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3. Le calcul des scores d’efficience pour chaque modèle : enseignement, recherche et attractivité &

3.1. Les résultats de l'évaluation de l'efficience de l'enseignement

Dans cette section, nous examinons les résultats obtenus après la mesure de l'efficience de l'enseignement de 34 pays (dont les données sont disponibles) en utilisant la méthode DEA et notre cadre conceptuel expliqué dans la section 3 de ce texte. Comme indiqué sur la Figure 1 le modèle d’efficience de l’enseignement comporte trois intrants : Dépenses Totales de l'enseignement supérieur par étudiant, Taux d'accès des étudiants à l'enseignement supérieur, Qualité des étudiants entrants (scores PISA), et trois extrants : Taux d'obtention de diplômes à l’issue d’un programme tertiaire de type A, Taux d'obtention de diplômes à l'issue d'un

Dépenses Totales par étudiant dans l'enseignement supérieur ($ ppp)

Attractivité des systèmes universitaires : -% des étudiants étrangers dans l'ensemble

du système universitaire

-% des étudiants étrangers dans les programmes de recherche de haut niveau Réputation des systèmes universitaires : -Somme des scores obtenus par les

universités dans le classement de Shanghai pour 10.000 étudiants

-Somme des scores obtenus par les universités dans le classement du Times pour 10.000 étudiants 2009 2008 2010 Extrant Intrants 2012 2011

160 programme de recherche de haut niveau, et Taux d'emploi des diplômés âgés de 25 à 34 ans. Le Tableau 5 de l'annexe détaille les résultats par pays sur deux années 2006 et 2012.

Pour lire ces résultats, il faut rappeler que la méthode DEA définit une frontière d’efficience c’est-à-dire la quantité maximale des extrants pouvant être produite pour chaque ensemble d’intrants. Les pays qui définissent la frontière sont considérés comme pleinement efficients (score d'efficience = 1) et sont utilisés comme points de référence (cibles, ou benchmarks) pour calculer les scores d'efficience des autres pays inefficients (score d'efficience <1) en mesurant leur distance de la frontière. Plus la distance de la frontière est longue, plus l'inefficience est élevée. Ces résultats diffèrent par conséquent selon les hypothèses faites sur les rendements d’échelle : variables (Variable Returns to Scale "VRS") ou constants (Constant Returns to Scale "CRS) ; cela conduit à parler d’efficience VRS et d’efficience CRS. Ils dépendent aussi du nombre de fois où un pays est pris comme référence ou cible, lors des calculs des scores d’efficience entre les pays.

Dans l'ensemble, le niveau d'efficience de l'enseignement des 34 pays évalués est très élevé avec un score moyen d'efficience de 0,973 (ou 97,3% d'efficience). La moitié du nombre de pays (17) sont pleinement efficients (efficience = 1 ou 100%) et définissent ainsi la frontière mondiale de l'efficience de l'enseignement des systèmes universitaires (dans le cadre de notre échantillon de 34 pays au niveau international). Les 17 pays inefficients montrent des niveaux d'inefficience relativement faibles variant de 0,883 (Italie) à 0.991 (Nouvelle-Zélande).

La douzième colonne dans le Tableau 5 de l'annexe est d'un intérêt particulier pour notre analyse. Elle contient des informations sur le nombre de fois où chaque pays a été utilisé par la méthode DEA comme cible pour calculer les scores d'efficience des autres pays. Pour la période de 2012, les pays qui ont été le plus utilisés comme cibles (y compris eux mêmes) sont la Russie (13 fois), le Royaume-Uni (11), la Slovaquie (9) et l'Allemagne (9). Cela signifie que ces pays pleinement efficients utilisent des niveaux d'intrants relativement similaires à la plupart des autres pays inefficients (en matière de dépenses, de qualité et quantité des étudiants entrants aux universités), tout en réussissant à produire plus d'extrants en matière de performance de l'enseignement (des taux d'obtention de diplômes et des taux d'emploi plus élevés).

Il convient de noter que d'un point de vue purement technique, les positions de tous les pays présents sur la frontière d'efficience de l'enseignement (pleine efficience) doivent être considérées comme étant également préférables. Certes, ils utilisent des technologies différentes (des combinaisons d'intrants et d'extrants différentes) et par conséquent sont situés sur différentes parties de la frontière, mais ils définissent tous ensemble la frontière ou la meilleure technologie de transformation d'intrants pour produire le maximum d'extrants de l'enseignement. De la même manière, les mêmes scores d'efficience représentent des pays situés à la même distance de la

161 frontière d'efficience, et donc leurs positions devraient également être considérées comme étant également préférables.

Toutefois, du point de vue de l'élaboration de politiques publiques relatives à l'enseignement supérieur, il est possible que tous les points sur la frontière (pleine efficience), ou tous les points situés à la même distance de la frontière (mêmes scores d'efficience), ne soient pas considérés par les décideurs comme étant également souhaitables, et ce, en raison de préférences subjectives, et des objectifs différents des pays que ce soit en matière de combinaison d'intrants souhaitée ou de combinaison d'extrants désirée (qui soient techniquement réalisables). C'est la raison pour laquelle nous considérons qu'il est important d'analyser la manière dont les pays réalisent leurs scores d'efficience, en termes de combinaisons d'intrants (ressources) / extrants (performance). Les intrants représentent les ressources allouées par les systèmes universitaires, tandis que les extrants représentent la performance des systèmes universitaires. Pour comparer le niveau des ressources des systèmes d'enseignement supérieur, nous allons se focaliser sur les ressources financières telles que reflétées par l'indicateur dépenses par étudiant. Toutefois, afin d'être en mesure de comparer facilement les performances (extrants) des différents pays par rapport aux différentes dimensions de l'enseignement supérieur (enseignement, recherche, réputation et attractivité), nous avons calculé des scores de performance agrégés et indexés sur la base de la performance du pays ayant réalisé le meilleur niveau de performance pour chaque indicateur extrant.

Pratiquement, pour chaque indicateur extrant nous identifions le pays qui a réalisé la meilleure performance et nous lui accordons un score de performance de 100 (indice = 100). Les scores des autres pays sont indexés et calculés en pourcentage du meilleur score. Nous procédons de la même manière pour tous les indicateurs extrants dans chacune des trois dimensions de performance dans l'enseignement supérieur.

Une fois que nous avons obtenu les scores indexés pour tous les extrants (au nombre de neuf), nous calculons la moyenne des trois scores indexés pour la performance de l'enseignement, la moyenne des deux scores indexés pour la performance de la recherche, et la moyenne des quatre scores indexés pour la performance de l'attractivité et la réputation des systèmes universitaires. Ainsi, nous obtenons pour chaque pays trois scores agrégés et indexés reflétant chacune des trois dimensions de la performance dans l'enseignement supérieur. les résultats de nos calculs sont présentés dans le tableau 4 de l'annexe. Ces scores de performance seront exploités, avec les dépenses par étudiant, pour analyser la manière dont les pays réalisent leurs scores d'efficience, en termes de combinaisons de ressources financières et de performance.

162 Le Tableau 3 suivant montre la relation entre les différentes catégories d’efficience et la combinaison de niveau de dépenses et de performances de l’enseignement. Ce tableau donne les résultats pour 2012. Il classe les 34 pays verticalement (deux colonnes), en fonction du niveau d’efficience de l'enseignement (efficience de l'enseignement supérieure ou inférieure à la moyenne de notre échantillon de 34 pays qui est un score d'efficience de 0,973), et horizontalement (quatre lignes), par rapport à leur combinaison d'intrant (dépenses totales de l'enseignement supérieur) et d'extrant (performance de l'enseignement).

Les quatre lignes représentent quatre catégories ou quatre combinaisons différentes d'intrants/extrants : 1. des dépenses élevées (supérieures à la moyenne qui est 12.761$ par étudiant) combinées à une performance de l'enseignement élevée (supérieure à la moyenne qui est un score de 66,45 points). 2. des dépenses faibles (inférieures à la moyenne) combinées à une performance faible de l'enseignement (inférieure à la moyenne). 3. des dépenses élevées combinées à une performance faible, et enfin 4. des dépenses faibles combinées à une performance élevée.

Le Tableau 3 contient ainsi huit catégories différentes de combinaisons possibles de niveau d'efficience/dépenses/performance. Il permet, d’une part, de simplifier la lecture des résultats d'efficience de l'enseignement en classant les pays en différentes catégories.

Tableau 3

La classification de 34 Pays par différents niveaux de dépenses, de performance et d'efficience de l'enseignement, pur la période de 2012 :

Efficience de l'Enseignement élevée (supérieure à la moyenne 0,973) Efficience de l'Enseignement faible (inférieure à la moyenne 0,973) Dépenses élevées (>12.761$) / Performance élevée (>66,45) France (1,000), Allemagne (1,000), Ireland (1,000), Pays-Bas (1,000), Norvège (1,000), Suisse (1,000), Royaume-Uni (1,000), Autriche (0,985), Suède (0,982), Danemark (0,979) Australie (0,971), Finlande (0,964), Etats-unis (0,921) Dépenses faibles (<12.761$) / Performance faible (<66,45)

Brésil (1,000), Chili (1,000), Estonie (1,000), Grèce (1,000), Mexique (1,000), Turquie (0,987), Israel (0,978) Hongrie (0,924), Tchéquie (0,919), Italie (0,832) Dépenses élevées/

Performance faible Belgique (1,000) Japon (0,971), Espagne (0,856) Dépenses faibles/ Performance élevée Islande (1,000), Nouvelle-Zélande (0,991), Russie (1,000) Slovaquie (1,000), Slovénie (1,000) Corée (0,887), Pologne (0,967), Portugal (0,961)

Total 23 pays 11 pays

Source : auteur.

Il aide, d’autre part, à interpréter les résultats d'efficience pour comprendre comment les différentes pays atteignent leurs scores d'efficience, par quelle combinaison de dépenses

163 (élevées/faibles) et de performance (élevée/faible). Chaque catégorie (cellule) dans le tableau fournit une explication des scores d'efficience obtenus par les pays contenus dans cette cellule. Commentons la première colonne du Tableau 3. Elle contient les pays ayant atteint des niveaux élevés (supérieurs à la moyenne) d'efficience de l'enseignement (23 pays).

- La première cellule de cette colonne est la catégorie des pays qui obtiennent ce niveau d'efficience élevé en utilisant des montants élevés (supérieurs à la moyenne) de dépenses et en produisant des niveaux élevés (supérieurs à la moyenne) de performance de l'enseignement. Près de la moitié des pays ayant atteint des niveaux d'efficience élevés tombent dans cette catégorie (10 sur 23). Il s'agit de la France, de l'Allemagne, de l'Irlande, des Pays-Bas, de la Norvège, de la Suisse, du Royaume-Uni, de l'Autriche, de la Suède et du Danemark.

- L'autre moitié est placée soit dans la catégorie dépenses faibles/performance faible (7 pays: Brésil, Chili, Estonie, Grèce, Mexique, Turquie, Israël), ou dépenses élevées/performance faible (1 pays: Belgique), ou dépenses faibles/performance élevée (5 pays: Islande, Nouvelle-Zélande, Russie, Slovaquie, Slovénie).

Dans la deuxième colonne du Tableau 3 sont énumérés les pays réalisant des scores d'efficience de l'enseignement inférieurs à la moyenne (11 pays).

- La première cellule de cette colonne est la catégorie des pays qui réalisent cette faible efficience de l'enseignement en dépensant des montants élevés de dépenses et en produisant des niveaux élevés de performance (Australie, Finlande, États-Unis).

- La seconde cellule contient la catégorie des pays avec montant faible de dépenses / niveau faible de performance (Hongrie, République tchèque, Italie), la troisième cellule montre la catégorie des pays de dépenses élevées / faible performance (Japon, Espagne), et la dernière cellule dresse la liste des pays dont l'efficience est faible suite à des dépenses élevées / performance faible ( Corée, Pologne, Portugal).

Du point de vue de l'élaboration des politiques dans le secteur de l'enseignement supérieur, les différentes catégories au sein de chaque colonne ne peuvent être considérées comme étant de valeur égale, et ce, en fonction des priorités et des objectifs fixés par les décideurs publiques. En particulier, on pourrait faire valoir que l'une des catégories les plus attrayantes de la première colonne (efficience supérieure à la moyenne) est celle des pays qui produisent des performances de l'enseignement supérieures à la moyenne tout en utilisant des dépenses inférieures à moyenne (Islande, Nouvelle-Zélande, Russie, Slovaquie, Slovénie). Parmi ces pays, le cas de ceux qui sont

164 présents sur la frontière d'efficience (pleine efficience) est encore plus attrayant (Islande, Russie, Slovaquie, Slovénie).

De même, concernant la deuxième colonne (efficience inférieure à la moyenne), on peut considérer que la catégorie la moins attrayante dans cette colonne, et donc aussi dans le tableau, serait celle des pays dépensant des montants élevés, tout en réalisant des niveaux faibles de performance d'enseignement (Japon, Espagne). Il convient de noter que lorsque l'on compare des pays avec les mêmes niveaux d'efficience, tout jugement que nous faisons sur quelle catégorie de combinaison d'intrant/extrant est préférable, serait complètement un choix subjectif. Par exemple, nous avons commenté plus tôt que l'Islande avec sa pleine efficience, sa performance d'enseignement supérieure à la moyenne (score de 74 points) et ses dépenses inférieures moyenne (9699 $ par étudiant), est située, sans doute, dans l'une des catégories les plus attrayantes de combinaison d'intrants/extrants dans notre tableau A. Toutefois, cela ne signifie pas nécessairement, s'il est techniquement faisable, que les décideurs publics du Royaume-Uni ou en de la Suisse seraient prêts à échanger leur performance encore plus élevée de l'enseignement (84 et 83 points respectivement) avec la performance de l'Islande, pour réduire sensiblement leurs dépenses élevées par étudiant (21.706 $ et 15,837 $ respectivement), en vue de les ramener à des niveaux inférieurs comparables à ceux de l'Islande. Il s'agit là plutôt d'une question de priorités et d'objectifs subjectifs et propre à chaque pays.

Si on focalise notre attention sur l’opposition France / Etats-Unis, on retrouve le résultat trouvé au Chapitre 3. Les Universités Américaines pourtant performantes sont moins efficientes. De la même manière, le système universitaire américain dans son ensemble a des scores d’efficience faibles. A l’opposé, le modèle français est peu performant, mais efficient du point de vue de l’enseignement. Cela signifie que si le gouvernement privilégie dans sa fonction d’objectif l’efficience de l’enseignement, une réforme devient inutile.