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Les possibilités d’intervention des États

Liens de causalité entre les ressources en terres, la population, la pauvreté et la dégradation de la terre

Fiche 6 Le marché foncier urbain et périurbain : exemples de Gaborone (Botswana) et de Lusaka (Zambie)

1.2. Les possibilités d’intervention des États

L’étude des tendances passées met en lumière l’influence sur le foncier de plusieurs facteurs, qui sont présentés à l’annexe 1.1. Après avoir pris en compte leur action passée, il importe de déterminer quels sont ceux sur lesquels les États, ou les entités régionales, peuvent intervenir pour peser sur l’évolution du foncier.

Les États ne peuvent influer d’une manière significative sur le changement climatique, dont l’impact sera important dans les zones où la productivité de l’agriculture est déjà faible en raison de l’épuisement des sols et de la diminution des ressources en

eau. La pression sur les terres risque d’accélérer encore le processus de dégradation des milieux. Les États sahéliens seront particulièrement exposés. L’impact sera également important dans les zones côtières, qui abritent une grande partie de la population urbaine d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale (Cour, 1998) en raison à la fois d’une érosion accélérée du littoral et, dans les zones rurales des régions côtières et les estuaires, d’une salinisation des sols et des nappes phréatiques.

À plus long terme cependant, l’intégration économique des pays d’Afrique subsaharienne et une meilleure intégration politique régionale pourraient permettre aux États d’agir collectivement sur le changement climatique grâce, en particulier, à un meilleur contrôle des ressources en eau et de la déforestation. L’intégration régionale permettrait également de peser sur les politiques de prévention des risques climatiques des pays plus riches.

Les États ne peuvent intervenir que marginalement sur la situation économique globale. Or, celle-ci détermine largement les stratégies d’investissement des entreprises, des groupes financiers et des États étrangers dans le secteur agricole (achats d’actifs agricoles dont des acquisitions massives de terres). L’évolution de la demande et des prix de produits agricoles, qui peut avoir une incidence sur la concentration de la propriété foncière mais aussi, dans les zones considérées comme étant en marge des grands circuits d’échange, sur son émiettement (par exemple en mettant en concurrence les produits agricoles locaux avec leurs équivalents importés), leur échappe. Si les accords internationaux sur le commerce ne donnent pas de marge de manœuvre aux États pour réguler les flux d’échanges et, moins encore, pour agir sur les prix des produits agricoles, les Etats peuvent néanmoins en limiter l’impact sur le foncier.

Bien que la situation de l’environnement au niveau local soit largement dépendante de celle qui prévaut aux niveaux régional et mondial, les États peuvent intervenir, mais avec une marge d’action limitée par les contraintes extérieures, pour assurer la protection des ressources naturelles. Leurs interventions combinent, d’une part, des mesures de contrôle et d’encadrement, en particulier pour lutter contre la dégradation des sols, assurer leur régénération, limiter la déforestation et préserver les ressources en eau et, d’autre part, des mesures d’incitation et d’accompagnement.

Les unes et les autres prennent appui sur la fiscalité et sur la politique d’équipement et d’aménagement du territoire en vue d’assurer une distribution de la population tenant compte de la potentialité des milieux. Les États peuvent également créer un cadre propice aux innovations dans le secteur agricole, en particulier par l’adaptation des systèmes de culture et des espèces cultivées au changement climatique et à l’état

des milieux. Toutes ces interventions sont susceptibles d’avoir une incidence sur le foncier.

Dans un environnement donné, la disponibilité en terres cultivables peut être augmentée grâce à des investissements pour améliorer la qualité des sols et/ou l’accès aux ressources en eau. Des investissements dans les aménagements hydrauliques et les infrastructures de stockage, de transport et de distribution des produits agricoles peuvent également permettre d’exploiter de nouvelles terres. L’extension des surfaces de terres cultivables dépend largement du niveau des investissements (Schmidhuber, 2009 ; NEPAD, 2003).

Les États peuvent aussi accélérer la transition démographique par le biais des politiques de la famille, de la santé et de l’éducation et limiter ainsi le taux d’accroissement de la population et la pression sur les terres. Les politiques de régulation des flux migratoires internes et externes peuvent avoir le même objectif mais leur dynamique échappe souvent au contrôle des États et leur mise en œuvre est difficile. L’action sur les dynamiques démographiques semble essentielle mais ses effets ne se feront ressentir qu’à moyen et long termes.

Les États peuvent influer sur la gouvernance en matière d’administration foncière et sur l’évolution des régimes et des systèmes fonciers par des décisions modifiant le cadre juridique de l’appropriation foncière. Au cours des deux dernières décennies, la grande majorité des pays d’Afrique subsaharienne a modifié ce cadre par l’adoption de nouvelles lois foncières ou de nouveaux codes domaniaux et fonciers. Toutes ces réformes, souvent initiées avec le soutien des coopérations internationales ou du système des Nations unies et fréquemment accompagnées de réformes constitutionnelles, sont cependant allées jusqu’ici dans le sens d’une libéralisation des marchés fonciers et d’un désengagement des États, ceux-ci renonçant progressivement à une partie de leurs prérogatives foncières au profit des collectivités locales dans le cadre des politiques de décentralisation.

Les États peuvent avoir une action plus directe, d’autant plus efficace qu’elle s’inscrit dans un contexte de continuité et de stabilité politiques, sur les politiques d’aménagement et d’équipement en milieux rural et urbain : aménagement du territoire, aménagement agricole, politiques urbaines et de l’habitat. Leurs possibilités d’action sont toutefois largement conditionnées par leurs ressources financières et humaines, par leur capacité à mettre en œuvre des formes de gouvernance assurant la sécurisation des droits et la régulation des marchés, ainsi que par le fonctionnement des administrations publiques et du système politique (Meisel et Ould Aoudia, 2007).

2. Evolution à long terme