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3.8 Les grands d´ efis

3.8.2 Les r´ eponses apport´ ees

La non-stationnarit´e des PAs

Ce probl`eme n’a pas fait l’objet de tr`es nombreux travaux. Il est une limite in- trins`eque `a la d´emarche, commune `a toutes les m´ethodes, de fonder la classification sur la forme des PAs uniquement. Jansen (1990) mentionne que si des PAs d’ampli- tudes diff´erentes, dans l’ensemble d’apprentissage, sont associ´es `a un mˆeme neurone

Figure 3.5: Superposition de deux potentiels d’action. Deux potentiels d’action sont ´emis quasi-simultan´ement par deux neurones diff´erents. La superposition de ces deux ´ev´enements donne naissance `a une forme particuli`ere souvent in´edite et unique dans l’enregistrement. Barre d’´echelle horizontale: 3 ms. Barre d’´echelle verticale: 100 µV .

de sortie, le r´eseau de neurones artificiels les reconnaˆıt comme venant du mˆeme neu- rone dans l’ensemble test. Cependant, cette lab´elisation identique de PAs d’amplitudes diff´erentes est une d´ecision que prend l’exp´erimentateur lui-mˆeme lorsqu’il construit son ensemble d’apprentissage. Aucune m´ethode de clustering (par ailleurs n´ecessaire pour construire l’ensemble d’apprentissage) ne permet de l’obtenir automatiquement. La non-stationnarit´e des PAs d’un neurone donne en effet naissance, pour ce neurone, `

a un nuage tr`es allong´e - dont la dispersion est tr`es diff´erente du mod`ele suppos´e par la m´ethode - ou mˆeme `a des nuages distincts. De ce fait, ces m´ethodes associent n´eces- sairement plusieurs classes de PAs au neurone en question.

Il est possible de revenir sur une premi`ere classification en regroupant a posteriori les nuages scind´es ou s´epar´es venant du mˆeme neurone. Fee et al. (1996) fondent ces agr´egations de nuages sur deux ´el´ements : la force de connexion entre deux nuages et leur histogramme d’ISIs. La premi`ere est d´efinie comme une ´energie d’interface calcul´ee sur toutes les paires de points des nuages. Elle doit ˆetre grande pour que la paire soit consid´er´ee comme issue du mˆeme neurone. Le second repr´esente tous les intervalles de temps s´eparant deux PAs successifs de l’ensemble des deux nuages. Il doit pr´esenter une p´eriode r´efractaire aussi nette que celle des deux nuages parents pour que ceux-ci soient attribu´es au mˆeme neurone. En fait, les auteurs commencent par r´ealiser une sur-partition des donn´ees (overclustering) de fa¸con `a obtenir environ dix fois plus de nuages que ce qu’ils estiment n´ecessaire. Ils fusionnent ensuite les paires de nuages selon les deux crit`eres mentionn´es. Les auteurs ne font aucune hypoth`ese sur la nature de la distribution des formes de PA au sein d’un nuage (i.e sur la nature du bruit). La m´ethode d´ecrite est une r´eponse ad hoc au probl`eme que posent aux m´ethodes de clustering l’anisotropie du bruit et la non-stationnarit´e des PAs d’un mˆeme neurone. Cette r´eponse passe par l’introduction, pour la premi`ere fois, d’une partie de l’information temporelle des trains de PAs (la p´eriode refractaire) dans la proc´edure de classification.

Les superpositions de PAs

Le probl`eme des superpositions de PAs a fait l’objet de travaux plus nombreux. C’est dans le cadre du template matching qu’il est le plus simple de le traiter. Par exemple, on peut soustraire aux PAs superpos´es la forme standard `a laquelle ils sont associ´es, en esp´erant pouvoir classer la forme r´esiduelle avec une autre forme standard. Ce pro- c´ed´e simple de soustraction n´ecessite une relativement bonne s´eparation temporelle des PAs superpos´es, permettant au premier PA d’ˆetre reconnu. Une approche plus robuste consiste `a comparer les PAs superpos´es `a toutes les combinaisons possibles, et toutes les translations relatives, de deux formes standard, afin de s´electionner la combinai- son la plus probable (Atiya, 1992). Il s’agit ici d’explorer de fa¸con exhaustive l’espace des superpositions des formes standard. Cette approche est computationnellement tr`es lourde, surtout si le nombre de formes standard est grand.

Lewicki fonde sa solution sur le mˆeme principe (Lewicki, 1994). Mais il construit un algorithme de d´ecomposition des superpositions plus efficace en restreignant l’espace des superpositions `a celles qui ont une probabilit´e non n´egligeable. Il optimise ´egalement la m´ethode de recherche dans cet espace en ayant recours `a la construction d’un arbre de recherche et `a la programmation dynamique.

Les r´eseaux de neurones, soumis `a un apprentissage ad´equat, peuvent se r´ev´eler relativement performants dans la r´esolution de PAs superpos´es (Chandra et Optican, 1997). Ces auteurs incluent dans leur ensemble d’apprentissage un certain nombre de superpositions, avec translations relatives des paires de formes standard utilis´ees. Cette m´ethode souffre de la faiblesse des m´ethodes utilisant les r´eseaux de neurones : ceux- ci doivent au pr´ealable ˆetre soumis `a un apprentissage sur un ensemble de PAs d´ej`a lab´elis´es. Ce que nous montrent Chandra et Optican fondamentalement, c’est qu’en ´etoffant leur ensemble d’apprentissage avec un certain nombre de superpositions, ils rendent leur r´eseau capable d’identifier celles-ci. De plus, leur m´ethode est test´ee sur des donn´ees simul´ees `a partir des trois formes standard utilis´ees par ailleurs dans l’ensemble d’apprentissage du r´eseau. Cette situation est ´evidemment tr`es favorable.

3.9

Conclusion

Au terme de ce tour d’horizon, il apparaˆıt que, si le spike-sorting est un probl`eme d´elicat en ´electrophysiologie, il n’est pas totalement inextricable. Avec les m´ethodes expos´ees dans ce chapitre, les ´electrophysiologistes sont en mesure de traiter des donn´ees dans lesquelles les formes de PAs des neurones sont stationnaires, les superpositions pas trop fr´equentes et les diff´erences entre classes de PAs relativement marqu´ees (pas de recouvrement de nuages). La d´etermination du nombre de neurones demeure un probl`eme dans la pratique, mˆeme dans le cas o`u une solution th´eorique est disponible (section 3.5).

La m´ethode de Monte Carlo par Chaˆınes de Markov (MCMC) d´evelopp´ee et pr´e- sent´ee dans cette th`ese (chapitre 4 et articles 1 et 2) offre une solution au probl`eme de la non-stationnarit´e des PAs d’un neurone, ainsi qu’au probl`eme de recouvrement des nuages de points. Ceci passe par la prise en compte de la statistique de d´echarge des neurones enregistr´es dans la classification des PAs. Par ailleurs, la d´etermination du

nombre de neurones est ´egalement possible dans le cadre de cette m´ethode. L’approche et la m´ethodologie bay´esienne MCMC propos´ees offrent ainsi un cadre de travail radi- calement nouveau, coh´erent et f´econd, au probl`eme du spike-sorting. En revanche, elles n’apportent pas d’avanc´ee notable, du moins pour l’instant, en mati`ere de superposition de PAs.

M´ethodes

Ce chapitre d´ecrit le protocole exp´erimental (section 4.1), la proc´edure de spike- sorting (section 4.2) et l’analyse des trains multiples de potentiels d’action (PAs) apr`es spike-sorting (section 4.3). Le contenu de la section 4.2 a ´et´e ´elabor´e au cours de ce travail de th`ese. Il est fond´e pour partie sur un travail th´eorique ant´erieur de Christophe Pouzat (Pouzat et al., 2002), et pour partie sur le travail th´eorique et de programmation pr´esent´e dans les trois premiers articles du chapitre 5. Cette section 4.2 expose de mani`ere descriptive et lin´eaire l’ensemble de la d´emarche ´elabor´ee pour r´ealiser le spike- sorting.

4.1

Le protocole exp´erimental

Pr´eparation des tranches

La pr´eparation des tranches utilis´ee est celle d´ecrite par Pouzat et Hestrin (1997). Les rats, ˆag´es de 9 `a 25 jours, sont anesth´esi´es avec quelques gouttes d’halothane (Sigma) d´epos´ees sur un mouchoir, puis d´ecapit´es. On pr´el`eve une partie du vermis du cervelet que l’on place dans une solution saline `a 4˚C (la composition pr´ecise de cette solution est donn´ee plus bas). Les tranches sagittales, d’une ´epaisseur de 180 µm, sont obtenues `

a l’aide d’un vibratome (Leica). La coupe a lieu dans la solution saline `a 4˚C. Une fois coup´ees, les tranches sont plac´ees dans la mˆeme solution saline `a 34˚C, dans laquelle bulle continˆument un m´elange de gaz 95% O2 and 5% CO2, pendant environ une heure.

On place alors une tranche dans la chambre d’enregistrement que l’on dispose sous le microscope.

Solution externe

La solution saline ´evoqu´ee dans la pr´eparation des tranches est la solution saline ex- terne de base (Bicarbonate Buffered Saline, BBS) utilis´ee durant toutes les exp´eriences. Elle contient (en mM) : 130 N aCl, 2.5 KCl, 2 CaCl2, 1 M gCl2, 1.3 N aH2P O4, 26

N aHCO3 and 25 glucose. Elle est constamment aliment´ee en m´elange 95% O2 and

5% CO2. Son pH est de 7.4. Durant l’exp´erience, la tranche situ´ee dans la chambre

d’enregistrement est en permanence perfus´ee par cette solution oxyg´en´ee, maintenue `a temp´erature ambiante.

Suivant l’exp´erience, diff´erents bloquants et agonistes (Tocris Neuramin Ltd, Bris- tol, UK) sont ajout´es `a la solution externe d´ecrite. La bicuculline, bloquant des r´e- cepteurs GABAAest appliqu´ee `a 25 µM ; le (S)-3,5-dihydroxyphenylglycine (DHPG),

agoniste des r´ecepteurs glutamate m´etabotropiques du groupe I (mGluRI) est appliqu´e `

a 40 µM . Les stocks de ces agents pharmacologiques sont conserv´es gel´es et dissous dans la solution externe au moment de leur utilisation.

Electrodes

Les enregistrements de cellules de Purkinje (PCs) individuelles sont effectu´es en configuration cellule attach´ee lˆache (loose cell-attached ), `a l’aide d’une micro´electrode de verre de r´esistance 2−4 M Ω. Cette micro´electrode de patch est remplie d’une solution proche de la solution externe, mais dans laquelle le tampon bicarbonate est remplac´e par le tampon HEPES. Cette solution, dite HBS, contient (en mM) : 145 N aCl, 2.5 KCl, 2 CaCl2, 1 M gCl2 , 10 HEPES, 10 glucose.

Les enregistrements simultan´es de plusieurs PCs sont effectu´es `a l’aide d’´electrodes multisites fournies par le Center for Neural Communication Technology, de l’universit´e de Michigan (voir Fig. 1.1). Ces ´electrodes sont de fines lames d’une longueur de 3 mm. Leur largeur `a leur extr´emit´e est de 33 µm et leur ´epaisseur d’environ 3 µm. Sur cette lame, 16 sites d’enregistrement (d´epˆots d’irridium) sont dispos´es lin´eairement et s´epar´es de 50 µm. La r´esistance de ces sites va de 1.3 `a 1.9 M Ω.

Identification des cellules

Toutes les exp´eriences ont ´et´e effectu´ees sur les PCs. Celles-ci sont identifi´ees vi- suellement, grˆace `a la taille de leurs somas (dont le diam`etre, ∼ 20 µm, est bien plus grand que celui de toutes les autres cellules du cortex c´er´ebelleux) et `a leur alignement caract´eristique s´eparant les couche mol´eculaire et la couche des grains dans les tranches sagittales.

L’´electrode multisite est dispos´ee le long des PCs en un endroit o`u leur disposition est rectiligne sur plusieurs centaines de µm, dans la direction de la lame de l’´electrode (Fig. 4.1). Cette derni`ere s’enfonce de quelques µm dans la tranche, avec un angle d’environ 10 − 15˚ par rapport `a l’horizontale. Les somas des PCs enregistr´ees ne sont pas visibles puisque dissimul´es sous l’´electrode (dont la largeur est l´eg`erement sup´erieure au diam`etre des PCs). L’activit´e extracellulaire de ces neurones peut ˆetre enregistr´ee sur les 8 premiers sites de l’´electrode, soit environ 350 µm.

Il est tr`es peu probable que les PAs d’autres cellules que les PCs soient enregistr´es par cette m´ethode. En effet, le placement de l’´electrode dans la couche des grains et dans la couche mol´eculaire n’a jamais fourni aucun signal. L’exp´erience montre qu’aux ˆ

ages ´etudi´es, un PA extracellulaire d’interneurone n’est visible que lorsqu’un contact ´etroit, proche de la configuration cellule attach´ee, est ´etabli entre une pipette de verre extracellulaire et cet interneurone. Ceci est sans doute li´e `a la faiblesse des courants membranaires responsables des PAs d’interneurones. Les courants en jeu dans les PCs

M

G

PC

Figure 4.1: Photographie d’une tranche de cervelet de rat telle qu’elle apparaˆıt sous le microscope. M: couche mol´eculaire. PC: couche des cellules de Purkinje. G: couche des cellules en grain. Le contour de l’´electrode multisite, ainsi que ses sites d’enregistrement, sont trac´es en lignes pointill´ees, `a l’´echelle, et tels qu’ils sont positionn´es sur la tranche durant les exp´eriences. Une pipette de patch-clamp est visible en haut `a gauche pour comparaison.

sont bien plus grands et leurs PAs sont encore visibles `a 50 µm du soma. Dans la mesure o`u les sites d’enregistrement sont plac´es sur la couche des PCs, le signal enregistr´e est donc largement domin´e par leur activit´e. Les PAs des cellules en panier proches de ces PCs sont de tailles bien plus faibles, indiscernables du bruit. Jamais aucun histogramme de corr´elation crois´ee ou des temps du pr´ec´edent (voir section 4.3) n’a mis en ´evidence l’inhibition d’un train de PAs par un autre, comme ce devrait ˆetre le cas si des cellules en panier ´etaient enregistr´ees en mˆeme temps que les PCs.

Dans les exp´eriences de validation de la m´ethode de spike-sorting (deuxi`eme ar- ticle), la pipette de verre extracellulaire est avanc´ee sous l’´electrode multisite de fa¸con `

a enregistrer les PAs de l’une des PCs vues par cette ´electrode. Le positionnement de la pipette sur le soma de cette PC est tel que seuls ses PAs sont pr´esents sur la trace qu’elle enregistre. Sur l’oscilloscope (voir ci-dessous), les PAs de la pipette et certains PAs de l’un des sites de l’´electrode multisite sont alors parfaitement simultan´es. Le train de PAs de cette cellule est utilis´e comme r´ef´erence pour juger de la performance de nos m´ethodes de spike-sorting (sections 4.2.2 et 4.2.3).

Poste exp´erimental et appareils de mesure

La tranche est visualis´ee `a l’aide d’un microscope Axioskop Zeiss (Allemagne), ´equip´e d’un objectif 63X et d’un syst`eme de contraste interf´erentiel de Nomarski. On utilise un micromanipulateur piezzo-´electrique (70 µm de course) mont´e sur un mi- cromanipulateur m´ecanique (12.5 mm de course) pour d´eplacer les micro´electrodes de verre. Pour l’´electrode multisite, on utilise un micromanipulateur hydraulique (10 mm de course, Narishige International, Japon).

L ’´electrode multisite est connect´ee `a un pr´e-amplificateur 16 canaux situ´e `a proxi- mit´e de l’´electrode et fabriqu´e au laboratoire. Ce pr´e-amplificateur amplifie deux fois le signal et est reli´e `a deux amplificateurs diff´erentiels de 4 canaux chacun (AM systems, mod`ele 1700, USA). Seuls les 8 premiers sites de l’´electrode sont reli´es `a ces 8 canaux. L’amplification du signal y est de 1000, soit une amplification totale de 2000. Le signal est filtr´e entre 300 et 5000 Hz.

L’amplificateur utilis´e pour les micro´electrodes de patch extracellulaires est un Axo- clamp 2B (Axon Instruments Inc., USA). Il amplifie 10 fois le signal et est reli´e `a l’un des canaux des amplificateurs diff´erentiels mentionn´es ci-dessus. L’amplification de 100 de ce canal porte `a 1000 l’amplification totale de ce signal extracellulaire. Son filtrage est identique `a celui des canaux de l’´electrode multisite.

Aucune stimulation n’est appliqu´ee. Les activit´es enregistr´ees sont les activit´es spon- tan´ees des PCs, dans les diff´erentes conditions pharmacologiques pr´ecis´ees plus haut. Acquisition des donn´ees

Durant toute l’exp´erience, les donn´ees fournies par 4 des sites au contact des PCs sont continˆument visualis´ees sur un oscilloscope `a 4 canaux (Tektronix, TDS 224). Le rapport signal-sur-bruit est toujours excellent et peut d´epasser 15. La valeur typique de l’amplitude au pic des PAs extracellulaires enregistr´ees est de 500 µV . L’acquisition des donn´ees est r´ealis´ee `a 15 kHz, `a l’aide d’une carte 16 bit A/D (PD2MF-64-500/16H,

United Electronics Industries, USA) et du logiciel Matlab. Les donn´ees sont stock´ees sur le disque dur pour l’analyse.