• Aucun résultat trouvé

Le système himalayen

2.3 Les sédiments himalayens

Le système fluviatile du Gange et du Brahmapoutre constitue un des bassins versants les plus grands au monde, contribuant largement aux apports océaniques en termes de débit et de flux sédimentaires.

2.3.1 Dynamique sédimentaire

Les paramètres qui contrôlent la production de sédiments au cœur de la chaîne himalayenne sont multiples - la lithologie, la morphologie, le climat ou encore le taux de surrection. Toutefois, les précipitations, et en particulier la saison de la mousson, sont un élément clef de la dynamique sédimentaire, fortement conditionnée par la saisonnalité du climat himalayen (Bookhagen et al., 2005b; Wulf et al., 2010). En effet, les précipitations déterminent à la fois le taux d'érosion chimique des principales lithologies du bassin, et les processus physiques de transport et de déposition des sédiments (Galy and France-Lanord, 2001; France-Lanord et al., 2003; Rahaman et al., 2009). On estime à plus de 75% le flux de sédiments transportés pendant la MEI (Chakrapani and Saini, 2009) et des taux d'érosion plus élevés sont attribués aux régions orientales du bassin du Gange-Brahmapoutre [2.9 mm/an, contre 2.1 mm/an dans la partie occidentale d’après Galy and France-Lanord (2001)], en accord avec une pluviométrie annuelle plus importante.

L’origine des sédiments dans la chaîne himalayenne peut être contrainte à l’aide des isotopes du Sr et du Nd (Figure 2.8), utilisés dans plusieurs études pour témoigner de l’hétérogénéité des sédiments gangétiques, issus de l’ensemble des unités lithologiques himalayennes (Galy et al., 1999; Galy and France-Lanord, 2001; Robinson et al., 2001; Singh et al., 2008; Morin, 2015). Toutefois, on estime que le Haut Himalaya contribue de manière prépondérante à la production sédimentaire, suite à l’importante érosion physique présente dans cette région, en particulier pendant la saison de la mousson (Galy et al., 1999; Singh et al., 2008). Enfin, l’observation de données géochimiques permet de mettre en évidence une participation considérable du bassin de la Gandak aux apports sédimentaires du Gange (Singh et al., 2008).

La dynamique érosive des bassins himalayens évolue parallèlement au profil altimétrique : le matériel sédimentaire est produit au niveau de la chaîne par érosion et altération et évolue ensuite dans les bas-reliefs, au cours des processus de transport et de dépôt. La faible topographie de cette région rend le transport des sédiments fortement dépendant des conditions hydrodynamiques, ce qui explique pourquoi leur propagation au sein de la plaine peut s'effectuer en plusieurs cycles de dépôt et de remise en suspension (Chakrapani and Saini, 2009).

Le système himalayen

[36]

Figure 2.8 Signature isotopique en Sr et Nd des principales lithologies du système himalayen (Morin, 2015). Depuis la mise en place de la chaîne proto-himalayenne, les sédiments issus de son érosion sont à l’origine de la formation de deux bassins sédimentaires principaux pour le système du Gange- Brahmapoutre: la plaine alluviale Indo-Gangétique et le cône du Bengale. Si environ 400 millions de tonnes de sédiments transitent chaque année vers ce dernier (Lupker et al., 2011), le taux de sédimentation dans la plaine alluviale du Gange est relativement faible. En effet, uniquement 10% du volume sédimentaire transporté annuellement est séquestré sous forme de dépôts fluviatiles au niveau de la plaine (Lupker et al., 2011).

2.3.2 Caractéristiques minéralogiques et géochimiques

Les sédiments fluviatiles sont généralement identifiés par rapport à leur granulométrie : les sédiments « grossiers » correspondent au matériel de berge et de fond, principalement composé dans le cas de la Gandak de sable « fin à très fin », d’argiles et de silts (Singh et al., 2007 ; Figure 2.9). Aucontraire les sédiments fins sont associés aux matières en suspension présentes dans la rivière.

L’évolution et la différenciation minéralogique et chimique des sédiments le long de la plaine alluviale du Gange et au sein même de la colonne d’eau résultent de leurs propres caractéristiques texturales (taille, forme et densité des grains) ainsi que des conditions hydrodynamiques locales (Garzanti et al., 2009; Lupker et al., 2011; Chabaux et al., 2012).

ε

Le système himalayen

[37]

Figure 2.9 A. Composition lithologique des sédiments de fond de la Gandak (Singh et al., 2007). B, C et D. Profil dans la colonne d’eau de la concentration de sédiments en suspension (B), de la distribution granulométrique (C) et de la composition chimique en SiO2 et Al2O3 (D) d’après Lupker et al. (2011).

Les sédiments en suspension sont quant à eux composés principalement de quartz, argile, mica et albite. Leur concentration varie au sein de la colonne d’eau, avec un enrichissement en mica et en argile en surface, alors que le quartz et l’albite sont plus abondants en profondeur (Figure 2.10). La fraction des minéraux lourds est distribuée de manière homogène au sein de la colonne d’eau et sa composition se rapproche de celle des sédiments grossiers, tout en étant plus riche en rutile, titanite, oxydes de Ti et zircon.

Grâce à l’étude minéralogique détaillée proposée par Garzanti et al. (2010; 2011) il est possible d’estimer les phases minérales impliquées dans le bilan U-Th des sédiments gangétiques, en tenant compte de l’abondance de chaque phase minérale et de ses teneurs en uranium et thorium. Les résultats indiquent les minéraux lourds comme phases principales porteuses de U et Th, et en particulier les zircons, les minéraux enrichis en terres rares légères de type monazite et allanite et différents oxydes de titane, comme l’ilménite et la titanite (Figure 2.11). Il est important de souligner que ces minéraux ne représentent qu’une moindre partie du sédiment total (< 1%) et qu’ils sont concentrés dans la fraction fine entre 40 et 150 µm.

Le système himalayen

[38]

Figure 2.10 Concentration (A) et composition minéralogique (B) des sédiments en suspension à différents profondeur dans une colonne d’eau du Gange (Garzanti et al., 2011).

Figure 2.11 Les principaux minéraux participant au bilan U-Th des sédiments du bassin du Gange. Données exprimées en % et calculées à partir de Garzanti et al. (2010; 2011). Autres : autres minéraux lourds.

A

Chapitre 3