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2.2 L’inhibition des cellules de Purkinje

2.2.2 Existence d’interneurones communs ` a deux cellules de Purkinje

Les axones des cellules en panier et des cellules ´etoil´ees les plus internes de la couche mol´eculaire s’´etendent sur 200 `a 300 µm le long de la couche des PCs, transversale- ment aux fibres parall`eles (Palay et Chan-Palay, 1974). Sur cette distance, ils forment donc potentiellement des synapses inhibitrices sur plusieurs PCs voisines, mˆeme s’ils ne contactent pas toutes les PCs qu’ils traversent (Bishop, 1993). Vincent et Marty (1993) ont montr´e l’existence d’IPSCs simultan´es dans des paires de PCs espac´ees de moins de 290 µm. La proportion d’IPSCs qu’une PC partage avec une autre (i.e le rapport entre le nombre des IPSCs d’une PC qui sont communs `a une autre et le nombre total des IPSCs de cette PCs) d´ecroˆıt avec la distance qui les s´epare. Elle varie de 13 `a 78% pour des cellules s´epar´ees de 25 − 50 µm. A ces distances, une paire sur 23 uniquement ne montre aucune corr´elation entre les IPSCs. Ces IPSCs communs `a deux PCs dispa- raissent en pr´esence de TTX, ils requi`erent donc la g´en´eration de PAs pr´esynaptiques. D’autre part, ils ne sont pas ´elimin´es par la suppression de toute transmission gluta- matergique excitatrice par le CNQX et l’APV. Ceci indique que la synchronie de ces IPSCs a pour origine les interneurones et non les aff´erences excitatrices en amont.

Il est donc tr`es vraisemblable que ces IPSCs communs `a deux PCs soient dus `a l’activit´e d’un mˆeme interneurone pr´esynaptique. La longueur des axones de cellules en panier est compatible avec la distance maximale de couplage des IPSCs trouv´ee par Vincent et Marty. Cependant, on ne peut pas exclure que certains de ces IPSCs syn- chrones soient dus `a deux interneurones diff´erents, coupl´es par des synapses ´electriques. Plusieurs travaux montrent en effet la pr´esence de jonctions communicantes (gap junc- tions) entre interneurones inhibiteurs (Sotelo et Llinas, 1972 ; Mann-Metzer et Yarom, 1999). Ce point est d´etaill´e dans la section 2.2.3. Observons simplement que le r´esultat est le mˆeme : les PCs voisines re¸coivent une inhibition commune de la part des inter- neurones de la couche mol´eculaire. Cette inhibition commune est susceptible de jouer un rˆole dans la formation de corr´elations entre les d´echarges de PCs (Fig. 2.6B).

Chez le rat, seules 6 `a 10 cellules en panier contactent une PC (Palay et Chan- Palay, 1974), et ce nombre est sans doute encore inf´erieur dans les tranches. La grande variabilit´e de la proportion d’IPSCs partag´ees par deux PCs est sans doute due aux grandes fluctuations relatives du nombre d’interneurones pr´esynaptiques qui peuvent ˆetre communs `a deux PCs. Par ailleurs, deux autres caract´eristiques de cette inhibition commune ont ´et´e mises en ´evidence par les mˆemes auteurs, lors d’un travail ult´erieur (Vincent et Marty, 1996), et m´eritent d’ˆetre signal´ees. La premi`ere est la diff´erence d’amplitude des IPSCs communs dans les deux PCs : l’inhibition de l’interneurone pr´e- synaptique commun est tr`es souvent plus forte pour une PC que pour l’autre. Il est mˆeme envisageable que, dans le cas o`u l’une des deux PCs ne re¸coit qu’une faible inhi- bition de cet interneurone, certains des IPSCs communs ne soient pas d´etect´es, ou mˆeme absents, dans cette cellule. On peut d’ailleurs concevoir que certains PAs de l’interneu- rone pr´esynaptique commun produisent un IPSC dans une PC et pas dans l’autre. La seconde caract´eristique de cette inhibition commune est l’absence de corr´elation entre les fluctuations d’amplitudes des IPSCs communs de deux PCs postsynaptiques : les fluctuations d’amplitudes de ces IPSCs dans une cellule ne sont pas corr´el´ees `a celles

de ces mˆemes IPSCs dans l’autre cellules. Ces fluctuations sont donc locales et ne sont pas synchrones entre deux diff´erentes synapses du mˆeme interneurone.

2.2.3

Synapses ´electriques et interneurones du cervelet

C’est dans les ann´ees 50, chez les invert´ebr´es, qu’ont ´et´e d´ecouvertes les synapses ´electriques entre neurones (Furshan et Potter, 1959). L’existence de ces synapses dans le cerveau des mammif`eres n’a ´et´e admise que plus tard, tr`es exactement depuis leur mise en ´evidence anatomique dans le cervelet (Sotelo et Llinas, 1972) et le cortex (Sloper, 1972). Depuis, de nombreux travaux ont montr´e l’importance de ce mode de communi- cation neuronale, en particulier dans les r´eseaux d’interneurones inhibiteurs. Une revue r´ecente fait l’inventaire de toutes les r´egions du cerveau dans lesquelles ces synapses ont ´et´e d´ecouvertes (Connors et Long, 2004). L’ensemble des travaux synth´etis´es par ces au- teurs contribuent `a forger l’image de r´eseaux d’interneurones inhibiteurs communiquant par couplage ´electrotonique.

Le site morphologique d’une synapse ´electrique est une structure sp´ecialis´ee, appel´ee jonction communicante (gap junction en Anglais), et constitut´ee d’un amas de canaux joignant les cytoplasmes de deux cellules. Les synapses ´electriques sont beaucoup plus rapides que les synapses chimiques et sont bidirectionnelles. De plus, leur action est continue et ne d´epend pas de l’´emission de PA. Elles sont consid´er´ees comme un moyen puissant et efficace de synchroniser les activit´es des neurones, que ce soit leurs PAs ou les fluctuations de potentiel sous le seuil. C’est l`a la fonction principale qui leur est attribu´ee, et celle qui nous int´eresse ici. Cette synchronisation par les synapses ´elec- triques a pu ˆetre constat´ee exp´erimentalement `a de nombreuses reprises. Cependant, des ´etudes th´eoriques montrent qu’elle n’est pas syst´ematique. La mani`ere dont les synapses ´electriques peuvent synchroniser les neurones d´epend en effet de deux fac- teurs : les propri´et´es intrins`eques des neurones (Pfeuty, 2003) et leur combinaison avec des synapses chimiques, notamment les synapses chimiques gabaergiques (Pfeuty, 2005). Dans le cervelet, malgr´e leur d´ecouverte anatomique pr´ecoce, la mise en ´evidence ´electrophysiologique des synapses ´electriques s’est r´ev´el´ee d´elicate. Vincent et Marty (1996) rapportent que la grande majorit´e des interneurones enregistr´es ne montrent pas de signe de couplage ´electrique. Par ailleurs, l’injection de neurobiotine dans un interneurone ne s’´etend pas `a un interneurone voisin, comme ce devrait ˆetre le cas en pr´esence de jonctions communicantes (Pouzat et Hestrin, 1997). En revanche, Mann- Metzer et Yarom (1999) montrent que 40% des interneurones de la couche mol´eculaire enregistr´es sont coupl´es ´electriquement. De plus, l’injection de biocytine dans un in- terneurone r´ev`ele souvent des groupes d’interneurones teints indirectement. Selon ces derniers auteurs, il est tr`es probable que ces diff´erences d’observation soient dues au fait que les jonctions communicantes sont encore peu d´evelopp´ees aux ˆages des rats utilis´es par les premiers auteurs (9 `a 15 jours), alors qu’elles le sont pleinement chez leurs cochons d’Inde matures. Chez les animaux juv´eniles, les dendrites des cellules ´etoil´ees superficielles, ainsi que leurs connexions ´electriques, sont seulement en cours de formation.

´evidence est assez fort pour synchroniser les d´echarges des interneurones mais la fenˆetre temporelle de cette synchronisation est relativement grande, de l’ordre de la dizaine de ms. La rˆole physiologique de cette synchronisation des interneurones inhibiteurs n’est pas clair. Ces auteurs avancent l’hypoth`ese qu’une inhibition efficace des dendrites distales d’une PC, notamment celle des PAs calciques ´evoqu´es par la fibre grimpante, peut n´ecessiter un “effort collaboratif”, selon l’expression qu’ils emploient, d’un groupe de cellules ´etoil´ees. D’autre part, la chute spectaculaire, au cours du d´eveloppement, de l’amplitude des courants synaptiques d’une PC ´evoqu´es par un PA d’un interneurone laisse penser que les activit´es d’interneurones, pour demeurer efficaces, doivent ˆetre mieux coordonn´ees chez l’animal mature (Pouzat et Hestrin, 1997).

Les cellules en panier quant `a elles exercent individuellement une forte inhibition au niveau proximal et somatique et sont, de fait, beaucoup moins souvent coupl´ees ´elec- triquement. Cette observation constitue d’ailleurs une seconde explication `a l’absence de couplage ´electrique constat´ee par Vincent et Marty (1996) dont les enregistrements proviennent pr´ef´erentiellement des cellules en panier. Celles-ci ne sont donc pas les seules `a pouvoir donner naissance `a des IPSCs synchrones dans deux PCs postsynap- tiques voisines. La synchronisation, par es jonctions communicantes, d’interneurones plus p´eriph´eriques de la couche mol´eculaire est un autre moyen d’obtenir une inhibition commune `a plusieurs PCs, tout au moins chez l’animal mature.