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II. Les exemples d’actes étatiques non obligatoires

3. Les actes non obligatoires de déclaration

3.2. Les actes non obligatoires de déclaration unilatéraux

3.2.2. Les recommandations

3.2.2.9. Les recommandations indirectes (comporte-

68. Les recommandations précédentes visaient toutes des recommanda-tions adressées directement par les autorités à leurs destinataires, et étaient reconnaissables en tant que telles. Indirectement toutefois, on décèle des re-commandations plus ou moins manifestes en rapport avec certains actes – matériels proprement dits – tels que le comportement exemplaire des

autori-234 Le Temps, édition du 13 novembre 2000, Genève. Les recommandations du groupe de travail

«Législation en matière de chiens dangereux» de l’Office vétérinaire fédéral du 21 décembre 2000 mentionnent cependant qu’il faut renoncer à formuler un modèle d’ordonnance «au vu de la disparité structurelle des législations cantonales» (chap. A let. b des recommandations).

235 DELLEY/MADER 1986, p. 24 s, suivi ensuite d’un modèle d’ordonnance puis de loi cantonale (ibidem p. 25).

236 OFFICEFÉDÉRALDELAJUSTICE, Guide de législation (1re éd.) 1995, p. 110.

237 Voir ci-dessous section II.6.3 (réf. cit.).

238 Voir ci-dessous section II.3.3.2.3.

239 SCHINDLER 2003, p. 71 ss (reprochant notamment à ce texte non impératif le style quasi nor-matif adopté pour la rédaction de certains articles ainsi que la reprise de normes légales [p. 73]).

240 MORAND 1999, p. 179 ss (sur l’expertise «à effets normatifs»).

241 MARTENET 2002, ad art. 10 LMI, ch. 11, p. 1451.

tés publiques. L’Etat adopte un modèle à suivre, démontrant la faisabilité du nouveau comportement auprès des particuliers, permettant de les y habituer, avec l’espoir de les y entraîner. La publicité donnée à cet acte matériel consti-tue une véritable recommandation d’adopter la même attitude que l’Etat. Les autorités peuvent ainsi décider de trier les déchets produits, de rénover un bâtiment en leur propriété pour procéder à des économies d’énergie ou de mettre leur politique contractuelle au service de la poursuite d’une politique publique242, et de le faire savoir. Si dans le premier exemple l’effet recom-mandationnel auprès de la population est limité, on notera dans les deux der-niers un effet incitatif renforcé auprès d’acteurs cibles spécifiques (les mé-tiers du bâtiment dans le premier cas et les contractants en général pour le second). Plus généralement, qu’il s’agisse d’actes obligatoires ou non, le comportement exemplaire est une question de crédibilité dans l’optique d’une mise en œuvre effective des politiques publiques soutenues par l’Etat.

69. La remise de prix ou de distinctions par les autorités aux citoyens les plus méritants dont on récompense l’attitude à suivre est également une re-commandation indirecte d’adopter un comportement déterminé. Le Prix suisse de la mobilité décerné par Suisse Energie (le programme de politique énergétique et climatique du Conseil fédéral) visant à récompenser et encou-rager chaque année les idées novatrices dans le domaine de la mobilité dura-ble243 ou la délivrance de prix ou d’autres distinctions dans le domaine ciné-matographique (art. 7 LCin244) afin d’encourager la création dans ce secteur sont deux exemples.

70. La formation est un moyen d’influence des comportements individuels dont l’efficacité potentielle est considérable dans une perspective à long terme245. Le message enseigné peut avoir valeur de recommandation à l’égard des apprenants. Tel est le cas lorsque la collectivité publique y recourt dans la mise en œuvre de ses politiques publiques, à l’instar de la promotion du tri des déchets dans l’éducation scolaire246 ou de la formation continue en ma-tière environnementale (art. 49 al. 1er LPE) ou énergétique (art. 11 LEne247).

71. Les recommandations indirectes peuvent aussi être le fait des particu-liers. Elles ne nous intéressent dans le présent rapport qu’en relation avec l’activité de régulation non impérative de l’Etat. On citera l’exemple de l’ins-titution d’un label recommandant indirectement le recours aux services de l’entreprise qui en est au bénéfice. Un label peut être adopté pour éviter une

242 MANFRINI 1991; MORAND 1999, p. 178.

243 http://www.prixpegasus.ch.

244 RS 443.1.

245 DELLEY 1991, p. 89 ss.

246 Réf. cit. in FLÜCKIGER 1996, p. 279 s.

247 RS 730.0.

intervention réglementaire. Ainsi, à la suite d’accidents graves lors de la pra-tique de sports extrêmes tels que le canyoning ou le saut à l’élaspra-tique, il a été décidé de ne pas en interdire l’exercice ni d’instaurer une surveillance étati-que; les organisations sportives concernées s’étaient engagées à élaborer des standards de sécurité reconnus sur le plan international dont le respect devrait être contrôlé par une instance indépendante chargée d’attribuer un label de sé-curité aux entreprises qui respectent les conditions ainsi définies248. Le lé-gislateur est libre de formaliser une telle mesure: le Conseil fédéral est habi-lité à édicter des prescriptions sur l’introduction d’un système volontaire de mise en place d’un label écologique (écolabel) (art. 43 a LPE249). La certifica-tion privée est une variante de ce mécanisme qui démontre la conformité de la production ou des services d’une entreprise à un standard déterminé. Tel est le cas du système de management environnemental permettant à une en-treprise d’examiner et de réduire l’impact de l’ensemble de ses activités sur l’environnement250. L’entreprise recommande par là indirectement le recours à ses services, dans le sens des buts de la politique publique en matière envi-ronnementale. A nouveau, le législateur est libre de formaliser cette question:

il l’a fait à l’article 43 a LPE.

72. Enfin, il reste à mentionner le cas des descriptions incitatrices. Plus subtilement, les recommandations peuvent prendre la forme d’énoncés des-criptifs. Les travaux récents en linguistique, plus particulièrement en théorie des actes de langage, nous apprennent qu’il n’existe aucun énoncé purement descriptif, car il n’existe en principe pas de situation où il serait possible de s’exprimer sans produire un effet non exprimé explicitement251. Tous les énoncés seraient ainsi «performatifs», en ce sens que le simple fait d’énoncer véhicule toujours quelque chose que les mots ne relatent pas expressément252. Cela signifie plus concrètement qu’une recommandation peut être rédigée in-directement sous l’apparence d’une description, à l’instar du constat scienti-fique des effets de la fumée sur l’organisme humain selon lequel «fumer tue».

Lorsque cette information est diffusée dans un contexte particulier (sur un pa-quet de cigarette ou dans une campagne de prévention étatique par exemple), il est spontanément lu comme une recommandation de ne pas fumer.

248 Neue Zürcher Zeitung, édition du 27 juillet 2000, p. 11.

249 RS 814.01.

250 SUBILIA-ROUGE 2000.

251 BÉCHILLON 1997, p. 182.

252 BÉCHILLON 1997, p. 183.

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