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Article 2 «Knock down of half pint gives birth to a meiotically stable piRNA-producing

A. Les piARN larvaires différents des piARN adultes ?

A.1 Relâcher la pression ?

La « piwi-less pocket » observée dans le germarium de l’adulte semble montrer qu’une certaine latitude existe dans la répression des éléments transposables au niveau de la lignée germinale. Nous voulions voir si de telles fenêtres de dérépression des ET étaient présentes au cours du développement de la lignée germinale. D’après mes résultats, il semble que ce ne soit pas le cas. Le silencer RS3 ne montre pas de faiblesse de silencing au cours du développement à l’exception des cystes germinaux à 2-16 cellules de la PILP (Dufourt et al, 2014).

Les résultats sur le gène hfp obtenus par A. Boivin suggèrent que certains gènes peuvent être impliqués dans la conservation de l’identité des séquences répétées, qu’elles soient productrices ou non-productrices de piARN. hfp maintient le cluster BX2 dans un état non producteur de piARN, mais l’abolition de cette répression en l’absence de hfp, entraine un changement stable des propriétés épigénétiques du locus. Néanmoins, d’après mes résultats, la mutation d’hfp ne rend pas BX2 actif avant le germarium. Un verrou extrêmement robuste semble être mis sur le développement, à la fois au niveau des clusters et des éléments transposables.

A.2 Utilisation du crible shARN pour étudier l’effet des mutations de gènes de la voie des piARN

L’étude de la production des piARN n’est pas toujours évidente car la mutation de gènes de la voie des piARN donne souvent lieu à des individus stériles aux ovaires atrophiés. Ceci empêche le suivi des mutants sur plusieurs générations et donc l’analyse d’éventuels effets épigénétiques médiés par les piARN. Durant ma thèse, j’ai pu montrer que la répression par les piARN fonctionne durant le développement de la lignée germinale depuis l’embryogenèse. Le crible de gènes candidats que j’ai mené ensuite en L3 a vérifié qu’un certain nombre de protéines partenaires de la voie des piARN en larve sont les mêmes qu’en adulte : la répression d’un transgène cible est abolie dès la larve en l’absence des principaux

192 acteurs de la voie des piARN. Un point intéressant est que l’ARN interférence médiée par les shARN ne change ni la morphologie des cellules germinales larvaires ni leur quantité. Ceci peut être attribué à l’efficacité moindre du shARN comparé à un mutant nul. J’ai pu observer la disparition de la protéine ciblée par les shARN dans les PGC de plusieurs lignées grâce à des immunomarquages, mais il est possible que des niveaux résiduels de protéine persistent et qu’ils ne soient pas détectables par cette méthode. Une autre explication de ce phénotype d'ovaires est l'implication des cellules folliculaires dans la forme de l'ovaire. En effet, certains partenaires de la voie des piARN sont nécessaires aussi dans les cellules somatiques de l’ovaire pour son bon développement. Par exemple, la disparition de Piwi uniquement dans les cellules folliculaire est suffisante pour induire une stérilité complète (Rozhkov, Hammell, et Hannon 2013) et l’absence de production de piARN de flamenco dans les cellules folliculaires empêche leur action de protection de la lignée germinale (Mével-Ninio et al. 2007). Ces cellules participent donc à façonner la structure de l’ovaire. Contrairement aux PGC, elles subissent de nombreuses mitoses et se différencient durant la vie larvaire (Chap. 4 A.2.3). La mutation de gènes de la voie des piARN dans les cellules folliculaires a donc un fort impact sur la forme de l’ovaire adulte, tandis que les PGC commencent à être vraiment actives durant l’ovogenèse quand elles se différencient. Au stade adulte en revanche, les ovaires des mouches contenant les shARN sont plus rarement atrophiés même si plusieurs lignées montrent de la stérilité (14/28). L’interférence ARN localisée uniquement dans les PGC grâce à des pilotes gal4, alliée à un système rapporteur pour la répression par les piARN, pourrait permettre de faire des recherches sur les gènes qui donnent des ovaires atrophiés. L’observation de la répression dans les gonades larvaires serait un bon indicateur de leur influence sur le TSE.

D’autre part, nous avons observé l’effet de ces mutations sur la répression médiée par les piARN du TAS 3R mais il est possible d’utiliser de cette façon tous les transgènes silencers localisés sur différents chromosomes que nous possédons. On pourrait alors comparer les clusters de piARN. L’étude du silencer P-1152 (localisé sur le chromosome X) et du cluster de transgène répresseur BX2* (localisé dans l’euchromatine) permettrait de mieux comprendre les différents mécanismes de répression. Il est probable que des différences existent entre les locus producteurs de piARN, certaines sont d’ailleurs déjà connues: clusters unidirectionnels / double brins, tandis que d’autres sont en cours d’étude : clusters télomériques / centromériques.

193 L’utilisation d'autres transgènes pilotes gal4 est également possible, pour diriger l’expression du shARN et de la cible dans le tissu étudié. Le pilote bamGal4 permettrait d’induire l’expression d’un shARN précisément dans les cystes germinaux à 2-16 cellules de l’ovariole pour visualiser l’effet d’un KD durant la différenciation des cellules germinales chez l’adulte. Au stade adulte également, on sait que le pilote nosGal4 ne s’exprime qu’au niveau du germarium et des stades tardifs de l’ovariole, la combinaison de plusieurs transgènes gal4 permettrait une activation du shARN plus complète lors de l'ovogenèse comme dans la lignée 31777 qui en contient trois (Ni et al. 2011).

Enfin, tester l’effet de l’absence de plusieurs protéines de la voie des piARN en même temps grâce à ce système n’est pas toujours possible. Certain partenaires des piARN ont des fonctions redondantes ou complémentaires (Tej et Tap par exemple) et l’étude de doubles mutants pourrait être intéressante. Malheureusement, la majorité des lignées shARN ont un site d’insertion fixe du transgène shARN sur le chromosome 3.

A.3 Quelle différence entre les transgènes silencers RS3 et P-1152 ?

Une question centrale qui se pose encore est la différence entre les silencers RS3 et

P-1152. Sachant que l’homologie de séquence qu’ils partagent avec le transgène cible est la

même (environ 500pb Fig. 1 Article 1), pourquoi n’induisent-ils pas un pourcentage de répression identique ? Nous nous sommes donc intéressés à la variégation induite par le silencer P-1152.

La première hypothèse serait une quantité différente de piARN produite par les deux silencers. Nous avons analysé les piARN du 5' de l'élément P produits par les deux transgènes silencers. Il semble que RS3 ne fasse pas plus de piARN de cette séquence que P-1152 en adulte, voire moins. Des séquençages de piARN de larves L3 sont en cours pour voir si c’est également le cas en larve.

La seconde hypothèse serait une nature différente des piARN produits par les deux silencers. Par exemple, le patron de découpage des précurseurs provenant de RS3 pourrait produire des piARN plus efficaces. Ce point est difficile à visualiser à cette échelle mais une analyse plus fine avec des piARN uniques pourrait apporter des réponses à cette question.

Les transgènes RS3 et P-1152 et le transcrit cible UASpGFP7373 partagent 500 pb d’homologie, un morceau du 5’ de l’élément P. Néanmoins, en amont du promoteur de

194 l’UASpGFP7373

on trouve des séquences du gène white (Fig. 1 Article). Il est possible que les piARN de white provenant de RS3 entrainent la répression transcriptionnelle du transgène cible de façon plus efficace grâce à un phénomène d’hétérochromatinisation. Néanmoins, cette hypothèse semble peu probable car elle n'explique pas pourquoi les transgènes cibles

PlacZ qui partagent plus d'homologie avec le silencer P-1152 (qui contient des séquences de lacZ) présentent une expression variéguée alors qu'ils sont totalement réprimés par RS3. Cela

va dans le sens que la variégation est une propriété intrinsèque à P-1152.

Une dernière idée implique que la localisation des différents TAS (chromosomes X et

3R) pourrait avoir un rôle dans leur efficacité. On peut imaginer que le regroupement de

certains TAS dans un compartiment spécifique du noyau ait une incidence sur la production de piARN (Voir hypothèse 1) ou pour la répression (hypothèse 2). Par exemple, les protéines du groupe Polycomb (PcG) sont présentes sous forme de foyers dans le noyau. Ces protéines permettent de maintenir un état répressif des gènes (marques H3K27me3) en compactant la chromatine (Bantignies et Cavalli 2011). Or les TAS possèdent certains motifs pouvant être reconnus par la famille PcG (Boivin et al. 2003). Il a été montré que la marque répressive H3K27me3 était présente sur les TAS par des expériences de FISH sur chromosomes polytènes (Andreyeva et al. 2005). Il est possible que les TAS des chromosomes X et 3 soient localisés dans deux focis distincts. Cela dit, il semblerait que l’effet des PcG soit limité aux cellules somatiques car des lignées GLKD pour Pc, sce, ph, E(z), Pcl et Rpd3 ne montrent pas de diminution de la répression par les silencers P-1152 et BX2*.

Enfin, les résultats que j'ai obtenus sur l'implication de HP1a dans la production de piARN télomériques amènent une autre hypothèse que je développerai dans la partie suivante.

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