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Les obstacles au transfert en service d’adultes

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était plus faible après le transfert qu’avant [79]. En revanche, une étude chez des patients ayant reçu un transplant rénal n’a pas montré de telle variation [80].

Cependant, l’interprétation des associations entre le transfert en service d’adultes et ces différents critères (évolution clinique, continuité des soins, observance médicamen- teuse) reste limitée, en particulier du fait que les études publiées sont souvent transver- sales et ne prennent pas ou peu en compte les facteurs de confusion. Des études longi- tudinales et l’utilisation de modèles multivariés, tenant compte en particulier de l’âge au transfert, seraient justifiées pour différencier le rôle du transfert de celui de l’évolution naturelle de la pathologie.

Néanmoins, ces résultats sont autant d’indices que le transfert vers le service d’adultes ne se fait pas dans des conditions optimales. L’identification des facteurs qui pourraient constituer des obstacles au transfert, ou le faciliter, pourrait mettre en évidence des le- viers d’action pour améliorer la continuité des soins lors du transfert et limiter les consé- quences cliniques potentielles d’une rupture du suivi ou du traitement.

5.3 Les obstacles au transfert en service d’adultes

Une difficulté majeure pour les patients est de quitter un environnement pédiatrique connu, confortable et auquel ils sont fortement attachés [74, 81–83]. Ils doivent accep- ter de quitter les autres patients et l’équipe pédiatrique, avec lesquels ils ont tissé des liens parfois amicaux, voire quasi-familiaux [84]. Ils vont devoir construire une nouvelle relation de confiance avec l’équipe soignante d’adultes, basée sur un mode relationnel différent. De plus, l’environnement du service d’adultes peut paraître austère aux jeunes patients habitués aux locaux et aux équipements du service pédiatrique, où ils peuvent croiser des adultes ayant la même pathologie qu’eux mais à un stade parfois très avancé, ce qui les confronte à une image très négative de leur avenir [74].

En outre, les patients sont beaucoup plus encadrés en pédiatrie : on vérifie leurs prises de rendez-vous, ils reçoivent des rappels et la famille est largement impliquée dans les relations avec l’équipe soignante et dans les soins. Les services et professionnels pédia- triques sont d’ailleurs familiarisés avec l’implication des familles dans la prise en charge des patients [48]. Dans le service d’adultes, le patient est plus au centre de la prise en charge, il est davantage responsabilisé [74, 85]. Le fait d’être autonomisé peut effrayer certains patients qui ne se sentent pas prêts [74, 86]. Les patients rapportent que le trans- fert est brutal, insuffisamment anticipé [74, 81]. Les médecins d’adultes signalent de leur côté le manque de connaissance des patients sur leur pathologie et le manque d’autono- mie vis-à-vis de leur prise en charge [87–89].

Par ailleurs, un certain nombre de difficultés sont liées au fait que le système de soins en dehors de la pédiatrie n’est pas encore totalement adapté à la prise en charge de patho- logies qui, jusqu’à récemment, n’étaient traitées que par des pédiatres, du fait de la sur- 81

vie limitée des patients. Avec les progrès de la médecine, les médecins d’adultes doivent prendre en charge de plus en plus de patients atteints de pathologies pour lesquelles ils ont été peu formés [90–93]. Le niveau de compétence du médecin d’adultes peut être source d’anxiété pour les patients et leur famille avant le transfert [83, 94, 95]. Il peut aussi être difficile pour un pédiatre de laisser partir un patient qu’il suit depuis des an- nées et avec lequel il a développé un lien fort, surtout s’il ne connaît pas le ou les méde- cins d’adultes qui vont le prendre en charge par la suite [85]. En effet, outre la difficulté à trouver un correspondant spécialiste pour prendre en charge certaines pathologies, le système de soins en dehors de la pédiatrie est plus fragmenté que le système de soins pédiatrique [48]. Les patients pourraient en conséquence être amenés à être suivis par plusieurs spécialistes d’adultes pour une même pathologie. Enfin, les patients peuvent être désorientés par les différences de pratiques cliniques entre la pédiatrie et le service d’adultes qui peuvent exister, notamment dans les protocoles de traitement [96].

Enfin, le patient peut être amené à devoir changer d’hôpital lorsque le service d’adultes ne se situe pas dans le même hôpital que la pédiatrie. L’éloignement géographique im- portant par rapport au domicile du patient peut constituer un obstacle au transfert [95]. Inversement, le fait que le service d’adultes et le service de pédiatrie soient proches et dans le même hôpital est probablement un facteur facilitateur du transfert [97].

Malgré ces difficultés potentielles, la plupart des études de satisfaction estiment que 80 à 90% des jeunes patients sont satisfaits du transfert [89, 97–102]. Selon les patients interrogés, la marge d’amélioration concerne prioritairement la préparation au transfert et la communication interprofessionnelle, jugées insuffisantes. Cependant, ces résultats positifs sont peut-être surestimés, du fait que seuls les patients toujours suivis ont été interrogés, alors que ceux qui ont été perdus de vue à l’occasion du transfert pourraient comporter une proportion plus grande de sujet insatisfaits. Deux études ont rapporté une insatisfaction vis-à-vis transfert exprimée par la moitié au moins des patients. Dans la première [81], portant sur des patients ayant une mucoviscidose (50% de non satisfaits), les principales raisons étaient le nombre insuffisant de consultations conjointes (pédiatre et médecin d’adultes) et la durée de transition trop courte. Dans la seconde étude, avec 57% d’insatisfaits chez des patients ayant un diabète de type 1 [103], les principales cri- tiques concernaient le manque de dispositifs pour accompagner le transfert, le manque d’information sur le transfert et le fait que l’âge du transfert soit fixé par la législation (étude allemande), à 18 ans.

Tous ces résultats sont basés sur des données déclaratives de patients, de leurs fa- milles ou de professionnels de santé. Ils permettent d’évaluer les inquiétudes et besoins perçus par les différents protagonistes. Des études épidémiologiques comparatives per- mettraient de fournir des données objectives complémentaires sur le rôle potentiel et l’importance relative de ces facteurs dans la réussite du transfert.

Cependant, la majorité de ces résultats converge vers l’idée que le transfert entre la pédiatrie et le service d’adultes gagnerait à être mieux préparé et organisé en amont.

5.4. LA TRANSITION EN SERVICE DE MÉDECINE D’ADULTES ET LES PROGRAMMES

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