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La société actuelle accorde une grande importance à la scolarité et au niveau de diplôme, devenus critères de réussite des parcours individuels et promesse d’une insertion sociale facilitée. Les adolescents d’aujourd’hui sont confrontés aux transformations dans le réel des conditions d’inscription dans l’univers des adultes, bouleversés par la crise de l’emploi et les évolutions du travail. En effet, l’évolution socio-économique rend difficile l’entrée des jeunes dans le marché du travail. Il est donc particulièrement complexe de travailler sur l’orientation professionnelle pour les patients du soins-études.

Les projets soins-études peuvent être investis par les jeunes et leur famille ainsi que par les médecins adresseurs comme une « solution idéale », une « dernière chance ». Le risque est de voir les patients et leurs familles se focaliser sur les études, qu’ils idéalisent voire même investissent d’un pouvoir magique de normalisation, au détriment des soins.

1. L’organisation institutionnelle

L’association sur un même lieu des services de soins et des études peut engendrer un risque de mise en place de relations totalisantes et de déni des troubles pour certains patients qui considèrent ce dispositif soins-études comme un lycée ordinaire ou un internat médicalisé. De plus, comme nous l’avons souligné précédemment, les projets scolaires sont souvent idéalisés par les patients et leurs familles. Les résultats de l’étude de I. Gasquet et M. Choquet (1993) ont d’ailleurssoulevé des difficultés d’adaptation au monde extérieur pour les patients pris en charge, pouvant être liées à une insuffisance d’ouverture de l’institution sur l’extérieur.

Une autre problématique peut être liée à l’inégalité de la répartition des établissements soins- études sur le territoire français (cf annexe B).L’éloignement du lieu d’habitation des familles, en ne favorisant pas les retours à domicile, limite alors les possibilités de travail autour de ce lien à la famille.

De même, des effets de résonance, de co-excitation entre adolescents, comme des conduites d’automutilation ou des consommations de toxiques, peuvent perturber le dispositif institutionnel, ce qui nécessite une rigueur dans la mise en place du cadre.

Pour limiter ces difficultés, cinq axes de travail ont été proposés : la mise en place pour chaque patient d’une référence psychiatrique extérieure à l’établissement, la partialisation temporelle des prises en charge, la médiatisation des relations entre soignants et soignés au travers d’une offre diversifiée de médiations thérapeutiques, de caractère non scolaire, la collaboration avec les familles, et enfin, l’externalisation des psychothérapies individuelles ou familiales.

2. La fin de la prise en charge

Le projet soins-études se termine le plus souvent au moment d’un passage de cycle supposant le passage d’un établissement à un autre, ou lorsque l’orientation a lieu en milieu professionnel. À la sortie de l’établissement, le patient peut ne pas retourner dans son établissement d’origine. Des difficultés peuvent alors apparaître dans la séparation avec l’institution et dans le relais de soins

a. Le travail de séparation avec l’institution

Idéalement, « les sorties devraient se faire progressivement, vers un extérieur sécure et investi qui viendrait prendre la place de l’intérieur d’une institution (...) qui aura été utile un temps » (N. Mammar, 2008). C’est pourquoi, tout un travail de séparation avec l’institution doit se faire et nécessite que la constitution d’assises narcissiques soit suffisante pour accepter cette séparation.

Différents cas de figure se présentent : la sortie peut se dérouler naturellement pour certains jeunes dont l’état s’est amélioré et pour lesquels l’envie de quitter la clinique se manifeste. Pour d’autres, la sortie sera difficile devant la crainte d’avoir à se confronter au monde extérieur et à sortir de la « chrysalide » institutionnelle, ainsi qu’aux enjeux de séparation douloureux, du fait de la dépendance liée à l’idéalisation excessive de l’institution. Certains quittent brutalement le service, d’autres multiplient les transgressions pour se faire exclure ou décompensent des troubles avant la sortie, d’autres encore mettent en échec leur projet de sortie.

Certains dispositifs, comme la « maison de sortie » et les « appartements relais », paraissent intéressants en ce qu’ils permettent un travail autour de la séparation, par un départ progressif de l’institution. La maison de sortie correspond à une zone de transition entre l’hospitalisation et la sortie de l’établissement, où l’adolescent va poursuivre son travail d’autonomisation avec un sevrage progressif de ses liens de dépendance à l’institution et une prise progressive de responsabilité dans un cadre groupal (cf annexe D). Les appartements relais facilitent la transition entre le dedans institutionnel et le dehors privé et social. La discontinuité de la présence médicale et infirmière, ainsi que le travail sur un projet d’hébergement autonome, permettent de décentrer progressivement le lieu thérapeutique et le lieu de vie.

b. La référence au secteur

Comme nous l’avons souligné ci-dessus, il est essentiel de pouvoir garder un lien avec l’extérieur durant toute la durée de la prise en charge, dans l’objectif de préparer la sortie.

La référence au secteur est fondamentale dans la mesure où elle est garante de la cohérence et de la continuité du projet de soins après l’hospitalisation soins-études. Elle vient faire tiers entre l’adolescent et l’institution. Selon les cliniques, ces liens sont maintenus avec les psychiatres référents qui peuvent participer aux synthèses cliniques, continuent à recevoir régulièrement les patients en entretien et restent garants de la prescription médicamenteuse. À leur sortie, certains patients sont confrontés au passage de la pédopsychiatrie à la psychiatrie adulte, ce qui implique des difficultés d’articulation.

Pour d’autres, c’est la difficulté de l’organisation des soins liée au changement de secteur qui se pose. Certains patients prennent la décision de ne pas retourner au domicile parental et de s’installer dans la ville où ils ont suivi leur projet soins-études.

B.

L’EQUILIBRE INSTABLE DE LA PLACE DES ETUDES DANS LE