usausa-ges quotidiens sont retrouvés chez 0,4% d’entre eux et au cours du dernier mois chez 4,9 % en 2006 (46 % en ont consommé au moins 10 fois au cours de leur vie). La fréquentation du milieu festif techno (festival, free partie…) n’apparaît pas dans cette population favoriser l’usage de ces produits contrairement aux produits stimulants et hallucinogènes [12].

En milieu festif peuvent être consommés les poppers (traités ci-dessous) et le protoxyde d’azote.

Le protoxyde d’azote, utilisé en médecine comme anesthésiant (mélange équi-moléculaire oxygène/protoxyde d’azote - MEOPA), peut être consommé de façon détournée en milieu festif alternatif ; les effets attendus par les usagers sont un état d’euphorie, des sensations de picotements, un engourdissement des membres, un ralentissement de la perception du temps, une atténuation des sensations tactiles, un état cotonneux et des distorsions sonores. Appelé aussi « proto » par les usagers, il serait vendu sous forme de ballons (2 €l’unité). Son usage détourné, qui était rapporté depuis plusieurs années par les observateurs en milieu festif, semble aujour-d’hui anecdotique. Le produit y est très peu disponible.

L

ES POPPERS

Les préparations contenant des nitrites aliphatiques ou cyclique d’alkyle (nitri-tes d’amyle, de butyle d’isobutyle, de propyle, de pentyle), plus connues sous le terme générique de « poppers » sont généralement classées dans la famille des sol-vants mais aussi des hallucinogènes du fait des effets de type hallucinatoires que leur consommation est susceptible d’engendrer. Ils se présentent sous la forme de liquides très volatils contenus dans des fioles de 10 à 15 ml [21, 23].

Les nitrites d’alkyles ont une action immédiate par inhalation. Leurs effets ne durent pas plus de deux minutes. Leur effet principal est la relaxation des fibres mus-culaires lisses entraînant notamment une dilatation intense des vaisseaux. Ils sont responsables d’une hypotension et d’une accélération du rythme cardiaque. Le nitrite d’amyle (ou iso-pentyle) a notamment été utilisé pour ses propriétés vaso-dilatatrices des coronaires pour soulager les crises d’angine de poitrine (angor).

Leur inhalation produit une euphorie, éventuellement accompagnée de rires.

En France, les poppers contenant des nitrites de pentyle et de butyle ou leurs isomères sont interdits à la vente ou à la distribution gratuite au public, depuis 1990 (décret n° 90-274 du 26 mars 1990). Par contre, certains nitrites, non mentionnés dans le décret d’interdiction, n’étaient pas contrôlés par une réglementation parti-culière et restaient disponibles (nitrites d’amyle ou de propyle par exemple) dans les sex-shops ou les bars gays. Depuis 2007, tous les produits comportant des nitri-tes d’alkyle aliphatiques, cycliques ou hétéro cycliques ou leurs isomères destinés au consommateur et ne bénéficiant pas d’une autorisation de mise sur le marché, ont été interdits à la vente ou à la distribution par le décret n°2007-1636 du 22 novembre 2007. Ce décret a été annulé en Conseil d’Etat le 15 mai 2009 sur la requête d’une des sociétés produisant ces produits et de plusieurs associations.

Données de cadrage

Selon les données issues du Baromètre Santé 2005, 4,1 % des personnes âgées de 18 à 64 ans auraient expérimenté des poppers [7, 82]. C’est dans la tranche d’âge des 26-44 ans que l’expérimentation est la plus élevée (6,3 %). L’expérimentation des poppers est un phénomène plus spécifiquement masculin.

La fréquence d’expérimentation des poppers chez les jeunes de 17 ans est en nette augmentation depuis huit ans puisqu’elle passe de 2,4 % en 2000 à 13,7 % en 2008, notamment chez les filles (de 1,3 % à 13,2 %) [53] ; Parmi les expérimentateurs, seuls 6,7 % ont consommé le produit de manière régulière (au moins 10 fois) dans l’année précédente.

Les saisies de poppers étaient inexistantes depuis plusieurs années et demeurent anecdotiques. En 2008, 4 flacons de poppers ont été saisis. Les poppers n’ont donné lieu à aucune interpellation [9].

Fréquences d’usage et usagers

Les poppers sont particulièrement consommés par les personnes fréquentant l’espace festif techno (alternatif et commercial). Ainsi les résultats d’une étude portant sur les villes de Bordeaux, Metz, Nice, Rennes et Toulouse ont montré que un peu plus de la moitié des personnes enquêtées dans ce milieu ont expérimenté les poppers et qu’elles sont 9 % à en avoir fait un usage récent (N=1496) [27].

Ils sont notamment expérimentés ou consommés occasionnellement par des adolescents qui recherchent l’état d’ébriété et d’euphorie brève qu’ils procurent. Leur image de produits peu risqués, la médiatisation dont ils ont été l’objet, dans un contexte de diffusion de l’expérimentation des drogues à usage festif chez les

jeu-nes, pourraient être à l’origine de cet engouement. Leur prix modéré et surtout leur partage particulièrement aisé dans un cadre festif (pas de préparation) ont pu concou-rir à la multiplication des expérimentations chez les jeunes. Des expérimentations ou des consommations occasionnelles de poppers sont également signalées chez des collégiens ou des lycéens hors contexte festif [21].

En contexte festif, consommé le plus souvent en groupe, notamment par les plus jeunes, ils procurent une sensation immédiate d’hilarité et d’euphorie de courte durée. Ils sont inhalé directement sur la piste de danse (la bouteille étant placée sous la narine).

Au cours des after, ils feraient « remonter l’effet des autres produits ».

Au sein de l’espace à tendance techno conventionnel, dans le milieu du club-bing (en partie homosexuel), l’usage récent concerne 17 % des personnes rencon-trées (N=430) [27].

En effet, les usages les plus fréquents concernent la population homosexuelle masculine qui fréquente des lieux de rencontres festives ou sexuelles. Selon le Baromètre Gay 2005 réalisé auprès d’hommes fréquentant les lieux de rencontre gay franciliens, 47 % des personnes ayant participé à l’enquête déclarent avoir consommé des poppers au cours des douze derniers mois [2]. La population mas-culine homosexuelle amatrice de substances psychotropes le consomme majori-tairement en contexte sexuel où le poppers occupe une place très particulière parmi les produits utilisés. Ils sont, en effet, censés améliorer l’érection, accroître les sen-sations orgasmiques et retarder l’éjaculation. Certains usagers ressentent une quasi-dépendance vis-à-vis du produit pour la réalisation d’actes sexuels. Il est égale-ment quasi systématiqueégale-ment associé à la pratique d’actes qualifiés de « hard ».

L’association avec du Viagra®, pourtant contrindiquée, n’est pas rare [1, 21, 23].

Marché

Jusqu’en 2007, les poppers sont légalement vendus en France dans les sex-shops, les saunas ou les clubs. Toutefois, dans ce type d’établissement, les pop-pers vendus légalement en France sont en général considérés comme peu effica-ces contrairement à ceux importés illégalement des Pays-Bas ou du Royaume-Uni [1]. Qualifiés de « vrais poppers » par les usagers, selon les observations ethnogra-phiques réalisées à Paris, du fait d’effets plus forts et plus durables, d’une odeur moins désagréable, de maux de tête consécutifs à la prise moins fréquents et d’une absence de sensation de brûlure sur les parois nasales et sur la peau, ces derniers seraient davantage recherchés que les poppers acquis en France [1].

Le décret de 2007, élargissant l’interdiction de vente à l’ensemble des poppers ne semble pas, sur les deux sites où une observation en milieu festif gay était menée

(Paris et Toulouse), avoir entrainé de diminution franche des usages en contexte fes-tif public. S’ils n’étaient plus proposés dans la plupart des saunas fréquentés par les hommes homosexuels, ils ont continué à y être utilisés. Plusieurs éléments ont concouru à cette disponibilité persistante. En premier lieu, dans l’espace festif gay, les usagers réguliers consommaient déjà un produit interdit en France, commandé sur Internet, le Jungle Juice. À Paris, dans ce milieu, le produit est également fré-quemment rapporté des voyages européens (Londres, Berlin, Amsterdam). Par ailleurs il semble que certains sex-shops ou saunas aient continué de le proposer discrètement à leurs clients [1, 21].

Les consommateurs les plus affectés par cette réglementation ont été les usa-gers occasionnels, disposant d’un réseau relationnel gay insuffisant ou absent qui s’approvisionnaient dans les sex-shops, les clubs et les saunas et ne voulaient pas risquer de donner leur adresse ou de se faire livrer au domicile [1, 21, 23]. Il sem-ble cependant, que l’accessibilité, même si elle a paru constante pour beaucoup d’usagers intégrés dans les cercles gays ait été perçue comme plus compliquée, avec une multiplication des intermédiaires pour ceux qui ne le commandaient pas eux même et une augmentation des prix.

Les prix cités en 2008 dans les sex-shops qui écoulent leurs stocks à Paris se situent entre 35 et 40 €le flacon de 13 ml. À Toulouse, le flacon de 10 à 15 ml, commandé à un intermédiaire, vendu 12 € en 2007 est accessible à 20 €en 2008 [1, 21, 23] .

La situation depuis l’annulation du décret à la mi-2009, n’a pas encore été évaluée.

Conséquences de l’usage

L’intoxication peut provoquer des nausées, des vomissements, une hypoten-sion, une dermite de contact caractéristique qui se traduit par des lésions nasales et du visage recouvertes de croûtes jaunâtre, une irritation cornéenne, des cépha-lées, une hypertension intraoculaire et parfois la survenue d’une anémie par alté-ration des globules rouges (méthémoglobinémie). Elle peut théoriquement prendre la forme d’une psychose aigue, plus rarement d’un coma ou d’un décès.

L’association avec un certain nombre de médicaments, dont le Viagra® qui lui est pourtant régulièrement associé par une frange des usagers, potentialise les risques d’accidents cardiovasculaires.

En dehors des notifications spontanées, il n’existe pas de données françaises permettant de quantifier la survenue d’effets indésirables. De 1992147à 2000, 310 cas d’intoxications aigues on été rapportés [102]. Des cas de blessures sont signa-lés en 2008 à Paris à la suite de chutes induites par des étourdissements, des ver-tiges ou une ébriété [21].

147. Date du premier cas d'intoxication aigue liée aux poppers rapporté aux centres anti-poisons et de toxicovigilance.

Les médicaments psychotropes regroupent plusieurs classes de substances des-tinées à agir sur l’activité cérébrale. Ceux-ci sont largement diffusés dans la popu-lation française. Pour la majorité des usagers, la consommation fait suite à une prescription médicale dans le cadre d’un traitement [52]. Seule une minorité les consomme en dehors d’un cadre thérapeutique avec pour objectif le soulagement de symptômes par le biais d’une automédication ou la recherche d’une modifica-tion de l’état de conscience.

D’une manière générale, les médicaments les plus détournés de leur usage sont les benzodiazépines (BZD) ou les molécules apparentées, principes actifs de la plupart des médicaments à visée anxiolytique ou hypnotique. Elles ont, outre leurs propriétés hypnotiques et anxiolytiques, des effets myorelaxants et anticonvulsivants.

Leur utilisation continue est susceptible d’engendrer le développement d’une tolé-rance et un risque de dépendance physique et psychique pouvant entraîner un syn-drome de sevrage.

Dans les populations particulièrement usagères de drogues, les antidépresseurs et les anti-psychotiques ne semblent pas détournés. Ainsi dans les CSST, bien que consommés chacun par 8 % des personnes rencontrées, ces médicaments ne font pas, selon l’enquête OPPIDUM 2006, l’objet de détournement [73].

Il faut noter que l’usage d’un médicament psychotrope tel que les BZD par un usager ou un ex-usager de drogues n’est pas forcément synonyme de recherche de

« défonce ». La fréquence importante des co-morbidités psychiatriques chez les usagers de drogues s’accompagne souvent d’une symptomatologie anxieuse moti-vant un usage, qu’il soit encadré ou non. Si certains mésusages sont patents, il est

LES MÉDICAMENTS PSYCHOTROPES

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